Répartition ou capitalisation : un débat renouvelé

Dossier : Retraite et prévoyanceMagazine N°644 Avril 2009Par Raoul BRIET

Il n’est pas plus aisé de répon­dre à cette ques­tion que d’analyser aujour­d’hui la vraie nature et la vraie portée de la crise que nous tra­ver­sons : ” une crise du crédit “, somme toute ana­logue à celle que con­nais­sent péri­odique­ment les marchés financiers (comme la ” bulle Inter­net ” du début des années 2000), même si la glob­al­i­sa­tion joue aujour­d’hui un rôle d’ac­céléra­teur et de mul­ti­pli­ca­teur ? Ou une crise sans précé­dent, plus fon­da­men­tale et qui con­duira à trans­former en pro­fondeur la sphère économique et finan­cière dans les prochaines décennies ?

Rémunérer le risque

La crise mar­que la fin d’une his­toire, celle de la glob­al­i­sa­tion heureuse dont on s’aperçoit qu’elle a été financée par l’en­det­te­ment général­isé et donc dopée par le crédit. Le retour à une finance plus sobre, plus sim­ple et mieux régulée est une con­di­tion néces­saire à une crois­sance économique de long terme souten­able. Mais rien ne per­met toute­fois de penser que, dans ces con­di­tions nou­velles, les marchés financiers ne sauront pas demain rémunér­er le risque que pren­nent les investisseurs.

Les opin­ions publiques res­teront durable­ment mar­quées par la crise financière

Les ” fon­da­men­taux ” du débat n’en seront donc pas boulever­sés pas plus que les défis qui pèsent sur les sys­tèmes de retraite à long terme.

En revanche, il ne fait guère de doute que les opin­ions publiques res­teront durable­ment mar­quées par la crise finan­cière. Si la France est beau­coup moins exposée en ce domaine que d’autres pays, du fait de l’ar­chi­tec­ture de son sys­tème de retraite, il ne fait guère de doute que l’onde de choc va dévelop­per une méfi­ance accrue envers toute évo­lu­tion qui ferait dépen­dre par trop ce revenu sûr atten­du que représente la retraite de l’in­sta­bil­ité con­sub­stantielle aux marchés financiers.

Un contrat social

En fin de compte, la crise finan­cière que nous tra­ver­sons rap­pelle, pour qui l’avait oublié, les ver­tus de la diver­si­fi­ca­tion. Le ” tout cap­i­tal­i­sa­tion “, avec la volatil­ité qui s’y attache, est incom­pat­i­ble avec la sécu­rité et la régu­lar­ité atten­dues d’un revenu de rem­place­ment. La retraite n’est, en effet, pas assim­i­l­able à une opéra­tion d’é­pargne finan­cière. C’est un con­trat social entre généra­tions qui vise à assur­er un revenu sta­ble et sûr après la ces­sa­tion d’ac­tiv­ité. C’est dire que si la cap­i­tal­i­sa­tion a un avenir — et elle en a un, avant comme après la crise -, c’est comme com­plé­ment du socle représen­té dans notre pays par les régimes en répartition.

Une tendance longue

Pour autant, ce serait une erreur de con­sid­ér­er que la crise finan­cière épargne les régimes en répartition.

La crise finan­cière s’est en effet pro­longée en une crise économique pro­fonde, si bien qu’au­jour­d’hui ces régimes sont dure­ment touchés. Plus fon­da­men­tale­ment, les cir­con­stances actuelles ne changent rien à la ten­dance longue qui affecte les régimes en répar­ti­tion : une baisse con­tin­ue du ren­de­ment qu’il est dif­fi­cile de stop­per et, plus encore d’in­vers­er, et, cor­réla­tive­ment, une éro­sion con­tin­ue et très préoc­cu­pante de la con­fi­ance des généra­tions les plus jeunes quant à la capac­ité des régimes exis­tants à leur assur­er une retraite adéquate.

C’est dire que le débat doit être posé en ter­mes de com­plé­men­tar­ité et de dosage de cette com­plé­men­tar­ité, qui ne peut être la même selon le statut social et le niveau de revenu, et que cap­i­tal­i­sa­tion et répar­ti­tion ont par­tie liée.

Une croissance plus régulière

À cet égard, il ne faut pas non plus oubli­er que la tech­nique de la cap­i­tal­i­sa­tion favorise l’émer­gence d’in­vestis­seurs financiers de long terme (fonds de pen­sion ou fonds de réserve) qui peu­vent con­tribuer pos­i­tive­ment à un développe­ment économique durable.

Une manière pour le futur de renou­vel­er les ter­mes du débat répar­ti­tion ou capitalisation.

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