Une symphonie alpestre

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°634 Avril 2008Par : Richard Strauss par Deutsche Symphonie-Orchester de Berlin, Kent NaganRédacteur : Marc Darmon (83)

Livret DVD Classical MasterpiecesRichard Strauss est un des com­po­si­teurs les plus impor­tants de son époque. Sa car­rière débu­tée à la fin du XIXe siècle se ter­mine au milieu du xxe. Elle est consti­tuée de deux périodes qui se che­vauchent. Consa­crée à la musique ins­tru­men­tale, son début de car­rière est mar­qué par la com­po­si­tion de poèmes sym­pho­niques. La seconde par­tie est consa­crée à la com­po­si­tion d’opéras, à par­tir de Salo­mé et Elek­tra au tout début du XXe siècle.

Le der­nier de ses poèmes sym­pho­niques, Une Sym­pho­nie alpestre, com­po­sé en 1915, est peut-être le plus ambi­tieux. Liszt et Dvo­rak avant Strauss avaient ren­du popu­laire le style des poèmes sym­pho­niques, mor­ceaux ins­tru­men­taux où une his­toire est racon­tée et décrite par l’orchestre. Dans une telle pièce, les évé­ne­ments et les per­son­nages évo­luent tout au long de l’œuvre. Les œuvres de ce style les plus célèbres de Strauss repré­sentent des per­son­nages célèbres tels que Don Juan, Till l’espiègle, Don Qui­chotte, Mac­beth, ou bien encore le héros idéal dans Une Vie de héros. Dans Une Sym­pho­nie alpestre, Strauss prend un par­ti ori­gi­nal : il repro­duit les pay­sages et les sen­sa­tions d’une ran­don­née en mon­tagne, débu­tée avant le lever du soleil et se ter­mi­nant la nuit suivante.

L’histoire de la repro­duc­tion dis­co­gra­phique de cette œuvre d’une heure a connu trois périodes dis­tinctes. Les ver­sions his­to­riques, sous la direc­tion de Strauss lui-même avant guerre par exemple, ne peuvent rendre jus­tice à l’instrumentation très riche et à la com­plexi­té de l’œuvre. Vinrent ensuite des inter­pré­ta­tions plus récentes – on conseille par exemple par Kara­jan (DG) ou Sol­ti (Dec­ca) – qui sont des disques de démons­tra­tion de vir­tuo­si­té orches­trale. Puis vint le DVD, ce qui repré­sente un énorme pro­grès ; en effet c’est au concert ou en DVD que l’on peut entiè­re­ment pro­fi­ter de cette œuvre, car voir les ins­tru­men­tistes per­met de suivre par­fai­te­ment l’ensemble et sai­sir la suc­ces­sion d’atmosphères que consti­tue la pièce de Strauss. Comme l’interprétation est exem­plaire, brillante et claire, regar­der ce DVD est une expé­rience for­mi­dable, abso­lu­ment enri­chis­sante même lorsque l’on connaît l’œuvre par cœur.

La prise de son est par­faite et res­ti­tue com­plè­te­ment l’ambiance et la dyna­mique d’un concert. Pro­fi­tons en pour rap­pe­ler que c’est natu­rel­le­ment en sté­réo­pho­nie et abso­lu­ment pas en « mul­ti­ca­nal », qu’il faut regar­der un DVD de musique clas­sique. C’est selon ce for­mat que la com­pres­sion est la moindre et que le son est le plus naturel.

Le concert est com­plé­té d’un docu­men­taire de cin­quante minutes très four­ni, inté­grant des expli­ca­tions par le chef et des extraits des répé­ti­tions. Le livret étant éga­le­ment très bien ren­sei­gné, ce DVD est déci­dé­ment le moyen par­fait pour décou­vrir ou appro­fon­dir cette œuvre géniale. L’éditeur publie aus­si dans la même col­lec­tion (donc avec un docu­men­taire four­ni) des œuvres de Mozart, Bee­tho­ven, Schu­mann, Bru­ck­ner, ain­si que la Qua­trième Sym­pho­nie de Brahms, que l’on conseille en prio­ri­té (après Strauss) car cette inter­pré­ta­tion de Brahms est d’un niveau qui rap­pelle la ver­sion de Car­los Klei­ber, la meilleure dis­po­nible en CD.

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