La lumière extrême va briller sur Palaiseau

Dossier : ExpressionsMagazine N°630 Décembre 2007Par Jean DESCHARD

Le pro­jet d’In­sti­tut de la lumière extrême (ILE) est piloté par le Lab­o­ra­toire d’op­tique appliquée (LOA) et Lab­o­ra­toire d’u­til­i­sa­tion des lasers intens­es (LULI). Ce pro­jet doit fournir sur le site de l’EN­S­TA, à l’hori­zon 2010, une source laser d’une extrême brièveté et d’une inten­sité telle qu’on pour­rait envis­ager à terme (tout du moins de façon indi­recte) d’obtenir la créa­tion de matière (élec­tron et positron) à par­tir de la lumière. Le fais­ceau que l’In­sti­tut veut créer doit, en fait, attein­dre une puis­sance de 10 petawatts (1016 W).

Les physi­ciens de l’in­ter­ac­tion laser matière pour­suiv­ront leurs travaux dans un domaine de la physique encore inex­ploré aujour­d’hui : celui de l’op­tique ultra-rel­a­tiviste dans laque­lle les ions, eux aus­si, sont accélérés à des vitesses proches de celles de la lumière. Pour situer les choses, le plus puis­sant laser de ce type délivre actuelle­ment un peu moins de 1 petawatt. 

Toutes les disciplines de la physique

François Ami­ra­noff, directeur du LULI, ajoute qu’un défi majeur de ce pro­jet sera de fournir des sources sec­ondaires de par­tic­ules et de ray­on­nement brèves et intens­es à la dis­po­si­tion d’une très large com­mu­nauté sci­en­tifique. Le pro­jet ILE touche toutes les dis­ci­plines de la physique, explique Gérard Mourou, coor­di­na­teur du pro­jet ; de l’op­tique clas­sique, à la cos­molo­gie en pas­sant par la physique nucléaire et la physique des par­tic­ules, avec des appli­ca­tions socié­tales importantes.

En ce sens, l’ILE jouera un rôle unique de fédéra­teur sci­en­tifique et tech­nologique. Hen­ri Videau, directeur du Lab­o­ra­toire Lep­rince-Riguet (LLR), annonce que ce pro­jet offrira, en phase 2, des pos­si­bil­ités très promet­teuses de développe­ment des tech­niques d’ac­céléra­tion de par­tic­ules à très haute énergie.

Dans le cadre du Con­trat de pro­jet État Région 2007–2013, L’É­tat et les col­lec­tiv­ités ter­ri­to­ri­ales vont y inve­stir entre 20 et 25 mil­lions d’eu­ros. Le démar­rage du pro­jet est prévu pour début 2008, et sera prin­ci­pale­ment local­isé au sein du tout nou­veau bâti­ment P de l’EN­S­TA, ain­si qu’à l’X, au LULI. 

Un prototype européen

Au-delà d’avancées remar­quables dans de nom­breux domaines sci­en­tifiques, ce pro­jet aura de très fortes retombées sur quelques appli­ca­tions socié­tales majeures

Ce pro­jet fran­cilien a aus­si pour ambi­tion de servir de pro­to­type au pro­jet européen ELI (Extreme Light Infra­struc­ture), dont la France, à tra­vers le LOA et le LULI, coor­donne la phase pré­para­toire (par le relais du CNRS). Ce pro­jet de recherche fon­da­men­tale devrait per­me­t­tre des avancées remar­quables dans de nom­breux domaines sci­en­tifiques et avoir aus­si de très fortes retombées sur quelques appli­ca­tions socié­tales majeures. Sa puis­sance prévue est 10 fois supérieure à celle du pro­jet fran­cilien. Il a été inscrit fin 2006 sur la feuille de route de l’ES­FRI (Euro­pean Strat­e­gy Forum on Research Infra­struc­tures) et les résul­tats de l’ap­pel d’of­fres lancé pour la phase pré­para­toire ont mon­tré le grand intérêt de la Com­mu­nauté pour ce pro­jet puisque ELI est doté d’une enveloppe de 6 mil­lions d’eu­ros pour men­er à bien cette phase durant les trois prochaines années.

” Nous sommes en phase pré­para­toire pour trois ans ” explique Jean-Paul Cham­baret, man­ag­er du pro­jet, ” nous dis­posons d’un an et demi pour choisir le site final d’im­plan­ta­tion de cette infra­struc­ture, puis nous devrons définir con­crète­ment l’ensem­ble du pro­jet (laser, bâti­ment, salles d’ex­péri­ences, struc­ture de fonc­tion­nement, règles de gou­ver­nance, plan de finance­ment, etc.).

Le pro­to­type français de l’ILE devrait valid­er notre savoir-faire et nous avan­tager dans la con­cur­rence pour le choix du site ” D’i­ci là quelques ver­rous tech­nologiques iden­ti­fiés devront avoir été réso­lus, en par­tie avec le con­cours d’in­dus­triels fran­ciliens qui se pas­sion­nent pour ce pro­jet. ” Mais, même si des per­spec­tives d’ap­pli­ca­tions socié­tales impor­tantes se font jour, notre objec­tif pre­mier reste la recherche fon­da­men­tale ” con­clut Jean-Paul Chambaret.

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