Tableau des NOUVEAUX MODÈLES D’ENTREPRISE B2B

Au-delà des places de marché : les nouveaux modèles B2B sur Internet

Dossier : Les services aux entreprisesMagazine N°558 Octobre 2000
Par Georges VIALLE (71)
Par Paul de LEUSSE (92)

Après le B2C, le nouvel Eldorado du B2B

Après le B2C, le nouvel Eldorado du B2B

Le com­merce élec­tron­ique entre entre­pris­es, dit ” Busi­ness to Busi­ness ” ou B2B ou B to B, fait fig­ure de nou­v­el Eldo­ra­do. Les poten­tial­ités offertes par Inter­net en ter­mes d’au­toma­ti­sa­tion des trans­ac­tions, d’élar­gisse­ment des offres ou encore de réduc­tion des coûts de trans­ac­tion sont en effet con­sid­érables. Le B2B sem­blait pou­voir devenir plus rapi­de­ment prof­itable que le com­merce élec­tron­ique vers le client final, ” Busi­ness to Con­sumer ” ou B2C. Au-delà de l’en­t­hou­si­asme ini­tial, nous dres­sons ici un pre­mier bilan des ini­tia­tives B2B et présen­tons des pistes de réflex­ion prometteuses.

Le succès mitigé des premières places de marché

Des cen­taines d’en­tre­pris­es se sont lancées dans la mise en place d’of­fres Inter­net B2B afin de créer de la valeur en rap­prochant acheteurs et vendeurs. Elles appor­tent du con­tenu et de l’in­for­ma­tion et per­me­t­tent d’amélior­er la liq­uid­ité des marchés et de réduire les coûts de transaction.

Les sites hor­i­zon­taux ser­vent de nom­breux secteurs d’ac­tiv­ité sur des thèmes trans­vers­es tels que les four­ni­tures de bureau, les voy­ages d’af­faires, la pub­lic­ité ou la logis­tique. GoIndustry.com est un exem­ple de site hor­i­zon­tal européen posi­tion­né sur la vente de sur­plus et de matériel d’occasion.

Les sites ver­ti­caux, quant à eux, ser­vent l’ensem­ble des besoins d’un secteur d’ac­tiv­ité pré­cis. Récem­ment, ce mod­èle a con­nu un suc­cès impor­tant auprès d’in­dus­tries tra­di­tion­nelles telles que la chimie, la sidérurgie ou le papier.

Un pre­mier bilan con­traste sin­gulière­ment avec l’en­t­hou­si­asme ini­tial. Sur la plu­part des places de marché, les trans­ac­tions restent peu nom­breuses, le chiffre d’af­faires est mod­este tan­dis que les con­cur­rents se mul­ti­plient. Ain­si dans le domaine du matériel indus­triel d’oc­ca­sion, une lutte acharnée oppose des dizaines de sites d’échanges qui ten­tent de se dif­férenci­er et d’at­tein­dre un vol­ume suff­isant pour faire fig­ure de leader.

Les déboires actuels des sites de com­merce élec­tron­ique B2B de pre­mière généra­tion s’ex­pliquent par trois raisons :

1. Une sur­val­ori­sa­tion de la recherche du prix min­i­mum. Les sites actuels se con­tentent sou­vent de rechercher à min­imiser le prix pour l’a­cheteur. Or, pour les entre­pris­es, le prix ne con­stitue sou­vent qu’un des paramètres de la valeur glob­ale qu’elles cherchent à opti­miser. Leurs exi­gences en ter­mes de qual­ité, de respect du cahi­er des charges ou des délais de livrai­son et leur souci d’op­ti­mi­sa­tion de la chaîne de pro­duc­tion sont des paramètres essen­tiels de la prise de déci­sion et impliquent une col­lab­o­ra­tion étroite avec les fournisseurs.

2. Une focal­i­sa­tion sur l’a­cheteur au détri­ment des four­nisseurs. Alors que la réus­site d’un site d’échanges repose autant sur la présence d’a­cheteurs que sur celle de vendeurs, les places de marché actuelles sont avant tout tournées vers les acheteurs. La per­spec­tive d’ac­céder à un plus grand nom­bre d’a­cheteurs sans aug­menter con­sid­érable­ment ses coûts mar­ket­ing est insuff­isante pour attir­er les four­nisseurs qui y voient surtout le risque d’ex­ac­er­ba­tion de la con­cur­rence et de banal­i­sa­tion de leurs produits.

3. Une absence de bar­rières à l’en­trée. L’ex­is­tence de tech­nolo­gies stan­dard­is­ées per­me­t­tant la créa­tion de places de marché favorise la mul­ti­pli­ca­tion des con­cur­rents. Ini­tiale­ment ces tech­nolo­gies offraient un atout de mise en place rapi­de, impor­tant sur Inter­net. Toute­fois cette facil­ité a entraîné des mis­es en place hâtives sans effort de dif­féren­ci­a­tion et s’est traduite non seule­ment par des pertes sig­ni­fica­tives pour la plu­part de ces sites mais par un retour à la frag­men­ta­tion du marché qu’ils étaient juste­ment cen­sés abolir.

Une nouvelle génération de modèles B2B

Une nou­velle généra­tion de sites B2B est en train d’émerg­er. Ces mod­èles gag­nants se dis­tinguent par leur capac­ité à créer une réelle valeur ajoutée pour leurs clients. Nous avons iden­ti­fié cinq busi­ness designs par­ti­c­ulière­ment prometteurs :

1. La méga-place de marché. Le con­cept de méga-place de marché con­sti­tué par les grandes entre­pris­es du secteur répond aux trois obsta­cles décrits précédem­ment. Ces sites met­tent l’ac­cent sur la coopéra­tion entre acheteurs et four­nisseurs plutôt que sur des rela­tions stricte­ment fondées sur les prix. La taille cri­tique est rapi­de­ment atteinte grâce à l’as­so­ci­a­tion des prin­ci­paux acteurs du secteur et les pro­tège de nou­veaux entrants.

L’émer­gence de ces méga-places de marché s’ob­serve avant tout dans des secteurs con­cen­trés. Cer­tains sites sont con­trôlés par les acheteurs (GM, Ford, Daim­ler-Chrysler, Renault-Nis­san avec Cov­isint dans l’au­to­mo­bile, Sears, Car­refour, Sains­bury et Metro avec Glob­al­NetX­change dans la dis­tri­b­u­tion). D’autres sont mis en place par les four­nisseurs (Met­al­Site dans la sidérurgie, le pro­jet de plate-forme équipemen­tière annon­cé par Valeo, Dana, Del­phi, TRW, Motoro­la et Eaton).

Ces méga-marchés risquent cepen­dant de béné­fici­er surtout aux petits acteurs qui auront ain­si accès à de sub­stantielles économies d’échelle. Ils ne créeront pas d’a­van­tages com­péti­tifs entre les grands acteurs.

2. L’of­fre de solu­tions inté­grées. Si les sites de pre­mière généra­tion sont axés sur les prix, les sites ori­en­tés solu­tions pren­nent en compte une approche plus glob­ale de l’ac­tiv­ité de leurs clients et se ser­vent d’In­ter­net pour com­bin­er leurs pro­duits avec des infor­ma­tions et ser­vices com­plé­men­taires. Une telle com­bi­nai­son per­met notam­ment d’of­frir aux PME des pro­duits et ser­vices jusqu’alors réservés aux grandes entreprises.

Ce mod­èle est appelé à se dévelop­per dans les secteurs où le pro­duit s’in­tè­gre dans une prob­lé­ma­tique élargie pour le client. Dans le secteur des machines-out­ils, Milpro.com guide les petits ate­liers de fab­ri­ca­tion mécanique pour iden­ti­fi­er la source d’in­ci­dents et débouche ensuite sur l’of­fre d’un pro­duit adap­té. Legrand.fr, le site du spé­cial­iste français de l’ap­pareil­lage élec­trique Legrand, per­met aux com­merçants de pré­par­er leur pro­jet de réno­va­tion élec­trique en allant jusqu’à la créa­tion d’un dossier pour l’ar­chi­tecte, tout en leur pré­con­isant les pro­duits de la marque.

3. L’op­ti­mi­sa­tion d’ac­t­ifs. La plu­part des sites B2B sont perçus comme une réelle men­ace pour les four­nisseurs quand ils appar­ti­en­nent à des secteurs frag­men­tés et sont con­fron­tés à des acheteurs con­cen­trés. De nou­veaux sites les aident à max­imiser l’u­til­i­sa­tion de leurs act­ifs, que ce soient les usines, les camions, les entre­pôts ou les con­teneurs mar­itimes. Les par­tic­i­pants y échangent des capac­ités plutôt que de se con­cur­rencer sur des appels d’of­fres. Le sys­tème prof­ite donc à l’ensem­ble des four­nisseurs tout en amélio­rant la source d’ap­pro­vi­sion­nement des acheteurs.

Ce mod­èle est par­ti­c­ulière­ment adap­té pour les petits four­nisseurs sans cou­ver­ture géo­graphique ou com­mer­ciale suff­isante. Aux États-Unis, dans le secteur du trans­port routi­er, Trans­portal Net­work utilise Inter­net pour pro­gram­mer les déplace­ments de camions dans leur ensem­ble, per­me­t­tant ain­si aux acteurs les plus mod­estes d’obtenir les gains d’ef­fi­cac­ité tra­di­tion­nelle­ment réservés aux plus grands.

4. Les hubs de com­mu­ni­ca­tion. Dans de nom­breux secteurs, la livrai­son d’un pro­duit ou d’un ser­vice au con­som­ma­teur final asso­cie de nom­breux acteurs autour de plusieurs événe­ments. Des plates-formes élec­tron­iques favorisant une meilleure com­mu­ni­ca­tion entre les entre­pris­es par­tic­i­pant à la chaîne de valeur peu­vent avoir un impact con­sid­érable en don­nant accès à un ensem­ble de don­nées clés.

Ce mod­èle devrait s’im­pos­er dans les secteurs frag­men­tés dont les chaînes logis­tiques sont com­plex­es. Dans le bâti­ment, Bidcom.com alloue un site web dis­tinct à chaque pro­jet pour per­me­t­tre à tous les acteurs de véri­fi­er les plans et com­man­des, d’ap­porter des mod­i­fi­ca­tions aux cahiers des charges et de s’ac­corder sur les dates de livrai­son. Dans le secteur de la san­té, Healtheon/CareInsite relie les médecins, lab­o­ra­toires, phar­ma­cies et assureurs. Il vise à amélior­er le suivi des dossiers, sim­pli­fi­er l’achat de four­ni­tures et assis­ter les médecins grâce à l’analyse en ligne.

5. La per­son­nal­i­sa­tion de l’of­fre par les tableaux de choix. L’ap­pari­tion d’un sys­tème inter­ac­t­if en ligne, le ” tableau de choix “, qui per­met à chaque client de con­fig­ur­er son pro­duit à par­tir d’un menu dynamique de car­ac­téris­tiques (com­posants, prix, options de livrai­son…), révo­lu­tionne les rela­tions clients/fournisseurs. Celui de Cis­co per­met aux clients pro­fes­sion­nels de con­fig­ur­er et com­man­der un rou­teur (net­work router) en sélec­tion­nant les élé­ments désirés à par­tir d’un menu d’options.

Par l’of­fre sur mesure qu’il pro­pose, le tableau de choix men­ace l’ex­is­tence même des sites d’échanges B2B de pre­mière généra­tion. En effet, il se pose en alter­na­tive à la var­iété de pro­duits qu’ils offrent et rend dif­fi­cile la com­para­i­son des prix lors de l’achat.

De plus, le four­nisseur obtient ain­si des infor­ma­tions uniques sur chaque client : Dell Com­put­er con­naît mieux le com­porte­ment des acheteurs que n’im­porte quel fab­ri­cant traditionnel.

Les cinq busi­ness designs résumés dans le sché­ma ci-dessus dépassent la sim­ple notion de place de marché et offrent des approches créa­tri­ces de valeur. La com­bi­nai­son d’élé­ments tirés de plusieurs d’en­tre eux per­me­t­tra de con­cevoir les mod­èles gag­nants de demain qui sauront garan­tir un intérêt mutuel des par­ties et tir­er prof­it de la capac­ité d’in­té­gra­tion de la sup­ply-chain qu’of­fre Internet.

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ROBERTrépondre
31 août 2016 à 15 h 17 min

Au-delà des places de marché : Nou­veaux mod­èles B to B
INTERESSANT

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