Réception à la résidence de France Tel-Aviv

Des opportunités de partenariats scientifiques et universitaires

Dossier : Israël : Les X et la Start-up NationMagazine N°728 Octobre 2017
Par Marion GUILLOU (73)

Au delà des liens directs de l’en­seigne­ment et de la recherche, les gou­verne­ments français et israélien ont créé le HCST (Haut-Con­seil fran­co-israélien pour la sci­ence et la tech­nolo­gie) pour met­tre en œuvre des pro­jets con­joints dans des domaines stratégiques et s’engager dans une coopéra­tion de longue durée.

Le HCST a notam­ment pour instru­ment le pro­gramme Hubert- Curien (PHC) Mai­monide, qui finance des pro­jets fran­co-israéliens de recherche et de mobilité. 

“ Cinq volontaires internationaux chercheurs effectuent leurs recherches dans un laboratoire israélien ”

Chaque année, nous choi­sis­sons deux thé­ma­tiques qui font l’objet d’un col­loque bilatéral puis d’un appel à pro­jets. Plusieurs dossiers sont retenus, pour une durée de deux ans. 

Au total, chaque gou­verne­ment mobilise un bud­get annuel de 500 000 €. 

Pour la pre­mière fois en 2017, nous avons égale­ment décidé d’organiser, en com­plé­ment, une ren­con­tre sur un sujet de sci­ence appliquée et avons retenu le thème des villes intel­li­gentes. Elle aura lieu à l’École cen­trale les 12 et 13 décembre. 

REPÈRES

La recherche et l’innovation sont au cœur du développement économique d’Israël, premier pays de l’OCDE en pourcentage du PIB consacré à la recherche (4,2 % en 2015). Nous pouvons nous réjouir de l’intensité de ses liens scientifiques avec la France.
Nous sommes son 5e partenaire dans le monde en nombre de copublications et le 2e dans le programme Horizon 2020 de l’Union européenne (Israël est associé depuis vingt ans aux programmes européens de recherche, avec succès puisque l’ensemble des financements obtenus s’élève à 1,7 milliard d’euros pour un investissement de 1,375 milliard).

DES DISPOSITIFS FACILITANT LA MOBILITÉ DES CHERCHEURS

La France sou­tient aus­si les mobil­ités de jeunes chercheurs entre nos deux pays, afin de pré­par­er les coopéra­tions de demain. Chaque année, des bours­es sont attribuées à des doc­tor­ants ou post­doc­tor­ants israéliens, à tra­vers le pro­gramme Chateaubriand, pour un bud­get de 200 000 €. En sens inverse, la France finance en per­ma­nence cinq volon­taires inter­na­tionaux chercheurs, doc­tor­ants ou post­doc­tor­ants, qui effectuent leurs recherch­es dans un lab­o­ra­toire israélien. 

“ Les établissements français trouvent en Israël des partenaires de rang mondial ”

Ils par­ticipent égale­ment à l’action du ser­vice de coopéra­tion sci­en­tifique et uni­ver­si­taire de l’ambassade de France, notam­ment pour son tra­vail de veille scientifique. 

Ces dis­posi­tifs sont cru­ci­aux pour l’avenir de nos coopéra­tions, et la val­ori­sa­tion de toutes les oppor­tu­nités de mobil­ités doc­tor­ales et post­doc­tor­ales doit être notre priorité. 

DES INITIATIVES QUI SE MULTIPLIENT

Plusieurs grandes uni­ver­sités et insti­tu­tions de recherche français­es ont choisi de s’engager dans un parte­nar­i­at de long terme avec un étab­lisse­ment israélien. 

UNE LARGE MOBILISATION

Au-delà de l’engagement du ministère chargé des Affaires étrangères et du ministère chargé de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, c’est tout le dispositif de recherche français qui se mobilise.
L’Inserm et le CNRS, notamment, financent des coopérations scientifiques et des associations entre laboratoires. Sans oublier le Centre de recherche français à Jérusalem (CRFJ), sous la double tutelle du ministère chargé des Affaires étrangères et du CNRS.

Le plus ancien est le pro­gramme Pas­teur- Weiz­mann qui sou­tient, depuis quar­ante ans, grâce à une poli­tique de lev­ée de fonds com­mune, une coopéra­tion autour de pro­jets de recherche, de vis­ites de pro­fesseurs et de mobil­ités de jeunes chercheurs. 

D’autres ini­tia­tives ont été pris­es plus récem­ment, avec l’objectif de créer des rela­tions pérennes entre équipes pour obtenir des finance­ments, notam­ment européens. 

L’École poly­tech­nique est à la pointe dans toutes ces actions, en coopéra­tion avec le Tech­nion, l’Université hébraïque de Jérusalem et l’Institut Weiz­mann autour de pro­jets sci­en­tifiques, de vis­ites de pro­fesseurs, de cotutelles de thès­es, d’écoles d’été et de mobil­ités d’étudiants.

FORTE CONCURRENCE

Les liens sci­en­tifiques entre la France et Israël con­stituent un pré­cieux atout pour attir­er des étu­di­ants israéliens en France. Mais la con­cur­rence est forte et la France n’est que la 12e des­ti­na­tion des étu­di­ants israéliens en mobil­ité internationale. 

L’X EN POINTE

Avec ses nouveaux cursus totalement en anglais, l’École polytechnique saura attirer d’excellents étudiants israéliens.
La présence de jeunes polytechniciens dans les meilleures universités israéliennes, pour un stage scientifique, un master ou une thèse contribuera également au rayonnement de l’École.

Les étab­lisse­ments français qui béné­fi­cient d’une recon­nais­sance mon­di­ale et d’une offre de for­ma­tion en anglais sont les plus attrac­t­ifs, à l’image de Sci­ences Po ou de l’Insead.

Plus glob­ale­ment, la mobil­ité des étu­di­ants israéliens en France passera par un ren­force­ment des pro­grammes d’échange étu­di­ants, notam­ment en s’appuyant sur les oppor­tu­nités de bours­es du dis­posi­tif européen Erasmus +. 

UNE SOURCE D’INSPIRATION

Les étab­lisse­ments français trou­vent en Israël des parte­naires de rang mon­di­al. Ils peu­vent être source d’inspiration, que ce soit par l’ouverture inter­dis­ci­plinaire qui irrigue la recherche ou encore par la con­nex­ion directe avec le monde de l’innovation et de l’entreprenariat à tra­vers les sociétés de trans­fert de tech­nolo­gies, les incu­ba­teurs et les pro­grammes de for­ma­tion à la créa­tion d’entreprise.


Récep­tion don­née à la rési­dence de France en l’honneur de la remise de la Légion d’honneur à M. Dan Shecht­man, lors du HCST, le 5 juil­let 2016 à Tel-Aviv Yafo. © ALEXANDRE SUPERVILLE

L’École poly­tech­nique a d’ailleurs déjà mis en place une coopéra­tion entre son accéléra­teur, X‑Up, et celui du Tech­nion, le T‑Factor.

DES LIENS À RENFORCER

Lors de mes vis­ites dans les uni­ver­sités israéli­ennes et mes dis­cus­sions avec leurs dirigeants, j’ai pu con­stater leur volon­té de ren­forcer leurs liens avec la France, dont ils appré­cient le haut-niveau sci­en­tifique, l’ouverture inter­na­tionale et la culture. 

Le Haut Con­seil doit faciliter ces coopéra­tions en inci­tant les uni­ver­sités et grandes écoles français­es à saisir les oppor­tu­nités de parte­nar­i­at en Israël. 

Avec le sou­tien de l’ambassade de France en Israël et de l’ambassade d’Israël en France, trente-trois représen­tants d’universités, organ­ismes de recherche et grandes écoles français­es se sont ren­dus en Israël en 2016. 

Nous pour­suiv­ons cet effort en 2017 et pour­rons, en 2018, nous appuy­er sur une mag­nifique occa­sion de célébr­er et ren­forcer encore nos coopéra­tions : la Sai­son croisée France-Israël. 

Jacques GOLDBERGJacques GOLDBERG professeur émérite au Technion

ISRAËL AU CERN : UNE LONGUE ATTENTE

Quit­tant la France voici trente ans pour créer le groupe du Tech­nion, j’ai soulevé auprès de Bernard Gré­go­ry, alors directeur général du Cern, la pos­si­bil­ité de l’association d’Israël, idée immé­di­ate­ment rejetée, car « elle paral­y­serait l’activité du Cern en y impor­tant le con­flit du Moyen- Orient ». 

Ce n’est que le 6 jan­vi­er 2014 qu’Israël a été offi­cielle­ment admis au Cern à l’unanimité. Aucune activ­ité du Cern n’a été paralysée ni avant ni depuis. Aucun con­flit ne s’y est produit. 

DÉTECTER LE BOSON DE HIGGS

La plu­part des expéri­men­ta­teurs israéliens y tra­vail­lent au sein du pro­gramme Atlas des­tiné à ten­ter d’observer (ten­ta­tive réussie depuis), puis d’étudier l’objet théorique dit « boson de Hig­gs » capa­ble de par son exis­tence d’attribuer une masse aux par­tic­ules qui peu­plent l’univers.

L’appareil détecteur est un cylin­dre instru­men­té de 46 m de long et 25 m de diamètre. Les deux extrémités ont été conçues et fab­riquées en Israël, puis instal­lées sous terre. 

Depuis leur mise en ser­vice, les con­struc­teurs analy­sent les don­nées issues d’Atlas, dont 440 000 canaux pour ces détecteurs israéliens par cycle de 25 nanosec­on­des de l’accélérateur LHC (Large Hadron Collider). 

DE LA RECHERCHE À L’INDUSTRIE

J’ai cédé à un autre caprice, par­ticiper à répon­dre par l’expérience à une des ques­tions posées par André Lagar­rigue en com­po­si­tion de physique le 16 jan­vi­er 1957 : « La masse du neu­tri­no est-elle math­é­ma­tique­ment nulle ou trop faible pour être mesurée ? » 

Réponse en 2010, mesurée très vraisem­blable­ment non nulle, et établie depuis 2015. 

Les con­nais­sances acquis­es sur ces sujets qu’on pour­rait juger futiles m’ont con­duit au lance­ment d’une start-up en vue de l’interception de trans­ferts fraud­uleux de matéri­aux fis­siles et, beau­coup plus grat­i­fi­ant pour moi, à réduire le nom­bre de chômeurs dans le pays où je vis. 

Joseph ZYSS (69) Joseph ZYSS (69) professeur émérite à l’École normale supérieure Paris-Saclay

DE NABI À IMAGINANO, UN FRUCTUEUX PARTENARIAT DU CNRS AVEC L’INSTITUT WEIZMANN

Le Lab­o­ra­toire européen asso­cié en nanobio­pho­tonique (LEA NaBi) asso­cie, depuis sa fon­da­tion en 2008, plusieurs unités mixtes de recherche du CNRS (six au total) aux départe­ments de physique et de chimie de l’Institut Weizmann. 

Il con­stitue un axe majeur de la stratégie inter­na­tionale du CNRS au tra­vers de deux de ses insti­tuts nationaux (Sci­ences de l’ingénierie et des sys­tèmes, Physique), en asso­ci­a­tion avec plusieurs étab­lisse­ments uni­ver­si­taires français (École nor­male supérieure Paris- Saclay, École nor­male supérieure Paris, uni­ver­sité Paul-Cézanne), aux­quels sont venus se join­dre depuis 2016 l’Institut Langevin (ESPCI), l’université Paris‑V (fac­ulté de médecine des Saints-Pères) et l’université Joseph-Fouri­er à Grenoble. 

Du côté israélien, le parte­nar­i­at s’est ouvert en 2016 à l’Université de Tel-Aviv et à l’Université hébraïque de Jérusalem, tout en prenant le nou­veau nom de « ImagiNano ». 

UNE APPROCHE MULTIDISCIPLINAIRE

Cette opéra­tion résulte de la volon­té du CNRS d’explorer en col­lab­o­ra­tion avec un parte­naire de pre­mier plan au niveau inter­na­tion­al un domaine émer­gent à la fron­tière des nanosciences, de la pho­tonique et des sci­ences du vivant, dans sa dou­ble dimen­sion fon­da­men­tale et appliquée. 

Le professeur Dan Oron, codirecteur d’ImagiNano, à l’Institut Weizmann.
Le pro­fesseur Dan Oron, codi­recteur d’ImagiNano, syn­théti­sant des nanopar­tic­ules de semi-con­duc­teur par voie col­loï­dale « douce » à l’Institut Weizmann.

Dans ce con­texte, l’Institut Weiz­mann se posi­tionne comme un parte­naire idéal compte tenu de sa cul­ture favor­able au décloi­son­nement entre dis­ci­plines, mais aus­si de son apti­tude éprou­vée au trans­fert industriel. 

Symétrique­ment, la répu­ta­tion d’excellence bien établie des lab­o­ra­toires et insti­tuts français con­cernés dans les domaines de l’optique mod­erne, tout par­ti­c­ulière­ment en optique non-linéaire, et des nanosciences est apparue attrac­tive à nos parte­naires israéliens, s’appuyant de plus sur une longue et fructueuse tra­di­tion de col­lab­o­ra­tion entre sci­en­tifiques des deux pays. 

DES RÉSULTATS PROMETTEURS

La vie sci­en­tifique du lab­o­ra­toire s’articule autour d’une douzaine de pro­jets de recherche cofi­nancés asso­ciant au moins une équipe française à une équipe israéli­enne, selon les axes prin­ci­paux suiv­ants : inno­va­tions en micro­scopie et imagerie biologique, proces­sus biologiques pho­to-induits, bio­capeurs et biochips, nanophysique. 

Ces recherch­es ont abouti à une flo­rai­son de résul­tats ayant fait l’objet de nom­breuses pub­li­ca­tions mais aus­si de pris­es de brevets com­muns, en par­ti­c­uli­er dans les domaines de l’endoscopie de nou­velle généra­tion per­me­t­tant une analyse fine des tis­sus explorés, des nano-antennes métalliques cou­plant les échelles micro et nanométriques, l’élaboration d’une nou­velle famille de matéri­aux pour la pho­tonique à base de polypep­tides fonc­tion­nal­isés, l’analyse d’images dans des milieux forte­ment dif­fu­sants, ou encore de nou­velles méth­odes de nanoscopie multiphotonique. 

Michel GOLDBERG (58) Michel GOLDBERG (58) président honoraire du Conseil Pasteur — Weizmann

LE CONSEIL PASTEUR — WEIZMANN

Créé en 1975 à l’initiative de Robert Pari­en­ti (délégué général de l’Institut Weiz­mann), du pro­fesseur André Lwoff (prix Nobel de médecine) et de la min­istre de la San­té Simone Veil, le Con­seil Pas­teur- Weiz­mann (P‑W) est une asso­ci­a­tion à but non lucratif visant à sus­citer et soutenir des col­lab­o­ra­tions actives entre chercheurs de l’Institut Pas­teur et de l’Institut Weizmann. 

Depuis sa créa­tion, elle a organ­isé et financé 25 sym­po­siums se déroulant alter­na­tive­ment à Pas­teur et à Weiz­mann et, depuis 1990, des mis­sions de prise de con­tact dans l’institut parte­naire pour plus de 100 chercheurs, 4 bours­es post­doc­tor­ales, 185 bours­es pour jeunes chercheurs et 51 pro­grammes de recherche impli­quant cha­cun au moins un lab­o­ra­toire dans chaque institut. 

Sur les 43 pre­miers pro­grammes financés, 18 ont généré des pub­li­ca­tions con­jointes, 9 des pub­li­ca­tions de cha­cun des lab­o­ra­toires parte­naires, et 9 des pub­li­ca­tions d’un seul des partenaires. 

DES PROJETS SOIGNEUSEMENT ÉVALUÉS

L'institut Pasteur
Insti­tut Pas­teur Paris.

Le suc­cès de ces col­lab­o­ra­tions est dû avant tout à la qual­ité des chercheurs impliqués, mais aus­si à la rigueur de l’évaluation des projets. 

Chaque année, ils sont classés par un comité spé­cial­isé dans chaque insti­tut puis, sur la base de ces deux classe­ments, le choix des pro­jets soutenus est réal­isé par le con­seil sci­en­tifique de P‑W. Ce dernier pilote égale­ment les sym­po­siums, l’attribution des bours­es et les missions. 

Le finance­ment – entre 250 et 400 k€ par an – provient exclu­sive­ment de la générosité du pub­lic sous forme de coti­sa­tions, dons, legs, et béné­fices de pres­tigieux galas aux­quels des per­son­nal­ités émi­nentes du monde artis­tique prê­tent leur concours. 

UN PARTENARIAT PRODUCTIF

Con­sid­érée dans cha­cun des deux insti­tuts comme le plus durable et le plus pro­duc­tif de ses parte­nar­i­ats inter­na­tionaux, la col­lab­o­ra­tion P‑W a large­ment con­tribué non seule­ment à d’importantes décou­vertes dans le domaine de la san­té, mais aus­si à des liens pro­fes­sion­nels et ami­caux entre les com­mu­nautés sci­en­tifiques française et israélienne.

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