Automobile connectée : les défis de la coopération compétitive

Dossier : Dossier FFEMagazine N°717 Septembre 2016
Par Laurent JULIA (88)

Les poten­tial­ités de ser­vices à valeur ajoutée per­mis par la con­nex­ion des auto­mo­biles au réseau inter­net sont très nom­breuses, dont par exemple : 

  • L’alerte automa­tique des unités d’intervention médi­cale en cas d’accident ;
  • Des flux audio, vidéo ou jeux à télécharg­er tout en roulant ; 
  • L’assistance à la nav­i­ga­tion dans les encom­bre­ments, la local­i­sa­tion du véhicule, les diag­nos­tics au tra­vers d’une inter­face smartphone… 

Pour les con­struc­teurs auto, faisant face à des acteurs comme Google, ces ser­vices posent cepen­dant un dilemme stratégique : s’allier pour obtenir une masse cri­tique, mais per­dre une par­tie de leur dif­féren­ci­a­tion, ou bien ris­quer de se faire in fine reléguer à la four­ni­ture de « dri­vers » par des tiers dévelop­pant les services. 

Google a d’ailleurs investi ce ter­rain de jeu avec l’Open Auto­mo­tive Alliance, fondée en jan­vi­er 2014, et regroupant quelques con­struc­teurs auto (dont GM et Hyundai pour les plus gros). Son ambi­tion est de per­me­t­tre aux smart­phones équipés d’Android, d’interagir au mieux avec les élé­ments de hard­ware spé­ci­fiques à l’automobile :

  • La com­mande vocale, point de pas­sage incon­tourn­able de l’interface conducteur-machine ; 
  • L’afficheur embar­qué, ali­men­té par le sys­tème élec­trique auto ; 
  • Et surtout le bus de diag­nos­tic embar­qué (OBD) lui-même relié à l’ensemble des sys­tèmes de con­duite et de diag­nos­tic des organes de la voiture. 

Out­re son savoir-faire et ses moyens, Google dis­pose d’un avan­tage majeur : la qua­si-uni­ver­sal­ité de son OS, équipant env­i­ron 70 % du marché des smart­phones. Grâce à cela, il béné­fi­cie d’un avan­tage de coûts pour l’interface util­isa­teur, en par­ti­c­uli­er la com­mande vocale, et d’un avan­tage de coûts et d’évolutivité pour la plate­forme de cal­cul, par rap­port à une solu­tion sans smartphone. 

Une réponse alter­na­tive des con­struc­teurs pour­rait être la mise au point d’interfaces de pro­gram­ma­tion (API) stan­dard­is­ées entre véhicules, sur lesquelles pour­raient s’appuyer des logi­ciels de ser­vice à valeur ajoutée afin d’accéder de façon uni­verselle aux don­nées du véhicule. 

Bien définir ces API néces­site de s’aligner préal­able­ment sur les prin­ci­paux cas d’usage (ex. : détec­tion de col­li­sion, opti­mi­sa­tion de la con­som­ma­tion car­bu­rant, main­te­nance pré­dic­tive de pannes ou d’usure…). Une coopéra­tion effi­cace per­me­t­trait aux con­struc­teurs regroupés en « pool » de pilot­er l’intégration des ser­vices dévelop­pés par des sociétés tierces, en mode « win-win » : i.e. pro­priété intel­lectuelle con­tre accès à une masse cri­tique de flotte. 

Elle con­stituerait égale­ment un levi­er de négo­ci­a­tion utile, pour sécuris­er ces coopéra­tions externes, très coû­teuses via acqui­si­tions. (cf. GM qui dépense 1B$ pour « Cruise automa­tion » société de 3 ans d’existence).

Il y a donc bien une voie stratégique de « coopéra­tion com­péti­tive » à explor­er pour la voiture con­nec­tée dans ses dimen­sions busi­ness, légales, et organisationnelles. 

L’enjeu : rester au con­trôle des grandes inno­va­tions à forte valeur d’usage et de leur béné­fice en ter­mes de prix et de gammes.

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