Eugène-Anatole Demarçay (1870) et l’europium

Dossier : ExpressionsMagazine N°751 Janvier 2020
Par Pierre LASZLO

En com­plé­ment au dossier de novem­bre 2019 sur la chimie, nous tenons à citer un élé­ment dont le mérite de la décou­verte en 1901 revient à un poly­tech­ni­cien. Il s’agit de l’europi­um, élé­ment numéro 63, qui appar­tient à la famille des lanthanides.

L’europium

L’europium est un métal, aux appli­ca­tions nom­breuses et impor­tantes. Au sein des lan­thanides, il se dis­tingue par sa réac­tiv­ité, large­ment supérieure à celle de ses con­génères ; ain­si que par sa mol­lesse à l’état solide, com­pa­ra­ble à celle du plomb : il se raye facile­ment à l’ongle et se laisse couper au couteau. Une autre car­ac­téris­tique, le met­tant à part des autres lan­thanides, est sa rel­a­tive rareté sur la planète.

Ses états d’oxydation prin­ci­paux sont + 2 et surtout + 3. On peut con­ver­tir le pre­mier en un sec­ond sous pres­sion : l’europium atteint la supra­con­duc­tiv­ité en dessous de 1,8 K et lorsqu’on le com­prime au-delà de 80 GPa.

On lui con­naît deux iso­topes naturels, d’abondances com­pa­ra­bles, et pas moins de 35 iso­topes arti­fi­ciels. Les appli­ca­tions prin­ci­pales actuelles tirent par­ti de la phos­pho­res­cence, dans cha­cun des deux états d’oxydation. Ain­si, les écrans de télévi­sion recè­lent actuelle­ment cha­cun entre un demi et un gramme d’oxyde d’europium. Les ordi­na­teurs quan­tiques, aux­quels on peut prédire un bel avenir, font appel à des puces à base d’europium.

Pour plus d’informations, voir la notice très com­plète sur Wikipedia.

Du radium à l’europium

Eugène-Ana­tole Demarçay (1870) est une fig­ure attachante de la chimie française au tour­nant du vingtième siè­cle. Né en 1852, il entra jeune à l’École poly­tech­nique. Il fit par­tie de son corps enseignant comme pré­para­teur, puis répéti­teur. Sa notice nécrologique nota (1904) : « L’esprit droit, la fran­chise indépen­dante tem­pérée de bonne humeur et d’une par­faite édu­ca­tion [lui attirent] bien­tôt l’amitié des maîtres de son temps : Cahours, Wurtz, Dev­ille, Dumas, Friedel, Cor­nu, Schützen­berg­er, Lecoq de Boisbaudran. »

D’abord organi­cien, il devint spec­tro­scopiste. Col­lab­o­ra­teur de Pierre et Marie Curie, il con­fir­ma en 1898 leur décou­verte du radium.

En 1896, il eut l’intuition que des échan­til­lons de l’élément récem­ment décou­vert, le samar­i­um, rece­laient des traces d’un élé­ment incon­nu ; il isol­era l’europium en 1901 et pro­posa son nom.

À présent que l’Europe est aus­si une « fédéra­tion » inter­na­tionale d’États, il con­vient de soulign­er davan­tage encore l’existence de cet élé­ment, que Demarçay eut l’autre intu­ition, prophé­tique, de nom­mer, dans sa note aux Comptes Ren­dus de l’Académie des sci­ences, en son honneur.

Poster un commentaire