The Essential Bach

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°635 Mai 2008Par : J.S. BachRédacteur : Marc Darmon (83)

Ce cof­fret est pas­sion­nant. Son titre raco­leur pour­rait faire craindre une com­pi­la­tion quel­conque alors qu’il s’agit du regrou­pe­ment de cinq DVD de tout pre­mier plan. Huit heures ne peuvent bien enten­du conte­nir tout le « Bach essen­tiel » (manquent par exemple des Concer­tos pour cla­vier, des Pas­sions, les Varia­tions Gold­berg…) mais nous avons ici une très bonne sélec­tion, incluant bien enten­du des œuvres complètes.

Coffret DVD The assential BACHLe pre­mier DVD contient les six Concer­tos bran­de­bour­geois par le désor­mais célèbre Orchestre baroque de Fri­bourg. La dis­po­si­tion de l’orchestre d’une ving­taine de musi­ciens, qui varie selon le concer­to, est tou­jours ori­gi­nale : les altistes et vio­lo­nistes debout à l’arrière, les solistes (dont flûtes en bois, cors natu­rels, haut­bois anciens…) à l’avant, le cla­ve­cin au centre. Les ins­tru­men­tistes, qui jouent sou­vent en soliste, dia­loguent, « concertent » entre eux, ce que la réa­li­sa­tion montre par­fai­te­ment. Le pre­mier vio­lon, Gott­fried von der Goltz, dirige l’ensemble de sa place, de façon imper­cep­tible, avec des petits signes et œillades dis­crets, mais effi­caces, ce qui signi­fie que le tra­vail de répé­ti­tion a dû être consi­dé­rable. Ces concer­tos « fri­bour­geois » seraient déjà remar­quables en disque. En DVD, ils sont exceptionnels.

Le second DVD com­porte la grande Messe en si mineur avec l’Orchestre du Gewand­haus de Leip­zig, en for­mat très réduit, enre­gis­trée dans l’église Saint-Tho­mas de Leip­zig dont Bach fut le « Kan­tor » durant vingt-sept ans. Le chef, Georg Chris­toph Biller, est l’actuel Kan­tor de Saint-Tho­mas. Il dirige l’œuvre dans les condi­tions de sa créa­tion, les chœurs étant consti­tués d’enfants et d’adolescents, sans femmes. L’image per­met de voir l’église pleine à cra­quer, notam­ment dans la nef, autour de la tombe de Bach. Le son est superbe, très fin et sub­til, l’interprétation est à la fois brillante et recueillie. Ce DVD nous offre l’un des pre­miers orchestres du monde, dans une des meilleures acous­tiques qui soit, inter­pré­ter un som­met de la musique occi­den­tale. Voir cette exé­cu­tion dans ces condi­tions pro­duit un plai­sir rare.

Le troi­sième DVD pré­sente le pre­mier livre du Cla­vier bien tem­pé­ré dans une approche très ori­gi­nale. Les 24 pré­ludes et fugues sont d’abord par­ta­gés entre deux grands pia­nistes, Andrei Gavri­lov et Joan­na McGre­gor. Ensuite, par­tant du prin­cipe que ces mor­ceaux ne sont pas conçus pour être écou­tés à la suite, les artistes varient à chaque mor­ceau l’ensemble des condi­tions d’écoute. Ain­si ils changent de pièce d’enregistrement, de tenue, de coif­fure et de bijoux. Le son même varie d’un mor­ceau à l’autre, évi­tant bien sûr toute mono­to­nie. Gavri­lov par­court douze pièces asep­ti­sées dif­fé­rentes d’un édi­fice moderne, alors que McGre­gor nous fait visi­ter les pièces et les caves du fameux Palau Güell de Bar­ce­lone, des­si­né par Gau­di. Tout cela serait natu­rel­le­ment acces­soire si l’interprétation n’était hau­te­ment recommandable.

Le DVD sui­vant pro­pose quelques pièces célèbres pour orgue (Cho­ral du veilleur, Toc­ca­ta en …), par le grand cla­ve­ci­niste et orga­niste Ton Koop­man. On réa­lise à nou­veau tout ce que per­met l’image et que ne per­met­tait pas le simple disque. Nous voyons les cla­viers, magni­fiques, et les belles orgues au sein de la cathé­drale Sainte-Marie de Fri­bourg. On découvre sur­tout le jeu de l’interprète, ce que l’on ne voit jamais ; la lisi­bi­li­té des œuvres en est trans­for­mée. Les voix se détachent et se suivent par­fai­te­ment. On est émer­veillé et impres­sion­né par ce que l’on voit (notam­ment le jeu sur les péda­liers, les cla­viers sculp­tés) et ce que l’on entend.

La fin du cof­fret peut être consi­dé­rée comme des « bonus », bons com­plé­ments mais d’un inté­rêt moindre. Nous avons notam­ment une heure de trans­crip­tions pour ensemble de cuivres d’œuvres célèbres ou plus rares. Très bien enre­gis­tré (c’est à nou­veau l’église Saint-Tho­mas) et dis­trayant. Les célèbres Toc­ca­ta et sur­tout Fugue en ré mineur sont un final brillant de ce coffret.

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