Une mutuelle dans l’air du temps

Dossier : Vie des entreprises - AssurancesMagazine N°793 Mars 2024Par Christian Pasquetti

À la croi­sée d’évolutions régle­men­taires et socié­tales struc­tu­rantes qui redes­sinent son modèle opé­ra­tion­nel et orga­ni­sa­tion­nel, la Mgé­fi pour­suit son déve­lop­pe­ment sans perdre de vue son ADN mutua­liste et sa volon­té d’apporter à ses adhé­rents les meilleurs ser­vices et offres pos­sibles. Chris­tian Pas­quet­ti, direc­teur géné­ral de la Mgé­fi, nous en dit plus et nous explique com­ment son entre­prise se réin­vente pour être plus que jamais au ren­dez-vous de ces chan­ge­ments forts.

Dans le paysage mutualiste de la santé et de la protection sociale, qu’est ce que la Mgéfi et comment vous positionnez-vous ?

La Mgé­fi est une mutuelle qui a été créée en 2007 à la suite de la fusion de plu­sieurs mutuelles qui évo­luaient dans l’environnement du minis­tère de l’Économie et des finances. C’est ain­si une mutuelle dite affi­ni­taire. À l’origine, la Mgé­fi ser­vait essen­tiel­le­ment les fonc­tion­naires d’État. Depuis son péri­mètre d’action s’est élar­gi et elle sert aujourd’hui toutes les caté­go­ries de fonc­tion­naires, ain­si que les per­son­nels des éta­blis­se­ments publics et des struc­tures en lien avec le minis­tère de l’Économie et des finances.
À fin sep­tembre 2023, la Mgé­fi assu­rait plus de 300 000 per­sonnes pour un chiffre d’affaires de l’ordre de 270 mil­lions d’euros. Mutuelle de réfé­rence dans la fonc­tion publique, la Mgé­fi est, par ailleurs, affi­liée au groupe Mat­mut depuis le 1er jan­vier 2023.

Votre actualité est marquée par la PSC. Pouvez-vous nous rappeler le contexte autour de cette évolution réglementaire ?

La Pro­tec­tion sociale com­plé­men­taire des agents publics est une grande réforme qui a été lan­cée en 2021. Avec cette réforme, l’idée est de com­pen­ser une dif­fé­rence qui existe entre les agents publics et les sala­riés de droit pri­vé, dont les employeurs prennent en charge la coti­sa­tion à la com­plé­men­taire santé.
Au niveau des col­lec­ti­vi­tés ter­ri­to­riales, il y a des dis­po­si­tifs, comme la label­li­sa­tion, qui per­mettent d’aider l’agent dans le paie­ment de sa coti­sa­tion via une contri­bu­tion de la col­lec­ti­vi­té. Mais, on ne retrouve pas cette typo­lo­gie de dis­po­si­tifs au niveau de la fonc­tion publique d’État, et tout l’enjeu de cette réforme est jus­te­ment de faire par­ti­ci­per l’État à la prise en charge de com­plé­men­taire san­té des agents publics à hau­teur de 50 % du coût.
Depuis, la réforme qui pré­voit un volet san­té et pré­voyance, se met pro­gres­si­ve­ment en place avec, tout d’abord, la par­ti­ci­pa­tion for­fai­taire de l’employeur aux coti­sa­tions san­té des agents publics de l’État, puis l’obligation pour ces der­niers, dès le 1er jan­vier 2025, d’adhérer à un contrat san­té obli­ga­toire via leur employeur.
En matière de pré­voyance, les dis­cus­sions au niveau de chaque minis­tère sont en encore en cours en ce qui concerne le mon­tant de la contri­bu­tion, mais aus­si de la nature du contrat qui pour­rait être un contrat col­lec­tif à adhé­sion facultative…
La PSC va venir rem­pla­cer un sys­tème construit autour des mutuelles de la fonc­tion publique. Cette évo­lu­tion implique éga­le­ment des chan­ge­ments de rela­tion, car la PSC intro­duit une logique de mar­ché public pour choi­sir les opé­ra­teurs qui seront demain les ges­tion­naires et les assu­reurs de ces contrats. Ces appels d’offres sont pré­vus en 2024 et 2025 avec un pro­ces­sus qui va se pour­suivre jusqu’en 2026.
Au-delà, la garan­tie sta­tu­taire évo­lue aus­si puisqu’il y a un enga­ge­ment de l’État employeur qui va doré­na­vant por­ter une par­tie plus impor­tante du risque, notam­ment en cas de décès, d’invalidité…

Comment la Mgéfi appréhende ces évolutions majeures et structurantes ?

Si notre cœur de métier reste le même, les moda­li­tés de ges­tion des contrats qui sont induits par la PSC entraînent des chan­ge­ments de pro­ces­sus opé­ra­tion­nels ain­si que l’adaptation de nos outils. En effet, nous pas­sons en quelque sorte d’un mode de fonc­tion­ne­ment en « BtoC » à une orga­ni­sa­tion « BtoBtoC ».
Dans le sec­teur pri­vé, les contrats d’assurance san­té des sala­riés sont gérés, d’abord, par la fonc­tion RH, puis par un assu­reur et un ges­tion­naire. Dans la sphère publique, avant la mise en place de la PSC, les mutuelles comme la Mgé­fi trai­taient direc­te­ment avec leurs adhé­rents. Demain, nous allons devoir nous caler sur le modèle des entre­prises pri­vées avec le pas­sage d’une rela­tion indi­vi­duelle à une rela­tion col­lec­tive cen­tra­li­sée par les RH.
Cette évo­lu­tion struc­tu­rante a, d’ailleurs, été prise en compte par notre plan stra­té­gique Magel­lan afin d’accompagner notre tran­si­tion d’une mutuelle affi­ni­taire à une mutuelle qui pro­pose ses ser­vices, ses cou­ver­tures et ses garan­ties à toute la fonc­tion publique, de manière plus large. Aujourd’hui, la Mgé­fi est, en effet, légi­time pour ser­vir d’autres popu­la­tions minis­té­rielles et fonc­tions publiques que son cœur de cible historique.
Dès 2023, nous avons lan­cé Vic­Ter­ria San­té, une offre des­ti­née à la fonc­tion publique ter­ri­to­riale et dis­tri­buée par nos dif­fé­rents réseaux phy­siques, Mgé­fi et Mat­mut, et digi­taux. Dans ce cadre, nous capi­ta­li­sons d’ailleurs, sur les moyens, notam­ment de dis­tri­bu­tion, de la Mat­mut avec ses 480 agences.

La digitalisation, le développement de la QVTC, les transitions et les crises redessinent les contours de votre secteur. Comment intégrez-vous ces évolutions structurantes ? Comment cela se traduit-il concrètement ?

Nous avons signi­fi­ca­ti­ve­ment inves­ti dans notre trans­for­ma­tion digi­tale et infor­ma­tique, envi­ron 4 % de notre chiffre d’affaires chaque année depuis cinq ans. Ces inves­tis­se­ments consé­quents visent éga­le­ment à adap­ter nos outils dans un contexte régle­men­taire qui a été par­ti­cu­liè­re­ment évo­lu­tif au cours des der­nières années (100 % San­té, RGDP, DDA…).
Au cours des cinq der­nières années, nous avons ain­si chan­gé inté­gra­le­ment nos sys­tèmes d’information et adop­té le CRM Sales­force qui est une réfé­rence sur le mar­ché en matière d’amélioration de la rela­tion client. En 2022, nous avons aus­si déployé un logi­ciel de ges­tion ouvert sur son envi­ron­ne­ment et inter­opé­rable par API (inter­conn­ce­tions entre logi­ciels et ser­vices). Depuis 2018, nous avons ain­si inves­ti près de 20 mil­lions d’euros.
Aujourd’hui, nous tra­vaillons sur le déve­lop­pe­ment d’une pla­te­forme com­mune avec la Mat­mut pour la ges­tion san­té. C’est un chan­tier qui a été lan­cé en 2023 et qui nous per­met­tra d’avoir un outil indus­triel par­ta­gé qui gère­ra plus de 1,2 mil­lion de per­sonnes pro­té­gées. Ce nou­vel équi­pe­ment nous per­met­tra éga­le­ment de ren­for­cer notre posi­tion­ne­ment sur le marché.
En paral­lèle, l’actualité est aus­si mar­quée par la pres­sion sur les frais de ges­tion. Dans ce cadre, le modèle ver­tueux de la Mgé­fi per­met de maî­tri­ser les aug­men­ta­tions tari­faires. Entre 2017 et 2023, la moyenne des aug­men­ta­tions était de 2 % par an, avec un pic à 3,5 % qui cor­res­pond à l’entrée en vigueur du 100 % san­té. En 2024, nous sommes sur une aug­men­ta­tion de l’ordre de 5 %. Le taux de redis­tri­bu­tion à nos adhé­rents avoi­sine 86 %. Concrè­te­ment, nos frais de ges­tion sont com­pris entre 14 et 16 %, des chiffres par­mi les plus bas en com­pa­rai­son à la moyenne du mar­ché. Et on retrouve là une carac­té­ris­tique forte de la Mgé­fi : offrir à ses adhé­rents des ser­vices et des garan­ties au meilleur coût.

Comment se profile 2024 ? Quels sont, selon vous, les principaux enjeux qui vont ponctuer cette année ?

Nous sommes, bien évi­dem­ment, mobi­li­sés autour des appels d’offres de la réforme PSC. 2024 est, en effet, comme une année char­nière pour la Mgé­fi, le sec­teur et les admi­nis­tra­tions concer­nées. La réus­site de cette évo­lu­tion majeure dépend de l’engagement de l’ensemble des par­ties pre­nantes. Ces appels d’offres repré­sentent un enjeu busi­ness et opé­ra­tion­nel, car il s’agit de mettre en œuvre ces contrats qui ont un for­mat et des moda­li­tés qui sont tota­le­ment nou­veaux aus­si bien pour l’État que les opé­ra­teurs. En paral­lèle, il s’agit aus­si de pour­suivre notre inté­gra­tion opé­ra­tion­nelle avec la Mat­mut afin de mettre au ser­vice de nos adhé­rents les infra­struc­tures et les res­sources de notre groupe.
Au-delà, nous menons actuel­le­ment un impor­tant plan de recru­te­ment afin d’élargir et de ren­for­cer nos com­pé­tences, d’améliorer notre per­for­mance… Face à l’évolution actuelle du mar­ché et la néces­si­té de déve­lop­per notre visi­bi­li­té, nous nous sommes dotés d’une direc­tion de la com­mu­ni­ca­tion et des affaires publiques. Nous avons aus­si créé une direc­tion spé­ci­fique en charge de la pré­ven­tion, des ser­vi­ce­set de la RSE.
La Mgé­fi s’est aus­si lan­cée dans une démarche de cer­ti­fi­ca­tion au tra­vers de la NF345 de l’AFNOR sur la qua­li­té de ser­vice et de la rela­tion client. C’est un pro­jet qui avance très bien, alors que selon les der­niers résul­tats d’une enquête BVA (baro­mètre de satis­fac­tion client) : 90 % de nos adhé­rents se déclarent satis­faits ou très satis­faits de nos services !

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