Innovation et développement dans les PME et les ETI

Dossier : Recherche et entrepriseMagazine N°694 Avril 2014
Par Christian BRÉVARD

Une PME ne fait pas de « recherche » au sens uni­ver­si­taire, mais prin­ci­pale­ment du « développe­ment », qui se traduit ensuite par une « inno­va­tion ». Cette inno­va­tion, de rup­ture ou incré­men­tale sur un pro­duit exis­tant, val­orise ain­si le marché de cette entre­prise ou ren­con­tre un nou­veau marché. Dans tous les cas, elle apporte un avan­tage con­cur­ren­tiel impor­tant et très sou­vent le succès.

REPÈRES

Sur 13 000 entreprises qui mènent des travaux de R&D en France, 11 000 sont des petites et moyennes entreprises, ou PME (effectif inférieur à 250 personnes), pour un total de 4 milliards d’euros (chiffres 2010). En outre, 1 800 sont des entreprises de taille intermédiaire ou ETI (moins de 5 000 personnes), pour plus de six milliards d’euros. Les grandes entreprises, ou GE (plus de 5 000 personnes), bien que plus connues, ne jouent qu’un rôle limité.

Vers des intermédiaires

Bien que la mise en place des pôles de com­péti­tiv­ité et des insti­tuts Carnot ait amor­cé un mou­ve­ment posi­tif de col­lab­o­ra­tion directe entre PME et lab­o­ra­toires publics, force est de recon­naître que la grande majorité de ces entre­pris­es se tour­nent, lorsque c’est néces­saire pour leurs développe­ments tech­niques, vers des inter­mé­di­aires de type cen­tres régionaux d’innovation et de trans­fert de tech­nolo­gie (CRITT) ou vers des cen­tres tech­niques spé­cial­isés, plus à même de répon­dre à une demande ciblée et ponctuelle.

Con­tri­bu­tion à l’ac­tiv­ité nationale économique globale
Chiffr​es en % PME ETI GE
Nom­bre
Emploi salarié
Chiffre d’affaires
Valeur ajoutée
Investissements
Exportation
99,9
52,4
38,4
48,6
43,1
17,7
0,1
24,2
28,1
24,5
29,7
34,4
0,01
23,3
33,5
27,0
27,2
47,9
Source : loi de finances 2014, don­nées de 2010.

Con­traire­ment à l’idée large­ment répan­due en France, une bonne recherche (uni­ver­si­taire) n’est pas automa­tique­ment source d’innovation. Tout résul­tat fon­da­men­tal n’est pas automa­tique­ment réutilisable.

La recherche et le développe­ment dans les PME et ETI sont sou­vent d’ordre tech­nique, mais aus­si organ­i­sa­tion­nel, qu’il s’agisse de procédés, de mar­ket­ing ou de vente.

Entre 2008 et 2010, 49 % des PME français­es ont innové au sens large du terme. La pro­por­tion aug­mente avec la taille : 43 % pour les moins de 20 salariés, 80 % entre 20 et 250.

Maîtriser la langue anglaise

Une intéres­sante com­para­i­son entre les efforts d’innovation français et alle­mands mon­tre que, para­doxale­ment, les PME français­es dépensent davan­tage en recherche et développe­ment que leurs homo­logues alle­man­des. La pro­por­tion s’équilibre dans les ETI de petite taille pour devenir net­te­ment plus impor­tante dans les ETI alle­man­des de plus de 1 000 personnes.

Répondre à une demande ciblée et ponctuelle

La bonne tenue française ne se retran­scrit mal­heureuse­ment pas dans les résul­tats économiques. Tout sim­ple­ment parce que les ETI alle­man­des, plus nom­breuses et plus expor­ta­tri­ces, ali­mentent mieux les comptes nationaux.

Une analyse plus appro­fondie ferait appa­raître de nom­breux atouts com­para­t­ifs plus favor­ables pour nos voisins d’outre-Rhin, en ter­mes de finance­ments ban­caires, de noy­aux pat­ri­mo­ni­aux et famil­i­aux sta­bles, de volon­té d’exporter et d’une maîtrise générale, du haut en bas de la struc­ture des PME et ETI, de la langue anglaise, gage d’une poli­tique d’exportation réussie.

Les com­para­isons entre mod­èles français et alle­mand démon­trent claire­ment l’enjeu : mal­gré la bonne tenue de nos PME en ter­mes d’innovation, il faut les faire croître pour les amen­er vers une struc­ture d’ETI.

Inten­sité de R&D en fonc­tion de la taille de l’en­tre­prise (2007), com­para­i­son entre la France et l’Allemagne
Don­nées 2006. Cha​mp : indus­trie. Source : Eurostat.

On pour­rait résumer cet objec­tif par « innover pour croître » et ain­si amorcer le cer­cle vertueux : inno­va­tion – marchés – chiffres d’affaires – marge – résul­tat – réserves – fonds propres.

Bien enten­du, il n’existe pas de remède mir­a­cle, mais on voit se dégager peu à peu quelques lignes de force. L’open inno­va­tion qui va per­me­t­tre à la PME ou ETI de cap­i­talis­er sur une col­lab­o­ra­tion bilatérale ou mul­ti­latérale pour éviter de lourds investisse­ments, hors de portée de sa capac­ité finan­cière ; la mise à dis­po­si­tion de nou­veaux out­ils (telles les imp­ri­mantes 3D qui risquent de boule­vers­er, à moyen terme, la notion de pro­to­ty­page) ; la mise en place du brevet uni­taire européen qui, si les frais de dépôt et de main­te­nance sont ceux annon­cés, faibles par rap­port à l’actuel brevet européen, per­me­t­tra de mieux sécuris­er l’innovation dans les PME et ETI.

Amener les PME vers une structure d’ETI

Enfin, les nom­breuses aides finan­cières ou autres (CIR, CICE, JEI, BPI, etc.) de l’État qui a vrai­ment pris acte de l’importance stratégique de ce tis­su indus­triel et commercial.

Cette incur­sion rapi­de dans le monde des PME et ETI con­forte leur impor­tance économique et stratégique. Rich­es d’initiatives et de défis, elles offrent aux jeunes diplômés de belles per­spec­tives de car­rière dans un envi­ron­nement à taille humaine.

Inno­va­tions réal­isées au sein des entreprises
% de salariés Nom­bre de sociétés % d’inno-
vantes
En % des sociétés inno­vantes au sens large
Innov. pro­duits Innov. nou­veaux produits Innov. tech­no-
logiques
Innov. procédés Innov. organi-
sation
Innov. mar-
keting
% CA innov.
Sur marché Dans l’entreprise
Ensem­ble
10 à​19
20 à 49
50 — 249
> 250
115 306
57 428
37 341
16 638
3 898
49 %
43 %
49 %
63 %
80 %
38 %
31 %
37 %
48 %
65 %
24 %
19 %
25 %
33 %
48 %
14 %
12 %
15 %
15 %
17 %
31 %
24,5 %
28,5 %
41 %
57 %
40 %
37 %
38 %
45 %
61 %
71 %
71 %
72 %
70 %
74 %
48 %
48 %
47 %
50 %
74 %
14 %
5 %
5 %
7 %
17 %
Source : Com­mu­ni­ty Inno­va­tion Sur­vey, CIS 2010. Exploita­tion : André Letowski.

Patron de PME et patron d’ETI

Le patron de PME est un acteur incontournable. Il faut un caractère remarquable pour être cet homme-orchestre, banquier, directeur des ressources humaines, commercial, technicien et, en plus, innovateur. Il doit éviter une technologie subie, car une PME peut mourir d’une nouvelle technique ignorée. La remise annuelle des trophées pour l’innovation, régionaux ou nationaux, met en valeur plusieurs de ces patrons ignorés qui ont innové, breveté, réussi.
Lorsqu’on se tourne vers le patron d’ETI, on perçoit un changement de structure. De par la taille de l’entreprise, ce manager dispose de plusieurs leviers de transmission : DRH, responsable de production, commercial et, souvent, directeur financier qui forment en général son « comité exécutif ». Il peut alors consacrer plus de temps à la stratégie en général, dont l’innovation devrait absolument faire partie et qu’il peut envisager en terme de ressources internes ou de sous-traitance, le fameux make or buy.

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