holding Jestia

Jestia : un groupe familial dans l’air du temps

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°788 Octobre 2023
Par Maxime JACOT (X12)

Maxime Jacot (X12), gérant au sein de la hold­ing Jes­tia, nous explique com­ment cette entre­prise famil­iale qui se développe dans le médi­co-social et l’industrie appréhende la ques­tion de la décar­bon­a­tion. Rencontre. 

Quelles sont les activités de Jestia ?

Nous avons deux branch­es d’activités prin­ci­pales. En 1992, le groupe a démar­ré une activ­ité d’accueil avec des EHPADs et des maisons de retraite médi­cal­isées. Depuis, nous avons com­plété cette offre avec des rési­dences ser­vices et une activ­ité hôtelière. Nous prévoyons, d’ailleurs, l’ouverture de notre pre­mier hôtel en 2024.

En par­al­lèle, nous avons aus­si une activ­ité indus­trielle qui s’articule autour de deux entre­pris­es. Mobidecor est spé­cial­isée dans la fab­ri­ca­tion de mobiliers pour les col­lec­tiv­ités (amé­nage­ment de salles de class­es, de restau­rants, d’amphithéâtres, de bib­lio­thèques…). Mobidecor s’est dévelop­pée au cours de la dernière décen­nie au tra­vers de la reprise de plusieurs sociétés en dif­fi­culté. Plus récem­ment, la reprise de Clestra, leader mon­di­al dans la fab­ri­ca­tion de cloi­sons de bureaux, nous a per­mis de dévelop­per une activ­ité de con­struc­tion mod­u­laire pour l’aménagement des bureaux, des open spaces…

Au cœur de votre activité, on retrouve aussi la notion de réorganisation et de reprise d’entreprises. Pouvez-vous nous en dire plus ? 

En effet, notre groupe s’est forte­ment dévelop­pé grâce à la reprise et la réor­gan­i­sa­tion de sociétés en dif­fi­culté. Dans le cadre de notre stratégie de reprise, nous avons une pos­ture assez ouverte. Nous pou­vons ain­si étudi­er des dossiers qui peu­vent com­pléte­ment sor­tir de nos champs de com­pé­tences. Toute­fois, nous n’avons pas voca­tion à faire du redresse­ment pour de la ces­sion à court terme. L’ensemble des entités et des activ­ités que nous avons repris­es au fil des années sont encore dans le giron de notre groupe.

En tant que groupe 100 % famil­ial, cette stratégie nous per­met de nous posi­tion­ner sur des opéra­tions qui vont néces­siter un apport de cap­i­taux moins impor­tant que la créa­tion d’une activ­ité ex nihi­lo, ce qui est par­ti­c­ulière­ment vrai dans le monde de l’industrie.

En par­al­lèle, nous accor­dons une atten­tion par­ti­c­ulière à la maîtrise de notre immo­bili­er, que nous con­sid­érons comme un levi­er de sta­bil­ité et de solid­ité. Pour nos métiers autour de l’accueil, de l’hôtellerie, du médi­co-social avec les EPAHDs et les rési­dences ser­vices, c’est un élé­ment stratégique. Mais, c’est aus­si le cas pour nos activ­ités indus­trielles, dans la mesure où cela nous per­met d’avoir une cer­taine sta­bil­ité et de nous inscrire dans une vision sur le long terme.

Comment la question de la décarbonation impacte-t-elle vos activités ? 

Même si la décar­bon­a­tion est dev­enue un enjeu stratégique, sa prise en compte dif­fère d’un secteur d’activité à l’autre. Par exem­ple, dans le monde du médi­co-social, la décar­bon­a­tion n’est pas au cœur des préoc­cu­pa­tions. La qual­ité de la prise en charge et l’accompagnement des dif­férents publics restent les sujets pri­or­i­taires qui mobilisent ce secteur.

À l’inverse, dans le monde de l’industrie, la décar­bon­a­tion est une pri­or­ité. Au-delà de la dimen­sion régle­men­taire et nor­ma­tive, c’est une con­vic­tion forte que nous por­tons auprès de l’ensemble de nos col­lab­o­ra­teurs. Pour Mobidecor qui tra­vaille essen­tielle­ment avec des col­lec­tiv­ités locales, c’est un critère décisif lors des appels d’offres publics, qui intè­grent depuis de nom­breuses années des critères envi­ron­nemen­taux. C’est aus­si un enjeu que nous ren­con­trons dans le cadre de l’activité de Clestra. Les grands groupes et entre­pris­es, notam­ment les ban­ques et les assur­ances, ont égale­ment inté­gré cet enjeu. Ils sont, en effet, con­scients que la manière d’aménager leurs espaces de tra­vail impacte leur empreinte envi­ron­nemen­tale et car­bone. Cette ques­tion de la décar­bon­a­tion est donc de plus en plus présente dans la poli­tique d’achats de nos clients, et nous devons, à notre niveau, la pren­dre en con­sid­éra­tion plus en amont afin de les accom­pa­g­n­er dans cette démarche.

Pour une indus­trie, l’intégration de la ques­tion envi­ron­nemen­tale dans ses proces­sus peut se révéler exigeante : cela peut impacter les prix, la disponi­bil­ité des matières, les process de production…

Parce que nous fab­riquons nos pro­duits en France, nous faisons face à des enjeux sup­plé­men­taires, notam­ment en ter­mes de com­péti­tiv­ité et de con­cur­rence, alors que les normes et les régle­men­ta­tions en matière envi­ron­nemen­tale dif­fèrent d’un pays à l’autre.

Quels sont les projets ou initiatives que vous avez lancées afin de décarboner vos activités ? Pouvez-vous nous donner des exemples ?

Nous nous sommes engagés dans un proces­sus de cer­ti­fi­ca­tion pour l’ensemble de nos activ­ités. Nous avons par exem­ple obtenu la cer­ti­fi­ca­tion ISO 14 001 qui nous per­met de nous inscrire dans une logique d’amélioration con­tin­ue (mesure des impacts envi­ron­nemen­taux, recherche de solu­tions d’amélioration…). Toutes nos équipes sont pleine­ment mobil­isées pour opti­miser nos résul­tats à ce niveau.

Nos meubles pour col­lec­tiv­ités Mobidecor sont cer­ti­fiés PEFC. Cela garan­tit que notre appro­vi­sion­nement en bois provient de forêts gérées de manière durable. Nous priv­ilé­gions par ailleurs la livrai­son de mobiliers démon­tés, que nous assem­blons chez nos clients. Cette presta­tion per­met d’augmenter le vol­ume trans­porté et d’optimiser ain­si les émis­sions de car­bone et de gaz à effets de serre induites par le trans­port. Dans la chaîne de pro­duc­tion de Mobidecor, nous avons égale­ment rem­placé le ver­nis tra­di­tion­nel par de l’époxy bois Blue­pro­tech, qui est recon­nu pour ses nom­breux avan­tages envi­ron­nemen­taux et écologiques, notam­ment en ter­mes d’émissions de com­posés organiques volatils (COV).

Nous tra­vail­lons aus­si sur la durée de vie et sur la qual­ité des pro­duits. Au-delà des émis­sions car­bone liées à la pro­duc­tion, la durée de vie du pro­duit représente un élé­ment décisif dans le cal­cul de l’empreinte car­bone d’un pro­duit. Nous devons, en effet, pro­pos­er à nos clients des pro­duits durables et solides, voire réu­til­is­ables. C’est une dimen­sion encore plus mar­quée dans notre activ­ité de con­struc­tion mod­u­laire. Nos clients veu­lent con­stru­ire et décon­stru­ire leurs cloi­sons Clestra pour faire évoluer leurs espaces en fonc­tion de leurs besoins, sans avoir à engager des travaux. Dans une logique d’économie cir­cu­laire, avec notre offre REUSE, nous récupérons des cloi­sons chez un client afin de leur don­ner une sec­onde vie en les instal­lant chez un autre client.

Enfin, nous tra­vail­lons sur l’éco-conception. Dès la phase de con­cep­tion, nous prenons en compte l’ensemble de la chaîne de valeur et le cycle de vie d’un pro­duit pour être plus effi­cient d’un point de vue envi­ron­nemen­tal (émis­sions de gaz à effets de serre, empreinte car­bone…). Nous sommes, d’ailleurs, cer­ti­fiés Cra­dle to Cra­dle, une cer­ti­fi­ca­tion qui vise à garan­tir que l’ensemble du cycle de vie du pro­duit est le plus béné­fique pos­si­ble sur l’environnement et sur la santé.

Plus que jamais aujourd’hui, ces notions de décar­bon­a­tion, de réduc­tion de l’impact envi­ron­nemen­tal et de cir­cu­lar­ité doivent être pris­es en compte dès les phas­es amont de con­cep­tion du pro­duit et tout au long de sa chaîne de valeur et de son cycle de vie, tout en restant compétitif.

Quels sont les autres sujets qui vous mobilisent actuellement ?

Nous sommes posi­tion­nés sur un marché glob­al et con­cur­ren­tiel où il y a de grands écarts sur le plan nor­matif et régle­men­taire. Dans ce con­texte, le main­tien d’une fab­ri­ca­tion française représente un véri­ta­ble enjeu. Parce que nous nous inscrivons aus­si dans une logique de reprise et de redresse­ment d’entreprises, se pose la ques­tion du main­tien d’une activ­ité indus­trielle, voire de la réin­dus­tri­al­i­sa­tion de notre pays. Au-delà des avan­tages écologiques (éco-con­cep­tion, trans­port, logis­tique, qual­ité…), une réflex­ion poussée est néces­saire sur le plan économique afin de per­me­t­tre aux acteurs français d’être com­péti­tifs et con­cur­ren­tiels sur le marché national.

Et pour conclure ?

Mal­gré une pres­sion économique cer­taine sur l’ensemble de nos marchés, notre ambi­tion est de con­tin­uer à pro­pos­er une offre qual­i­ta­tive et dif­féren­ciante sur le plan envi­ron­nemen­tal et écologique, mais aus­si de con­tribuer au main­tien d’activités économiques et indus­trielles dans notre pays.  

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