Sept promotions sous le signe des neutrons

Dossier : ExpressionsMagazine N°675 Mai 2012
Par Daniel SUCHET (08)

La pas­sion pour la sci­ence n’a pas d’âge et s’il fal­lait encore le prou­ver, la vis­ite à Greno­ble du binet Boson, dont l’objectif est de rap­procher étu­di­ants et chercheurs, en serait une démon­stra­tion irréfutable. Invités par Yves Bréchet (81) et encadrés par leurs anciens de la 2006, des élèves des pro­mo­tions 2008, 2009 et 2010 ont eu la chance de pou­voir vis­iter l’Institut Laue Langevin et l’Euro­pean syn­chro­tron radi­a­tion facil­i­ty en com­pag­nie de Frédéric Livet (67), mem­bre de la Société française de physique, et de Robert Dau­tray (49), mem­bre de l’Académie des sciences.

Aussi unique que son concepteur

L’Institut Laue Langevin (ILL) est né d’une col­lab­o­ra­tion fran­co-alle­mande dans le milieu des années soix­ante et compte aujourd’hui plus d’une trentaine de nation­al­ités par­mi ses util­isa­teurs. Il per­met à des équipes de recherche de son­der et d’analyser des échan­til­lons de matière grâce à un flux de neu­trons généré par un réac­teur nucléaire. Ces expéri­ences cou­vrent un spec­tre extrême­ment large entre physique fon­da­men­tale et diag­nos­tic industriel.

Toute par­tic­ule chargée accélérée dans un champ élec­tro­mag­né­tique émet un ray­on­nement ; c’est sur cette pro­priété fon­da­men­tale que repose un synchrotron.

Comme l’ont expliqué J.-L. Mar­tinez, directeur adjoint de l’ILL, et H. Guy­on, chef de la divi­sion réac­teur, l’ensemble représente une véri­ta­ble prouesse tech­nique, non seule­ment sur le plan du génie nucléaire (l’ILL délivre le flux de neu­trons le plus intense dans le monde de la recherche) mais aus­si sur le plan du génie civ­il (il est situé au con­flu­ent de l’Isère et du Drac et subit les efforts des mas­sifs de la Char­treuse, de Belle­donne et du Vercors).

Mal­gré cela, il peine à éton­ner autant que son con­cep­teur, Robert Dau­tray, dont les expli­ca­tions et les com­men­taires tout au long de la vis­ite ont vive­ment impres­sion­né l’auditoire. Quar­ante ans après les derniers coups de crayons sur les plans du réac­teur, Robert Dau­tray est, à 80 ans passés, tou­jours ani­mé d’une même pas­sion com­mu­nica­tive, voire contagieuse.

Des polytechniciens sous rayons X

L’Euro­pean syn­chro­tron radi­a­tion facil­i­ty pro­pose lui aus­si de son­der la matière, mais avec des pho­tons plutôt qu’avec des neu­trons. Un anneau long d’un kilo­mètre accélère des élec­trons dont le ray­on­nement est util­isé pour étudi­er des struc­tures de pro­téines, analyser des oeu­vres d’art ou déter­min­er les pro­priétés d’un métal.

Aus­si mas­sifs que les noy­aux atom­iques et dépourvus d’in­ter­ac­tions élec­tro­mag­né­tiques, les neu­trons sont des son­des priv­ilégiées pour analyser, non seule­ment la com­po­si­tion struc­turale, mais aus­si la dynamique de la matière con­den­sée sous toutes ses formes.

Guidés par Frédéric Livet, Guil­laume Beu­ti­er et Jean François Bérar, les vis­i­teurs ont pu explor­er l’intérieur du long tun­nel cir­cu­laire du syn­chro­tron ain­si qu’une des lignes de lumière util­isée pour la recherche, avant de rejoin­dre Philippe Noz­ières, de l’Académie des sci­ences, pour un pas­sion­nant échange de physique théorique.

Un passage de relais

Cette vis­ite mar­que égale­ment le pas­sage de relais du binet Boson de la pro­mo­tion 2009 à la pro­mo­tion 2010 : c’est à présent Loïc Hervi­ou et Thomas Stre­bler qui repren­nent le flam­beau et seront en charge d’assurer les liens entre poly­tech­ni­ciens et monde de la recherche. Ils ont d’ores et déjà prévu d’organiser, dans la voie ouverte par Georges Charpak, une séance de démys­ti­fi­ca­tion des super­sti­tions par la prestidigitation.

Poster un commentaire