VINCI Autoroutes : Un modèle, des expertises et un engagement au service de la décarbonation de la mobilité

VINCI Autoroutes : un modèle, des expertises et un engagement au service de la décarbonation de la mobilité

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°788 Octobre 2023
Par Blaise RAPIOR (X99)

Acteur clé et incon­tour­nable de la mobi­li­té rou­tière, VINCI Auto­routes suit avec grand inté­rêt les évo­lu­tions tech­no­lo­giques et les nou­veaux usages pous­sés par la course à la décar­bo­na­tion et la lutte contre le réchauf­fe­ment cli­ma­tique. Mobi­li­té élec­trique, mobi­li­té lourde, adap­ta­tion des infra­struc­tures… sont autant d’enjeux qui mobi­lisent VINCI Auto­routes. Le point avec Blaise Rapior (X99), Direc­teur géné­ral adjoint de VINCI Auto­routes et direc­teur géné­ral d’Escota.

Comment un acteur comme VINCI Autoroutes appréhende la question du changement climatique et de la décarbonation de la mobilité ? 

Ces sujets qui mobi­lisent tout le sec­teur des trans­ports sont bien évi­dem­ment au cœur de notre poli­tique d’entreprise. Aujourd’hui, en France, le sec­teur des trans­ports est res­pon­sable de près d’un tiers des émis­sions de gaz à effet de serre. C’est aus­si le seul sec­teur dont les émis­sions n’ont pas bais­sé depuis 1990. Or l’objectif col­lec­tif à une échelle pla­né­taire est d’atteindre la neu­tra­li­té car­bone à hori­zon 2050.

Nous sommes donc face à l’urgente néces­si­té de trou­ver des solu­tions pour dimi­nuer les émis­sions du monde de la mobilité.

En France, l’essentiel de la mobi­li­té est rou­tière (entre 85 et 90 % pour les per­sonnes comme pour les mar­chan­dises) et sera dura­ble­ment rou­tière. Même si notre pays atteint son objec­tif de dou­ble­ment de la part modale du fer­ro­viaire, 80 % des dépla­ce­ments seront encore rou­tiers. Le sec­teur doit donc concen­trer ses efforts sur la décar­bo­na­tion des mobi­li­tés rou­tières et faire preuve d’innovation et d’ingéniosité pour décar­bo­ner l’ensemble des mobi­li­tés routières.

Quels sont vos engagements en la matière ? 

La par­ti­cu­la­ri­té de notre acti­vi­té est que nos émis­sions indi­rectes (scope 3) liées notam­ment à l’usage de nos infra­struc­tures sont bien plus impor­tantes que nos émis­sions directes liées à nos consom­ma­tions d’énergie (scope 1 et 2).

Dans le cadre de la poli­tique envi­ron­ne­ment du groupe VINCI, « Envi­ron­ne­ment 2030 », sur nos propres acti­vi­tés, d’ici 2030, nous nous sommes enga­gés à bais­ser de 50 % nos émis­sions de CO₂ et de 20 % notre consom­ma­tion d’énergie. Nous visons aus­si la valo­ri­sa­tion de la tota­li­té de nos déchets d’exploitation, dont 60 % sous forme de valo­ri­sa­tion matière. Nous vou­lons aus­si réduire de 10 % notre consom­ma­tion d’eau d’ici 2030 et sup­pri­mer tota­le­ment le recours aux pro­duits phy­to­sa­ni­taires sur nos réseaux.

En paral­lèle, sur le Scope 3, nous nous sommes fixés comme objec­tif de dimi­nuer de 50 % les émis­sions de nos chan­tiers d’ici 2030 et de recy­cler 90 % des maté­riaux qui sont pro­duits sur nos chan­tiers dans une logique d’économie cir­cu­laire. Enfin, nous vou­lons éga­le­ment réduire de 20 % les émis­sions de CO₂ des clients qui cir­culent sur nos réseaux.

Énergie renouvelable, mobilité électrique, hydrogène sont autant de pistes explorées pour décarboner la mobilité routière. Quel regard portez-vous sur ces différentes technologies ?

Pour les véhi­cules légers, le véhi­cule élec­trique à bat­te­rie s’est impo­sé comme la solu­tion tech­nique la plus per­ti­nente pour réduire l’empreinte car­bone. Aujourd’hui, 55 % de notre flotte de véhi­cules légers et de véhi­cules uti­li­taires légers sont élec­triques ce qui nous per­met de faire bais­ser for­te­ment notre empreinte car­bone depuis 2018.

Aujourd’hui, en France, si les ventes de véhi­cules élec­triques neufs repré­sente 15 % des ventes glo­bales, seuls 2 % du parc natio­nal est élec­trique du fait du rythme de renou­vel­le­ment des véhi­cules. C’est une nou­velle forme de mobi­li­té que nos conci­toyens doivent s’approprier. Alors que l’Europe a voté l’interdiction de la vente de véhi­cules ther­miques à hori­zon 2035, on s’attend à un fort déve­lop­pe­ment de la mobi­li­té élec­trique entre 2030 et 2050. Nous avons donc un fort enjeu d’aménagement de notre réseau rou­tier et auto­rou­tier ain­si que de nos aires de ser­vice afin de les équi­per avec les infra­struc­tures de recharge requises. Cette évo­lu­tion implique aus­si une hausse de la fré­quen­ta­tion de ces aires et la néces­si­té de déployer des ser­vices com­plé­men­taires qui pour­ront être uti­li­sés durant le temps de recharge. Se pose aus­si la ques­tion de l’adaptation des réseaux élec­triques. Aux côtés des dif­fé­rentes par­ties pre­nantes, l’État, RTE et ENEDIS prin­ci­pa­le­ment, nous devons éla­bo­rer des sché­mas direc­teurs afin d’agir en bonne coordination.

Les tech­no­lo­gies sont moins matures du côté de la mobi­li­té lourde. Par­mi les pistes explo­rées, il y a l’hydrogène. C’est un vec­teur éner­gé­tique inté­res­sant, notam­ment parce qu’il est fluide et qu’il peut donc se trans­va­ser très faci­le­ment. Mais de nom­breux freins per­sistent à son déploie­ment. D’abord le coût : à den­si­té éner­gé­tique équi­va­lente, l’hydrogène gris coûte plu­sieurs fois plus cher que du die­sel, et l’hydrogène vert coûte, lui aus­si plu­sieurs fois plus cher que l’hydrogène gris. Se pose aus­si la ques­tion de la sécu­ri­té, car l’hydrogène est un gaz hau­te­ment inflam­mable et explo­sif. Tou­jours en matière de mobi­li­té lourde, le déve­lop­pe­ment des poids lourds à bat­te­rie est en cours. Ceux actuel­le­ment sur le mar­ché ont une capa­ci­té de 12 à 14 tonnes, et ceux qui arrivent, de 40 tonnes. Ils sont équi­pés de bat­te­ries qui per­mettent déjà un usage sur des courtes et moyennes dis­tances, notam­ment pour des usages de logis­tique urbaine, là où les zones à faibles émis­sions accé­lèrent la néces­si­té d’adopter des moto­ri­sa­tions moins pol­luantes. Il n’existe pas encore de tech­no­lo­gie leur per­met­tant de par­cou­rir de très longues dis­tances, alors qu’il s’agit de l’usage le plus répan­du en Europe. Pour lever ce frein, plu­sieurs déve­lop­pe­ments sont en cours. Les construc­teurs de poids lourds viennent de mettre au point un stan­dard de prise de recharge per­met­tant de faire tran­si­ter 1 MW. Si cette tech­no­lo­gie a l’avantage d’être décen­tra­li­sée, la taille de bat­te­rie et le déploie­ment d’une infra­struc­ture de recharge adap­tée res­tent de vrais défis. Des expé­ri­men­ta­tions sont aus­si menées sur la recharge dyna­mique, qui est la capa­ci­té d’un véhi­cule à se rechar­ger en rou­lant. Des tests sur route ouverte ont été réa­li­sés en Alle­magne avec un pan­to­graphe posé sur un véhi­cule et une caté­naire au-des­sus de l’autoroute, pour jus­te­ment per­mettre cette recharge de la bat­te­rie en rou­lant. La Suède a éga­le­ment fait des tests sur des bus qui se rechargent par induc­tion. Récem­ment, nous avons rem­por­té un appel à pro­jet pour expé­ri­men­ter cette tech­no­lo­gie sur l’A10 en Île-de-France sur un tron­çon de deux kilo­mètres. Nous regar­dons aus­si la tech­no­lo­gie de recharge par rail qui est déjà lar­ge­ment uti­li­sée dans l’univers du tram­way. Tou­te­fois trans­po­sée dans le sec­teur de la mobi­li­té rou­tière, cette tech­no­lo­gie sou­lève des ques­tions en matière de sécu­ri­té, car l’implantation de rails métal­liques au milieu de la chaus­sée peut induire des pertes d’adhérence, notam­ment pour les deux roues.

D’un point de vue tech­nique, notam­ment en termes de ren­de­ment, la recharge dyna­mique semble être la meilleure option, la plus col­lec­tive aus­si en termes d’usages futurs. Tou­te­fois, son déploie­ment néces­si­te­ra une déci­sion cen­tra­li­sée au niveau euro­péen afin d’homogénéiser la démarche et de s’assurer que tous les pays se basent sur un cahier des charges commun.

Ces tech­no­lo­gies répondent à des besoins et des usages dif­fé­rents (courte et moyenne distance/longue dis­tance). Dans ce contexte, les trans­por­teurs pour­raient devoir seg­men­ter leur flotte en fonc­tion de ces contraintes.

Pour un acteur comme VINCI Autoroutes, quels sont les principaux enjeux ? 

Nous avons éga­le­ment un enjeu autour du déve­lop­pe­ment d’énergies renou­ve­lables. Nous sommes un grand pro­prié­taire fon­cier avec plus de 45 000 hec­tares de fon­cier (plus de 4 fois la super­fi­cie de Paris), dont plus de deux tiers sont non-revê­tus. Il y a donc là un véri­table poten­tiel de déve­lop­pe­ment d’énergies renou­ve­lables, notam­ment de cen­trales pho­to­vol­taïques au sol, avec une puis­sance à la clé que l’on estime à envi­ron un giga­watt crête.

Nous devons aus­si tra­vailler sur l’adaptation des réseaux d’infrastructures à l’évolution du cli­mat. En effet, nos infra­struc­tures ont été conçues pour répondre à des contraintes qui, aujourd’hui, ne sont plus les mêmes. C’est notam­ment le cas pour le risque d’inondation ou de crues. À titre d’exemple, entre 2015 et 2019, nous avons ain­si connu trois crues plus que tren­ten­nales sur un petit fleuve côtier des Alpes-Mari­times que fran­chit l’autoroute A8 !

Ces évolutions s’inscrivent dans le temps long. Tout comme le modèle de la concession qui est au cœur de votre positionnement. En quoi est-ce un véritable avantage et un levier de différenciation ? 

C’est, effec­ti­ve­ment, un réel avan­tage, car nous avons l’habitude de pen­ser le temps long, dans lequel la lutte contre le chan­ge­ment cli­ma­tique et l’adaptation face au chan­ge­ment cli­ma­tique s’inscrivent éga­le­ment, tout comme la tran­si­tion éner­gé­tique, par ailleurs ! Dans ce contexte, la conces­sion est un véhi­cule d’investissement qui per­met un finan­ce­ment tout au long de la durée de vie d’une infra­struc­ture et qui est donc par­fai­te­ment adap­té aux tran­si­tions éner­gé­tiques et cli­ma­tiques que nous vivons ! VINCI Auto­routes est donc en pre­mière ligne pour accom­pa­gner ces évo­lu­tions en capi­ta­li­sant sur son expé­rience, son exper­tise et son modèle. 

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