Divertissements mathégraphiques

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°548 Octobre 1999Par : Pierre NASLIN (39)Rédacteur : Jean-Marie CHAUVIN (51)

Le mot “ math­é­graphique ” en dit assez long pour que vous ne le cher­chiez pas dans le Petit Larousse : il n’y est pas encore, mais cela vien­dra. Quant aux diver­tisse­ments pro­posés par Pierre Naslin, ils régaleront les math­é­mati­ciens comme les philosophes des sci­ences. Loin d’en avoir fait un sim­ple recueil de curiosités clas­siques et mod­ernes, l’auteur innove, décou­vre, invente, par­ti­c­ulière­ment dans des domaines d’actualité tels que ceux des attracteurs et des formes fractales.

Aucun amoureux des nom­bres et de leurs appli­ca­tions graphiques ne man­quera d’y trou­ver quelque sujet de pas­sion, tant ce livre cou­vre de champs où cha­cun s’est déjà égaré avec délices.

Entre ces champs, à pre­mière vue dis­parates, Pierre Naslin a un remar­quable tal­ent pour ouvrir des portes qui ren­dent son ouvrage très cohérent. En chemin, nous par­courons un pays où se côtoient des formes géométriques créées à par­tir des nom­bres, des con­struc­tions imag­i­naires impos­si­bles dans notre monde réel, des pavages sophis­tiqués, des suites numériques aux com­porte­ments incroy­ables (lisez donc le réc­it des exploits du gang à Fibonac­ci !), de bizarres struc­tures arith­mé­tiques, des orages de grêlons et de super-grêlons, le cal­cul des car­rés et des cubes mag­iques, et cent autres étrangetés. L’auteur n’oublie pas d’aborder la logique booléenne, les jeux et le hasard.

Tout ceci est donc tis­sé à par­tir d’une trame qui donne une éton­nante con­ti­nu­ité à l’ensemble. Et tout nous devient fam­i­li­er, tant l’exposé est clair et plaisant : car il est impos­si­ble d’être vrai­ment sérieux, sans le sub­til recul qu’on appelle l’humour.

S’il est moins soucieux de cohérence glob­ale, le lecteur pour­ra au con­traire sirot­er ces diver­tisse­ments à petites gorgées. Il appro­fondi­ra alors les chapitres les plus pro­pres à étanch­er sa soif et, qui sait, y ajoutera à son tour quelques décou­vertes : Pierre Naslin, peu jaloux des thèmes qu’il développe, les accueillera volontiers.

Pour ma part et avec l’aide de mon ordi­na­teur – Arthur, pour les intimes –, j’ai pris un vif plaisir à creuser l’arithmétique des man­tiss­es, la loi de New­comb-Ben­ford (selon laque­lle le pre­mier chiffre sig­ni­fi­catif d’une don­née physique ou économique est plus sou­vent 1 ou 2 que 8 ou 9), et les cycles d’attraction évo­qués aux pages 172 et suiv­antes de l’ouvrage : car la logique de l’informatique sou­tient bien la recherche théorique, tan­dis que sa rapid­ité facilite les cal­culs. L’étude des grêlons de Syra­cuse en est aus­si une bonne appli­ca­tion. L’auteur préfère sa cal­culette, qui pro­cure une vision directe des opéra­tions effec­tuées, mais l’une com­plète bien l’autre.

Sous les cubes mag­iques, la plage ! C’est en soule­vant le car­relage du boulanger chi­nois que le drag­on Pythagore décou­vre le tré­sor du nom­bre d’or. Mais bon, l’ami Naslin me dit que j’embrouille tout et que je déna­ture son livre : j’y retourne immédiatement.

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