Benjamin BRITTEN : War Requiem

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°683 Mars 2013Par : Chœur et Orchestre symphonique de Birmingham, sous la direction d’Andris NelsonsRédacteur : Marc DARMON (83)

La cathé­drale de Coven­try fut détruite par les bom­bar­de­ments pen­dant la guerre comme tout le cen­tre­ville. Pour célé­brer sa recons­truc­tion en 1962, le grand com­po­si­teur anglais Ben­ja­min Brit­ten com­po­sa ce War Requiem, mêlant le texte latin clas­sique du requiem et des poèmes en anglais com­po­sés pen­dant la Grande Guerre par le poète bri­tan­nique Wil­fred Owen.

Cette œuvre mili­tante devait réunir à sa créa­tion, sous la direc­tion du com­po­si­teur, trois for­mi­dables solistes de trois pays b e l l i g é r a n t s , l’Allemand Die­trich Fischer-Dies­kau (dis­pa­ru l’année der­nière), la Russe Gali­na Vish­nevs­kaya (l’épouse de Ros­tro­po­vitch, fina­le­ment inter­dite de voyage) et le ténor bri­tan­nique Peter Pears, le com­pa­gnon de vie de Britten.

Coffret du DVD : War Requiem de Benjamin BrittenExac­te­ment cin­quante ans après la créa­tion de l’œuvre, la cathé­drale de Coven­try est à nou­veau le théâtre de cette œuvre monu­men­tale, écrite pour elle. Le bâti­ment moderne est magni­fique, orné de déco­ra­tions et vitraux contem­po­rains extrê­me­ment élé­gants der­rière les­quels on aper­çoit les ruines de l’ancienne cathé­drale. L’orgue gigan­tesque se voit sou­vent der­rière le chef d’orchestre.

On a vu trop d’églises contem­po­raines déce­vantes de par le monde pour ne pas être frap­pé par la gran­deur et l’élégance de celle-ci. Et Brit­ten joue par­fai­te­ment du gigan­tisme de l’espace, dis­po­sant des chœurs aux deux extré­mi­tés de l’église, et les solistes chan­tant les poèmes d’Owen dans un troi­sième espace, devant l’orchestre principal.

Avec l’organiste en un qua­trième point de la cathé­drale, l’effet sur place devait être incroyable, mais on com­prend que seuls les spec­ta­teurs de ce DVD peuvent vrai­ment voir l’ensemble des artistes (et encore mieux en Blu-Ray, grâce à la haute défi­ni­tion, très utile compte tenu de l’espace énorme, du nombre d’exécutants et de la beau­té du lieu).

Le Chœur de la cité de Bir­min­gham est très impres­sion­nant, par sa masse et sa dis­po­si­tion, très bien ren­dues par la camé­ra, et sur­tout par son niveau musi­cal et l’émotion qu’il sus­cite dans cette par­ti­tion riche et variée. L’Orchestre sym­pho­nique de la cité de Bir­min­gham est un des plus grands orchestres d’Angleterre.

C’est à sa tête que le jeune Simon Rat­tle a gagné sa noto­rié­té avant d’être choi­si pour diri­ger, avec le suc­cès qu’on sait, la Phil­har­mo­nie de Ber­lin, pour­sui­vant l’héritage de Wil­helm Furtwän­gler, Her­bert von Kara­jan et Clau­dio Abbado.

Andris Nel­sons est lui aus­si un jeune chef très pro­met­teur, pro­ba­ble­ment celui qui acquiert en ce moment la plus grande répu­ta­tion par­mi ceux de sa géné­ra­tion. Et il faut recon­naître qu’une fois de plus il est impres­sion­nant quand il dirige l’ensemble des artistes répar­tis dans l’église et fait res­sen­tir les émo­tions fortes créées par cette musique.

Par­mi les moments les plus forts, écou­tez ce Dies irae à res­sus­ci­ter les morts (c’est le but), avec des cuivres puis­sants, nom­breux et par­fai­te­ment dif­fé­ren­ciés (et fil­més). Ou écou­tez ces Lacry­mo­sa et Bene­dic­tus en latin, trans­cen­dés par la sopra­no Erin Wall (qui suc­cède à la célèbre Bri­tan­nique fina­le­ment créa­trice de l’œuvre, Hea­ther Har­per) devant un chœur remarquable.

Nous n’avons pas l’habitude ici de com­men­ter des œuvres contem­po­raines. Nous le fai­sons lorsque nous savons qu’il s’agit d’œuvres qui sur­vi­vront et dont la valeur musi­cale et his­to­rique mérite l’investissement du spectateur.

C’est natu­rel­le­ment le cas avec ce War Requiem, dont Brit­ten espé­rait qu’il s’agissait de son œuvre dont on se sou­vien­drait le plus longtemps.

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