Blues en si bémol

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°621 Janvier 2007Par : François Mayer (45)Rédacteur : Jean Salmona (56)

Tout roman est auto­bi­ographique. On con­naît le mot de Flaubert : « Madame Bovary, c’est moi. »

François May­er n’échappe évidem­ment pas à la règle, et si son pre­mier ouvrage La Digue de sable était ouverte­ment un réc­it, Alain Berthi­er, le per­son­nage cen­tral et nar­ra­teur de son nou­veau roman Blues en si bémol, quoi qu’il s’en défende, c’est lui !

Le roman se situe dans l’immédiat après-guerre. Comme May­er, Alain Berthi­er, issu d’une famille bour­geoise, entre dans l’industrie à sa sor­tie de l’X et, par­al­lèle­ment, joue du cor­net dans des ensem­bles de jazz. Et il va décou­vrir en même temps les arcanes, les chausse-trappes et les joies de la vie en entre­prise, et ceux, plus com­plex­es encore, du com­merce des femmes. Mais cette descrip­tion lap­idaire ne saurait ren­dre compte d’un livre beau­coup plus ambitieux. Blues en si bémol est le réc­it d’une ini­ti­a­tion, d’un pas­sage de la vie sim­ple et claire au monde réel, qui entremêle en un con­tre­point exigeant et sub­til les manip­u­la­tions dont un jeune X est l’objet dans un groupe indus­triel, l’insertion d’un musi­cien ama­teur par­mi des musi­ciens pro­fes­sion­nels et le chem­ine­ment amoureux d’un garçon qui ne peut se résoudre à alién­er sa liberté.

Écrit dans un style vif, con­cis et qui pétille d’intelligence, Blues en si bémol, dont le sous-titre Paris-Lyon-Méditer­ranée résume par ailleurs le déroule­ment géo­graphique du réc­it, se lit d’une traite et avec un plaisir sans mélange. À recom­man­der sans réserve à ceux qui atten­dent d’un roman, au-delà du petit bon­heur d’une his­toire bien écrite et bien con­duite avec des per­son­nages com­plex­es, la décou­verte d’un milieu, ici celui de l’industrie de la fin des années 40, qui ne le cède en rien, par sa dureté et ses faux-sem­blants, à celui des polars améri­cains de la même époque.

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