Innover ensemble au service de la transition énergétique des villes

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°769 Novembre 2021
Par Michel SALEM-SERMANET (86)

Aujourd’hui, en France, les villes sont respon­s­ables de 50 % de la con­som­ma­tion d’énergie et de 2/3 des émis­sions de gaz à effet de serre. Alors que le pays vise la neu­tral­ité car­bone à hori­zon 2050, il est impératif de pou­voir dis­pos­er d’outils numériques avancés pour opti­miser la prise de déci­sion et la con­cep­tion de quartiers bas car­bone. Dans cet entre­tien, Michel Salem-Ser­manet (86), directeur général d’EFFICACITY, nous explique com­ment cet insti­tut de R&D se mobilise en ce sens.

EFFICACITY est un des instituts de R&D public-privé sur la thématique de la transition énergétique, créé par l’État en 2013. Quel est votre périmètre d’action et votre spécificité ?

EFFICACITY est dédié à la tran­si­tion énergé­tique et écologique des villes, et notre rôle est de dévelop­per des out­ils logi­ciels d’aide à la déci­sion pour tous les acteurs de la ville : col­lec­tiv­ités, amé­nageurs, pro­mo­teurs, ingénieries, entre­pris­es de l’énergie et des ser­vices urbains. Notre orig­i­nal­ité est de cibler non pas l’échelle du bâti­ment, rel­a­tive­ment maîtrisée, mais l’échelle du quarti­er qui est beau­coup plus com­plexe et sys­témique et où les out­ils d’aide à la déci­sion n’étaient jusqu’à récem­ment pas à la hau­teur des défis cli­ma­tiques. Notre orig­i­nal­ité réside aus­si dans notre méth­ode col­lab­o­ra­tive très poussée : nos équipes-pro­jets sont toutes pluridis­ci­plinaires et pub­lic-privé, issues à la fois de la recherche publique et des entre­pris­es, et tra­vail­lent en lien direct avec des ter­ri­toires pilotes dans un mode « recherche & action ». Grâce à cette coopéra­tion mul­ti-acteurs, nous créons une nou­velle généra­tion d’outils d’aide à la déci­sion adap­tés aux réal­ités du terrain. 

L’actualité énergétique est aujourd’hui marquée par la forte ambition de neutralité carbone à horizon 2050. Quels en sont les principaux enjeux en lien avec votre activité ?

Le prin­ci­pal enjeu est sim­ple : faire en sorte que tout pro­jet urbain sans excep­tion (en con­struc­tion neuve, réno­va­tion, ou mixte) intè­gre à toutes ses étapes de con­cep­tion, un cal­cul pré­cis de son empreinte envi­ron­nemen­tale et en par­ti­c­uli­er de son empreinte car­bone. Or, cette quan­tifi­ca­tion de l’impact car­bone n’est pas la règle, faute de sen­si­bil­i­sa­tion suff­isante des acteurs mais aus­si faute d’outils logi­ciels fiables pour le faire. Ce vide est main­tenant comblé, et il était grand temps car l’autre enjeu est de généralis­er ces nou­velles pra­tiques d’urgence, dès 2022 et pas dans 5 ans.

Dans ce cadre, quels outils et solutions mettez-vous à la disposition des parties prenantes ? 

Grâce à notre prox­im­ité avec les acteurs de ter­rain, nous avons conçu une chaîne com­plète de logi­ciels opéra­tionnels. En résumé, on peut dire que nous avons trans­posé au niveau des quartiers, les deux grandes méth­odes qui ont fait leur preuve à l’échelle du bâti­ment : la sim­u­la­tion énergé­tique et le cal­cul d’impacts envi­ron­nemen­taux en analyse de cycle de vie (ACV).

Ain­si, nous pro­posons des out­ils qui vont per­me­t­tre de faire une présélec­tion des meilleurs gise­ments d’énergies renou­ve­lables et de récupéra­tion, et des sys­tèmes énergé­tiques asso­ciés (Ener­gyMap­per® et Ener­gyScreen­er®) puis une sim­u­la­tion énergé­tique détail­lée (Pow­erDIS®) afin d’identifier la manière opti­male de pro­duire, dis­tribuer et con­som­mer l’énergie, et in fine de définir la meilleure stratégie énergé­tique pour un quarti­er don­né en fonc­tion d’objectifs envi­ron­nemen­taux et économiques. C’est ce que font avec suc­cès des pre­miers ter­ri­toires emblé­ma­tiques : Toulouse pour son grand pro­jet urbain autour de la gare de Matabi­au ; la Prin­ci­pauté de Mona­co, pour pri­oris­er ses investisse­ments sur la réno­va­tion des bâti­ments et les réseaux d’énergie.

Nous avons aus­si conçu l’outil Urban­Print® qui cal­cule l’impact envi­ron­nemen­tal d’un pro­jet, et en par­ti­c­uli­er son « score énergie » et son « score car­bone » en com­para­nt son impact à celui d’un pro­jet référence. En out­re, Urban­Print est une aide pré­cieuse à la déci­sion puisque l’outil cal­cule lui-même les meilleures com­bi­naisons d’actions per­me­t­tant d’améliorer l’impact du pro­jet, dans toutes ses com­posantes (matéri­al­ité des bâti­ments, sys­tèmes énergé­tiques, mobil­ité, espaces publics, ges­tion de l’eau et des déchets…). Cet out­il a béné­fi­cié de l’appui de l’ADEME et de l’implication de l’ensemble de la pro­fes­sion, en par­ti­c­uli­er du CSTB. 

Actuelle­ment, avec l’ADEME et le min­istère de la tran­si­tion écologique, nous réfléchissons à la façon dont les pro­jets label­lisés éco­quartiers pour­raient mon­tr­er l’exemple et inté­gr­er une éval­u­a­tion quan­ti­ta­tive de leur empreinte envi­ron­nemen­tale et en par­ti­c­uli­er de leur « score carbone ».

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