Energy Pool, concepteur et opérateur de solutions pour une énergie flexible et bas carbone

Energy Pool, concepteur et opérateur de solutions pour une énergie flexible et bas carbone

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°775 Mai 2022
Par Olivier BAUD

Diri­gée par Oli­vier Baud, son pré­sident et son fon­da­teur, Ener­gy Pool gère et opti­mise des sys­tèmes com­plexes pour une ges­tion plus intel­li­gente et décar­bo­née de l’énergie. C’est aujourd’hui l’un des lea­ders mon­diaux de la modu­la­tion de consom­ma­tion d’électricité. Entretien.

Quelle a été la genèse de votre entreprise ?

Ener­gy Pool est née, il y a 12 ans en Savoie, de la conjonc­tion de trois élé­ments. À l’époque, RTE venait d’être sépa­ré d’EDF et ne pou­vait dis­po­ser des moyens d’effacement élec­trique dont il avait besoin pour gérer les pointes de consom­ma­tion d’électricité. Cette même année, je pré­si­dais Alu­mi­nium Pechi­ney, l’un des plus gros consom­ma­teurs d’électricité dans le monde. Et je voyais bien que les indus­triels ne par­ti­ci­paient pas « cor­rec­te­ment » aux pro­blèmes d’effacement élec­trique. Pour­tant, la tech­no­lo­gie et les nou­veaux busi­ness models per­met­taient déjà de réa­li­ser des effa­ce­ments extra­or­di­naires et beau­coup plus sub­tils que ceux que nous fai­sions dans les années quatre-vingt-dix. 

Par­mi ces avan­cées, il y a notam­ment l’émergence du sta­tut d’agrégateur indé­pen­dant, né aux États-Unis pen­dant la crise des années 2000 pour remé­dier à des cou­pures de cou­rant (par exemple une cou­pure de plus 24 heures dans la ville New York en 2002) se posi­tion­nant entre les four­nis­seurs d’électricité et le res­pon­sable du réseau (RTE pour nous).

Aujourd’hui, quels sont vos métiers et votre positionnement ?

Nous sommes un Smart Ener­gy Mana­ger de sys­tèmes com­plexes. Notre acti­vi­té ne concerne donc plus uni­que­ment l’électricité, mais aus­si d’autres éner­gies comme le gaz (et notam­ment les gaz verts). 

Concrè­te­ment, nous déve­lop­pons et opé­rons des solu­tions d’optimisation de la consom­ma­tion d’énergie.

« Fournir de l’énergie bas carbone, avec un coût acceptable et sécurisé. »

Nous fai­sons du conseil pour des pays, de grandes villes, nous aidons à la concep­tion de sys­tèmes com­plexes, nous fai­sons les desi­gns, nous pilo­tons les assets… notre métier est donc assez glo­bal, ce qui n’existe pas sur le mar­ché. Nous sommes en mesure d’utiliser n’importe quels outils et méca­nismes de mar­ché. Par exemple, nous savons pilo­ter le sto­ckage, la consom­ma­tion, la pro­duc­tion de l’hydrogène… et le mettre à dis­po­si­tion des acteurs du pays (élec­tri­ciens, four­nis­seurs, pro­duc­teurs), tout en pre­nant en compte les exi­gences locales. Aujourd’hui, nous pilo­tons 6 GW, de pro­duc­tion et de consom­ma­tion, à tra­vers 10 pays dans le monde. Avec la col­la­bo­ra­tion active de 130 per­sonnes, nous réa­li­sons un chiffre d’affaires de l’ordre de 50 mil­lions d’euros. Et, nous espé­rons dou­bler notre taille d’ici l’année prochaine.

Au cœur des enjeux de la transition énergétique, on retrouve la question de la décarbonation de l’industrie. Comment appréhendez-vous ce chantier et à quel niveau pouvez-vous intervenir ?

80 % du CO2 de la pla­nète est émis par l’énergie. Notre objec­tif est de four­nir de l’énergie bas car­bone, avec un coût accep­table et sécu­ri­sé. Notre pre­mière pré­oc­cu­pa­tion est la sécu­ri­té du réseau élec­trique. Ensuite, nous veillons à appro­vi­sion­ner de l’électricité à bas car­bone grâce à la flexi­bi­li­té et à l’adaptation des consom­ma­teurs. S’il y a trop d’électricité renou­ve­lable, com­ment l’utiliser ? Et s’il n’y en a pas assez, com­ment pou­vons-nous réduire ou opti­mi­ser la consom­ma­tion ? Nous répon­dons à ces ques­tions ! Nous avons, par ailleurs, une seconde acti­vi­té qui consiste à rendre hybrides les ins­tal­la­tions thermiques. 

Géné­ra­le­ment, les ins­tal­la­tions hybrides fonc­tionnent avec du gaz ou du fioul. Nous sou­hai­tons les rendre comme les voi­tures, c’est-à-dire hybrides (fioul/gaz + électricité).

Et dans cette continuité, qu’en est-il de la décarbonation du mix énergétique ?

La décar­bo­na­tion du mix éner­gé­tique dépend pour beau­coup des entre­prises dont l’activité néces­site une consom­ma­tion impor­tante d’électricité, appe­lées aus­si élec­tro-inten­sives. En France, cela concerne un peu plus de 500 entre­prises indus­trielles. Elles absorbent approxi­ma­ti­ve­ment 20 % de la consom­ma­tion natio­nale d’électricité et emploie­raient au total près de 100 000 sala­riés. Cer­taines d’entre elles consacrent l’équivalent de 20 % de leur chiffre d’affaires à leur consom­ma­tion élec­trique. Pour décar­bo­ner le mix éner­gé­tique, ces entre­prises doivent deve­nir flexibles et s’adapter. Sinon, il est évident que le net zéro est impossible.

Quels sont les principaux enjeux et sujets qui vous mobilisent actuellement ?

Notre pre­mier enjeu a tou­jours été d’aller là où il y a des enjeux impor­tants et de les affron­ter. Aujourd’hui, en obser­vant nos clients et le monde autour de nous, nous voyons que beau­coup de pays émer­gents (et sur­tout en Afrique) sont en train de se moder­ni­ser mais ont besoin d’aide pour pas­ser direc­te­ment aux nou­velles tech­no­lo­gies. Nous essayons de les accom­pa­gner à adop­ter les der­nières inno­va­tions comme les micro­grids, par exemple. Il s’agit de réseaux intel­ligents de petite taille qui reposent sur des moyens locaux de pro­duc­tion d’électricité et de cha­leur, appor­tant ain­si un appro­vi­sion­ne­ment élec­trique à un petit nombre de consom­ma­teurs pour leur four­nir une alter­na­tive, moins chère et plus fiable, aux réseaux élec­triques cen­tra­li­sés. Enfin, nous avons pour ambi­tion de faire en sorte que l’équilibre du sys­tème incor­pore beau­coup plus la flexi­bi­li­té des consom­ma­teurs dans leurs scénarios.

Comment voyez-vous votre secteur mais également votre entreprise ?

Je ne par­le­rai pas de sec­teur mais de métier. Nous avons en effet très peu de concur­rents dans le monde : rares sont les acteurs qui comme Ener­gy Pool font de la tech­nique, de l’opérationnel et du consul­ting. Il y a quelques années, nous avons fait le pari d’être une entre­prise glo­bale tout en étant une PME. Dans notre métier, il y a une nébu­leuse de tech­no­lo­gies et d’acteurs. Nous sommes éga­le­ment indé­pen­dants et agnos­tiques, ce que nos clients appré­cient énor­mé­ment. Aujourd’hui, notre seul pro­blème est d’arriver à gran­dir suf­fi­sam­ment vite pour pou­voir répondre au besoin gran­dis­sant du monde.

Justement, quelles perspectives de carrière pouvez-vous proposer à de jeunes ingénieurs ?

Nous sommes prêts à embau­cher 200 per­sonnes en deux ans. Nous en avons besoin ! Tech­ni­que­ment, les ingé­nieurs fran­çais sont extra­or­di­naires. Leur répu­ta­tion les pré­cède dans le monde entier. Néan­moins, au-delà des com­pé­tences techniques, il est tout aus­si impor­tant de savoir tra­vailler en équipe. Nous recher­chons des per­sonnes humbles qui savent s’adapter aux dif­fé­rentes cultures : les Japo­nais sont des Japo­nais et les Saou­diens, des Saou­diens… Un bon ingé­nieur se doit d’avoir l’humilité d’écouter et de consi­dé­rer qu’il peut apprendre des autres même en sor­tant de l’X. La dimen­sion humaine, col­lec­tive et l’esprit entre­pre­neu­rial sont essen­tiels pour réus­sir dans notre métier (et dans tout autre d’ailleurs).

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