Citroën, une vie à quitte ou double

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°521 Janvier 1997Par : Jacques WOLGENSINGERRédacteur : Marcel RAMA (41)

Vous vous sou­ve­nez, bien sûr, parce que vous êtes des lec­teurs atten­tifs de mes recen­sions, de celle que j’ai faite du remar­quable ouvrage consa­cré par Jacques Wol­gen­sin­ger à André Citroën (X 1898) chez Flam­ma­rion en 1991. Elle a été publiée par La Jaune et la Rouge de novembre de la même année.

Je rap­pelle que Jacques Wol­gen­sin­ger a été pen­dant trente ans direc­teur de la com­mu­ni­ca­tion des Auto­mo­biles Citroën et que s’il n’avait que 5 ans quand André Citroën est mort, il a, selon sa propre expres­sion, pen­dant trente ans vécu chaque jour avec lui. Eh bien, il réci­dive, et avec autant de bonheur !

Cette fois-ci c’est un album, un magni­fique album de 200 pages dont les superbes illus­tra­tions occupent la moi­tié de l’espace.

Cinq cha­pitres : Le pro­grès pour but. Des autos par mil­liers. Bataille pour l’Afrique. La route de la soie. Trac­tion révolution.

Le pre­mier s’ouvre sur la pho­to­gra­phie presque pano­ra­mique d’un salon de l’automobile du début du siècle au Grand Palais ; au pre­mier plan, le stand de la firme Mors dont André Citroën a pris la des­ti­née en main en 1908 : “ les Mors vont vite ” (Tris­tan Bernard).

L’enfance d’André Citroën est mar­quée par la construc­tion de la tour Eif­fel. Il veut être ingé­nieur. Il entre à l’X en 1898. À la sor­tie, il est artilleur. Puis il fabrique ses célèbres roues d’engrenage.

On sait com­ment en 1915 il construit ex nihi­lo en quelques mois son usine de fabri­ca­tion d’obus : elle en aura pro­duit 23 mil­lions à la fin de la guerre.

Cha­pitre 2 : en 1919 l’usine est recon­ver­tie. Ce sont “ les autos par mil­liers ” : en 1929, sa pro­duc­tion annuelle dépasse les 100 000 uni­tés. Cha­cun de ses modèles est une révo­lu­tion tech­nique. Et il invente le ser­vice et le com­merce modernes de l’automobile.

À par­tir de 1925, le nom de Citroën s’inscrit en lettres de feu sur la tour Eif­fel et illu­mine le ciel noc­turne de Paris. Et le 27 mai 1927, dix mille voix accueillent et acclament Charles Lind­bergh à l’usine de Javel.

Les cha­pitres 3 et 4 sont consa­crés à la Croi­sière noire (1924) et à la Croi­sière jaune (1931). Je vous laisse décou­vrir la minu­tieuse chro­no­lo­gie des épi­sodes afri­cains et les mille dif­fi­cul­tés et exploits héroïques des 315 jours de la tra­ver­sée de l’Asie, le long de la plus vieille piste de la terre depuis la Médi­ter­ra­née jusqu’à la mer de Chine. Je vous laisse aus­si décou­vrir – je vous invite à le faire – la très inté­res­sante ico­no­gra­phie propre à ces deux chapitres.

Le der­nier cha­pitre : “Trac­tion révo­lu­tion ”. Nous sommes à la fin des années vingt, “ la Comète Citroën est à l’apogée de sa course ”, André Citroën est le deuxième construc­teur dans le monde, après Hen­ry Ford, et le pre­mier en Europe.

En 1933, il démo­lit une par­tie de Javel et rebâ­tit à la place, en un temps record, une usine ultra­mo­derne. C’est aus­si l’année où à Montl­hé­ry il prend lui-même le volant de la Petite Rosa­lie, la voi­ture aux 106 records du monde.

En avril 1934, la “ 7 ” trac­tion avant est révé­lée à tous les conces­sion­naires et au public. Elle est “ si neuve, si auda­cieuse, si riche en solu­tions ori­gi­nales, si dif­fé­rente de tout ce qui a été fait, qu’elle a pro­duit une impres­sion qui mérite vrai­ment le qua­li­fi­ca­tif de sen­sa­tion­nelle ” (Le jour­nal L’Auto, 19 avril 1934).

Mais depuis plu­sieurs années, c’est la crise et pour André Citroën les dif­fi­cul­tés finan­cières. Était-il, grâce à la “ 7 ”, à la “ 11 ” et à la “ 22 ” et avec l’aide des Miche­lin, sur le point de se réta­blir quand un petit four­nis­seur le force, le 15 décembre 1934, à dépo­ser son bilan ?

Depuis deux ans, il était atteint d’une mala­die impla­cable. Le 3 juillet 1935, après une vie menée à cent à l’heure, il s’éteint.

Les illus­tra­tions, vous ai-je dit, occupent la moi­tié de l’album. Leur inté­rêt, leur qua­li­té, leur richesse méritent une men­tion par­ti­cu­lière. Au long des 150 pre­mières pages, elles sont en noir et blanc. Et puis la cou­leur appa­raît à la suite des cinq cha­pitres avec la der­nière par­tie “Docu­ments” :

  • “ Citroën vu par… ” Her­gé avec Tin­tin, Milou et le Capi­taine Had­dock, Fran­quin avec Lagaffe, Bob de Moor, Moe­bius et d’autres des­si­na­teurs encore. Sans oublier (mais sans des­sin) Lucien Rosen­gart, Teil­hard de Char­din, Michel Déon pour ne citer que ceux-là.
  • “ Les voi­tures du mythe ” : les B2, B14, C4, C6, Rosa­lie 8, et bien sûr la 7 trac­tion avant – entre autres. On trouve leur image, et toutes leurs carac­té­ris­tiques tech­niques, sans oublier les véhi­cules des deux Croi­sières noire et jaune.
  • Les très beaux des­sins faits par Alexandre Iacov­leff au cours de ces deux croi­sières et ses notes de voyage : les unes et les autres méritent que vous vous y attardiez.

Enfin n’oubliez pas d’admirer de nou­veau les 5 superbes illus­tra­tions des pre­mières pages.

L’ouvrage se ter­mine, bien sûr, par des remer­cie­ments. À notre tour de for­mu­ler très sin­cè­re­ment les nôtres à l’égard de Jacques Wolgensinger

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