Intelligence et société, vers une socio-économie de l’intelligence

Dossier : ExpressionsMagazine N°536 Juin/Juillet 1998Par Jacques MORIN (47)

L’hu­ma­nisme moderne ne sau­rait repo­ser sur la seule défense des « droits de l’homme ». La défense des plus faibles, des plus dému­nis, des plus mal­chan­ceux, l’é­ga­li­té des chances pour tous ne sau­raient à elles seules consti­tuer une « poli­tique sociale ». Pas plus que le trai­te­ment social du chô­mage ne sau­rait tenir lieu de poli­tique de l’emploi.

Il y faut aus­si, nous en sommes convain­cus, ajou­ter l’ar­dente obli­ga­tion d’as­su­rer la pleine uti­li­sa­tion et la meilleure valo­ri­sa­tion pos­sible de ces res­sources rares que sont les connais­sances, les savoir-faire, les capa­ci­tés à apprendre, à ima­gi­ner, à entre­prendre dont cha­cun est por­teur à un degré ou à un autre ; ou pour­rait l’être pour peu qu’on lui donne la pos­si­bi­li­té de les déve­lop­per et qu’on lui laisse la plus grande liber­té et les meilleures chances d’en tirer le par­ti le plus judi­cieux, pour lui-même mais aus­si pour la collectivité. 

Le « social » ins­pi­ré par le sou­ci per­ma­nent de recon­naître les intel­li­gences indi­vi­duelles et ani­mé de la volon­té d’en assu­rer le plein épa­nouis­se­ment n’est pas moins essen­tiel que le « social » qui se réclame des ver­tus de géné­ro­si­té et de jus­tice, d’é­ga­li­té et de soli­da­ri­té. À la réflexion, s’a­dres­sant, deux cents ans après la Révo­lu­tion fran­çaise, à des hommes mieux for­més, mieux infor­més, plus libres, ce « social » des intel­li­gences ne serait-il pas une expres­sion moderne des dites vertus ? 

Car, au nom de ce qui fait la spé­ci­fi­ci­té de l’homme, pour­quoi le gas­pillage de l’in­tel­li­gence des uns et de ses poten­tia­li­tés serait-il plus sup­por­table que l’é­goïsme qui lais­se­rait sur le bord de la route les exclus des richesses que les pre­miers ont voca­tion à créer ? Ver­tu et effi­ca­ci­té seraient-elles, poli­ti­que­ment, incom­pa­tibles entre elles ? 

À la « socié­té de pro­duc­tion », née avec l’a­ven­ture indus­trielle, suc­cède, peu à peu, une « socié­té de créa­tion ». À l’é­co­no­mie du quan­ti­ta­tif domi­née par la logique méca­no-ratio­na­liste du XIXe siècle se sub­sti­tue une éco­no­mie du qua­li­ta­tif plus imma­té­rielle.

Sou­te­nue par une logique plus sub­tile, et plus com­plexe, cette der­nière se carac­té­rise par une plus grande flexi­bi­li­té dans les modes d’or­ga­ni­sa­tion des acti­vi­tés éco­no­miques, une mul­ti­pli­ca­tion des espaces de liber­té, d’i­ni­tia­tive et d’i­ma­gi­na­tion, offerts à cha­cun au sein de réseaux mul­tiples ; ceux-ci tendent à rem­pla­cer les sys­tèmes tra­di­tion­nels de rela­tions for­melles, notam­ment hié­rar­chiques pour ce qui concerne les entreprises. 

Occu­pant chaque jour mieux ces espaces, les intel­li­gences indi­vi­duelles et col­lec­tives se lient ain­si les unes aux autres, en une infi­nie varié­té d’in­ter­con­nexions sans cesse renou­ve­lées. On les voit, en quelque sorte, des­si­ner une nou­velle trame sociale. 

Géné­ra­trice de richesses maté­rielles, sociales et cultu­relles, mais aus­si de connais­sances nou­velles dont elle nour­rit son propre déve­lop­pe­ment, cette « trame », par son exis­tence et son fonc­tion­ne­ment mêmes, apporte une réponse de notre temps à des besoins mal for­mu­lés (infor­ma­tion et com­mu­ni­ca­tion, recon­nais­sance de ses capa­ci­tés, uti­li­té sociale et éco­no­mique), que cha­cun aspire à satis­faire au mieux avant même, peut-être, ses reven­di­ca­tions plus maté­rielles der­rière les­quelles, plus ou moins consciem­ment, se cachent ces besoins d’une autre nature. 

Un nou­veau concept de valeur émerge ; plus glo­bal, il jus­ti­fie de nou­veaux modes d’ap­pré­cia­tion de l’ef­fi­ca­ci­té d’un sys­tème où le « social » n’est plus néces­sai­re­ment en rela­tions conflic­tuelles avec « l’é­co­no­mique » comme il était natu­rel qu’il le fût dans les pre­mières phases du déve­lop­pe­ment de la socié­té industrielle. 

Le temps est dépas­sé où cha­cun, le « social » et « l’é­co­no­mique », pen­sait légi­time de faire valoir sa pri­mau­té sur l’autre ; les deux se rejoignent désor­mais en une rela­tion intime fon­dée sur la valo­ri­sa­tion, éco­no­mique et sociale par nature, des intel­li­gences indi­vi­duelles orga­ni­sées en intel­li­gences col­lec­tives, créa­trices de valeurs plus glo­bales et plus durables. 

Ces besoins indi­vi­duels, évo­qués plus haut, dont la satis­fac­tion est habi­tuel­le­ment reven­di­quée au nom des seuls « droits de l’homme » et de sa digni­té, ou par réfé­rence à des exi­gences d’ordre psy­cho­so­cio­lo­gique, peuvent donc être, aus­si, et de mieux en mieux, satis­faits au nom d’une autre ver­tu : « l’ef­fi­ca­ci­té glo­bale ». En par­ti­cu­lier, le vrai ou le faux débat sur la nature véri­table, éco­no­mique ou sociale, des fins de l’en­tre­prise devient ain­si sans objet dès lors que, quelle que soit sa voca­tion, elle ne pour­ra désor­mais l’exer­cer qu’en cher­chant à tirer le meilleur par­ti, éco­no­mique et social, des intel­li­gences dont elle dis­pose et des connais­sances aux­quelles elle peut accéder. 

Ce « social » là ne serait-il pas l’al­pha et l’o­mé­ga de l’é­co­no­mie moderne ?

Encore faut-il que, à tous les plans, notam­ment poli­tique, de l’UE, des États, des col­lec­ti­vi­tés natio­nales et régio­nales, les entre­prises et tout le sys­tème concur­ren­tiel réservent à cette ges­tion des intel­li­gences la place émi­nente qui lui revient. 

S’a­gis­sant des entre­prises, il faut sou­li­gner au pas­sage le rôle, en la matière, des plus grandes d’entre elles en rai­son de la varié­té des com­pé­tences dont elles dis­posent et aux­quelles elles peuvent accé­der. Plus que les petites, dont on dit, trop sou­vent, qu’elles seront seules créa­trices d’emplois, leur petite taille leur confé­rant, ce qui est vrai, une plus grande capa­ci­té d’a­dap­ta­tion et de chan­ge­ment inno­vant, elles ont des poten­tia­li­tés consi­dé­rables de recom­bi­nai­sons inno­va­trices des connais­sances, et par consé­quent une res­pon­sa­bi­li­té cen­trale à assu­mer, dont elles ne peuvent s’exo­né­rer, dans la mise en œuvre d’une poli­tique géné­rale de valo­ri­sa­tion des intelligences. 

Alors, dans cette pers­pec­tive, que pèse le débat clas­sique, auquel nous fai­sions allu­sion, sur la ques­tion de savoir si la fina­li­té de l’en­tre­prise est, ou non, plus éco­no­mique que social ? 

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Uto­pies que tout ceci ? Peut-être. Et pourtant… 

Une lec­ture atten­tive d’un docu­ment aus­si offi­ciel et aus­si lar­ge­ment dif­fu­sé à tra­vers l’Eu­rope que le Livre vert sur l’In­no­va­tion (1996) de la Com­mis­sion euro­péenne révèle par quelques phrases signi­fi­ca­tives l’é­mer­gence d’une réelle sen­si­bi­li­té sur ces questions : 

• « l’Eu­rope doit miser sur l’in­tel­li­gence » (p. 11 du texte français) ;
• (il faut) « que soient mobi­li­sées toutes les com­pé­tences néces­saires (car) les res­sources humaines sont le fac­teur essen­tiel » (du déve­lop­pe­ment) (p. 2, col. 1) ;
• « l’U­nion euro­péenne doit mettre son capi­tal scien­ti­fique et tech­no­lo­gique au ser­vice de la com­pé­ti­ti­vi­té » (p. 2, col. 2). 

Mais, pour déce­ler ces affir­ma­tions, il faut jeter, sur ce docu­ment, un regard vrai­ment atten­tif. Car, en fait, les pro­grammes d’ac­tion qu’il pro­pose res­tent très clas­siques et sont loin d’être à la hau­teur des exi­gences qu’une véri­table mobi­li­sa­tion des intel­li­gences euro­péennes impli­que­rait. Comme si ses rédac­teurs crai­gnaient de s’a­van­cer un peu trop dans une voie qu’il ne leur appar­te­nait pas d’ou­vrir plus lar­ge­ment, peut-être aus­si faute de savoir en tirer les conséquences. 

Pou­vait-il, d’ailleurs, en être autre­ment tant il est vrai que ces quelques phrases dépassent lar­ge­ment le cadre, néces­sai­re­ment limi­té, d’une poli­tique, com­mu­nau­taire ou natio­nale, de « recherche et de déve­lop­pe­ment tech­no­lo­gique ». La page 29, col. 2, le recon­naît d’ailleurs impli­ci­te­ment : « la valo­ri­sa­tion du savoir acquis par un indi­vi­du… ne fait pas encore aujourd’­hui l’ob­jet d’une réelle reconnaissance ».

De fait, une telle recon­nais­sance, et ce qui en découle, devrait être un des élé­ments, non pas seule­ment d’une poli­tique de recherche et déve­lop­pe­ment tech­no­lo­gique mais aus­si d’une poli­tique « sociale » dyna­mique, un des fon­de­ments d’une véri­table « Europe sociale » sur laquelle tous pour­raient et devraient s’accorder. 

On doit regret­ter qu’au­cun homme poli­tique ne s’a­vance dans cette voie de « Euro-intel­li­gence », et que tous ceux qui admettent que le volet social de l’Eu­rope est encore bien vide laissent le débat s’en­li­ser dans un conflit dépas­sé entre ceux qui ne veulent par­ler que « d’Eu­ro-moné­taire » et ceux qui réclament qu’on lui asso­cie une bonne dose « d’Eu­ro-social », mais d’un social encore à la sauce du XIXe siècle. 

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Certes, ce débat « éco­no­mique et social », qui de nos jours manque tant de souffle faute, notam­ment, d’y inté­grer la recon­nais­sance et la valo­ri­sa­tion des intel­li­gences, a été pen­dant de très nom­breuses années au centre du débat poli­tique, en fait depuis les débuts de l’a­ven­ture indus­trielle. Car cette aven­ture a été enga­gée au XIXe siècle par des déten­teurs de capi­taux. Clair­voyants et déter­mi­nés, ayant com­pris le par­ti, certes ris­qué, qu’ils pou­vaient tirer de l’ex­ploi­ta­tion des nou­velles connais­sances scien­ti­fiques et tech­niques, ils ont, dès l’o­ri­gine, mar­qué de leurs pré­oc­cu­pa­tions « capi­ta­listes » la conduite du déve­lop­pe­ment indus­triel ; ce qui explique la place pré­émi­nente qu’y occupe la logique de bonne ges­tion des capi­taux, les res­sources rares de l’époque. 

Il était alors nor­mal, et sain, que dans un sys­tème dont une autre res­source essen­tielle était la force et le temps de tra­vail de l’homme, un contre­poids ait été créé, qui se réfère, lui, aux exi­gences des « droits de l’homme » et de sa dignité. 

Aujourd’­hui, une nou­velle page doit être ouverte : parce que l’im­ma­té­ria­li­té de l’é­co­no­mie s’ac­croît, que l’in­no­va­tion est deve­nue le fac­teur stra­té­gique déter­mi­nant du déve­lop­pe­ment éco­no­mique et social, les res­sources rares de ce déve­lop­pe­ment sont moins les res­sources finan­cières que celles indis­pen­sables au pro­ces­sus inno­va­tif, à savoir les com­pé­tences et facul­tés créa­trices orga­ni­sées en intel­li­gence collective.

Un chan­ge­ment s’im­pose, de nature éco­no­mique, poli­tique, cultu­relle, phi­lo­so­phique peut-être. Les rai­son­ne­ments d’hier prennent peu à peu valeur de mythes qu’il faut avoir le cou­rage de consi­dé­rer comme tels, avec luci­di­té, pour évi­ter d’en res­ter les pri­son­niers : la bonne logique de ges­tion des nou­velles res­sources rares, le sou­ci per­ma­nent de toutes col­lec­ti­vi­tés d’en tirer le meilleur par­ti, doit prendre, dans nos orga­ni­sa­tions, une place au moins égale à celle de la bonne logique de ges­tion des res­sources finan­cières qui ne peut plus pré­tendre à une pré­émi­nence aujourd’­hui dépassée. 

La logique finan­cière, par nature foca­li­sée sur le court terme, par­fois le moyen terme, trop rare­ment sur le long terme, ne doit plus s’im­po­ser au détri­ment d’une « logique de valo­ri­sa­tion, à moyen et long terme, des intel­li­gences indi­vi­duelles et collectives ». 

Gas­piller la matière grise au pro­fit de ren­de­ments finan­ciers immé­diats, c’est scier la branche de notre pros­pé­ri­té future, ou plu­tôt celle de nos petits-enfants. 

Nous devons apprendre, par exemple, à consi­dé­rer que les gains de pro­duc­ti­vi­té, quand ils ne peuvent trou­ver de contre­par­tie en rai­son de l’é­tat du mar­ché, ne génèrent pas seule­ment des sur­ef­fec­tifs qu’il faut éli­mi­ner, mais libèrent en même temps des poten­tia­li­tés nou­velles qu’il faut s’at­ta­cher à remo­bi­li­ser. Sachons faire la balance entre le concept clas­sique de pro­duc­ti­vi­té rap­por­tée à une notion éco­no­mique de moins en moins per­ti­nente, le temps de tra­vail, et le concept moderne, plus adap­té aux réa­li­tés du XXIe siècle, de « pro­duc­ti­vi­té de la connais­sance ».

D’ailleurs, en accor­dant une telle pré­émi­nence à une fonc­tion finan­cière qui s’é­loigne de plus en plus sou­vent de sa fina­li­té pre­mière, sou­te­nir la créa­tion de valeur, et qui, selon cer­tains, trouve en elle-même sa propre jus­ti­fi­ca­tion, notre sys­tème n’a-t-il pas atteint ses limites ? Que doit-on pen­ser d’une bourse des valeurs qui se réjouit lorsque le chô­mage a ten­dance à croître, qui voit l’ac­tion Élec­tro­lux pro­gres­ser de 27 % dans les deux jours qui suivent l’an­nonce de la sup­pres­sion de 12 000 emplois ! 

Cette idée que la bonne ges­tion des intel­li­gences pour­rait être un vec­teur du déve­lop­pe­ment aus­si impor­tant, sinon plus, que la bonne ges­tion des capi­taux com­mence à émer­ger, comme le montre, là encore, une lec­ture atten­tive du Livre vert déjà cité. Évo­ca­tion encore timide car elle ne se tra­duit par aucune pro­po­si­tion concrète, ne serait-ce que sous forme, par exemple, d’ac­tions de sen­si­bi­li­sa­tion. On lit, en effet, page 9, col. 1 : « Les nou­velles théo­ries de la crois­sance (endo­gène) insistent sur le fait que c’est le déve­lop­pe­ment des connais­sances… qui consti­tue le moteur de la crois­sance durable plu­tôt que l’ac­cu­mu­la­tion pure et simple de capi­taux. »

Oui, et alors ? a‑t-on envie de dire… Il est vrai que, là plus encore, le débat se situe à un plan autre que celui de l’innovation. 

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Gérer l’in­tel­li­gence ; un pro­jet à la fois éco­no­mique, social, huma­niste, auquel il faut don­ner vie. 

Un pro­jet nou­veau pour des hommes poli­tiques qui en paraissent aujourd’­hui dépour­vus. Enfer­més qu’ils sont dans des repré­sen­ta­tions du pas­sé, assu­jet­tis aux pesan­teurs de l’his­toire, leur démarche essouf­flée relève d’un achar­ne­ment thé­ra­peu­tique qui les empêche de consa­crer des efforts cou­ra­geux à créer les condi­tions d’une har­mo­nie éco­no­mique et sociale renou­ve­lée, lar­ge­ment fon­dée sur la valo­ri­sa­tion, créa­trice de richesses, des poten­tiels d’in­tel­li­gences, dans le res­pect, bien enten­du, des pré­oc­cu­pa­tions jus­ti­fiées de ren­ta­bi­li­té des capi­taux inves­tis et de sau­ve­garde des acquis sociaux les plus essentiels. 

Il ne s’a­git pas de fer­mer tota­le­ment le livre du pas­sé mais d’ou­vrir une nou­velle page qui invente une nou­velle logique du développement. 

Pour nous, Euro­péens, cela signi­fie recon­naître expli­ci­te­ment que le fon­de­ment de notre pros­pé­ri­té est notre capi­tal de connais­sances – que tous ensemble nous ras­sem­blons et renou­ve­lons sans cesse – asso­cié à notre capa­ci­té à le mobi­li­ser en exploi­tant le plus lar­ge­ment pos­sible la richesse de nos diver­si­tés cultu­relles.

C’est là l’es­sen­tiel, bien plus encore que de bâtir une Europe moné­taire qui ne sau­rait consti­tuer une fin en soi contrai­re­ment à ce que tout le lais­se­rait croire aujourd’hui. 

Sommes-nous encore capables, avons-nous le cou­rage, d’en­tre­prendre cette réno­va­tion de notre pen­sée poli­tique, éco­no­mique et sociale pour la mieux adap­ter aux réa­li­tés qui sont déjà les nôtres aujourd’­hui, sûre­ment à celles que, demain, vivront nos des­cen­dants à qui nous avons à rendre des comptes ? 

Soyons opti­mistes : les uto­pies deviennent plus sou­vent qu’on ne croit des réa­li­tés. Après tout, nous avons su intro­duire dans la logique éco­no­mique la néces­si­té de pro­té­ger les res­sources natu­relles. L’in­tel­li­gence humaine n’est-elle pas une res­source natu­relle qui mérite autant de consi­dé­ra­tion que l’air pur, les forêts et les petits oiseaux ?

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