Quelques données de base sur les PME françaises

Dossier : Le tissu des PME françaisesMagazine N°522 Février 1997
Par Georges COMÈS (54)

Qu’entend-on par PME ?

Critères quantitatifs

Pour l’IN­SEE, les PME sont des “entre­pris­es de struc­ture juridique pro­pre, de 10 à 499 salariés”.

Les PME sont encadrées, au-dessous de 10 salariés par les TPE (très petites entre­pris­es) et au-dessus de 500 salariés par les GE (grandes entreprises).

À l’in­térieur de la pop­u­la­tion des PME, on dis­tingue quelque­fois les PE (petites entre­pris­es) de 10 à 49, et les ME (moyennes entre­pris­es) de 50 à 499.

C’est à ces déf­i­ni­tions que nous nous référerons pour les chiffres cités, sauf excep­tions signalées.

Mais, il y a des vari­antes dans les définitions :
— pour les PME de l’In­dus­trie (PMI) les enquêtes du Min­istère ne por­tent que sur la tranche “20–500” ;
— à l’in­verse, la Con­fédéra­tion générale des PME (CGPME) englobe tout, de 0 à 500 ;
— pour l’Eu­rope, l’ob­ser­va­toire européen des PME (Euro­stat) sépare les micros (<10) les petites (10 à 100) et les moyennes (100 à 500) ;
— et la Com­mis­sion de Brux­elles repar­le des PME avec une nou­velle déf­i­ni­tion : “entre­prise employ­ant moins de 250 per­son­nes dont le chiffre d’af­faires n’ex­cède pas 40 mil­lions d’é­cus et qui n’est pas détenu, à la hau­teur de 25 % ou plus du Cap­i­tal, par une ou plusieurs entre­pris­es ne cor­re­spon­dant pas à la déf­i­ni­tion de la PME.”

Au Japon, le pla­fond d’ef­fec­tif pour la PME est de 300 per­son­nes et il s’y ajoute un pla­fond pour le cap­i­tal (100 mil­lions de yens, soit 5 MF).

Aux USA, on par­le plutôt de petites et de grandes entre­pris­es (small and big busi­ness) et dans l’e­sprit de la pop­u­la­tion, small c’est moins de 10 per­son­nes. Mais, il existe des sta­tis­tiques des “SME”, par tranch­es de 50, 100, 500, et même 1 000 salariés.

Critères qualitatifs

Le fait que le con­cept de PME résiste à des critères quan­ti­tat­ifs aus­si flous mon­tre qu’il repose sur une autre base com­mune à toutes les tailles, à savoir : la présence d’un “patron-pro­prié­taire” qui prend per­son­nelle­ment le risque com­plet de la réus­site ou de l’échec. Vision un peu exces­sive certes puisqu’elle ignore les frac­tion­nements du Cap­i­tal et exclue les fil­iales, mêmes minori­taires, des GE. Mais elle répond encore assez bien à la réal­ité (72 % des patrons de PME sont majori­taires dans le cap­i­tal) et cor­re­spond à l’im­age de mar­que de la PME dans l’opin­ion publique.

Cette image de mar­que est néan­moins tirée vers le bas par les con­tacts de la vie quo­ti­di­enne, puisque, dans les enquêtes d’opin­ion, la PME est perçue comme une petite unité ne dépas­sant pas 50 à 100 personnes.

De son côté, la grande presse pro­fes­sion­nelle, fascinée par les grandes entre­pris­es traite la PME avec une cer­taine con­de­scen­dance. C’est pourquoi un cer­tain nom­bre d’au­teurs, voulant s’ex­primer sur les PME de plus grande taille, utilisent le sigle MPE (moyennes et petites entreprises).

Enfin ceux qui reti­en­nent majori­taire­ment le critère de l’équipe famil­iale “dirigeant-pro­prié­taire”, ont lancé le sigle MEP (moyenne entre­prise pat­ri­mo­ni­ale) et en éten­dent l’ap­pli­ca­tion jusqu’à des entre­pris­es de 2 000 personnes. 

Que sait-on des PME ?

Jusqu’à une époque récente, les infor­ma­tions sur les PME étaient très incom­plètes et pas tou­jours très sûres. Depuis une dizaine d’an­nées de gros pro­grès ont été accom­plis, et la base d’in­for­ma­tion don­née par l’IN­SEE s’est beau­coup enrichie et fiabilisée.

Au niveau européen, l’Eu­ro­pean Net­work for SME Research (ENSR) a réus­si, en 1993, à con­solid­er les sta­tis­tiques des divers pays et à établir un rap­port panoramique (“Obser­va­toire des PME”) dont la dernière ver­sion date de 1995.

À ces travaux d’ensem­ble se sont ajoutées des enquêtes et des études par­ti­c­ulières, notam­ment celles du Ser­vice des sta­tis­tiques indus­trielles (SESSI) du min­istère français de l’In­dus­trie, et celles du Cen­tre de recherche EURO-PME, attaché à l’É­cole supérieure de Com­merce de Rennes.

Le directeur de ce cen­tre, B. Duch­e­neaut, a dirigé en 1994 une enquête appro­fondie auprès de 600 entre­pris­es ; à la suite de quoi il a pub­lié en 1995 un ouvrage très com­plet qui con­stitue une syn­thèse de tous les travaux effec­tués depuis dix ans sur les PME (plus de 300 références). Cet ouvrage, inti­t­ulé Enquête sur les PME français­es a été édité par Max­i­ma. Il a été suivi en 1996 par un deux­ième ouvrage Les dirigeants de PME du même auteur et même éditeur.

Ces deux ouvrages, ain­si que Les chiffres clés des PMI pub­lié par le SESSI ont con­sti­tué nos prin­ci­pale sources d’information.

Il reste néan­moins quelques zones d’om­bre sur les PME, notam­ment en ce qui con­cerne la con­sti­tu­tion de leurs fonds pro­pres et leur proces­sus d’évo­lu­tion. Ces enquêtes nous ren­seignent sur la sit­u­a­tion instan­ta­née mais non sur la tra­jec­toire. En out­re, man­quant d’ob­ser­va­tions antérieures, nous sommes mal infor­més sur les tendances. 

Poids respectif des trois classes d’entreprises

Les entre­pris­es non agri­coles du secteur marc­hand représen­tent, en 1993, env­i­ron 70 % de la pop­u­la­tion active occupée, soit 15,7 mil­lions d’emplois :
31 % dans les GE (4,8 mil­lions d’emplois).
41 % dans les PME (6,5 mil­lions d’emplois).
28 % dans les TPE (4,4 mil­lions d’emplois).

Cette répar­ti­tion se situe dans la moyenne européenne, mais en Alle­magne les GE ont une place plus impor­tante (tableau 1).

La répar­ti­tion du chiffre d’af­faires entre les trois class­es d’en­tre­pris­es est évidem­ment à l’a­van­tage des grandes entre­pris­es, qui incor­porent le chiffre d’af­faires de leurs sous-traitants.

La répar­ti­tion des valeurs ajoutées est proche de celle des emplois. La répar­ti­tion des effec­tifs par grande branche d’ac­tiv­ité dif­fère selon les class­es d’en­tre­pris­es, comme le mon­tre le tableau 2 (chiffre 1993). Les PME sont très représen­ta­tives de la moyenne générale.

Tableau 1
Part dans l’emploi total des entre­pris­es ICS en Fr​ance et dans la CEE
TPE PME GE TOTAL
France​ 28 % 41 % 31 % 100 %
CEE​ 32 % 40 % 28 % 100 %
Alle­magne 19 % 44 % 37 % 100 %
Source : Obser­va­toire européen des PMI, année 1991. OP. cit. Enquête sur les PME français­es, p. 68.

Tableau 2
Indus­trie  BTP  Ter­ti­aire (hors financiers) TOTAL
GE (hors​GE nationales) 41 % 4 % 55 % 100%
PMI​ 31 % 10 % 59 % 100 %
TPE​ 14 % 14 % 72 % 100 %
Ensem­ble 29 % 10 % 61 % 100 %
Source : En​quête sur les PME françaises.

Variations depuis dix ans

De 1983 à 1993 les effec­tifs salariés des entre­pris­es ont var­ié dans les pro­por­tions suivantes :

GE : ‑29,6 %
PME : + 5,​7 %
TPE : + 20,1 %
au total : + 3,3 %
Source : Unedic, citée par 
Enquête sur les PMI françaises.

La forte hausse des TPE provient en grande par­tie de la crois­sance du ter­ti­aire où elles tien­nent une place très importante.

La baisse des GE provient pour par­tie de l’ex­ter­nal­i­sa­tion de leurs activ­ités aux­il­i­aires et du développe­ment de la sous-traitance.

Les PME ont égale­ment prof­ité de ces deux phénomènes, mais elles ont aus­si eu un développe­ment autonome. Néan­moins, depuis 1992 leur effec­tif régresse au même rythme que celui des GE. 

Composition de la population actuelle des PME


Fig­ure 1 : Les effec­tifs des étab­lisse­ments indus­triels de PMI par région en 1992

Tableau 3
Entre­pris­es (mil­liers) Salariés (mil­lions) Salariés​par entreprise
Indus­trie
BTP
Ter­ti­aire
46
21
86
2,5 (30 %)
0,8 (10 %)
4,8 (60 %)
54
38
50
Total 163 8,1 (10,1 %) 49

Tableau 4
Pop­u­la­tion mil­lion d’hab. Nom­bre d’étab­lisse­ments pour 1000 hab.  Nom­bre de salariés pour 1000 hab. 
> 100 000 hab.
 2 000​à 10 000 hab.
Com­munes rurales
26,1
15,0
15,5
6,5
6,4
2,6
135
141
55

Les chiffres pour 1993 sont indiqués dans le tableau 3. Il en ressort :
— il y a en moyenne en France, pour 1 000 habi­tants trois PME et 140 emplois,
— l’ef­fec­tif salarié moyen par entre­prise varie peu d’un secteur à l’autre,
— l’in­dus­trie ne représente que 30 % des effec­tifs totaux des PME.

Répartition sur le territoire

D’après les sta­tis­tiques fournies directe­ment à l’AIMVER par l’IN­SEE, la den­sité des étab­lisse­ments de PME sur le ter­ri­toire est la suiv­ante, en 1992 (tableau 4).

Les PME sont donc présentes dans les petites unités urbaines autant que dans les grandes mais elles sont rares dans le pays rur­al (qui représente 80 % du ter­ri­toire et 27 % de la pop­u­la­tion). Néan­moins elles y sont moins rares que les GE, très con­cen­trées dans les départe­ments urbains (fig­ure 1). 

Le flux des naissances et des décès (figure 2)

Les 200 000 créa­tions d’en­tre­pris­es par an don­nent lieu à 100 000 entre­pris­es durables, dont plus de 90 % restent des TPE et n’ont jamais eu, pour la plu­part, l’am­bi­tion d’aller plus loin. Ain­si les 232 000 nais­sances d’en­tre­pris­es en 1987 ont don­né lieu, cinq ans après, à 7 000 PME représen­tant 100 000 emplois env­i­ron et à 110 000 TPE représen­tant env­i­ron 300 000 emplois.

Les créa­tions de PME ne sont donc pas, en France, une machine à dévelop­per l’emploi qui ait un haut ren­de­ment. Dévelop­per les PME exis­tantes et éviter leur dis­pari­tion mérite une atten­tion au moins égale.

Nous don­nons plus loin des chiffres plus pré­cis pour les PME de l’In­dus­trie (PMI).

Autonomie financière et statut juridique

Plus d’une PME sur six (17,6 %) est liée à une société mère, générale­ment GE. Curieuse­ment la pro­por­tion est plus forte dans les Ser­vices (28 %) que dans l’In­dus­trie (18 %). Elle est min­i­male dans les BTP (7 %) et le Com­merce (12 %).


Fig­ure 2 : Taux de survie des entre­pris­es créées en 1987 suiv­ant les effec­tifs initiaux 

Les PME dépen­dantes sont générale­ment de gross­es PME ; leurs poids en nom­bre d’emplois et en chiffre d’af­faires est donc net­te­ment supérieur à leur pro­por­tion en nom­bre d’entreprises.

En ce qui con­cerne le statut juridique :
— la Société Anonyme est majori­taire (61 %) y com­pris dans les entre­pris­es de 10 à 50 salariés (56 %),
— la SARL se ren­con­tre dans 27 % des PME, (prin­ci­pale­ment dans les moins de 50 salariés),
— env­i­ron 10 % des PME ont des statuts var­iés (SNC, entre­pris­es personnelles…). 

Quelques précisions sur les PMI de 20 à 500 salariés1

Elles sont 23 000, ce qui représente, sur l’ensem­ble des PME indus­trielles 50 % des entre­pris­es, 80 % des emplois et 90 % du chiffre d’affaires.

La PMI moyenne ain­si com­prise a un effec­tif de 70 salariés, et un chiffre d’af­faires de 50 MF, soit 700 KF par tête.

Ce chiffre d’af­faires par tête n’est égal qu’aux deux tiers de celui des GI et la valeur ajoutée aux trois-quarts ; la pro­duc­tiv­ité des PMI paraît donc plus faible que celle des GI.

Les PMI réduisent, elles aus­si leurs effec­tifs : les PMI de 1981 sub­sis­tant en 1992 ont per­du en dix ans 23 % de leur per­son­nel (con­tre 29 % dans les GI). En con­trepar­tie de nou­velles PMI ont com­pen­sé cette perte. Mais depuis 1990, le sol­de est légère­ment négatif et la part des PMI dans les indus­tries man­u­fac­turières pla­fonne après avoir fait un bond de 10 points entre 1980 et 1990 (tableau 5).

Env­i­ron 4 000 PMI sont fil­iales de groupes indus­triels, pour moitié français, pour moitié étrangers. Elles pèsent lourd en chiffre d’af­faires : 40 % du total. Les PMI indépen­dantes restent donc majori­taires mais sont d’assez petite taille (une cinquan­taine de salariés en moyenne)(figure 3).

La place des PMI est dom­i­nante (en nom­bre d’emplois) dans la plu­part des branch­es indus­trielles, plus par­ti­c­ulière­ment dans les branch­es les plus tra­di­tion­nelles : leur per­cée dans les hautes tech­nolo­gies est lente.

FIGURE 3 : PMI INDÉPENDANTES ET PMI DE GROUPES FRANÇAIS OU ÉTRANGERS
Sources : SESSI — Tré­sor — INSEE.

Par rapport à l’étranger

— le poids des PMI de plus de 20 salariés dans l’In­dus­trie est de 52 % en France, con­tre 60 % en Ital­ie et au Japon, 40 % en Alle­magne, 30 % aux USA. L’Alle­magne se car­ac­térise par une forte pro­por­tion de gross­es PMI (100 à 500 salariés), alors que c’est l’in­verse en Ital­ie, où par ailleurs le taux d’indépen­dance par rap­port aux GI est beau­coup plus élevé que chez nous. (Source : SESSI 1995).

Les marges béné­fi­ci­aires des PMI sont supérieures à celles des GI en Ital­ie et en Alle­magne, alors qu’en France elles sont inférieures, et que dans la moyenne européenne elles sont sen­si­ble­ment égales. 

Les dirigeants de PME

Tableau 5 : Év​olution de la place des PMI2 (de 0 à 500 salariés) dans les indus­tries manufacturières
Effec­tifs
(en milliers)
Chiffres d’af­faires
francs courants (mDF)
PMI GI Total PMI/Total 
(%)
Total Part des PMI
>20s (%)
1980
1985
1990
1992
1993
1994
2390
2348
2438
2340
2240
2180
2390
1860
1570
1475
1360
1120
4780
4208
4008
3815
3600
3500
50,0
55,8
60,8
61,3
62,2
62,3
1302
2120
2875
2900
2712
2920
36,7
36,6
39,8
40,0
41,0
41,0
Vari­a­tion
1980-1994
‑210
(-9%)
‑1070
(-45%)
‑1280
(-27%)
+12
points
- +4
points
Sour​ces : SESSI — 1995 — Les chiffres clés des PMI.
INSEE — TEF 1996–1997.

Près de la moitié des patrons de PME actuels (50 % pour les PE, 40 % pour les ME) sont les fon­da­teurs de leur entreprise.

Ces patrons fon­da­teurs ont une for­ma­tion sco­laire lim­itée : 52 % ont un niveau inférieur ou égal au bac (39 % dans les ME) et les créa­teurs d’en­tre­pris­es récents ont le même pro­fil ; 81 % des créa­teurs de 1985 et 75 % des créa­teurs de 1994 ne dépassent pas le niveau du bac. Dans les créa­tions, les deman­deurs d’emploi sont restés longtemps minori­taires (de l’or­dre de 25 %), mais en 1994 ils sont mon­tés à 44 %.

La plu­part des patrons (72 %) con­trô­lent le cap­i­tal de leur entre­prise : dont 44 % avec leur seul apport per­son­nel. Mais 28 % sont minori­taires ; ils sont même 51 % dans les ME.

Les créa­teurs d’en­tre­pris­es français répug­nent à intro­duire des parte­naires extérieurs dans leur cap­i­tal et sont peu attirés par les offres du Cap­i­tal-risque, sauf chez une minorité de créa­teurs récents (plutôt “hautes tech­nolo­gies”) pour lesquels l’ap­por­teur d’ar­gent est un four­nisseur comme un autre.

Les PME sont con­sid­érées comme “famil­iales” lorsque la famille du patron par­ticipe à l’ac­tion­nar­i­at ou à la ges­tion de l’en­tre­prise : la moitié des PME sont dans ce cas.

Même dans les entre­pris­es dont le dirigeant n’est pas action­naire majori­taire, le Con­seil d’Ad­min­is­tra­tion a un rôle assez dis­cret. Dans 9 % des cas seule­ment, il se sent autorisé à révo­quer le PDG et dans 17 % des cas il stat­ue sur sa rémunération.

Cette dis­cré­tion est jus­ti­fiée par le fait que le patron de PME est totale­ment engagé dans son entre­prise ; il y risque son pat­ri­moine, sa répu­ta­tion pro­fes­sion­nelle, et en cas d’échec son honneur.

Cette sit­u­a­tion a une forte influ­ence sur le com­porte­ment du chef d’en­tre­prise et légitime la dis­tinc­tion faite par le CGPME entre le “patronat de ges­tion” — qui est celui des fil­iales de groupes — et le “patronat réel” qui est celui des patrons-propriétaires.

————————————————————————————-
1. Source : Les chiffres clés des PMI — 1995 — SESSI — Min­istère de l’Industrie. 
2.  Y com­pris les “10 à 19 salariés” 

Poster un commentaire