La Vigie de PREDICT Services : le centre névralgique de gestion 24/7.

Un modèle unique au service de l’adaptation au changement climatique

Dossier : Vie de entreprisesMagazine N°787 Septembre 2023
Par Alix ROUMAGNAC

PREDICT Ser­vices a vu le jour à une époque où le change­ment cli­ma­tique était encore appréhendé comme une men­ace loin­taine. Depuis 17 ans, cette entre­prise citoyenne française tra­vaille sur le risque cli­ma­tique et se mobilise pour en atténuer les effets. Son prési­dent, Alix Rou­ma­gnac revient sur la créa­tion de cette fil­iale de Météo France, Air­bus Defence & Space et BRL, et son posi­tion­nement unique dans le monde entier.

Depuis près de 17 ans, vous observez l’évolution du changement climatique et ses impacts. Quel bilan dressez-vous aujourd’hui ?

En effet, l’entreprise PREDICT Ser­vices est née suite aux impor­tants événe­ments que le sud de la France a con­nu à la fin des années 90 et le début des années 2000. Nous avons com­mencé à tra­vailler sur le con­cept en 2003 et nous avons créé la société en 2006. Depuis, nous suiv­ons jour et nuit tous les événe­ments cli­ma­tiques d’abord en France, puis dans le monde entier.

PREDICT Ser­vices est une fil­iale de Météo France qui apporte son exper­tise dans le domaine météorologique ; Air­bus Defence & Space qui nous apporte son exper­tise dans le domaine spa­tial ; et BRL, qui est spé­cial­isé en hydraulique. En 2006, nous avons démar­ré l’aventure avec 3 per­son­nes avec un focus sur 3 com­munes pilotes. Aujourd’hui, plus de 30 000 com­munes et col­lec­tiv­ités locales français­es béné­fi­cient de nos ser­vices. Nous sommes 35 col­lab­o­ra­teurs. Nous avons noué des parte­nar­i­ats stratégiques avec les prin­ci­paux groupes d’assureurs français et inter­na­tionaux dont Groupa­ma, qui a été notre pre­mier parte­naire, GAN, AXA, Gen­er­ali, Paci­fi­ca… Nous dis­posons des coor­don­nées de plus de 20 mil­lions de foy­ers français et 5 000 entre­pris­es que nous pou­vons alert­er via SMS en cas de risque d’inondation, de tem­pête, de sub­mer­sion marine ou d’incendies de forêt…

à l’heure de l’accélération de la sur­ve­nance des événe­ments cli­ma­tiques extrêmes, il ne faut plus appréhen­der le change­ment cli­ma­tique comme un événe­ment à venir. Ses con­séquences sont une réal­ité : les inon­da­tions de 2018 dans l’Aude, les tem­péra­tures extrêmes dans l’Hérault en 2019, la tem­pête Alex dans les Alpes-Mar­itimes en 2020, ain­si que l’année 2022 qui mar­que un réel point de rup­ture, con­fir­mé par de nou­veaux tristes records dépassés encore en cette année 2023. Il est doré­na­vant urgent de s’adapter ! 

Au cœur de l’entreprise que vous avez créée, on retrouve cette notion de gestion des risques climatiques. Qu’en est-il ? 

PREDICT Ser­vices conçoit des solu­tions inté­grées pour la ges­tion des risques majeurs en France et à l’international. Nos ser­vices com­bi­nent con­cep­tion d’organisations et con­signes préven­tives à un sys­tème d’avertissement et d’aide à la déci­sion pour l’anticipation et la ges­tion des phénomènes à risques. Notre objec­tif est ain­si de con­tribuer à la résilience des ter­ri­toires, des entre­pris­es et des par­ti­c­uliers face aux risques liés aux phénomènes hydrométéorologiques (inon­da­tion, tem­pêtes, fortes chutes de neige, sub­mer­sion marine, canicule, grands froids, cyclone). 

En par­al­lèle, nous pro­posons aus­si des out­ils logi­ciels, des plate­formes web de ges­tion de crise. Dans le cadre de mis­sions d’appuis auprès de ser­vices inter­na­tionaux qui souhait­ent ren­forcer leur dis­posi­tif de ges­tion crise, nous assurons le trans­fert de méthodolo­gies et de technologies.

Nous nous appuyons sur deux cen­tres de veille qui assurent un suivi 24/7 des événe­ments à risques en France avec La Vigie et à l’international avec Le Sémaphore. 

Notre ambi­tion est de dévelop­per une meilleure con­nais­sance des risques afin de mieux les anticiper. Le mon­i­tor­ing 24/7 et en temps réel nous per­met via des sys­tèmes de com­mu­ni­ca­tion partagées avec les élus, les entre­pris­es, les assureurs et les citoyens d’optimiser la prise de déci­sion en sit­u­a­tion du risque et de lim­iter les con­séquences des événe­ments extrêmes. 

Comment intervenez-vous ?

Nous aidons les com­munes français­es à éla­bor­er et à met­tre au point des plans com­mu­naux de sauve­g­arde. Nous les accom­pa­gnons ain­si dans l’organisation d’exercices de sim­u­la­tion, l’activation de ces plans com­mu­naux, la mise en place des actions d’alerte pré­coce via l’envoi de SMS et d’informations local­isées avec des recom­man­da­tions et des con­signes afin d’anticiper et de lim­iter les con­séquences d’événements extrêmes.

En par­al­lèle, nous avons con­stru­it un mod­èle économique très vertueux adossé à notre parte­nar­i­at avec le monde de l’assurance qui finance notre ser­vice de mon­i­tor­ing des risques et d’envoi de recom­man­da­tions que nous met­tons gra­tu­ite­ment à la dis­po­si­tion de leurs assurés. En aler­tant les per­son­nes d’un dan­ger immi­nent, nous con­tribuons à sauver des vies, à met­tre en sécu­rité des biens ce qui per­met de réduire le coût des sin­istres. Les économies générées per­me­t­tent en retour de financer le sys­tème de préven­tion. 

Notre spé­ci­ficité repose dans notre capac­ité à délivr­er un mes­sage pro­gres­sif afin de dis­sémin­er les bonnes infor­ma­tions au bon moment en fonc­tion de l’évolution de la sit­u­a­tion et de l’intensité du risque. Ce qui per­met d’éviter les fauss­es alertes. 

Vous proposez aussi vos services au-delà des frontières nationales…

PREDICT Ser­vices n’a pas d’équivalent ni en France, ni dans le reste du monde. En 2009, nous avons com­mencé à échang­er avec des bailleurs de fonds inter­na­tionaux, notam­ment la Banque Inter­améri­caine de Développe­ment, la Banque Mon­di­ale et les Nations Unies.

Notre pre­mière mis­sion à l’international s’est déroulée en Haïti en 2009. Ont suivi plusieurs autres et notam­ment pen­dant les Jeux Olympiques de Rio de Janeiro afin d’assurer le suivi et le mon­i­tor­ing des risques pen­dant cet événe­ment sportif. Depuis nous sommes régulière­ment sol­lic­ités par des pays et des États du monde entier deman­dent que nous leur trans­féri­ons notre savoir-faire, nos méthodolo­gies… 

Notre action à l’international s’inscrit en réponse à l’appel à pro­jet de l’Organisation des Nations Unies et de l’Organisation Mon­di­ale de la Météo en faveur de la mise en place d’un sys­tème d’alerte pré­coce mon­di­al. Avec Météo France Inter­na­tion­al, nous sommes mobil­isés pour pro­pos­er un appui adap­té aux dif­férents pays au tra­vers du trans­fert de méthodolo­gies, de tech­nolo­gies et de for­ma­tions. Nous tra­vail­lons, par exem­ple, avec le Maroc sur le déploiement de Vigirisque, un sys­tème de ges­tion du risque d’inondation au sein du min­istère de l’Intérieur maro­cain en col­lab­o­ra­tion avec la Direc­tion Générale de la Météo maro­caine. En Haïti, nous sommes mobil­isés sur le pro­jet Gade Lapli label­lisé par le SCO (Space Cli­mate Obser­va­to­ry), visant à assis­ter la Direc­tion Générale de la Pro­tec­tion Civile Haï­ti­enne dans la ges­tion des risques hydrométéorologiques extrêmes.

“Notre action à l’international s’inscrit en réponse à l’appel à projet de l’Organisation des Nations Unies et de l’Organisation Mondiale de la Météo en faveur de la mise en place d’un système d’alerte précoce mondial.”

Dans la con­ti­nu­ité des objec­tifs stratégiques du pro­jet CREWS-SWIO (Sou­tien à la coopéra­tion régionale pour ren­forcer les sys­tèmes de prévi­sion opéra­tionnelle con­tin­ue et d’alerte pré­coce mul­ti­risque au niveau nation­al dans le Sud-Ouest de l’Océan indi­en), nous appor­tons aus­si un appui aux Comores. En Ango­la, nous par­ticipons au pro­jet de mod­erni­sa­tion des ser­vices de la météorolo­gie nationale. Nous inter­venons sur la par­tie hydrologique avec un focus sur la ges­tion du risque d’inondation afin de faire un diag­nos­tic com­plet de la ges­tion du risque d’inondation en Ango­la. En col­lab­o­ra­tion avec Météo France Inter­na­tion­al qui porte le pro­jet depuis 2019, nous avons par­ticipé à la mise en place d’une préalerte hydrologique à l’échelle nationale.

En par­al­lèle, pour répon­dre à la demande de nos parte­naires assureurs, nous avons aus­si un sys­tème d’alerte qui nous per­met d’alerter et d’informer leurs clients indus­triels français qui ont des implan­ta­tions et des sites dans le monde entier. 

Dans votre modèle, l’innovation et la R&D jouent un rôle stratégique. Comment cela se traduit-il ?

Il y a deux décen­nies, quand nous avons lancé PREDICT Ser­vices, les smart­phones n’existaient pas encore ! Aujourd’hui, le volet relatif à la dis­sémi­na­tion et le mon­i­tor­ing des alertes est au cœur de nos enjeux tech­nologiques. Avec le BRGM, ARMINES et l’Université Paris-Dauphine, nous tra­vail­lons ain­si sur le pro­jet RESOCIO (Réseaux Soci­aux en Sit­u­a­tion de Cat­a­stro­phe naturelle, Inter­pré­ta­tion Opéra­tionnelle) dont l’objectif est de démon­tr­er l’intérêt et la fais­abil­ité de l’exploitation automa­tisée des don­nées issues des réseaux soci­aux en con­texte de crise liée à une cat­a­stro­phe naturelle à ciné­tique rapi­de, comme les crues éclair ou les séismes, pour con­firmer rapi­de­ment l’intensité et l’ampleur d’une cat­a­stro­phe naturelle, afin d’apporter une réponse adéquate rapi­de­ment. 

Nous nous intéres­sons aus­si à l’IA pour pré-qual­i­fi­er une sit­u­a­tion à risque et établir dif­férents niveaux de risques que nos ingénieurs vont analyser afin de déter­min­er les infor­ma­tions néces­saires et arbi­tr­er si l’envoi de mes­sages d’avertissement aux usagers est req­uis. Si le diag­nos­tic humain reste essen­tiel, ces préqual­i­fi­ca­tions à exper­tis­er basées sur l’analyse d’importants vol­umes de don­nées issues du monde entier per­me­t­tent à nos équipes de mieux iden­ti­fi­er les sit­u­a­tions qui néces­si­tent une atten­tion ou une action par­ti­c­ulière et con­tribuent donc à opti­miser le proces­sus de prise de déci­sion. 

Enfin, nous avons aus­si recours aux jumeaux numériques et aux don­nées spa­tiales qui nous per­me­t­tent d’avoir une meilleure visu­al­i­sa­tion et com­préhen­sion du risque. 

Chaque année, nous organ­isons une journée dédiée à l’innovation, PREDICT INNOVE. La 6e édi­tion s’est tenue le 27 juin. Plus de 150 mem­bres de la com­mu­nauté des acteurs de la ges­tion des risques y ont par­ticipé. 

Pour relever ces défis, quels profils recherchez-vous ?  

Nous sommes en recherche per­ma­nente de tal­ents. Notre méti­er est très par­ti­c­uli­er. Au-delà des com­pé­tences tech­niques, c’est aus­si un méti­er qui néces­site des con­vic­tions et un engage­ment. Nos équipes ont la mis­sion de suiv­re 24/7 des événe­ments cli­ma­tiques. Dans un con­texte où on par­le beau­coup de la quête de sens au tra­vail, notre méti­er fait par­ti­c­ulière­ment sens et est très sat­is­faisant mal­gré ses nom­breuses con­traintes ! 

Et pour conclure ? 

Dans les années 70, l’économiste et philosophe améri­cain, Ken­neth Bould­ing dis­ait : « celui qui croit qu’une crois­sance expo­nen­tielle peut con­tin­uer indéfin­i­ment dans un monde fini est soit un fou, soit un écon­o­miste ». C’est aujourd’hui une réal­ité. Il me sem­ble néces­saire de dif­fuser plus large­ment les notions de rai­son d’être et de sobriété à tous les niveaux de la société. L’adaptation ne suf­fi­ra pas à invers­er les courbes, il nous faut aus­si nous inscrire dans une démarche d’atténuation.  

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