Un élève polytechnicien en stage militaire

Accompagner les élèves et les faire grandir

Dossier : Formation humaine et militaire à l’XMagazine N°708 Octobre 2015
Par Luc LEMONNIER

En stage civil, dès qu’il a reçu son affec­ta­tion, chaque élève prend contact avec l’organisme d’accueil. Paral­lè­le­ment, le BOE (Bureau orga­ni­sa­tion études) adresse à tous les orga­nismes par­te­naires, civils et mili­taires, des infor­ma­tions sur les élèves qu’ils vont accueillir.

“ Tout se fait en confiance et dans l’intérêt des élèves ”

Les élèves, durant leur stage, sont à com­plète dis­po­si­tion du par­te­naire. L’École ne demande pas de contact régu­lier, sauf en cas de pro­blème. Une élève était très mal logée : nous avons contac­té l’organisme, qui a rec­ti­fié le tir.

Un autre ne trou­vait pas d’intérêt à son stage d’enseignement. Le lycée a bien vou­lu mettre un terme à ce stage, et un autre par­te­naire asso­cia­tif a accep­té le nou­vel arrivant.

Tout se fait en confiance et dans l’intérêt des élèves.

REPÈRES

Au terme de leur stage, les élèves rédigent un rapport de stage qu’ils présentent devant un jury formé d’un binôme cadre militaire et ancien X civil bénévole. Cette démarche est pour eux une première hors du milieu scolaire. Les élèves répondent également à un questionnaire ; la synthèse des réponses permet à l’École de prendre la mesure de la pertinence des stages et d’affiner l’organisation de l’année suivante via un processus de retour d’expérience bien rodé.

Un partenariat gagnant-gagnant

Les stages mili­taires com­mencent par une for­ma­tion en école d’officiers de l’une des armées : Terre, Air, Marine, Gen­dar­me­rie et Sapeurs-pompiers.

D’octobre à décembre, le com­man­dant de pro­mo­tion, accom­pa­gné ou non du chef de corps, direc­teur de la FHM, visite ces écoles. Des tables rondes per­mettent de « prendre la température ».

DÉSERTEUR INVOLONTAIRE

Dans le cadre militaire, un élève a « déserté » malgré lui. En vue d’un départ en opération, le régiment lui a demandé divers papiers administratifs pour son départ, et sans rien dire à personne il est rentré chez lui pour les récupérer. J’ai appelé l’élève qui s’est expliqué, et je l’ai remis sur le bon chemin.

Le com­man­dant de pro­mo­tion se laisse un peu plus de temps pour les orga­nismes civils : les visites com­mencent début décembre. On ren­contre le par­te­naire, on constate sur le ter­rain l’adéquation du stage avec sa description.

Autre inté­rêt : à cette occa­sion, l’élève fait un petit rap­port d’étape oral. Il est dif­fi­cile de voir tous les par­te­naires civils. Une struc­ture visi­tée une année n’est pas for­cé­ment revue l’année sui­vante. Cer­tains orga­nismes ayant plu­sieurs implan­ta­tions, la DFHM alterne les sites.

Nous essayons de visi­ter tous nos nou­veaux par­te­naires pour leur mon­trer l’intérêt que nous leur por­tons, pour voir si les élèves sta­giaires cor­res­pondent à leurs attentes et si le stage cor­res­pond à l’attente de l’élève. Les deux par­ties doivent se sen­tir gagnantes dans cet échange.

Tutorat

L’École demande au tuteur de rece­voir l’élève au début du stage pour lui expli­quer ce qu’on attend de lui. Il serait sou­hai­table qu’il le voie aus­si à mi-par­cours, pour échan­ger sur leurs impres­sions réci­proques – mais cela n’a pas tou­jours lieu.

À la fin du stage, le tuteur rem­plit une feuille d’évaluation avec une note manus­crite nous per­met­tant de juger, au retour des élèves, com­ment leur stage a été vécu et ressenti.

Rapports de stage

Ins­truc­tions et conseils concer­nant le rap­port figurent dans le livret remis aux élèves à La Cour­tine, avec des témoi­gnages d’élèves de pro­mo­tions pré­cé­dentes, un exemple de plan, et ce que l’on attend d’eux à la sou­te­nance, avec une grille de nota­tion. Deux mois avant la fin du stage, un cour­riel à toute la pro­mo­tion rap­pelle ces dispositions.

Le rap­port, en géné­ral, est atten­du dans le cou­rant de la pre­mière semaine du retour. Avant d’entamer le cycle de sou­te­nances, le jury mène tout un tra­vail de pré­pa­ra­tion. De plus, les entre­tiens doivent débu­ter assez vite car les élèves auront bien­tôt d’autres pro­jets aca­dé­miques à mener.

Soutenances

Les élèves, durant leur stage, sont à com­plète dis­po­si­tion du partenaire.

Cer­tains capi­taines, com­man­dants d’unité, quittent l’École en juillet, d’autres res­tent au-delà de l’été, ou plus. Ceux qui res­tent com­mencent les sou­te­nances en géné­ral un mois après les retours de stage.

Pour ceux qui partent l’été, ce sont leurs suc­ces­seurs qui se chargent en sep­tembre des sou­te­nances, ce qui leur per­met de décou­vrir les élèves. Les sou­te­nances se ter­minent fin décembre-début jan­vier afin de pou­voir com­mu­ni­quer les notes à la direc­tion des études.

L’évaluation

Le dérou­le­ment de la sou­te­nance per­met d’apprécier qui a tiré le meilleur de cette expé­rience de vie, mais aus­si qui est pas­sé à côté. Un élève a pro­duit une des­crip­tion très scien­ti­fique de ce qu’il avait fait, mais n’a pas su en décrire la par­tie humaine.

Très sco­laire, il n’a pas vu ce que le stage lui avait appor­té dans ses rela­tions avec les sous-offi­ciers, avec ses supé­rieurs. Il l’a réa­li­sé à la fin de sa soutenance.

Toutes les situa­tions ne rentrent pas dans la grille de nota­tion, aus­si la consti­tu­tion du jury est-elle inté­res­sante : le binôme cadre mili­taire-ancien X civil apporte un double éclai­rage, recher­ché par la direc­tion de la FHM.

Cha­cun de nous éva­lue avec sa part de sub­jec­ti­vi­té. Même si le coef­fi­cient de la note n’est pas très éle­vé, elle entre dans le clas­se­ment final.

Retour d’expérience

À la fin du stage, les élèves reçoivent un ques­tion­naire qui leur donne la pos­si­bi­li­té de faire des com­men­taires et per­met au com­man­dant de pro­mo­tion de rédi­ger un rap­port de stage au direc­teur géné­ral de l’École.

“ Les deux parties doivent se sentir gagnantes dans l’échange ”

Ce rap­port, qui donne la répar­ti­tion détaillée des stages (ensei­gne­ment, asso­cia­tions, armées, etc.) avec une syn­thèse des obser­va­tions effec­tuées, four­nit un « retour d’expérience » très pré­cieux car il per­met d’en tirer des effets concrets pour l’année suivante.

Ain­si, cer­tains stages mili­taires, inté­res­sants pour la struc­ture d’accueil, n’apportent guère de béné­fice en termes de for­ma­tion humaine. Le BOE expose ces retours d’expérience aux orga­nismes par­te­naires : les objec­tifs sont alors redé­fi­nis pour l’année suivante.

Naissance d’une promotion

PETITS-DÉJEUNERS POLYTECHNICIENS

Le directeur général de l’École organise des petits-déjeuners avec des groupes d’une dizaine d’élèves : Air, Marine, associations, etc. Les élèves, à l’École depuis un ou deux mois, ont souvent une liberté de parole plus affirmée que lorsqu’ils ont rempli le questionnaire de fin de stage. Cela enrichit à nouveau le retour d’expérience.

Le recul donne deux visions du poly­tech­ni­cien : à l’incorporation en sep­tembre, che­veux ton­dus, ché­tif, timide, yeux grands ouverts. Et six mois après, au pre­mier amphi d’avril, des gaillards, mieux dans leur peau. Ce ne sont plus les mêmes, ils sont pas­sés à autre chose. Plus sou­riants, plus à l’aise dans les dis­cus­sions, ils n’évitent plus les cadres mili­taires. Ils ont gagné en maturité.

On sent aus­si que les stages ont sou­dé les élèves. Les « Ter­riens » se réunissent, la « Légion » fait un petit dîner de groupe, les « Pom­piers » de même, etc. Ils se retrouvent « anciens », devant décrire leurs stages aux futurs nouveaux.

Mal­gré leurs ori­gines dif­fé­rentes, ils deviennent les élèves d’une pro­mo­tion de l’École polytechnique.

Propos recueillis par Gérard Cohen (70)

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