Simplifier et démocratiser l’usage de la biomasse

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°788 Octobre 2023
Par Jean-Baptiste MARIN

Forte d’une tech­nolo­gie révo­lu­tion­naire brevetée, Européenne de Bio­masse apporte une alter­na­tive vertueuse aux éner­gies fos­siles. Son PDG, Jean-Bap­tiste Marin, nous en dit plus dans cet entretien.

Quels sont les constats qui vous ont poussé à créer Européenne de Biomasse ? 

La matière pre­mière végé­tale est un for­mi­da­ble atout dans le con­texte de la tran­si­tion énergé­tique qui est le nôtre aujourd’hui. La bio­masse représente un poten­tiel majeur, cap­i­tal­isant sur les atouts de la pho­to­syn­thèse qui cap­ture le car­bone atmosphérique.

La con­nais­sance de la bio­masse est dev­enue un des points forts d’Européenne de Bio­masse, ain­si que sa capac­ité à mobilis­er un appro­vi­sion­nement autour des usines exis­tantes et en pro­jet. Chaque usine con­sti­tu­ant en soi un véri­ta­ble écosys­tème, c’est cette dimen­sion de développe­ment ter­ri­to­ri­ale qui con­stitue une part majeure du savoir-faire et de l’expertise de notre société. 

Depuis la date de la créa­tion de l’entreprise en 2004, Européenne de Bio­masse a ain­si pu adapter son offre pour apporter à ses clients des ser­vices et des pro­duits qui répon­dent aux défis aux­quels le monde est confronté.

Plus particulièrement, Européenne de Biomasse se positionne comme une cleantech. Qu’est-ce que cela implique ? 

Européenne de Bio­masse, à l’issue de plusieurs années de R&D, a mis au point une tech­nolo­gie per­me­t­tant le vapoc­raquage de la bio­masse. Cette tech­nolo­gie, pro­tégée par le dépôt de 20 brevets en France et à l’international, per­met de ren­dre acces­si­ble les dif­férents con­sti­tu­ants de la matière pre­mière végé­tale, prin­ci­pale­ment la lig­nine, la cel­lu­lose et l’hémicellulose.

Le traite­ment en con­tinu de la bio­masse autorise la pro­duc­tion d’une poudre vapoc­raquée, qui peut ensuite être soit gran­ulée (pro­duc­tion de gran­ulés « high tech » HPCI Green Pel­let®), soit servir de matière pre­mière pour les bio-matéri­aux, la chimie verte ou encore pour la pro­duc­tion de Car­bu­rants Avi­a­tion Durables (CAD ou SAF en anglais). 

Le développe­ment de cette tech­nolo­gie s’est traduit par la mise en place d’une usine de référence, pre­mière mon­di­ale, con­stru­ite sur le site de la bio­raf­finer­ie de Pomacle-Bazan­court (Marne) en parte­nar­i­at avec MERIDIAM et la CDC – Banque des Ter­ri­toires. Dans ce cadre, Européenne de Bio­masse se posi­tionne à la fois comme un bailleur de licence et un développeur de tech­nolo­gie pour per­me­t­tre la mise en place des usines util­isant sa tech­nolo­gie, pour la pro­duc­tion de gran­ulés, ou en amont d’autres briques tech­nologiques pour la pro­duc­tion de CAD, par exemple.

Comment mettez-vous vos expertises et vos savoir- faire au service de la décarbonation ? 

Sur le site de la bio­raf­finer­ie de Pomacle- Bazan­court, Européenne de Bio­masse dis­pose d’une équipe R&D recon­nue qui dis­pose d’un out­il unique, en lien avec des parte­naires R&D locaux : une instal­la­tion pilote de vapoc­raquage qui per­met à la fois de tester les évo­lu­tions de la tech­nolo­gie, mais aus­si de valid­er les bio­mass­es locales pour chaque nou­velle implantation. 

Cette équipe R&D tra­vaille égale­ment avec le CEBB, cen­tre européen mul­ti­dis­ci­plinaire regroupant des chaires de grandes écoles, pour aller plus loin dans l’innovation. Ce tra­vail de fond per­met d’imaginer et de met­tre en place des amélio­ra­tions de la tech­nolo­gie, tout en pro­posant des rup­tures des­tinées à être implan­tées sur les sites exis­tants ou en pro­jet. Les usines sont ain­si de plus en plus vertueuses, que ce soit au niveau du ren­de­ment (l’intégralité de la bio­masse entrante est val­orisée sur site), de la per­for­mance énergé­tique ou encore de la ges­tion de l’eau.

Signe de cette effi­cience, la pro­duc­tion issue de l’usine FICAP de Pomacle-Bazan­court est label­lisée PEFC pour son appro­vi­sion­nement (ges­tion durable de la forêt), mais aus­si SBP (Sus­tain­able Bio­masse Pro­gram), une pre­mière pour une entre­prise française, ce qui sig­ni­fie qu’elle intè­gre la per­for­mance envi­ron­nemen­tale de l’ensemble de la chaîne de valeur.

Votre technologie innovante et révolutionnaire Edb-HPCI® permet de remplacer les énergies fossiles par le HPCI Green Pellet®. Comment fonctionne-t-elle et quelles en sont les principales caractéristiques ?

Le vapoc­raquage est un procédé ther­mique, chim­ique et mécanique qui per­met la déstruc­tura­tion de la matière lig­no­cel­lu­losique par l’action com­binée de la vapeur et de la chaleur qui en est issue. Appliqué sur de la bio­masse en con­tinu, il favorise l’hydrolyse de la matière et la libéra­tion de molécules oxygénées volatiles dans la phase gazeuse, et le cisaille­ment en sor­tie de traite­ment résul­tant de la décom­pres­sion explo­sive, qui vapor­ise l’eau con­tenue au cœur du végé­tal. Il engen­dre une expan­sion de la vapeur au sein du matéri­au, qui éclate la struc­ture des fibres lig­no­cel­lu­losiques. Cela s’accompagne de la migra­tion de la lig­nine, polymère insol­u­ble et hydrophobe, vers la sur­face de la bio­masse, par­tic­i­pant à la résis­tance à l’eau et à la forte cohé­sion du gran­ulé. Cela per­met de val­oris­er toute ressource lig­no­cel­lu­losique (bois rond, pla­que­ttes forestières, bois malades, con­nex­es de sci­erie, déchets de bois, quelle que soit l’essence forestière, et peut aus­si inté­gr­er des bio­mass­es lig­no­cel­lu­losiques agricoles).

Quand il est pro­duit sous forme de gran­ulés « high tech » HPCI Green Pel­let®, ce gran­ulé dis­pose de car­ac­téris­tiques avancées : plus forte den­sité énergé­tique, sim­plic­ité de la logis­tique (gran­ulés avec une dura­bil­ité supérieure mino­rant l’émission de Fines par­tic­ules et donc les pertes pro­duits, mais aus­si aug­men­tant la sécu­rité d’emploi du pro­duit : moins de risque ATEX et de risque san­i­taire pour les per­son­nes), sta­bil­ité dans le temps de la bio­masse (résis­tance à la pluie, à l’humidité, pas de fer­men­ta­tion avec émis­sion de CO2…).

De façon résumée, ce gran­ulé d’un haut niveau de stan­dard sim­pli­fie l’usage de la bio­masse pour tous les usages. Sous sa forme de poudre, le HPCI Green­fu­el® dérisque la chimie verte et la pro­duc­tion de CAD en facil­i­tant l’accès aux dif­férents con­sti­tu­ants du végé­tal, en mino­rant cer­tains pol­lu­ants naturelle­ment présents dans la matrice végé­tale et en prof­i­tant d’un haut niveau de stan­dard­i­s­a­tion quelle que soit l’origine de la bio­masse transformée. 

Revenons à votre première usine mondiale FICAP. Comment vous projetez-vous sur le marché ? 

FICAP est une pre­mière réponse aux enjeux de la tran­si­tion écologique. C’est une pre­mière mon­di­ale qui représente une démon­stra­tion du savoir-faire d’Européenne de Bio­masse. Après un clos­ing réal­isé en juin 2018 dans le cadre d’un parte­nar­i­at avec MERIDIAM et la CDC – Banque des Ter­ri­toires, ce site représente un investisse­ment de l’ordre de 110 M€ et une créa­tion de plus de 50 emplois directs, aux­quels d’ajoutent env­i­ron 300 emplois indi­rects (fil­ière forestière, logis­tique, maintenance). 

Cette usine pré­fig­ure les sites sur lesquels nous tra­vail­lons actuelle­ment pour dis­pos­er d’une fil­ière sta­bil­isée et sécurisée à l’échelle du ter­ri­toire nation­al. Chaque usine est créa­trice d’un écosys­tème à son échelle, et par­ticipe à la créa­tion d’une dynamique ter­ri­to­ri­ale forte au sein des ter­ri­toires ruraux.

Pour attein­dre cet objec­tif, nous ambi­tion­nons la créa­tion d’une fil­ière com­plète d’une dizaine d’usines en France et en Europe. Nous tra­vail­lons égale­ment avec des parte­naires à la mise en place de telles fil­ières sur d’autres ter­ri­toires comme l’Amérique du Nord. Des accords ont été signés en ce sens. 

D’autres accords ont égale­ment été signés ou sont en cours de sig­na­ture pour met­tre en place des parte­nar­i­ats pour se servir du HPCI Green­fu­el® comme matière pre­mière pour dif­férents process indus­triels, comme la chimie verte ou la pro­duc­tion de CAD. Les annonces récentes du gou­verne­ment français et des acteurs du secteur mon­trent l’existence d’un marché réel, soutenu et exis­tant dans la durée.

Dans un contexte où la décarbonation des usages s’accélèrent, quels sont, selon vous, les freins qui persistent ? 

Les enjeux sont à l’échelle de la décar­bon­a­tion : mon­di­aux. Il s’agit de met­tre en place rapi­de­ment des usines suff­isam­ment nom­breuses pour peser dans la lutte con­tre le réchauf­fe­ment cli­ma­tique. Pour cela, il nous faut par­al­lélis­er l’ensemble de nos pro­jets et avancer très vite. Nous ne pou­vons pas nous per­me­t­tre de con­stru­ire les usines les unes après les autres, mais en même temps. 

Par ailleurs, cer­taines procé­dures typ­ique­ment français­es ren­dent les dif­férentes phas­es pré­para­toires par­ti­c­ulière­ment longues et com­plex­es par rap­port à d’autres pays plus attrac­t­ifs sous cet angle. Nous avons besoin du sou­tien de l’État français pour nous per­me­t­tre d’aller vite dans cette mise en place, et con­stituer ain­si une réponse à la hauteur.

Enfin, à l’heure où se dévelop­pent les impor­ta­tions de pro­duits énergé­tiques pour rem­plac­er les éner­gies fos­siles, la tech­nolo­gie d’Européenne de Bio­masse per­met une réponse forte, nationale et non délocalisable. 

Recherchez-vous des ingénieurs et des jeunes talents pour renforcer vos équipes et relever ces défis ?

Dans le cadre de sa dynamique de crois­sance, Européenne de Bio­masse est actuelle­ment en train de pass­er de petite PME au statut de groupe inter­na­tion­al. Des recrute­ments seront ain­si mis en place dans les prochaines années pour accom­pa­g­n­er la crois­sance de l’entreprise.

En par­al­lèle de cette struc­tura­tion, la mise en place des fil­ières de pro­duc­tion va représen­ter des oppor­tu­nités pour des jeunes pour inté­gr­er pleine­ment la dimen­sion indus­trielle, tout en par­tic­i­pant à une dynamique por­teuse d’avenir.

L’ADN d’Européenne de Bio­masse est la trans­for­ma­tion de la bio­masse au ser­vice de la tran­si­tion écologique, et nous souhaitons partager nos valeurs avec des jeunes tal­ents et des cadres pour con­tin­uer cette belle aven­ture ensemble. 

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