Coordonner les acteurs français

Dossier : Géo-information et SociétéMagazine N°662 Février 2011
Par François SALGÉ (74)

REPÈRES

REPÈRES
La direc­tive Inspire vise à faire émerg­er le con­cept d’in­fra­struc­ture européenne de géoin­for­ma­tion et à faire évoluer forte­ment la poli­tique en Europe. Il s’ag­it essen­tielle­ment de faciliter l’ac­cès à la géo-infor­ma­tion à bien des domaines de la vie de tous les jours, en élim­i­nant les freins tech­niques, juridiques et économiques. Par­mi les mesures qu’im­pose la direc­tive se trou­ve la désig­na­tion d’un lieu de coor­di­na­tion nationale des acteurs visant à la met­tre en oeu­vre. Le gou­verne­ment français s’ap­prête à répon­dre à cette oblig­a­tion sous la forme d’une refon­da­tion du CNIG. Doré­na­vant présidé par un élu, le nou­veau Con­seil repren­dra les principes de la gou­ver­nance à cinq, mis en place lors du Grenelle de l’En­vi­ron­nement. Ce sera l’oc­ca­sion de rééquili­br­er le Con­seil en faveur des col­lec­tiv­ités ter­ri­to­ri­ales dont le poids en matière de géo-infor­ma­tion est grandissant.

Le Con­seil nation­al de l’in­for­ma­tion géo­graphique (CNIG) a été mis en place au milieu des années qua­tre-vingt. L’in­for­ma­ti­sa­tion de la car­togra­phie et les sys­tèmes d’in­for­ma­tion géo­graphique pre­naient leur essor et le besoin de coor­don­ner les acteurs du secteur était ressen­ti comme un besoin fort. Com­posé de représen­tants des min­istères util­isa­teurs et de représen­tants des col­lec­tiv­ités ter­ri­to­ri­ales, ain­si que des prin­ci­paux organ­ismes pro­duc­teurs, le Con­seil a su s’im­pos­er comme le prin­ci­pal lieu nation­al de con­cer­ta­tion entre pro­duc­teurs et utilisateurs.

S’ouvrir au privé

Une coor­di­na­tion pro­fes­sion­nelle : le réseau Teria
À l’ini­tia­tive de l’or­dre des Géomètres Experts, et en liai­son avec ses parte­naires, le réseau “Teria” de posi­tion­nement GPS cen­timétrique temps réel sur le ter­ri­toire français a été mis en place en 2006, afin de gag­n­er en pré­ci­sion et en pro­duc­tiv­ité dans les travaux topographiques de la pro­fes­sion. Comp­tant quelque 1866 cab­i­nets sur tout le ter­ri­toire, les géomètres experts exer­cent une délé­ga­tion de ser­vice pub­lic pour dress­er les plans topographiques qui délim­i­tent les pro­priétés fon­cières et qu’ils trans­met­tent au Cadastre.

Afin d’ou­vrir plus large­ment la con­cer­ta­tion, notam­ment en direc­tion du secteur privé et des ges­tion­naires de réseau, l’As­so­ci­a­tion française pour l’in­for­ma­tion géo­graphique (Afigéo) a été créée. Elle est dev­enue au fil du temps le lieu priv­ilégié des pro­fes­sion­nels de la “géo­ma­tique ” où se tien­nent des débats aus­si bien tech­niques qu’or­gan­i­sa­tion­nels et économiques.

En effet, dans le con­texte ter­ri­to­r­i­al, la con­cer­ta­tion s’est égale­ment organ­isée aux éch­e­lons infra­na­tionaux. Dès le milieu des années qua­tre-vingt-dix, dans plusieurs régions et quelques départe­ments, des plate­formes de mutu­al­i­sa­tion de géo-infor­ma­tion se sont mis­es en place.

L’Afigéo est dev­enue le lieu priv­ilégié des débats de la géomatique

Au démar­rage, dans la plu­part des cas, leur objet était de mutu­alis­er l’ac­qui­si­tion des référen­tiels auprès des four­nisseurs nationaux de don­nées tels que l’In­sti­tut géo­graphique nation­al et le Cadas­tre. Mais rapi­de­ment après avoir mis en place les moyens tech­nologiques d’ac­cès à ces don­nées, l’an­i­ma­tion des acteurs est dev­enue un des moteurs de ces plate­formes. Il s’est agi alors de les accom­pa­g­n­er, de recueil­lir les bonnes pra­tiques et de faire émerg­er un com­porte­ment ouvert en matière de partage des con­nais­sances géo­graphiques entre les acteurs inter­venant sur leur territoire.

Associer conseil régional et préfecture

Démarche ter­ri­to­ri­ale par essence, l’outil géo­ma­tique a été inté­gré très tôt

Sous des formes juridiques et organ­i­sa­tion­nelles var­iées en ter­mes de par­tic­i­pants et dotées de moyens humains adap­tés aux con­textes locaux, ces plate­formes, égale­ment appelées infra­struc­tures de don­nées géo­graphiques — con­cept défi­ni inter­na­tionale­ment -, se généralisent depuis quelques années dans les 26 régions français­es et dans plusieurs départements.

L’adop­tion de la direc­tive Inspire en 2007 n’est pas étrangère à ce phénomène. En effet, la prise de con­science que tous les niveaux de gou­verne­ment, donc toutes les col­lec­tiv­ités ter­ri­to­ri­ales, sont con­cernés, a entraîné les régions dans cette voie, sou­vent en asso­ciant le con­seil région­al et la pré­fec­ture de région. 

Des échanges entre utilisateurs

Une coor­di­na­tion européenne
L’or­gan­i­sa­tion européenne de con­cer­ta­tion est com­posée de dix-sept instances nationales (l’Afigéo pour la France), de deux asso­ci­a­tions thé­ma­tiques et de cinq grandes entre­pris­es. Nom­mée Euro­gi (Euro­pean Umbrel­la Orga­ni­za­tion for Geo­graph­ic Infor­ma­tion), cette organ­i­sa­tion a été fondée en 1993 et est basée à Amers­foort (Pays-Bas).
Asso­ci­a­tion plus sec­to­rielle, Euro­Geo­graph­ics (car­togra­phie et cadas­tre) rassem­ble les pro­duc­teurs nationaux de géo-infor­ma­tion (le représen­tant de la France est l’IGN), soit 55 mem­bres issus de 44 pays. Elle pro­duit des géodon­nées de référence har­mon­isées sur l’ensem­ble du con­ti­nent européen et apporte son con­cours aux pro­grammes et direc­tives de la Com­mis­sion européenne. Elle a été (re)fondée en 2001 et est basée à Bruxelles.

Les métiers s’or­gan­isent égale­ment, comme, par exem­ple, les acteurs du domaine de l’eau, avec la loi prévoy­ant la mise en place du Sys­tème nation­al des don­nées sur l’eau.

S’agis­sant d’une démarche ter­ri­to­ri­ale par essence, l’outil géo­ma­tique a été inté­gré très tôt dans les travaux. De manière plus informelle, les util­isa­teurs dans leurs domaines de com­pé­tence se coor­don­nent pour échang­er leurs savoir-faire et leurs ques­tion­nements tech­niques, juridiques, économiques et organ­i­sa­tion­nels. Sans être exhaus­tif, on peut citer le cas des géomètres experts, des ingénieurs ter­ri­to­ri­aux, des agences d’ur­ban­isme, des parcs naturels, des acteurs de la bio­di­ver­sité, des assureurs, etc.

À titre de syn­thèse, l’Afigéo a pub­lié à l’oc­ca­sion des Cinquièmes Ren­con­tres des dynamiques régionales, en juin dernier, un cat­a­logue de plus de 50 infra­struc­tures de don­nées géo­graphiques mis­es en place aux éch­e­lons infra­na­tionaux ou nationale­ment sur des thé­ma­tiques par­ti­c­ulières, cat­a­logue qui trou­ve son pro­longe­ment européen grâce à Euro­gi dans le cadre du pro­jet eSDI-Net +.

L’u­nic­ité du géoréférentiel
La plu­part des États européens ont fusion­né ou regroupé leurs ser­vices topographiques et cadas­traux : Alle­magne, Dane­mark, Estonie, Fin­lande, Norvège, Pays-Bas, Por­tu­gal, Roumanie, Slo­vaquie, Suède, Suisse et Tchéquie. Pour la Grande-Bre­tagne, en l’ab­sence de cadas­tre, l’Ord­nance Sur­vey, homo­logue de l’IGN, assure la pro­duc­tion de toute la car­togra­phie aux grandes échelles, équiv­a­lente à notre plan cadastral.
La dual­ité en France entre PCI (Plan cadas­tral infor­ma­tisé) et couche par­cel­laire du RGE (Référen­tiel à grande échelle) porte à la fois sur la mise à jour, l’archivage et la mise en ligne des don­nées. Loin­taine con­séquence de l’his­toire de nos insti­tu­tions, elle est inutile et coû­teuse, représen­tant selon cer­tains un sur­coût de 10 mil­lions d’eu­ros par an, sans compter le coût (malaisé à chiffr­er) des dif­fi­cultés pour les usagers.
Il est clair qu’il y a là un chantier de mod­erni­sa­tion de l’ad­min­is­tra­tion, qui serait ren­du pos­si­ble par les pro­grès tech­niques et par une meilleure coor­di­na­tion des deux organ­ismes, séparés depuis deux siècles.

Commentaire

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Bruno IRATCHETrépondre
1 février 2011 à 20 h 57 min

Bon­jour,

Il existe égale­ment un ter­ri­toire, où l’on par­le français, et qui dis­pose d’un seul référen­tiel cadastral :
http://www.dittt.gouv.nc/portal/page/portal/dittt/photos_cartes_cadastre/plans_cadastraux

Bruno Iratch­et

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