Pour un peu de sagesse à propos du réchauffement climatique

Dossier : ExpressionsMagazine N°714 Avril 2016
Par Marie-Louise CASADEMONT (X74)

Un appel au calme et à la sagesse pour arréter les débats stériles entre cli­ma­to-scep­tiques et cli­ma­to- réchauff­istes. Pour le moment il faut se con­cen­tr­er sur ce que l’humanité doit faire face au change­ment cli­ma­tique. Quelle que soit son impor­tance, les pro­jets de préser­va­tion des ressources naturelles doivent être pour­suiv­is en priorité.

L’état de l’art en matière d’évolution du cli­mat n’est pas achevé, en dépit des impor­tants travaux des sci­en­tifiques du monde entier, notam­ment au sein du GIEC. Peut-être en saurons-nous un peu plus en 2050 ? Il est donc essen­tiel que le doute sci­en­tifique s’applique en ce domaine, compte tenu de la com­plex­ité inhérente aux fac­teurs de cette évolution.

“ Les débats ne laissent aucune place au doute scientifique ”

Nos sociétés humaines con­sid­èrent volon­tiers que la sci­ence a réponse à tout, ce qui est loin d’être vrai. Or, les débats entre cli­ma­to-scep­tiques et cli­ma­to-réchauff­istes ne lais­sent aucune place au doute scientifique.

Sur le plan pra­tique, le débat fon­da­men­tal ne porte pas sur la con­nais­sance et la recherche en évo­lu­tion du cli­mat, mais sur le bien-fondé des actions des sociétés humaines con­tre toute évo­lu­tion poten­tielle du cli­mat. En atten­dant 2050 où l’on en saura peut-être un peu plus.

Le débat fondamental

La vraie ques­tion est : « Quelles dis­po­si­tions l’homme doit-il pren­dre face à l’évolution du cli­mat ? » Pour y répon­dre, la Con­ven­tion cli­mat (UNFCCC, Unit­ed Nations frame­work con­ven­tion on cli­mate change) pro­pose des dis­po­si­tions de réduc­tion des émis­sions de gaz à effet de serre d’une part, et des dis­po­si­tions d’adaptation aux con­séquences du réchauf­fe­ment cli­ma­tique d’autre part.

Atténuer

Même si les émis­sions humaines de gaz à effet de serre n’étaient pas la cause d’un réchauf­fe­ment cli­ma­tique, lequel même ne serait pas avéré, les pro­jets visant à réduire ces émis­sions – pro­jets d’atténuation ou NAMAs (nation­aly appro­pri­ate mit­i­ga­tion actions) – seraient utiles.

Ils ont plusieurs qual­ités intrin­sèques : ils préser­vent les ressources énergé­tiques finies de la planète ; ils per­me­t­tent de dévelop­per et préserv­er la forêt et sa bio­di­ver­sité ; ils génèrent des économies à long terme, la créa­tion d’emplois, etc.

Ils sont aus­si fac­teurs de développe­ment humain grâce aux tech­nolo­gies les plus récentes. Les pro­jets d’atténuation per­me­t­tent en effet aux pays dits en développe­ment de s’affranchir des étapes suc­ces­sives suiv­ies par les pays dits dévelop­pés pour acquérir la maîtrise des tech­nolo­gies mod­ernes, vecteurs de pro­grès humains.

Adapter

Même s’il n’y avait pas de réchauf­fe­ment cli­ma­tique et, donc, de fléaux asso­ciés, les pro­jets de préser­va­tion de la ressource en eau, de préser­va­tion de l’agriculture face aux sécher­ess­es afin de garan­tir la sécu­rité ali­men­taire et autres pro­jets d’adaptation ou NAPAs (nation­al adap­ta­tion pro­grams of actions) seraient tout aus­si utiles.

Ces pro­jets ne sont cepen­dant pas faciles à con­cevoir car il s’agit de cou­vrir un risque naturel dont la pré­dic­tion est délicate.

Il faut d’abord appréhen­der cor­recte­ment les con­séquences et vul­néra­bil­ités dues au réchauf­fe­ment cli­ma­tique. Puis déter­min­er un posi­tion­nement socié­tal face aux risques encou­rus : décide-t-on de les cou­vrir totale­ment, par­tielle­ment, ou pas du tout ?

Décider n’est pas facile : cela s’appelle « gér­er le risque ». Cela sup­pose en général d’approfondir les critères de niveau de risque selon lesquels l’homme engage ou non des investisse­ments pour con­tr­er ces phénomènes dont la pré­dictibil­ité est rel­a­tive, puis d’adopter l’une des trois atti­tudes men­tion­nées après études et réflex­ions divers­es et participatives.

En fait, con­cevoir des pro­jets d’adaptation revient à agir au nom du principe de pré­cau­tion, qui est un principe d’action, et non d’inaction, et con­duit à des décisions.

On soulign­era que les déci­sions pour des pro­jets d’adaptation, si dif­fi­ciles soient-elles, sont à pren­dre locale­ment : il faut pren­dre en compte à la fois les con­séquences locales des vul­néra­bil­ités cli­ma­tiques déjà con­statées ou pro­jetées par les études, et les souhaits locaux de cou­ver­ture des risques.

Des plans climat nationaux

Ces con­stats mon­trent in fine la per­ti­nence, pour un pays par exem­ple, de recenser et plan­i­fi­er l’ensemble des pro­jets d’atténuation et d’adaptation en un « plan cli­mat nation­al ». En ce sens, les con­tri­bu­tions nationales (INDC) pré­parées pour la COP 21 de décem­bre 2015 con­stituent les pre­miers engage­ments des pays pour s’organiser face au réchauf­fe­ment climatique.

“ Des projets qui préservent les biens communs de l’humanité ”

Ce sont des engage­ments dans des pro­jets qui préser­vent les biens com­muns de l’humanité. Ce sont des engage­ments pris envers la Con­ven­tion cli­mat : il reste à ce qu’ils devi­en­nent des engage­ments poli­tiques via des plans cli­mat, NAMAs et NAPAs.

En défini­tive, la lutte con­tre le réchauf­fe­ment cli­ma­tique, qu’il soit de court terme ou de long terme – ce que la sci­ence con­tin­uera d’approfondir –, reste un sujet fon­da­men­tal que les sociétés humaines ne peu­vent éviter. La Con­ven­tion cli­mat est le garant du cadrage inter­na­tion­al de ce sujet, le vecteur de la coopéra­tion entre pays, ou encore le ciment entre les pays pour favoris­er leur organ­i­sa­tion indi­vidu­elle vis-à-vis du climat.

Éviter les débats stériles

Les débats cli­ma­to-scep­tiques et cli­ma­to- réchauff­istes n’apportent rien à la Con­ven­tion cli­mat, ni en ter­mes de propo­si­tions de sim­pli­fi­ca­tion du fonc­tion­nement de l’UNFCCC, l’organe des Nations unies pour la mise en oeu­vre de la Con­ven­tion cli­mat, ni en ter­mes d’amélioration de la ges­tion des flux financiers entre pays signataires.

Rien en ter­mes de pré­pa­ra­tion des nou­veaux engage­ments des pays à venir après le pro­to­cole de Kyoto, ni en ter­mes d’incitations ou d’aides pour éla­bor­er, pilot­er et réalis­er des plans climat.

Inutile de dire que le cli­mat est une « préoc­cu­pa­tion de rich­es » : les pays « pau­vres » ont sou­vent de con­sid­érables vul­néra­bil­ités aux change­ments cli­ma­tiques. Inté­gr­er la ges­tion de la prob­lé­ma­tique du cli­mat à l’ensemble des pro­grammes visant à la réduc­tion de leur pau­vreté ne peut être que bénéfique.

Pour les pays « rich­es » ou « pau­vres », éla­bor­er et gér­er des plans cli­mat est une voie pour la déf­i­ni­tion et la réal­i­sa­tion de pro­jets de développe­ment con­crets, con­struc­tifs, donc finançables. Car il n’est pas pos­si­ble de financer n’importe quel pro­jet : il leur faut une bonne déf­i­ni­tion et une bonne cohérence stratégique entre eux pour faciliter les financements.

Même si l’hypothèse d’un réchauf­fe­ment cli­ma­tique rapi­de n’était pas totale­ment avérée, au lieu de débats stériles et répéti­tifs, mieux vaut soutenir active­ment les gou­ver­nances cli­mat nationales et inter­na­tionales, leviers de développe­ment humain et de con­tri­bu­tion à la paix.

Commentaire

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Fran­cis­Soulié de Morantrépondre
12 avril 2016 à 5 h 12 min

Lut­ter con­tre le réchauf­fe­ment cli­ma­tique
“King Canute and the waves” racon­te com­ment le roi Canute démon­tra à sa cour que les pou­voirs d’un roi n’é­taient rien face à ceux de Dieu en instal­lant son trône sur la plage et en ordon­nant à la marée de ne pas monter.
Nous rem­plaçons Dieu par “Nature”, et nous expliquons au monde com­ment l’homme peut LUTTER con­tre la Nature (le réchauf­fe­ment climatique).
J’ai l’im­pres­sion que, pour de nom­breuses raisons, le réchauf­fe­ment ne peut pas être totale­ment maîtrisé, et donc qu’il est plus urgent de nous pré­mu­nir con­tre ses effets les plus per­vers que de l’empêcher.

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