IHEDN : Préparer la défense de demain

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°769 Novembre 2021
Par Général Benoît DURIEUX

L’Institut des hautes études de défense natio­nale (IHEDN) pro­pose à ses audi­teurs, cette année, une nou­velle offre de for­ma­tion, com­pre­nant notam­ment une ses­sion natio­nale unique. Expli­ca­tions du Géné­ral Benoît Durieux, Direc­teur de l’IHEDN.

Quel est le sens du récent changement connu par l’IHEDN ?

Cette ses­sion natio­nale est conçue pour per­mettre aux audi­teurs de mieux appré­hen­der dans leur glo­ba­li­té et leur com­plexi­té les enjeux de défense, carac­té­ri­sés par leur dimen­sion inter­mi­nis­té­rielle et inter­sec­to­rielle, mais aus­si par leur trans­ver­sa­li­té. La spé­ci­fi­ci­té de notre ins­ti­tut et sa richesse est d’être un lieu de croi­se­ment entre des points de vue dis­tincts, sou­vent mar­qués du sceau de l’expertise, mais tou­jours par­tiels. C’est pour­quoi l’IHEDN, confor­mé­ment à sa voca­tion, se doit de favo­ri­ser le décloi­son­ne­ment des savoirs, plu­tôt que de créer autant de for­ma­tions que d’aspects de la défense natio­nale. Tel est le sens qu’il convient de don­ner à l’ouverture de la pre­mière ses­sion natio­nale « inté­grée » de l’IHEDN : une ses­sion unique, com­por­tant un socle com­mun de for­ma­tion, ouvrant l’espace d’une réflexion par­ta­gée entre tous les audi­teurs, quelle que soit la majeure choi­sie (arme­ment et éco­no­mie de défense, défense et sécu­ri­té éco­no­mique, enjeux mari­times, poli­tique de défense, sou­ve­rai­ne­té numé­rique et cyber­sé­cu­ri­té). Les sujets de chaque majeure se recoupent d’ailleurs en par­tie. Pour ne don­ner qu’un exemple, la ques­tion cyber se pose aus­si bien en mer, dans l’industrie de défense, consti­tuant éga­le­ment un pro­blème de sécu­ri­té économique.

Les cinq majeures de la ses­sion natio­nale impliquent donc, au même titre que le socle com­mun, décloi­son­ne­ment des savoirs, croi­se­ment des points de vue et par­tage d’expériences entre des audi­teurs aux com­pé­tences variées, issus de tous les sec­teurs d’activité (civil, mili­taire, public, pri­vé, asso­cia­tif, syn­di­cal, jour­na­lis­tique ou encore cultuel…). 

Cepen­dant, au-delà de ces recou­pe­ments thé­ma­tiques, c’est bien comme « lieu unique où s’institue un débat durable » entre des inter­lo­cu­teurs riches d’une expé­rience propre que l’IHEDN pour­suit sa mis­sion car­di­nale, à savoir déve­lop­per « une uni­té de sen­ti­ment, de pen­sée et de doc­trine » qui condi­tionne l’efficacité de l’action.

Dans cet esprit, l’IHEDN a voca­tion à sou­te­nir cette culture du débat qui per­met de s’accorder, au fon­de­ment même de la démo­cra­tie, culture qu’il revient aux audi­teurs de faire vivre, de même qu’il nous revient, comme citoyens, de por­ter une vision de la défense natio­nale, vision de ce que nous sommes en tant que nation, en tant que répu­blique, en tant que société.

Plus globalement, comment envisager aujourd’hui la question de la défense nationale ? 

Cette ques­tion peut s’appréhender à tra­vers trois cercles concen­triques : le cercle cen­tral de la défense mili­taire, bien sûr, qui se carac­té­rise par l’emploi ou la pers­pec­tive d’emploi de la force armée. Le cercle sui­vant est celui de la défense natio­nale, domaine de l’emploi de la puis­sance par les États, ou plus lar­ge­ment par les enti­tés poli­tiques. Tout ce qui porte atteinte à notre sou­ve­rai­ne­té, et donc à notre liber­té et à nos inté­rêts en tant que nation, concerne la défense natio­nale. Le cyber, le ter­ro­risme inter­na­tio­nal, l’espionnage, la dés­in­for­ma­tion, le rachat d’entreprises sen­sibles, ou encore l’imposition de normes extra­ter­ri­to­riales, relèvent de ce domaine. Enfin, il y a le cercle plus large de la sécu­ri­té natio­nale, domaine de la ges­tion des risques. Dans tous les cas, nous ne par­lons pas d’une ques­tion technique. 

La défense natio­nale n’est pas davan­tage un objec­tif en soi mais une com­po­sante de notre poli­tique. Com­ment défi­nir une stra­té­gie ? Toute réflexion por­tant sur la défense natio­nale sou­lève d’abord des ques­tions : ques­tion du niveau de prio­ri­té de la sécu­ri­té natio­nale ; ques­tion du rythme de l’action, tiraillé entre la double ten­ta­tion du court terme média­tique et de la cohé­rence à long terme ; ques­tion enfin du niveau de risque à consen­tir. L’IHEDN, lieu de débat, est aus­si le lieu d’un tel ques­tion­ne­ment, autre­ment dit l’occasion de déployer une réflexion stratégique.

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