Un feu de forêt. Parmi les risques climatiques, la direction générale de la prévention des risques, rattachée au pôle ministériel de la Transition Écologique est en charge des risques naturels dont font partie les incendies de forêt

« L’adaptation au changement climatique est aujourd’hui l’affaire de tous »

Dossier : Vie de entreprisesMagazine N°787 Septembre 2023
Par Cédric BOURILLET (X97)

Le chan­ge­ment cli­ma­tique et l’accélération et inten­si­fi­ca­tion des évé­ne­ments et phé­no­mènes natu­rels sou­lèvent de nou­veaux enjeux en matière de ges­tion des risques, notam­ment indus­triels. En paral­lèle, dans la recherche de l’atténuation du réchauf­fe­ment cli­ma­tique, se posent aus­si des ques­tions rele­vant de la tran­si­tion du pays vers l’économie cir­cu­laire ou encore de sa sou­ve­rai­ne­té. La Direc­tion géné­rale de la pré­ven­tion des risques du minis­tère de la Tran­si­tion éco­lo­gique est mobi­li­sée sur l’ensemble de ces sujets et enjeux afin d’accompagner l’ensemble de ces par­ties pre­nantes en faveur d’une meilleure ges­tion des risques. Son direc­teur géné­ral, Cédric Bou­rillet (X97), nous en dit plus.

Présentez-nous votre direction et son périmètre d’action.

La direc­tion géné­rale de la pré­ven­tion des risques est rat­ta­chée au pôle minis­té­riel de la Tran­si­tion Éco­lo­gique. Son action s’articule autour de 4 missions :

  • la pré­ven­tion des risques indus­triels et des pol­lu­tions indus­triels : les risques liés aux émis­sions indus­trielles des usines, des cen­trales nucléaires, au trans­port de matières dan­ge­reuses, aux cana­li­sa­tions, à l’activité minière ;
  • les risques natu­rels : les inon­da­tions, la sub­mer­sion marine, les incen­dies de forêt, les séismes, les ava­lanches, le vol­ca­nisme, les glis­se­ments de terrain ;
  • la san­té envi­ron­ne­ment : les dégra­da­tions de l’environnement qui peuvent impac­ter la san­té humaine (pro­duits chi­miques, qua­li­té de l’air, OGM, bruit, ondes élec­tro­ma­gné­tiques, pol­lu­tions lumineuses…) ; 
  • l’économie cir­cu­laire et la ges­tion des déchets.

Au sein de la direc­tion, nous nous appuyons sur 230 per­sonnes au niveau natio­nal et plus de 3 500 dans les ser­vices décon­cen­trés sur le ter­rain. Nous régle­men­tons et sur­veillons plus de 500 000 ins­tal­la­tions indus­trielles ain­si que 50 000 kilo­mètres de cana­li­sa­tions de trans­port de matières dan­ge­reuses et plu­sieurs cen­taines de mil­liers de kilo­mètres de réseaux de dis­tri­bu­tion de gaz. C’est aus­si 22 opé­ra­teurs de l’État qui inter­viennent en appui de la poli­tique de la DGPR, comme Météo France…

À la tête de cette direction, quelles sont les grandes lignes de votre feuille de route ?

Au cœur de nos prio­ri­tés, on retrouve bien évi­dem­ment l’adaptation au chan­ge­ment cli­ma­tique qui va avoir des impacts sur les risques natu­rels (aggra­va­tion du risque d’incendies de forêt, hausse du niveau de la mer et du risque de sub­mer­sion, séche­resse…) qui entraînent de nou­veaux enjeux en termes de sécu­ri­té pour les popu­la­tions, les équi­pe­ments publics et les entre­prises ; avec une aggra­va­tion pos­sible sous forme d’accident ou de pol­lu­tion pour les indus­triels mani­pu­lant des sub­stances dangereuses.

En paral­lèle, nous sommes mobi­li­sés par la tran­si­tion de la France vers une éco­no­mie cir­cu­laire. Dans ce cadre, nous tra­vaillons notam­ment sur la réduc­tion, voire la sup­pres­sion des gas­pillages mais aus­si de la pol­lu­tion plas­tique. Puis un allon­ge­ment de la durée de vie des objets avant, en fin de vie, un meilleur recy­clage, pour réduire notre empreinte envi­ron­ne­men­tale et ren­for­cer notre sou­ve­rai­ne­té afin de ne pas être dépen­dants de puis­sances étran­gères pour notre appro­vi­sion­ne­ment (par exemple en métaux cri­tiques dont les terres rares). 

Nous pro­té­geons aus­si la san­té des Fran­çais. Nous essayons de pro­mou­voir une meilleure culture du risque et sen­si­bi­li­sa­tion des popu­la­tions en capi­ta­li­sant notam­ment sur des outils digi­taux comme les sites inter­net, les appli­ca­tions mobiles… Par exemple, sur le risque de crues, nous avons lan­cé cette année une appli­ca­tion pour infor­mer et noti­fier aux abon­nés à proxi­mi­té d’un cours d’eau de l’éventuelle mon­tée des eaux. Le 13 octobre 2022, nous avons orga­ni­sé la pre­mière édi­tion de la Jour­née Natio­nale de la Rési­lience pour sen­si­bi­li­ser le grand public aux dif­fé­rents risques et les infor­mer sur les bons gestes à adop­ter si ces risques se concrétisent. 

Revenons sur l’accélération du changement climatique et ses impacts qui ont nettement marqué l’année 2022. Que retenez-vous de cette période ? Quels sont les risques que cette situation a entraînés notamment pour les sites industriels ?

Les incen­dies de forêt sont un des prin­ci­paux risques aux­quels nous avons été confron­tés en 2022. Ils impliquent des risques natu­rels, des enjeux de pro­tec­tion des per­sonnes, des biens et de la bio­di­ver­si­té. Aujourd’hui, ces incen­dies ne touchent plus uni­que­ment le pour­tour médi­ter­ra­néen. C’est tout le ter­ri­toire natio­nal qui est expo­sé. Tou­te­fois, 9 incen­dies sur 10 sont d’origine humaine. Le risque natu­rel d’incendie n’est donc pas une fata­li­té, même si le réchauf­fe­ment cli­ma­tique com­plexi­fie, bien évi­dem­ment, la situa­tion. La sen­si­bi­li­sa­tion et la pro­mo­tion des bonnes pra­tiques res­tent ain­si une prio­ri­té absolue ! 

Les sites indus­triels sont aus­si expo­sés à ce risque. En 2022, lors du grand incen­die de La Teste de Buch, le feu a encer­clé un site de sto­ckage d’hydrocarbures, et, dans le Vau­cluse, le feu a pris sur la végé­ta­tion autour d’un dépôt d’explosifs. Dans ces deux situa­tions, les scé­na­rios avaient été anti­ci­pés et les actions déployées ont été très effi­caces. C’est une confir­ma­tion de la per­ti­nence de notre stra­té­gie et il s’agit donc de l’étendre à l’ensemble du ter­ri­toire natio­nal, tout en cher­chant à l’améliorer encore.

Au-delà, le réchauf­fe­ment cli­ma­tique entraîne aus­si une hausse du niveau de la mer et des sub­mer­sions marines, beau­coup plus vio­lentes que par le pas­sé tan­dis que des débor­de­ments des cours d’eau vont évo­luer par rap­port à ce qu’on connaît à ce jour. C’est un risque pour les popu­la­tions et les sites indus­triels implan­tés dans les zones por­tuaires ou à proxi­mi­té de cours d’eau. L’enjeu est donc de prendre les bonnes dis­po­si­tions pour pro­té­ger l’existant contre ces aléas dont la fré­quence et l’intensité ont voca­tion à évo­luer au cours des pro­chaines années, mais aus­si de repen­ser la loca­li­sa­tion des pro­chaines implan­ta­tions ou bien leur concep­tion pour opti­mi­ser leur résilience. 

En 2023, quels sont les axes prioritaires que vous avez identifiés pour faire face à ce nouveau contexte ?

Pour lut­ter contre les incen­dies de forêt, nous avons mis en place plu­sieurs actions. En avril der­nier, nous avons ain­si dis­tri­bué une pla­quette péda­go­gique d’information et de sen­si­bi­li­sa­tion à plus de 2,3 mil­lions de foyers vivant à proxi­mi­té de forêts. À l’initiative de la Pré­si­dence de la Répu­blique, une météo des forêts est doré­na­vant dis­po­nible sur tous les grands médias, entre début juin et l’automne, afin d’avoir une infor­ma­tion fiable sur le niveau de risque durant cette période pro­pice aux incen­dies de forêt. 

En paral­lèle, nous avons aus­si trans­mis à chaque dépar­te­ment une carte de l’exposition de leur ter­ri­toire à ce risque à une très fine échelle de l’ordre du quar­tier et de la rue. Pour ce faire, nous avons tra­vaillé avec une start-up inno­vante : à par­tir de l’analyse d’images satel­lites, nous sommes, en effet, en mesure de déter­mi­ner où se trouvent les mas­sifs fores­tiers, la den­si­té de leur végé­ta­tion, le cli­mat, l’exposition au soleil… afin de déduire la sen­si­bi­li­té de chaque par­celle à de poten­tiels incendies.

« Nous avons aussi lancé une campagne d’information sur la période estivale pour promouvoir les bons comportements pour éviter de faire débuter un feu. »

Nous avons aus­si lan­cé une cam­pagne d’information sur la période esti­vale pour pro­mou­voir les bons com­por­te­ments pour évi­ter de faire débu­ter un feu, pour se mettre à l’abri, pour pré­ve­nir les pom­piers… La cam­pagne est relayée sur les réseaux sociaux, dans la presse, mais aus­si au tra­vers d’affichages urbains et dans le cadre de nos par­te­na­riats avec de nom­breuses radios.

Au niveau des ins­tal­la­tions indus­trielles, nous avons deux prio­ri­tés : la décar­bo­na­tion et l’atténuation du chan­ge­ment cli­ma­tique. Dans ce cadre, le Gou­ver­ne­ment a lan­cé une pre­mière action prio­ri­taire visant les 50 plus grands sites émet­teurs de gaz à effet de serre ain­si qu’une action de fond pour accom­pa­gner 20 000 TPE et PME dans leurs démarches de décar­bo­na­tion. Nous menons aus­si des actions en matière de sobrié­té sur l’eau. Pour les 50 sites indus­triels les plus consom­ma­teurs d’eau, nous les accom­pa­gnons sur ce volet tout au long de l’année, mais aus­si avec des actions ren­for­cées en période de séche­resse. De la même manière, nous tra­vaillons avec les TPE et les PME afin d’optimiser leur ges­tion de la res­source en eau, notam­ment en période de sécheresse. 

Au-delà des risques que pose le changement climatique, quels sont les autres sujets et enjeux qui mobilisent votre direction ?

Nous avons mis en place un plan d’action en jan­vier der­nier sur les PFAS qui pré­voit des cam­pagnes de mesure afin de réduire leurs émis­sions sur les sites concer­nés. Nous tra­vaillons actuel­le­ment sur une stra­té­gie natio­nale pour les per­tur­ba­teurs endo­cri­niens de troi­sième géné­ra­tion afin de ren­for­cer l’effort de sen­si­bi­li­sa­tion, de recherche, de réduc­tion et de sub­sti­tu­tion au béné­fice des indus­triels. Nous sommes mobi­li­sés en faveur de la réduc­tion de la quan­ti­té totale uti­li­sée des pro­duits phy­to­phar­ma­ceu­tiques, com­mu­né­ment appe­lés les pes­ti­cides agri­coles, ain­si que la sub­sti­tu­tion voire l’interdiction de ceux qui sont trop dan­ge­reux. D’ailleurs, cette année, à un niveau euro­péen, la France doit de nou­veau se pro­non­cer sur l’approbation du gly­pho­sate sur notre continent. 

En matière d’économie cir­cu­laire et de réduc­tion de la pol­lu­tion plas­tique, nous menons des actions à un niveau natio­nal et inter­na­tio­nal. En mai der­nier, par exemple, la France a ain­si accueilli une ses­sion de négo­cia­tion pour l’élaboration d’un trai­té inter­na­tio­nal sur le plas­tique. À une échelle natio­nale, une démarche de concer­ta­tion est en cours pour explo­rer les dif­fé­rentes pistes et alter­na­tives pour évi­ter les pol­lu­tions plas­tiques (inter­dic­tion de cer­tains plas­tiques à usage unique, mise en place de dis­po­si­tifs pour inci­ter à trier et recy­cler comme la consigne,…). Des ini­tia­tives sont prises éga­le­ment pour pro­lon­ger la durée de vie (fonds pour sub­ven­tion­ner les répa­ra­tions pour les par­ti­cu­liers, par exemple).

« Nous avons prévu de réaliser une nouvelle génération de cartes du bruit et de l’exposition au bruit dans les agglomérations et autour des grands axes de transport. » 

Nous tra­vaillons aus­si sur le bruit : nous cher­chons à mieux le tra­cer et le mesu­rer pour prendre en compte les bruits inter­mit­tents, notam­ment liés aux vibra­tions lors du pas­sage des métros ou des trains, dont cer­tains acteurs estiment qu’ils ne sont pas suf­fi­sam­ment repré­sen­tés par nos indi­ca­teurs et nos études d’impact, et donc par les déci­sions poli­tiques à l’heure actuelle. Nous avons aus­si pré­vu de réa­li­ser une nou­velle géné­ra­tion de cartes du bruit et de l’exposition au bruit dans les agglo­mé­ra­tions et autour des grands axes de trans­port afin de rédi­ger des plans d’action adap­tés visant à la réduc­tion de la pol­lu­tion sonore. 

En Outre-Mer, nous avons avan­cé sur les tra­vaux rela­tifs à la pro­tec­tion sis­mique. Dans cette zone par­ti­cu­liè­re­ment expo­sée au risque sis­mique, nous avons eu une forte accé­lé­ra­tion des actions visant à ren­for­cer les bâti­ments exis­tants avec un focus sur les écoles, les centres de ges­tion de crise, les centres hos­pi­ta­liers, les loge­ments col­lec­tifs… Nous cher­chons aus­si à mieux prendre en compte le risque cyclo­nique avec des tra­vaux en cours pour opti­mi­ser la concep­tion para­cy­clo­nique des nou­veaux bâtiments.

Dans cette démarche, qui sont vos principaux partenaires ?

Nous col­la­bo­rons avec un vaste éco­sys­tème de partenaires. 

Nous tra­vaillons avec les acteurs éco­no­miques : le monde indus­triel et agri­cole, les fédé­ra­tions pro­fes­sion­nelles sur le risque indus­triel, par exemple, ou les ques­tions rela­tives aux pro­duits chi­miques et à l’économie circulaire.

Avec les col­lec­ti­vi­tés locales, nous tra­vaillons sur dif­fé­rents sujets : la ges­tion des déchets, l’économie cir­cu­laire, la prise en compte et la pré­ven­tion des risques natu­rels notam­ment en matière d’aménagement…

Nous col­la­bo­rons aus­si avec des asso­cia­tions envi­ron­ne­men­tales dans une démarche de réflexion par­ta­gée, mais aus­si parce qu’elles agissent aus­si en qua­li­té de lan­ceurs d’alerte et de relais pour nos actions de sen­si­bi­li­sa­tion auprès du grand public.

« Nous collaborons avec un vaste écosystème de partenaires. »

Les par­le­men­taires nous sol­li­citent régu­liè­re­ment pour garan­tir la bonne prise en compte d’un cer­tain nombre de dis­po­si­tifs dans les lois. À titre d’exemple, nous avons connu ces der­niers mois des tra­vaux par­le­men­taires sur un phé­no­mène du réchauf­fe­ment cli­ma­tique dont les effets ne sont pas immé­diats, mais qui, à long terme, va géné­rer des dom­mages impor­tants. Il s’agit du phé­no­mène de retrait-gon­fle­ment de l’argile qui est une consé­quence de la séche­resse et se mani­feste par des fis­sures dans les bâti­ments et les habi­ta­tions. Sur ce sujet, de nom­breuses évo­lu­tions sont en cours sur le plan légis­la­tif. Dans ce cadre, nous avons des contacts récur­rents avec les par­le­men­taires pour trou­ver des solu­tions pertinentes. 

Nous échan­geons aus­si régu­liè­re­ment avec les auto­ri­tés euro­péennes. En effet, de nom­breux domaines de com­pé­tence de ma direc­tion géné­rale relèvent de l’Europe. C’est notam­ment le cas du domaine des pro­duits chi­miques, des risques indus­triels, du bruit, des tech­niques géno­miques ou encore des pro­duits phy­to­sa­ni­taires. Au-delà du tra­vail avec les ins­ti­tu­tions euro­péennes, nous avons des échanges bila­té­raux avec nos homo­logues d’autres pays euro­péens qui nous per­mettent de capi­ta­li­ser sur leur retour d’expérience et leurs bonnes pra­tiques pour mieux appré­hen­der ces sujets en France.

Nous tra­vaillons aus­si avec les autres minis­tères et les opé­ra­teurs de l’État qui apportent une exper­tise tech­nique et scientifique.

En paral­lèle, de manière plus ponc­tuelle, nous échan­geons avec des réseaux d’experts, des uni­ver­si­taires, de scien­ti­fiques, ain­si que des agences inter­na­tio­nales d’expertises comme l’OMS.

Qu’en est-il du niveau de maturité de l’ensemble des parties prenantes ? Quels sont les freins qui persistent et les axes d’amélioration que vous avez identifiés ?

Glo­ba­le­ment, nos par­ties pre­nantes sont bien conscientes des enjeux. En matière de chan­ge­ment cli­ma­tique, pour être en mesure d’agir, il y a encore des zones d’ombres scien­ti­fiques qu’il nous faut lever. Par­mi ceux-ci, on peut citer les risques d’origine gla­ciaire et péri­gla­ciaire qui se mani­festent en mon­tagne. Ces risques sont liés au fait que l’isotherme 0°, qui repré­sente l’altitude mini­male à laquelle la tem­pé­ra­ture atteint la valeur de 0° dans une atmo­sphère libre, ne cesse de remon­ter dans les mas­sifs mon­ta­gneux sous l’effet de chan­ge­ment cli­ma­tique. Cette situa­tion peut notam­ment libé­rer des maté­riaux qui étaient liés soli­de­ment entre eux, ou entraî­ner la créa­tion de poches d’eau sous les gla­ciers qui peuvent céder sous la pres­sion de l’eau et pro­vo­quer des vagues meur­trières. C’est un risque qui se pré­sente sous un jour nou­veau, que nous devons étu­dier et mieux com­prendre afin de mieux l’anticiper, le pré­ve­nir et y faire face.

« Avec les collectivités locales, nous devons trouver le meilleur équilibre entre l’adaptation aux risques naturels, d’une part, et la prise en compte des besoins de développement, de modernisation ou d’amélioration du cadre de vie. »

Nous sommes par­fois confron­tés à des diver­gences avec les indus­triels sur le rythme d’adaptation. Ces der­niers, sans contes­ter l’objectif visé, s’inquiètent de la dis­tor­sion de la concur­rence et de leur capa­ci­té à finan­cer les inves­tis­se­ments ren­dus néces­saires par le chan­ge­ment cli­ma­tique. Avec les col­lec­ti­vi­tés locales, nous devons trou­ver le meilleur équi­libre entre la néces­saire adap­ta­tion et pru­dence vis-à-vis des risques natu­rels, d’une part, et la prise en compte, d’autre part, des besoins de déve­lop­pe­ment, de moder­ni­sa­tion ou d’amélioration du cadre de vie dans un contexte mar­qué par les contraintes en termes de zéro arti­fi­cia­li­sa­tion nette des sols.

Sur la ques­tion de l’économie cir­cu­laire et de la ges­tion des déchets, l’enjeu est de se doter d’une stra­té­gie qui nous per­met­tra d’avoir une boucle qui ne consom­me­ra qua­si­ment plus de res­sources et qui per­met­tra de réduire au mini­mum la pol­lu­tion envi­ron­ne­men­tale, et plus par­ti­cu­liè­re­ment plas­tique. Plu­sieurs pistes sont ain­si pos­sibles : miser sur un meilleur ré-emploi, une bonne col­lecte et un bon recy­clage ou bien renon­cer tout sim­ple­ment à ce maté­riau et à ce type d’usage. Ces deux pistes sont por­teuses de béné­fices et de contraintes qui dif­fèrent selon la par­tie pre­nante concer­née. Dans ce cadre, nous avons un rôle d’arbitre à jouer pour faire conver­ger des visions ou des inté­rêts dif­fé­rents, voire opposés.

Quelle place occupe la technologie ? Explorez-vous des pistes en particulier ?

Aux côtés des solu­tions fon­dées sur la nature, la tech­no­lo­gie est une des réponses en matière de pré­ven­tion. Si ce n’est pas la seule solu­tion, la tech­no­lo­gie peut nous aider à amé­lio­rer les pro­ces­sus et les tech­niques indus­triels ou à mieux connaître les risques natu­rels et détec­ter encore plus en amont les phé­no­mènes climatiques.

En matière d’économie cir­cu­laire, nous capi­ta­li­sons sur les nou­velles tech­no­lo­gies pour aller vers plus de recy­clage et moins de refus de tri ce qui per­met­tra de réduire le volume de déchets en décharge ou des­ti­né à l’incinération.

La tech­no­lo­gie nous per­met aus­si de déve­lop­per de nou­veaux usages. Dans le cadre de notre rôle his­to­rique d’alerte et de pro­tec­tion des popu­la­tions contre les risques natu­rels et indus­triels, depuis 2022, le Gou­ver­ne­ment déploie ain­si un nou­vel outil, FR-Alert, qui per­met d’envoyer des SMS géo­lo­ca­li­sés et de déclen­cher à dis­tance une son­ne­rie pour aler­ter les popu­la­tions locales, les indi­vi­dus de pas­sage et même les tou­ristes d’un risque immi­nent et de les tenir infor­més de l’évolution de la situation. 

Enfin, nous avons com­men­cé à uti­li­ser l’intelligence arti­fi­cielle sur des cas d’usages de détec­tion d’activités éco­no­miques illé­gales (phy­siques ou en ligne), de pré­vi­sions des crues… De nom­breux autres pro­jets sont pré­vus tou­jours afin d’augmenter et d’améliorer notre capa­ci­té à pré­ve­nir et gérer ces dif­fé­rents risques. 

Qu’en est-il de la dimension humaine ? Quels sont les profils et les talents et les compétences que vous recherchez pour renforcer vos équipes ?

Pour bien gérer les risques, nous avons besoin de pro­fils diver­si­fiés. En effet, nous avons besoin de pou­voir confron­ter des visions et des approches dif­fé­rentes, mais sou­vent com­plé­men­taires. Dans cette logique, notre poli­tique de recru­te­ment est donc assez diver­si­fiée. En termes de com­pé­tences, nous recru­tons essen­tiel­le­ment des pro­fils tech­niques qui ont une connais­sance des pro­cé­dés, des ter­ri­toires et de l’urbanisme, de la ques­tion de la san­té envi­ron­ne­ment, des sys­tèmes d’information… Nous recru­tons aus­si des pro­fils qui ont une for­ma­tion en socio­lo­gie dans le cadre de notre rôle de sen­si­bi­li­sa­tion du grand public et de l’ensemble de nos par­ties pre­nantes, juri­dique ou qui ont une connais­sance des codes diplo­ma­tiques pour nos échanges avec nos homo­logues euro­péens et internationaux.

Sur ces sujets et enjeux, quelles sont les pistes de réflexion que vous pourriez partager avec nos lecteurs ?

L’adaptation au chan­ge­ment cli­ma­tique est aujourd’hui l’affaire de tous. Cha­cun, à notre place aus­si bien dans le cadre fami­lial, social que pro­fes­sion­nel, devons adop­ter les bons réflexes et la bonne atti­tude pour rendre notre socié­té tou­jours plus résiliente.

À une autre échelle, nous devons faire en sorte que le mou­ve­ment de réin­dus­tria­li­sa­tion de la France sou­hai­té apporte une richesse col­lec­tive au pays tout en limi­tant son impact envi­ron­ne­men­tal. Et, je pense que la com­mu­nau­té poly­tech­ni­cienne qui est très impli­quée sur ces sujets et enjeux peut être d’un très grand appui dans cette démarche ! 

Enfin, la sobrié­té ne doit pas être per­çue comme un dépé­ris­se­ment ou un refus du pro­grès, mais plu­tôt comme une alter­na­tive pour gagner en effi­ca­ci­té, faire les bons choix tech­no­lo­giques, ren­for­cer notre sou­ve­rai­ne­té et déve­lop­per la rési­lience (notam­ment envi­ron­ne­men­tale) de notre territoire. 

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