Une assurance à la croisée d’enjeux et de perspectives nouvelles !

Dossier : Vie des entreprises - AssurancesMagazine N°793 Mars 2024Par Olivier Requin (X99)

Avec le rap­pro­che­ment avec Klé­sia et le déploie­ment de la PSC, le Groupe AGPM est à la croi­sée d’évolutions majeures. Oli­vier Requin (X99), direc­teur des risques, revient sur les chan­ge­ments que cette situa­tion implique ain­si que les chan­tiers qui vont mobi­li­ser le Groupe AGPM dans ce cadre. Entretien.

Votre secteur est fortement perturbé par les transitions qui redessinent l’appréhension et la gestion des risques. Qu’observez-vous à votre niveau ?

Tous les métiers de l’assurance sont, en effet, concer­nés par ce phé­no­mène. Tout d’abord, on observe une mul­ti­pli­ca­tion des évé­ne­ments natu­rels, comme les tem­pêtes, la grêle, les inon­da­tions, ou encore la séche­resse, qui impacte signi­fi­ca­ti­ve­ment l’IARD, c’est-à-dire l’assurance des biens et des responsabilités.
La récur­rence et l’intensité de ces catas­trophes natu­relles ne cessent de se ren­for­cer depuis 2016 avec des zones qui y sont plus expo­sées que d’autres. Cette nou­velle situa­tion ques­tionne, d’ailleurs, le modèle mutua­liste de l’assurance qui, par défi­ni­tion, per­met de cou­vrir des per­sonnes ou des entre­prises contre un aléa grâce à une mutua­li­sa­tion du risque. Or, si cer­taines régions ou zones sont plus expo­sées à ces évé­ne­ments cli­ma­tiques, et deviennent de façon récur­rentes sujettes à des épi­sodes cli­ma­tiques sévères, il existe un risque de dému­tua­li­sa­tions pour ces popu­la­tions avec des consé­quences poten­tielles telles que des hausses fortes de tarif, voire des refus d’assurance.
En France, nous avons la chance de dis­po­ser du régime Cat Nat dans le cadre duquel la CCR vient réas­su­rer pour moi­tié les sinistres qui sont sou­mis à ce régime. Néan­moins, l’ensemble du sec­teur doit repen­ser l’assurance de ces risques qui vont se pro­duire de plus en plus fré­quem­ment à l’avenir, le régime lui-même ne pou­vant être pérenne dans les condi­tions actuelles.
En paral­lèle, l’inflation, mais aus­si la concen­tra­tion des acteurs, notam­ment sur le seg­ment de la répa­ra­tion auto­mo­bile, et la néces­si­té de valo­ri­ser des pra­tiques plus durables entraînent une hausse des coûts moyens pour les assureurs.
Avec la pan­dé­mie et la crise sani­taire, nous avons éga­le­ment tous pris conscience du risque que repré­sente une épi­dé­mie d’envergure mon­diale. Un risque qui est, en autres, exa­cer­bé par le réchauf­fe­ment cli­ma­tique qui peut faci­li­ter la réap­pa­ri­tion de microbes ou de virus exis­tants dans des zones autre­fois tota­le­ment gelées ou cou­pées du monde.
En paral­lèle, la hausse des tem­pé­ra­tures et les échanges inter­na­tio­naux entraînent l’apparition de mala­dies qui étaient peu ou pas pré­sentes sur le conti­nent euro­péen, sans comp­ter que le réchauf­fe­ment cli­ma­tique et ses vagues de cha­leur impactent, par ailleurs, l’état de san­té des per­sonnes fragiles.
Au-delà des dimen­sions envi­ron­ne­men­tales et cli­ma­tiques, l’évolution de nos socié­tés a aus­si des réper­cus­sions sur la san­té, notam­ment men­tale, de nos conci­toyens. Le nombre d’arrêts de tra­vail est en constante aug­men­ta­tion ces der­nières années, ce qui engendre une hausse des charges de pres­ta­tions pour les contrats de prévoyance.
Au cours de la der­nière décen­nie, nous avons enfin assis­té à une véri­table explo­sion du risque cyber dans une socié­té et un monde qui sont de plus en plus digi­ta­li­sés et inter­con­nec­tés. C’est un risque auquel les assu­rances et les mutuelles, en leur qua­li­té d’entreprise déten­trices de don­nées, notam­ment de san­té, sont éga­le­ment confron­tées et expo­sées. Pour le Groupe AGPM, qui s’adresse plus par­ti­cu­liè­re­ment à la com­mu­nau­té défense et sécu­ri­té, c’est un enjeu encore plus cri­tique dans un contexte mar­qué par la pro­fes­sion­na­li­sa­tion des cyber-atta­quants, des ten­sions géo­po­li­tiques exa­cer­bées et une hausse des ten­ta­tives de désta­bi­li­sa­tion éco­no­mique et poli­tique des pays.

Dans ce cadre, comment se positionne le Groupe AGPM et comment faites-vous évoluer votre offre ?

His­to­ri­que­ment, le Groupe AGPM est une mutuelle affi­ni­taire qui a un posi­tion­ne­ment de lea­der sur la par­tie pré­voyance mili­taire. Au cours des der­nières décen­nies, nous avons déve­lop­pé un por­te­feuille de contrats affi­ni­taires en assu­rance auto ou habi­ta­tion qui repré­sente une acti­vi­té de taille assez modeste sur ces seg­ments for­te­ment expo­sés à ces risques liés aux transitions.
La recherche tou­jours plus pous­sée d’offres adap­tées aux clients pour tou­jours plus de flexi­bi­li­té, digi­tale pour plus d’autonomie, est au cœur des pré­oc­cu­pa­tions du Groupe AGPM et peut s’envisager aus­si bien en interne que par des par­te­na­riats. De par notre ADN mutua­liste, le Groupe AGPM dis­pose d’une cer­taine marge de manœuvre que les assu­reurs capi­ta­lis­tiques ne vont pas for­cé­ment avoir, car ils doivent, entre autres, rému­né­rer leurs actionnaires.
Même si une assu­rance est déte­nue par ses assu­rés, afin d’être pérenne dans le temps et pou­voir faire face à ses enga­ge­ments, elle se doit de main­te­nir une cer­taine ren­ta­bi­li­té. Elle doit donc trou­ver les meilleurs équi­libres tech­niques en termes de tari­fi­ca­tion, mais aus­si en termes de recours aux nou­velles tech­no­lo­gies pour auto­ma­ti­ser et digi­ta­li­ser ses pro­ces­sus. Cela per­met de réduire les charges et gagner en per­for­mance sans perdre de vue ses enga­ge­ments vis-à-vis de ses assurés.

Comment capitalisez-vous sur les nouvelles technologies pour faire face à ce contexte et faire évoluer vos métiers et votre offre ?

Dans le monde de l’assurance, la data est deve­nue incon­tour­nable. Aujourd’hui, nous tra­vaillons à l’amélioration de la col­lecte, de l’analyse et de la valo­ri­sa­tion de nos don­nées. L’enjeu est, en effet, d’exploiter cette don­née au mieux afin d’aller vers plus de pré­ven­tion et d’anticipation des risques.
Dans cette démarche, le Groupe AGPM a la chance de pou­voir s’appuyer sur une fine connais­sance et com­pré­hen­sion de ses clients, les mili­taires, qui ont un mode de vie et des besoins très spé­ci­fiques et reliés à leur métier.
Cette syner­gie entre la data, le digi­tal et nos exper­tises nous per­met aujourd’hui de leur pro­po­ser des offres adap­tées à leur réalité.

Votre actualité est marquée par le rapprochement avec Klésia. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Nous col­la­bo­rons avec Klé­sia depuis 2017 dans le cadre du réfé­ren­ce­ment auprès du minis­tère des Armées avec l’offre com­mune For­té­go avec Klé­sia qui couvre la par­tie civile et le Groupe AGPM son pen­dant militaire.
Forts de cette pre­mière col­la­bo­ra­tion fruc­tueuse avec Klé­sia, nous avons déci­dé en 2022 de créer une asso­cia­tion Loi 1901 afin de faci­li­ter la mise en place de nou­veaux par­te­na­riats et de syner­gies opérationnelles.
Plus récem­ment, lors des votes aux assem­blées géné­rales qui se sont tenues en juin 2023, aus­si bien Klé­sia que le Groupe AGPM ont voté en faveur de la construc­tion d’un groupe pru­den­tiel avec des liens de soli­da­ri­té finan­cière et des enga­ge­ments com­muns et res­pec­tifs plus forts que le cadre ini­tia­le­ment mis en place par l’association.
L’idée est ain­si de construire un groupe solide doté de près de 2 mil­liards de fonds propres avec un chiffre d’affaires de l’ordre de 3 mil­liards d’euros et un posi­tion­ne­ment sur les seg­ments IARD, san­té, pré­voyance, épargne et retraite, donc l’ensemble des métiers de l’assurance, sur le col­lec­tif comme sur l’individuel, du fait de la com­plé­men­ta­ri­té de Klé­sia et le Groupe AGPM.

Comment imaginez-vous votre métier demain ? Quels sont vos principaux enjeux et perspectives dans ce cadre ?

Aujourd’hui, en ma qua­li­té de direc­teur des risques, aus­si bien côté Groupe AGPM que Klé­sia, je joue un rôle actif dans la construc­tion de ce futur grand groupe. Pour ce faire, une de mes mis­sions est de m’assurer que les risques sont bien maî­tri­sés et enca­drés, notam­ment d’un point de vue réglementaire.
De manière très didac­tique, quand un de nos com­mer­ciaux signe un contrat, il ne vend pas quelque chose de spé­ci­fique, mais achète du risque pour le compte de l’assureur.
Pour être en capa­ci­té d’assumer nos enga­ge­ments en cas de sinistre, il est cri­tique de sécu­ri­ser tous les maillons de la chaîne de valeur, de la sous­crip­tion à l’indemnisation, mais éga­le­ment de s’assurer que l’ensemble des acti­vi­tés, y com­pris au niveau des sous-trai­tants, s’opèrent dans un envi­ron­ne­ment de maî­trise du risque total (règle­men­taire, opé­ra­tion­nel, cybersécurité…).
Le direc­teur des risques doit donc avoir via ses équipes une capa­ci­té d’analyse et de com­pré­hen­sion pour pou­voir anti­ci­per les crises, mais éga­le­ment être en capa­ci­té de les gérer quand elles se pro­duisent. Il par­tage sa vision du risque avec les diri­geants afin d’éclairer et d’objectiver leurs choix stra­té­giques. Dans un monde de plus en plus vola­til et incer­tain, cette vision du risque, avec la pro­tec­tion de la sol­va­bi­li­té du groupe, donc la pro­tec­tion de ses enga­ge­ments envers les assu­rés, est cen­trale et est au cœur de toutes les réflexions stratégiques.

Patrice Pau­let, Pré­sident Direc­teur Géné­ral du Groupe AGPM revient sur l’imapct de la réforme de la Pro­tec­tion Sociale Com­plé­men­taire, la PSC, sur son groupe.

« Parce que le cœur de métier et d’expertise du Groupe AGPM sont la pré­voyance des mili­taires, nous sou­hai­tons bien évi­dem­ment être acteur du déploie­ment de la PSC, la réforme de la Pro­tec­tion Sociale Com­plé­men­taire des fonctionnaires.
Dans ce cadre, nous par­ti­ci­pons aux appels d’offres lan­cés par l’ensemble des minis­tères en lien avec la com­mu­nau­té défense et sécu­ri­té : les mili­taires, les poli­ciers, les pom­piers, les agents de sécurité…
Dans cette démarche, nous avan­çons avec Klé­sia, qui est un des lea­ders sur le seg­ment de la san­té pour le per­son­nel civil du monde de la défense et acteur majeur des contrats collectifs.
Ain­si, avec Klé­sia, nous sommes à même de cou­vrir aus­si bien la par­tie civile que mili­taire de ce sec­teur, avec l’expertise de la ges­tion du col­lec­tif, dans le res­pect des exi­gences tech­niques, notam­ment IT compte tenu de la spé­ci­fi­ci­té des don­nées militaires.
En paral­lèle, notre enjeu est aus­si d’anticiper les impacts et les évo­lu­tions néces­saires sur un plan orga­ni­sa­tion­nel et opé­ra­tion­nel, car la PSC intro­duit une logique de contrat col­lec­tif qui n’existait pas aupa­ra­vant dans le monde de la fonc­tion publique d’État.
Plus que jamais, les syner­gies et la com­plé­men­ta­ri­té de posi­tion­ne­ment de Klé­sia et du Groupe AGPM vont nous per­mettre d’adresser l’ensemble des cibles sur tous les métiers de l’assurance ».

Poster un commentaire