Louis LEPRINCE-RINGUET

Hommage à Louis Leprince-Ringuet

Dossier : ExpressionsMagazine N°526 Juin/Juillet 1997Par : Propos recueillis par Stéphane Deschamps

Vous avez inté­gré le corps enseignant de l’École poly­tech­nique à 35 ans, il y a exacte­ment soix­ante ans de cela. Vous venez de fêter votre 96e anniver­saire au sein même de cette École. Que ressentez-vous ?

Vous avez inté­gré le corps enseignant de l’École poly­tech­nique à 35 ans, il y a exacte­ment soix­ante ans de cela. Vous venez de fêter votre 96e anniver­saire au sein même de cette École. Que ressentez-vous ?
Je suis très heureux. C’est une chance d’être resté en bonne forme physique car il ne reste presque per­son­ne de ma pro­mo­tion. Je suis tou­jours resté fidèle à l’École poly­tech­nique. Depuis les années 20 jusqu’à mon départ, il a tou­jours existé une ambiance frater­nelle entre les mem­bres de mon lab­o­ra­toire ici à Polytechnique.

• “ J’ai vécu une vie de rêves au point de vue sci­en­tifique et au point de vue décou­verte ” avez-vous affir­mé dans le film qui vous est con­sacré *. Si vous deviez extraire un rêve de votre vie, lequel serait-il ?
Le bon­heur d’une vie frater­nelle et d’une vie en équipe frater­nelle. Au CERN, nous avons fait du gros boulot. Par­fois, il nous arrivait de rester jour et nuit lorsque nous étions prévus pour dis­pos­er du fais­ceau de particules.

• Une chose à laque­lle vous teniez énor­mé­ment quand vous étiez pro­fesseur, c’était l’importance du tra­vail en com­mun. Pourquoi était-ce si impor­tant à vos yeux ? Croyez-vous, au con­traire, au génie individuel ?
Actuelle­ment, on ne réus­sit que si on a de grandes équipes. C’est une néces­sité de bien s’entendre sans créer de jalousie. Chez nous, il exis­tait une grande fra­ter­nité entre tous, y com­pris entre les tech­ni­ciens et les mécani­ciens. Quant au génie indi­vidu­el, il existe, certes, mais de moins en moins, et unique­ment comme théoriciens.

Louis LEPRINCE-RINGUET• La sci­ence per­met d’avoir des appli­ca­tions béné­fiques ou malé­fiques. Où situez-vous la frontière ?
Cela dépend de beau­coup de choses. Si on n’avait pas détru­it Hiroshi­ma, les Japon­ais auraient con­tin­ué pen­dant très longtemps. Depuis la fin de la guerre, il existe un équili­bre de la ter­reur. Par con­tre, les rayons X, bien util­isés, sont extrême­ment intéres­sants. Si vous en prenez trop, vous en mour­rez. La sci­ence donne du con­fort mais si vous abusez de cer­taines appli­ca­tions, vous pou­vez en mourir.

• À l’aube du XXIe siè­cle, la sci­ence française est-elle en danger ?
En tout cas, elle devient de plus en plus inter­na­tionale. Le CERN en est le par­fait exem­ple avec une par­faite entente entre tout le monde. Cha­cun garde sa nation­al­ité et son eth­nie. C’est sa grande force.

Pro­pos recueil­lis par Stéphane deschamps 

(*) Louis Lep­rince-Ringuet, un physi­cien dans le siè­cle a été réal­isé par Jean Druon et Euse­bio Ser­ra­no, et édité par Cul­ture production.

Poster un commentaire