Le circuit de la Supply Chain

Ponts et chaussées : l’innovation dans la continuité

Dossier : Dossier FFEMagazine N°719 Novembre 2016
Par Hervé HILLION (80)

Quelle était la valeur ajoutée de l’école des Ponts et Chaussées par rapport à l’école Polytechnique et l’université américaine ?

Il y a trente ans, l’école des Ponts et Chaus­sées était un excellent « pont » entre la for­ma­tion concep­tuelle sui­vie à l’X et les uni­ver­si­tés amé­ri­caines plus prag­ma­tiques dans leur enseignement. 

Elle mariait intel­li­gem­ment un excellent niveau théo­rique avec un appren­tis­sage pra­tique de notre métier d’ingénieur.

À l’heure du tricentenaire du corps des Ponts et Chaussées, quel regard portez-vous sur l’évolution de votre ancienne école ?

L’innovation dans la conti­nui­té ! Pour­quoi ? Parce que les dis­ci­plines fon­da­men­tales de l’ingénieur sont tou­jours ensei­gnées à haut niveau, tout en pré­pa­rant les élèves aux métiers du futur. Il y a une tren­taine d’années, c’était, à ma connais­sance, la seule Grande École à avoir noué des rela­tions avec des uni­ver­si­tés amé­ri­caines pres­ti­gieuses (M.I.T, Har­vard, Ber­ke­ley, Stanford,…). 

L’excellence du cur­sus des Ponts et Chaus­sées était recon­nue par ces uni­ver­si­tés, ce qui était, à l’époque, une vraie gageure pour une Grande École Française ! 

Qu’est-ce qui caractérise selon vous la formation des Ponts et Chaussées ?

Citons déjà la mul­ti-dis­ci­pli­na­ri­té, à tra­vers toutes les filières/options offertes aux étu­diants (amé­na­ge­ment, finance, génie indus­triel,…). Mais en ceci les Ponts et Chaus­sées ne sont pas uniques. 

“ IL FAUT S’AFFRANCHIR DU FORMATAGE DES CONCOURS : LA COMPLEXITE N’EST PAS DANS LA RECHERCHE DE SOLUTIONS MAIS DANS LA FORMULATION DES BONNES QUESTIONS ”, ASSÈNE HERVÉ HILLION.

Peut-être plus carac­té­ris­tique est le savant équi­libre qui existe et per­dure entre la for­ma­tion fon­da­men­tale aux sciences de l’ingénieur, les stages en entre­prise, la proxi­mi­té avec des labo­ra­toires de recherche de pre­mier plan, les doubles cur­sus avec des uni­ver­si­tés internationales. 

Il y a en même temps une grande liber­té pour for­ger son propre par­cours d’étudiant, avec pour seule exi­gence la recherche de l’excellence : exac­te­ment ce que l’on exige en prio­ri­té dans la vie professionnelle ! 

Elle doit aussi son succès à sa modernité…

En effet, c’est le cas par exemple pour la dis­ci­pline fon­da­trice des Ponts et Chaus­sées : l’École reste une réfé­rence inter­na­tio­nale avec un lea­der­ship incon­tes­té sur la construc­tion, l’aménagement du ter­ri­toire, les ouvrages d’art, le déve­lop­pe­ment des « smart cities »… 

Mais cela est aus­si vrai dans d’autres domaines où les Ponts ont été véri­ta­ble­ment pré­cur­seurs : les mathé­ma­tiques finan­cières par exemple, domaine où les ingé­nieurs des Ponts sont excel­lents depuis deux décen­nies, le « desi­gn thin­king » qui s’impose aujourd’hui un peu par­tout, la « Sup­ply Chain » pour citer un domaine qui m’est cher ! Et je suis loin d’être exhaustif. 

Comment un ingénieur des Ponts et Chaussées a‑t-il pu s’intéresser à la Supply Chain ?

Il y a trente ans, la Sup­ply Chain n’existait pas en tant que telle, nous par­lions « d’optimisation des flux ». En ce qui me concer­nait, j’avais déjà le goût de l’industrie et du « manu­fac­tu­ring » d’une part, et je m’intéressais éga­le­ment aux outils et tech­niques dites de « Recherche Opé­ra­tion­nelle » d’autre part. 

J’avais choi­si la filière « Génie Indus­triel » (laquelle s’est péren­ni­sée depuis) qui m’avait convain­cu de l’intérêt de ce domaine d’optimisation des flux appli­quée à l’industrie.

Vous avez décidé de créer votre propre activité de conseil en Supply Chain pratiquement dès la sortie des Ponts.
Qu’est-ce qui vous a poussé à vous lancer ?

Dans ce domaine tout à fait inno­vant où je vou­lais me spé­cia­li­ser, je n’ai pas eu beau­coup d’échos auprès des cabi­nets de conseil de l’époque, sou­vent parce qu’ils trou­vaient la dis­ci­pline trop opé­ra­tion­nelle ou trop tech­nique, avec des enjeux limi­tés pour les entre­prises. On sait ce qu’il en advint avec l’explosion de la Sup­ply Chain dès la fin des années 90… 

En tout état de cause et comme je n’avais pas l’intention de renon­cer, j’ai déci­dé de créer ma propre struc­ture PEA Consul­ting à l’époque.

Cela correspondait peut-être aussi à votre état d’esprit…

Il est vrai que j’ai tou­jours eu le goût d’entreprendre qui va de pair avec une cer­taine forme de liber­té. Je n’ai donc pas eu à me for­cer pour me dire qu’il fal­lait que je crée ma propre boîte ! 

Il est amu­sant de consta­ter 25 ans après com­bien de jeunes diplô­més sont atti­rés vers le monde des « start-ups », ce qui est une excel­lente chose. Au début des années 90, je fai­sais figure d’OVNI en sor­tant d’une Grande École d’ingénieur…

Votre formation à l’école des Ponts et Chaussées est-elle adaptée à votre activité de conseil ?

Oui et non. Oui dans la mesure où le métier de conseil néces­site de l’agilité intel­lec­tuelle, de la pro­fon­deur d’analyse et de la capa­ci­té à gérer la com­plexi­té. Insuf­fi­sam­ment du point de vue de l’apprentissage des dis­ci­plines « soft », c’est-à-dire la ges­tion des rela­tions humaines dans l’entreprise et plus géné­ra­le­ment les pro­blé­ma­tiques de conduite du changement. 

J’ajoute qu’il est impé­ra­tif de sor­tir du syn­drome « concours » ce qui n’est mal­heu­reu­se­ment pas tou­jours le cas dans le conseil : car la com­plexi­té n’est pas dans la solu­tion, mais dans la for­mu­la­tion des bonnes questions ! 

Le métier de conseil implique donc d’aller plus loin qu’une question d’ingénierie…

Abso­lu­ment, le consul­tant doit certes s’assurer de la per­ti­nence « tech­nique » de ses recom­man­da­tions et évi­ter toute erreur de raisonnement. 

Mais cela ne suf­fit pas : il faut savoir appré­hen­der les res­sorts cachés des acteurs de l’entreprise, com­prendre les dimen­sions mana­gé­riales, poli­tiques, cultu­relles, qui fondent les déci­sions. Que valent nos recom­man­da­tions si elles res­tent « lettre morte », en dépit de leur per­ti­nence technique ? 

Qu’est-ce qui vous différencie par rapport à d’autres cabinets de conseil spécialisés dans la Supply Chain ?

Tout d’abord le fait que nous inno­vons en per­ma­nence, la façon dont nous abor­dons la Sup­ply Chain aujourd’hui n’a rien à voir avec ce qui ce fai­sait il y a seule­ment une dizaine d’années.

C’est le cas par exemple de la « Sup­ply Chain Digi­tale » où nous avons déve­lop­pé une pla­te­forme de smart data, mais aus­si de la « Sup­ply Chain Finance », où nous sommes les seuls aujourd’hui à dis­po­ser d’une offre inté­grant les opé­ra­tions, la finance et la ges­tion des risques de la Sup­ply Chain. 

J’ajoute par ailleurs que nous tra­vaillons dans un esprit et une culture « start-up » avec des asso­ciés qui res­tent en per­ma­nence « sur le ter­rain », au contact direct avec les clients aus­si bien qu’avec les jeunes consultants. 

Quelle est votre touche et dans quels grands secteurs d’activités intervenez-vous ?

Nous avons un cœur d’expertise, des métho­do­lo­gies et des outils qui nous sont propres, mais nous ne déli­vrons pas de « prêt-à-penser ». 

Au contraire, nous cher­chons tou­jours le « sur-mesure » en matière de recom­man­da­tions en Sup­ply Chain, et évi­tons en par­ti­cu­lier l’écueil des soi-disant « meilleures pra­tiques » appli­cables à tous. C’est cette manière de faire qui, je crois, est appré­ciée de nos clients et des consul­tants qui tra­vaillent avec moi. 

S’agissant des sec­teurs d’activité, nous inter­ve­nons dans de nom­breuses filières indus­trielles : Auto­mo­bile, Aéro­nau­tique, Luxe, Éner­gie, Dis­tri­bu­tion, Grande Consom­ma­tion. Nous sommes éga­le­ment pré­sents dans cer­tains sec­teurs du service. 

Comment voyez-vous l’avenir des Ponts et Chaussées ?

EN BREF

Say Partners est un cabinet de conseil spécialisé en “ Supply Chain Management ”, avec des offres innovantes en matière de “ Digital Supply Chain ”, “ Supply Chain Finance ” et “ Supply Chain Risk Management ”.
Say Partners intervient pour les grandes et moyennes entreprises de tous secteurs : industrie, distribution, énergie & utilities, services.

Les Ponts et Chaus­sées est l’une des plus anciennes Écoles d’Ingénieur à ma connais­sance (Tri­cen­te­naire !), donc je crois qu’elle a fait la preuve de sa capa­ci­té à évo­luer en per­ma­nence pour pré­pa­rer aux mieux les ingé­nieurs aux défis du futur ! 

Cette capa­ci­té d’adaptation est pour moi plus impor­tante que la tra­jec­toire elle-même, sur­tout dans un monde où le futur est de moins en moins prévisible. 

À cet égard, je ne crois pas qu’il faille craindre la « concur­rence » des très grandes uni­ver­si­tés inter­na­tio­nales et la mon­dia­li­sa­tion : je suis cer­tain que l’École des Ponts et Chaus­sées conti­nue­ra d’avoir toute sa place à l’échelle glo­bale, si elle sait pré­ser­ver son iden­ti­té, son niveau d’excellence et son « ADN », ce dont je ne doute pas.

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