Coopération scientifique et technologique entre Israël et la Communauté européenne

Dossier : IsraëlMagazine N°537 Septembre 1998
Par Edith CRESSON

La mise en œuvre d’une coopéra­tion sci­en­tifique accrue et mieux coor­don­née au niveau européen est dev­enue indis­pens­able. C’est là en effet que se situe le cadre d’or­gan­i­sa­tion per­me­t­tant de faire face à la mon­di­al­i­sa­tion, en par­ti­c­uli­er parce qu’il per­met d’obtenir l’ef­fet de seuil nécessaire.

Cela ne sig­ni­fie pas que la recherche doive se dévelop­per en vase clos à l’in­térieur d’un ensem­ble région­al, celui-ci fût-il l’U­nion européenne. En effet, cer­tains prob­lèmes sont d’une nature telle qu’ils con­cer­nent l’ensem­ble de la planète. L’évo­lu­tion cli­ma­tique ou le SIDA en sont deux bons exem­ples. En out­re, la Com­mu­nauté européenne n’a pas une con­cep­tion fer­mée de la coopéra­tion sci­en­tifique inter­na­tionale. Elle le man­i­feste claire­ment en dévelop­pant des accords avec d’autres régions du monde. Elle s’ef­force tout par­ti­c­ulière­ment d’as­soci­er à sa pro­pre poli­tique les pays qui lui sont les plus proches.

L’U­nion européenne ne peut évidem­ment pas se dés­in­téress­er du bassin méditer­ranéen. Qua­tre de ses États mem­bres en font par­tie. De nom­breux prob­lèmes con­cer­nent directe­ment les pop­u­la­tions de ses deux rives. Cette prox­im­ité jus­ti­fie ample­ment une coopéra­tion sci­en­tifique ayant pour pre­mier objec­tif d’aider les pays méditer­ranéens du Sud à maîtris­er leur évo­lu­tion. Cette démarche doit con­tribuer, même mod­este­ment, à sta­bilis­er la région.

RECHERCHE ET DÉVELOPPEMENT EN ISRAËL

Budget R&D (civil) :

1,9 mil­liard US$ en 1995, soit 2,3 % du PNB
(1,8 % en moyenne dans l’U­nion européenne, 2,5 % aux États-Unis et 2,8 % au Japon).

Budget Éducation :

7,5 mil­liards US$ soit 9 % du PNB (1995). La plus impor­tante dépense du bud­get nation­al après la défense.

Secteurs financés :

Indus­trie et Agri­cul­ture (42 %)
Énergie et Infra­struc­ture (8 %)
San­té et Envi­ron­nement (8 %)
Avance­ment des con­nais­sances (42 %).

Ressources humaines :

300 000 diplômés (niveau uni­ver­si­taire) — 15 % de la pop­u­la­tion active.
Un total de plus de 75 750 chercheurs et ingénieurs, soit 133 ingénieurs pour 10 000 employés (le taux le plus élevé au monde : les USA sont deux­ièmes avec 70 sur 10 000 ; l’U­nion européenne se situe à 50 sur 10 000).
3 000 entre­pris­es — essen­tielle­ment PME — con­sacrent des efforts con­séquents à la R&D (9 % des effec­tifs des entre­pris­es de haute tech­nolo­gie et 3 % des entre­pris­es man­u­fac­turières ont des activ­ités de RDT).

“Brain gain” :

Entre 1990 et 1996, Israël a accueil­li 750 000 immi­grés, dont 10 500 scientifiques.

Universités :

Au nom­bre de 6, plus 2 insti­tuts, avec une pop­u­la­tion de 100 000 étu­di­ants, dont 25 000 suiv­ent des études post-uni­ver­si­taires. 5 000 doc­tor­ats sont délivrés par an. Toutes les uni­ver­sités dis­posent d’une “Research Author­i­ty” et d’une “Com­mer­cial­i­sa­tion Unit”.

Publications :

10,9 arti­cles pour 1 000 habi­tants, soit le pre­mier rang mon­di­al. Avec 0,1 % de la pop­u­la­tion mon­di­ale, Israël assure 1,1 % du total mon­di­al des pub­li­ca­tions sci­en­tifiques. Un tiers de ces pub­li­ca­tions sont cosignées avec des chercheurs étrangers.

Secteurs d’excellence :

Télé­com­mu­ni­ca­tions, semi-con­duc­teurs, logi­ciels, optoélec­tron­ique, biotech­nolo­gie, phar­ma­colo­gie, instru­men­ta­tion médi­cale, neu­ro­sciences, envi­ron­nement (éner­gies renou­ve­lables, eau, agri­cul­ture en zone aride).

Structures R&D :

11 Min­istères mènent des activ­ités R&D et dis­posent d’un Chief Sci­en­tist, notamment :

  • Le MIT (Min­istère de l’In­dus­trie et du Com­merce) : avec un bud­get annuel de 400 mil­lions US$, il sou­tient la R&D indus­trielle (1 116 pro­jets en 1996), perçoit des roy­al­ties sur les pro­jets réus­sis (80 mil­lions US$ en 1996), met en place des incu­ba­teurs tech­nologiques (28, hébergeant 240 sociétés), aide les “start-up companies”.
  • Le MOS (Min­istère des Sci­ences) : avec un bud­get annuel de 40 mil­lions US$, il sou­tient la recherche stratégique et assure la coor­di­na­tion et la représen­ta­tion auprès des organ­ismes internationaux.
  • Le Min­istère de l’É­d­u­ca­tion : avec son Con­seil pour l’É­d­u­ca­tion Supérieure, il sou­tient la recherche fon­da­men­tale à rai­son d’un mil­liard de US$ par an.

 
Autres sources de financement :

— Israel Acad­e­my of Sci­ence and Humanities
— Plusieurs fon­da­tions bilatérales (USA, Alle­magne, Royaume-Uni)
— Fon­da­tions et cap­i­taux privés
— 150 sociétés étrangères ont déjà investi en R&D (INTEL, IBM, Motoro­la, Microsoft, Siemens, Volkswagen).

Relations économiques entre Israël et l’Union européenne

Expor­ta­tions : 19 mil­liards US$ (1996) dont 6,58 mil­liards vers l’U­nion européenne (34 % du total, à com­par­er à 29 % vers les USA).
Impor­ta­tions : 30 mil­liards US$ (1996) dont 15,5 mil­liards de l’U­nion européenne (50 % du total, à com­par­er à 20 % des USA).


Dans le cadre général de cette poli­tique, des rela­tions plus étroites se sont nouées tout naturelle­ment avec des pays dont les affinités avec l’Eu­rope sont par­ti­c­ulière­ment fortes. Tel est bien évidem­ment le cas d’Israël.

La poli­tique de coopéra­tion sci­en­tifique et tech­nologique entre la Com­mu­nauté européenne et Israël s’est dévelop­pée depuis 1983, dans le cadre, d’une part de l’ac­cord de coopéra­tion de 1975, d’autre part des “pro­grammes-cadres de recherche-développe­ment tech­nologique de la Com­mu­nauté” (PCRD). Du fait de son haut degré de développe­ment sci­en­tifique et tech­nologique, Israël est le seul État non européen du bassin méditer­ranéen à pou­voir met­tre en œuvre avec l’U­nion européenne une col­lab­o­ra­tion sci­en­tifique et tech­nologique suiv­ie, réciproque et mutuelle­ment bénéfique.

Au cen­tre d’un marché poten­tiel de 200 mil­lions d’habi­tants au Moyen-Ori­ent, l’é­conomie israéli­enne se car­ac­térise par une crois­sance forte et régulière de son PNB, une bal­ance des paiements en équili­bre et une infla­tion lim­itée. Israël est aujour­d’hui la 13e puis­sance économique du monde. La RDT joue un rôle majeur dans son économie, comme le mon­trent les quelques don­nées ci-contre.

Historique des relations scientifiques et techniques Europe-Israël

À l’o­rig­ine, la coopéra­tion sci­en­tifique et tech­nologique entre l’U­nion européenne et Israël s’est prin­ci­pale­ment inscrite dans le cadre de pro­grammes ciblés sur les pays en développement :

  • d’abord le pro­gramme spé­ci­fique “Sci­ences et Tech­nolo­gies au ser­vice du Développe­ment-STD“1 des pre­miers PCRD ;
  • ensuite les ini­tia­tives hors PCRD (“Coopéra­tion Sci­en­tifique Inter­na­tionale-ISC” et “AVICENNE“2 ;
  • enfin, au cours du 4e PCRD (1994–1998), l’ac­tiv­ité de coopéra­tion inter­na­tionale avec les pays en développe­ment “INCO-DC”.


Par ailleurs, les organ­ismes israéliens ont eu égale­ment la pos­si­bil­ité de par­ticiper à l’ac­tion “MED-TECHNO”, pré­parée dans le cadre de MEDA, instru­ment financier du “Parte­nar­i­at euro-méditerranéen”.

Station satellite en Israël
Sta­tion satel­lite © AMBASSADE D’ISRAËL

De l’avis de tous, cette coopéra­tion s’est révélée par­ti­c­ulière­ment sat­is­faisante. Ceci n’est certes pas sur­prenant quand on con­naît la com­mu­nauté sci­en­tifique israéli­enne et les rela­tions très étroites qu’elle entre­tient depuis tou­jours avec ses homo­logues européens. Ces résul­tats très posi­tifs ont tout naturelle­ment con­duit à envis­ager de dévelop­per et de ren­dre sys­té­ma­tique cette coopéra­tion en asso­ciant Israël à l’ensem­ble du PCRD.

C’est dans cet esprit qu’est signé, en 1996, “l’Ac­cord de Coopéra­tion sci­en­tifique et tech­nique entre la Com­mu­nauté européenne et l’É­tat d’Is­raël”. Il s’ag­it du pre­mier accord dit “d’as­so­ci­a­tion” con­clu entre la Com­mu­nauté et un État tiers non européen.

Il per­met d’as­soci­er Israël à tous les pro­grammes spé­ci­fiques non nucléaires du 4e PCRD (1994–1998). Par ailleurs, il donne accès aux chercheurs et ingénieurs européens aux pro­jets et résul­tats israéliens dans les domaines sci­en­tifiques et tech­nologiques sim­i­laires. Des dis­po­si­tions par­ti­c­ulières régis­sent les droits de pro­priété intel­lectuelle et assurent la pro­tec­tion des intérêts des organ­ismes européens.

En con­trepar­tie d’une con­tri­bu­tion finan­cière d’Is­raël au bud­get du 4e PCRD, cal­culée au pro­ra­ta du PNB (soit env­i­ron 30 mil­lions d’é­cus par an), les entités de recherche israéli­ennes sont traitées comme celles des États mem­bres de la Com­mu­nauté, et peu­vent être financées par la Com­mis­sion selon les règles et procé­dures fixées par le Con­seil. Selon une clause de réciproc­ité, les entités de recherche de la Com­mu­nauté peu­vent par­ticiper à cer­tains pro­grammes de RDT d’Is­raël3, jusqu’alors fer­més à la par­tic­i­pa­tion de pays tiers, toute­fois sans finance­ment pub­lic israélien car la Com­mu­nauté n’as­sure pas de con­tri­bu­tion au bud­get de recherche israélien. Un comité con­joint veille à la mise en œuvre de l’ac­cord et des coopéra­tions en général.

Bilan de la participation d’Israël au 4e PCRD

Un sémi­naire, organ­isé con­join­te­ment par la Délé­ga­tion de la Com­mis­sion à Tel-Aviv (sec­tion sci­en­tifique) et par ISERD (the Israeli EU-RTD con­tact cen­tre) s’est tenu en Israël sur les rives de la mer Morte les 3 et 4 févri­er 1998 afin d’é­val­uer les con­di­tions de mise en œuvre et les résul­tats de l’ac­cord de coopéra­tion sci­en­tifique et tech­nique. Plus de 120 per­son­nal­ités du monde sci­en­tifique et tech­nologique y ont par­ticipé, notam­ment 16 coor­di­na­teurs européens de pro­jets de recherche ayant au moins un parte­naire israélien.

Ce sémi­naire a per­mis de recenser les par­tic­i­pa­tions israéli­ennes aux pro­grammes com­mu­nau­taires de RDT : 238 entités de recherche israéli­ennes sont par­tie prenante à des pro­jets européens (sélec­tion­nés ou présélec­tion­nés). Toute­fois, seuls 56 de ces pro­jets sont de nature indus­trielle et il n’y a que 12 pro­jets impli­quant des con­sor­tia israéliens uni­ver­sité-indus­trie4.

Compte tenu de leur tra­di­tion d’ou­ver­ture à la coopéra­tion inter­na­tionale5, il n’est pas sur­prenant que l’ac­cord avec la Com­mu­nauté ait sus­cité un réel intérêt de la part des chercheurs uni­ver­si­taires israéliens.

Bien qu’à ce jour la par­tic­i­pa­tion des chercheurs indus­triels aux activ­ités du 4e PCRD soit faible, les indus­tries israéli­ennes appa­rais­sent très ouvertes à l’idée de dévelop­per des coopéra­tions avec la Com­mu­nauté6. Il sem­ble cepen­dant que l’in­térêt des indus­triels soit d’abord lié aux avan­tages financiers et com­mer­ci­aux qu’ils espèrent retir­er de leurs coopéra­tions avec les chercheurs européens.

Comme toute activ­ité de coopéra­tion en parte­nar­i­at, les col­lab­o­ra­tions israé­lo-européennes ont per­mis de con­stituer des ensem­bles de RDT ayant la dimen­sion appro­priée pour men­er, au moin­dre coût et avec une effi­cac­ité accrue, des activ­ités de qual­ité. Par ailleurs, out­re le développe­ment du dia­logue poli­tique entre Israël et la Com­mu­nauté dans les domaines de la sci­ence et la tech­nolo­gie, l’ac­cord a con­duit à de réelles syn­er­gies entre chercheurs israéliens et européens et a per­mis aux deux parte­naires un accès réciproque à de nou­velles tech­nolo­gies. Il con­vient enfin de soulign­er cer­taines retombées indi­rectes des col­lab­o­ra­tions engagées dans le cadre de l’ac­cord : accès à de nou­veaux marchés, mise en réseaux de chercheurs, mise à dis­po­si­tion d’op­por­tu­nités nou­velles de for­ma­tion, for­mu­la­tion de nou­velles idées.

Pro­jet PROMETHEUS
(pro­gramme BRITE-EURAM)

(Haz­ardous Waste Treat­ment and Valu­able Prod­ucts Recov­ery with Pulsed-Plas­ma Technology)

L’o­rig­ine de PROMETHEUS se trou­ve dans une étude de fais­abil­ité que le Nuclear Research Cen­ter de Soreq a con­fié à une société israéli­enne en 1994. En 1996, l’é­tude de fais­abil­ité a don­né un résul­tat posi­tif, mais la société fait fail­lite. Soreq a alors décidé de prof­iter de l’ac­cord de coopéra­tion avec l’U­nion européenne.

Pour le futur con­sor­tium, Soreq a choisi une genèse “rationnelle” en 6 étapes.

  1. Déf­i­ni­tion des intérêts de Soreq pen­dant la phase de pro­jet et pen­dant la phase d’exploitation.
  2. Types de parte­naires s’adap­tant le mieux aux impérat­ifs de l’é­tape précédente.
  3. Choix du pro­gramme spé­ci­fique auquel soumet­tre la proposition.
  4. Pro­tec­tion des infor­ma­tions et des droits intel­lectuels de base.
  5. Con­trat d’as­sis­tance passé à un con­sul­tant européen.
  6. Choix des parte­naires non seule­ment en fonc­tion des besoins du pro­jet mais aus­si en fonc­tion de leur con­nais­sance des rouages communautaires.

La propo­si­tion a été soumise à la Com­mis­sion le 14 avril 1997, puis approu­vée le 29 juil­let 1997, et le con­trat a été signé le 3 novem­bre 1997.

Aucune dif­fi­culté par­ti­c­ulière n’a été soulignée par les parte­naires européens. En revanche, et ceci est pour l’essen­tiel dû au fait que les Israéliens n’ont été asso­ciés au 4e PCRD que dix-huit mois après son lance­ment, les chercheurs israéliens n’ont pas prof­ité pleine­ment de cette asso­ci­a­tion à ce pro­gramme-cadre. Mal­gré des débuts promet­teurs, la mobil­i­sa­tion des insti­tu­tions de recherche et des sociétés est en effet restée en dessous de ce qu’on pou­vait en atten­dre. Le manque d’in­for­ma­tion sur les pos­si­bil­ités offertes, les dif­fi­cultés ren­con­trées pour trou­ver des parte­naires — surtout dans le cas des indus­triels — et le recours insuff­isant à cer­tains instru­ments du 4e PCRD (par exem­ple les bours­es et les mesures d’ac­com­pa­g­ne­ment) ont con­duit à une par­tic­i­pa­tion israéli­enne inférieure à ce qu’elle aurait pu être, compte tenu de l’im­por­tance du poten­tiel sci­en­tifique et tech­nologique israélien.

De ce fait, le taux de retour financier en Israël s’est avéré inférieur à ce que les autorités de ce pays espéraient. Ceci explique le débat qui s’est déroulé en Israël sur le pro­jet d’as­so­ci­a­tion au 5e PCRD. Toute­fois, force est de con­stater que l’analyse en ter­mes de retour budgé­taire n’est pas adap­tée aux spé­ci­ficités de la recherche : d’une part, l’in­térêt qu’un pays peut trou­ver dépasse en effet les sim­ples aspects financiers puisque la coopéra­tion inter­na­tionale est stim­ulée, chaque pro­jet com­prenant plusieurs par­tic­i­pants orig­i­naires de pays dif­férents ; d’autre part, chaque par­tic­i­pant a accès à l’ensem­ble de la recherche cor­re­spon­dant aux pro­jets aux­quels il par­ticipe et non à la seule recherche qui lui est directe­ment financée.

Bénéfices mutuels de la coopération scientifique et technique

Compte tenu de sa petite taille, l’ex­is­tence d’Is­raël dépend de sa capac­ité à répon­dre aux nom­breux défis qui mar­quent son his­toire récente. Le dernier défi est celui du “high-tech”, c’est-à-dire le pari — risqué — de bâtir son économie sur l’ex­por­ta­tion de pro­duits à très haute valeur ajoutée, résul­tant de la mise en œuvre de tech­nolo­gies sophistiquées.

Pro­jet Com­bi­na­tion of Mem­brane Treat­ment for Brak­ish Water (pro­gramme JOULE)

La genèse du pro­jet remonte à une action de coopéra­tion bilatérale, indus­trielle, entre la France et Israël. Depuis 1994, le Groupe Suez-Lyon­naise des Eaux col­la­bore avec Meko­rot, la société d’É­tat israéli­enne pour l’ex­ploita­tion des ressources aquifères du pays. Un accord formel de coopéra­tion en R&D a été signé en juin 1997. Il est doté d’un bud­get de 1 mil­lion de dol­lars par an — ver­sé par chaque par­tie — et est val­able trois ans. Il a pour objec­tif, entre autres, de mieux utilis­er la tech­nolo­gie des mem­branes pour la désalinisation.

Grâce aux con­tacts de Meko­rot avec le Tech­nion de Haï­fa (Water Research Insti­tute), qui avait déjà lui-même des liens étroits de coopéra­tion avec l’U­ni­ver­sité de Thes­sa­lonique, le noy­au ini­tial indus­trie-indus­trie s’est élar­gi à un groupe com­prenant deux entre­pris­es indus­trielles et deux uni­ver­sités. L’a­jout d’une société d’É­tat espag­nole (Sociedad Gen­er­al Agua de Barcelona) a don­né au groupe la masse cri­tique pour dépos­er un pro­jet dans le cadre du pro­gramme Joule.

Grâce à la bonne con­nais­sance des pro­grammes de l’U­nion par la Lyon­naise des Eaux, le dossier de can­di­da­ture a pu être rem­pli rel­a­tive­ment aisé­ment. Il a été sélec­tion­né pour un finance­ment com­mu­nau­taire à hau­teur de 713 500 écus.

D’autres pro­jets de coopéra­tion sont envis­agés à l’avenir, avec les mêmes ou avec d’autres parte­naires, notam­ment dans le cadre de l’environnement.

Pour y par­venir, il ne lui suf­fit pas de dis­pos­er d’une pop­u­la­tion par­mi les mieux instru­ites au monde ni d’avoir mis en place des out­ils admin­is­trat­ifs per­for­mants pour faciliter la tran­si­tion de l’idée inno­va­trice au pro­duit com­mer­cial. Il lui faut aus­si un marché. Au-delà de la nor­mal­i­sa­tion de ses rela­tions avec les pays arabes voisins, qui apportera à Israël un marché non nég­lige­able, l’U­nion européenne — avec ses 370 mil­lions d’habi­tants des­tinés à dépass­er le demi-mil­liard après l’élar­gisse­ment — représente un parte­naire incon­tourn­able. Le défi “high-tech” n’est donc pos­si­ble que via son corol­laire “exporter vers l’U­nion européenne”.

Au-delà des béné­fices retirés de l’ac­cès au poten­tiel sci­en­tifique et tech­nologique de l’U­nion, qui dis­pose de con­nais­sances et de savoir-faire de pointe dans nom­bre de secteurs sci­en­tifiques, nous trou­vons là une des raisons pro­fondes de la déter­mi­na­tion d’Is­raël à pour­suiv­re son asso­ci­a­tion avec le PCRD, au-delà des résul­tats insuff­isants de sa par­tic­i­pa­tion au 4e PCRD.

L’ac­cord de coopéra­tion a per­mis en par­al­lèle à l’U­nion européenne d’ac­céder à un poten­tiel sci­en­tifique et tech­nologique de qual­ité. C’est dans la pos­si­bil­ité ain­si offerte de partager le savoir-faire des insti­tu­tions de recherche israéli­ennes et de prof­iter du dynamisme de ses PME que se trou­ve la véri­ta­ble valeur ajoutée pour les sci­en­tifiques et indus­triels européens :

  • Les sci­en­tifiques israéliens excel­lent dans le développe­ment de com­posants sophis­tiqués de pro­duits com­plex­es7. Bien que n’é­tant pas en mesure de dévelop­per et de com­mer­cialis­er le pro­duit fini dans son ensem­ble, ils en déti­en­nent la clef.
  • Nom­bre d’en­tre­pris­es israéli­ennes pos­sè­dent un savoir-faire tech­nologique extrême­ment pointu. Les nich­es tech­nologiques dans lesquelles elles opèrent sont par­fois lim­itées, mais leur exper­tise est telle que, très sou­vent, elles en devi­en­nent les lead­ers mondiaux.
  • Out­re leur dynamisme, leur imag­i­na­tion et leur esprit d’en­tre­prise, les PME israéli­ennes excel­lent dans l’art de pro­téger et d’ex­ploiter leurs pro­priétés intel­lectuelles. Ain­si, Israël est devenu le deux­ième pays étranger, après le Cana­da, en vol­ume glob­al d’af­faires traitées à la bourse tech­nologique de New York, le NASDAQ8.
     

La société ASI
(Applied Spec­tral Imaging)

ASI est une PME israéli­enne typ­ique. Née d’une “start-up” com­posée de deux per­son­nes, ses débuts ont été financés par des fonds de cap­i­tal-risque mis à dis­po­si­tion par le Gou­verne­ment. Après qua­tre-cinq ans de crois­sance très rapi­de, ASI compte main­tenant 32 employés.

Le dernier suc­cès de ASI est l’in­ven­tion et la com­mer­cial­i­sa­tion de la pre­mière caméra capa­ble de réalis­er une analyse spec­trale com­plète de chaque pix­el d’une image quel­conque. Les prin­ci­paux domaines d’ap­pli­ca­tion de cet instru­ment inno­va­teur (appelé SPECTRACUBE) sont l’im­agerie médi­cale au ser­vice de la détec­tion de dif­férentes mal­adies et de dif­férents can­cers, ain­si que l’analyse des patholo­gies chromosomiques.

En novem­bre 1997, ASI a gag­né le pres­tigieux “Prix européen pour les Tech­nolo­gies de l’In­for­ma­tion”, sélec­tion­née par­mi 319 entre­pris­es. À l’époque, le per­son­nel de ASI avait une con­nais­sance très faible de la “chose européenne”. En fait, ASI avait déjà par­ticipé, avant l’at­tri­bu­tion du prix, comme parte­naire dans une propo­si­tion des­tinée au pro­gramme BIOTECH, mais le coor­don­na­teur du con­sor­tium européen avait géré lui-même les procé­dures, de sorte que le parte­naire israélien s’é­tait trou­vé pris dans les rouages du PCRD sans même savoir de quoi il s’agis­sait. Les dirigeants de ASI com­men­cent aujour­d’hui seule­ment à saisir la “cul­ture européenne”.

La société OPTIBASE

OPTIBASE est une entre­prise de 92 employés. Actuelle­ment leader mon­di­al dans le domaine des pro­to­coles MPEG de com­pres­sion et de décom­pres­sion d’im­age, OPTIBASE, comme beau­coup d’autres sociétés israéli­ennes, est née — il y a six-sept ans — d’une start-up créée par deux très jeunes officiers retraités de l’ar­mée israélienne.

Les dirigeants de cette société ont vite com­pris les oppor­tu­nités offertes par l’ac­cord de coopéra­tion entre Israël et l’U­nion. Avec l’aide d’un con­sul­tant privé, ils ont investi du temps et de l’ar­gent pour établir des réseaux avec des sociétés européennes, notam­ment en par­tic­i­pant à de nom­breuses journées d’in­for­ma­tion organ­isées par la Com­mis­sion [Matra (F), Téléd­if­fu­sion de France (F), Rohde & Schwarz (D), Ter­a­com (S), Ora­cle (NL), Joan­neum Research (A), Euro­pean Broad­cast­ing Union, Museo Nazionale del Cin­e­ma (I), Fon­dazione Ugo Bor­doni (I), Ned­er­land Film Muse­um et Fast Mul­ti­me­dia (D)].

Suite à ces con­tacts, et en moins d’un an et demi, qua­tre propo­si­tions ont été soumis­es à la Com­mis­sion, dont trois au titre du pro­gramme ESPRIT (tech­nolo­gies de l’in­for­ma­tion) et une au titre du pro­gramme ACTS (tech­nolo­gies des com­mu­ni­ca­tions), avec un pour­cent­age de suc­cès de 100 %.

Conclusion

L’ac­cord de coopéra­tion a hissé Israël à un niveau très élevé de coopéra­tion avec l’U­nion. Non seule­ment les sociétés israéli­ennes peu­vent par­ticiper pleine­ment à toutes les activ­ités non nucléaires du 4e PCRD, mais des représen­tants israéliens, nom­més par leur gou­verne­ment, par­ticipent à tous les Comités de ges­tion des pro­grammes et à la plu­part des Comités con­sul­tat­ifs, assis­tant la Com­mis­sion dans l’élab­o­ra­tion et la mise en œuvre de sa poli­tique en matière de RDT. Israël n’est plus seule­ment un pas­sager con­finé dans une cab­ine du paque­bot “PCRD”, mais il fait aus­si par­tie de son équipage.

Toute­fois, la par­tic­i­pa­tion d’Is­raël au 4e PCRD n’a pas été opti­male. C’est pourquoi, le pays a con­nu une longue péri­ode de réflex­ions, d’hési­ta­tions et de débats internes — notam­ment entre min­istères. À son issue, le Pre­mier min­istre, Ben­jamin Nétanya­hou, a pris le 15 juin 1998 une déci­sion pos­i­tive en faveur de la par­tic­i­pa­tion d’Is­raël au 5e PCRD.

Sur la base du man­dat que lui avait con­fié le Con­seil, la Com­mis­sion a achevé la négo­ci­a­tion du nou­v­el accord avec les autorités israéli­ennes et a pro­posé au Con­seil de le con­clure. Cet accord pour­rait donc entr­er en vigueur avant la fin de l’an­née, en con­comi­tance avec celle du 5e PCRD lui-même.

J’ai conçu le 5e PCRD, actuelle­ment en cours d’adop­tion, comme une rup­ture avec le passé. Il ne s’ag­it plus d’une sim­ple syn­thèse d’in­térêts nationaux et sec­to­riels. L’ob­jec­tif est résol­u­ment mis sur la con­cen­tra­tion des moyens sur des pri­or­ités claire­ment ciblées, tout en recen­trant la recherche com­mu­nau­taire sur la crois­sance et la com­péti­tiv­ité économiques, la créa­tion d’emplois et la sat­is­fac­tion des besoins soci­aux. Un de mes soucis majeurs a été de la dot­er d’une réelle capac­ité d’adap­ta­tion à l’évo­lu­tion des besoins économiques, soci­aux et scientifiques.

Je suis con­va­in­cue qu’Is­raël sera un parte­naire essen­tiel du 5e PCRD et que cette asso­ci­a­tion apportera un élé­ment décisif au développe­ment économique de la zone euro-méditerranéenne.

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1. 94 pro­jets con­joints de recherche ont été menés de 1984 à 1993 dans le cadre de STD puis de ISC, pour une con­tri­bu­tion glob­ale de la Com­mu­nauté de 12 mil­lions d’é­cus — dont 55 % allant aux équipes de recherche israéli­ennes, 45 % aux équipes des États membres.
2. Sur les 71 pro­jets lancés dans le cadre du pro­gramme AVICENNE de 1992 à 1995, 22 impli­quaient des organ­ismes israéliens, pour une con­tri­bu­tion glob­ale de la Com­mu­nauté de 7,6 mil­lions d’é­cus. Dans ces pro­jets, les lab­o­ra­toires israéliens se trou­vaient asso­ciés à des lab­o­ra­toires de pays de l’U­nion, mais aus­si, sou­vent, de pays arabes et des Ter­ri­toires palestiniens.
3. Par exem­ple MAGNET (“Gener­ic Pre-Com­pet­i­tive Tech­no­log­i­cal RD”).
4. Au 1er juin 1998, 316 pro­jets com­prenant au moins un parte­naire israélien ont été approu­vés. Seuls 63 d’en­tre eux impliquent un parte­naire industriel.
5. L’ac­tiv­ité de recherche des uni­ver­sités israéli­ennes a tou­jours été ouverte sur le reste du monde et son car­ac­tère inter­na­tion­al est très mar­qué. Ceci est notam­ment dû à l’oblig­a­tion faite aux chercheurs israéliens d’avoir une car­rière inter­na­tionale (plusieurs années de séjours “post-doc” à l’é­tranger sont imposées à tout can­di­dat à un poste dans l’U­ni­ver­sité ; tous les sept ans, tout chercheur doit pass­er un an à l’é­tranger). Par ailleurs, un fonds spé­cial est facile­ment util­is­able pour tout chercheur désir­ant se ren­dre à l’é­tranger (vis­ites, con­férences…). Enfin, chaque uni­ver­sité a de nom­breuses pos­si­bil­ités d’ac­cueil de chercheurs étrangers.
6. Une enquête de ISERD auprès d’un échan­til­lon d’in­dus­triels israéliens (par­tic­i­pant ou non au 4e PCRD) a fait appa­raître quelques opin­ions sig­ni­fica­tives à cet égard : 91 % des indus­triels inter­rogés esti­ment que le PCRD répond à leurs besoins ; 74 % expri­ment le désir de par­ticiper au PCRD ; en revanche, seuls 45 % con­sid­èrent qu’ils dis­posent d’une infor­ma­tion suff­isante et adéquate et tous soulig­nent la dif­fi­culté de trou­ver des parte­naires dans la Com­mu­nauté. Enfin, l’en­quête de ISERD a mis en exer­gue les trois deman­des fon­da­men­tales des milieux indus­triels israéliens : dis­pos­er d’une aide dans leur recherche de parte­naires européens ; dis­pos­er d’une meilleure infor­ma­tion, en temps utile ; être assistés dans la pré­pa­ra­tion des propositions.
7. On peut citer, entre autres : com­posants élec­tron­iques de PC ; mod­ules de com­pres­sion d’im­age dig­i­tale pour la trans­mis­sion satel­li­taire ; logi­ciels d’emploi courant sur réseaux — Inter­net, Eth­er­net, etc. — ; sys­tèmes de recon­nais­sance des formes, de la voix humaine et de textes man­u­scrits ; logi­ciels de ges­tion de vidéo­con­férences et mes­sageries vidéo à large bande pas­sante ; instru­ments pour la vision noc­turne à guidage laser.
8. Si les “vétérans” par­mi les PME israéli­ennes sont nés au cours des années 60, il faut not­er que 80 % de l’ensem­ble des PME a moins de dix ans d’âge.

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