L'innovation chez Pfizer

« L’innovation ne doit plus être perçue comme un coût, mais un investissement »

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°770 Décembre 2021
Par Luca MOLLO
Par Olivier DEMARCQ

Recherche, valo­ri­sa­tion de la data, digi­ta­li­sa­tion, inno­va­tion, pan­dé­mie… sont autant de sujets qui mobi­lisent le monde phar­ma­ceu­tique. Luca Mol­lo, direc­teur médi­cal Pfi­zer France et méde­cin de for­ma­tion et Oli­vier Demarcq, direc­teur médi­cal pour la divi­sion mala­dies rares et méde­cin de for­ma­tion nous expliquent tout ce que cela implique pour un acteur d’envergure inter­na­tio­nale comme Pfizer.

Comment un acteur comme Pfizer appréhende la santé à l’ère du numérique ? 

Dans le domaine de la san­té, le numé­rique repré­sente une immense oppor­tu­ni­té à dif­fé­rents niveaux : R&D, ciblage thé­ra­peu­tique, opti­mi­sa­tion de notre orga­ni­sa­tion en interne et oppor­tu­ni­té de par­te­na­riat avec des acteurs externes. Au sein de Pfi­zer, le virage numé­rique a été amor­cé bien avant la crise sani­taire. La pan­dé­mie n’a fait qu’accélérer une trans­for­ma­tion qui était déjà engagée. 

Dans ce cadre, le déve­lop­pe­ment et l’intégration du numé­rique mais aus­si le trai­te­ment de la don­née et l’utilisation de l’intelligence arti­fi­cielle sont des axes prio­ri­taires. Au-delà, il faut pou­voir nous entou­rer de com­pé­tences et de talents. D’ailleurs, nous avons créé au sein de Pfi­zer France un centre d’excellence dédié au trai­te­ment de la don­née en vie réelle, per­met­tant notam­ment de mieux carac­té­ri­ser une prise en charge thé­ra­peu­tique, un par­cours de soin et de mieux iden­ti­fier et appré­hen­der les besoins et le vécu des patients. C’est une dimen­sion stra­té­gique dans notre sec­teur pour laquelle nous avons notam­ment besoin d’experts de la don­née, de data scien­tists, pro­fils très pri­sés sur le mar­ché de l’emploi.

Cette accé­lé­ra­tion de l’innovation au sein de Pfi­zer se tra­duit éga­le­ment par des par­te­na­riats. Nous avons, par exemple, lan­cé le Pfi­zer Heal­th­care Hub pour accom­pa­gner des start-up qui tra­vaillent notam­ment sur le numé­rique appli­qué à la san­té au ser­vice des patients. Nous avons une démarche de sou­tien et d’appui aux start-up inno­vantes avec qui nous par­ta­geons des enjeux de recherche com­muns. Il s’agit essen­tiel­le­ment de jeunes socié­tés créa­tives et inno­vantes dont les solu­tions peuvent appor­ter un béné­fice pour les patients ; amé­lio­rer leur prise en charge ; contri­buer à mieux suivre et gérer leur mala­die ; mais encore lut­ter contre l’errance diag­nos­tique… Cela per­met de mettre en place un cercle ver­tueux qui, au-delà de la dimen­sion thé­ra­peu­tique, prend éga­le­ment en compte le par­cours de soin et de vie des patients.

L’innovation et la quête de sens restent des axes stratégiques et structurants dans le monde de la santé. Qu’en est-il pour vous ? 

Lea­der phar­ma­ceu­tique mon­dial, Pfi­zer est impli­qué dans le trai­te­ment de 16 des 21 pre­mières mala­dies mon­diales. Sous l’impulsion de notre CEO, nous avons opé­ré un recen­trage de notre recherche sur des domaines très inno­vants pour satis­faire des besoins médi­caux en impasse thé­ra­peu­tique. En 2020, nous avons accé­lé­ré la trans­for­ma­tion de notre orga­ni­sa­tion pour encore plus miser sur la science et l’innovation.

Pour Pfi­zer, « inno­ver » c’est se pré­pa­rer aux révo­lu­tions médi­cales de demain : la lutte mon­diale contre l’antibiorésistance, contre les can­cers ou contre les acci­dents vas­cu­laires céré­braux, la lutte contre l’errance diag­nos­tique pour les per­sonnes atteintes de mala­dies rares ou encore le déve­lop­pe­ment de l’immunothérapie et de la thé­ra­pie génique. Pour conti­nuer à aug­men­ter l’espérance de vie en bonne san­té des popu­la­tions, c’est aus­si s’intéresser en prio­ri­té aux besoins médi­caux non satis­faits, c’est-à-dire dans lequel peu de solu­tions existent pour le patient et où les besoins en inno­va­tion sont très importants.

Ce choix stra­té­gique se tra­duit par une ambi­tion très forte : le lan­ce­ment de 25 médi­ca­ments inno­vants à hori­zon 2025 pour appor­ter des réponses aux grands enjeux de san­té publique.

Cette trans­for­ma­tion sous-entend de revoir notre orga­ni­sa­tion en interne et de gagner en agi­li­té en nous ins­pi­rant des méthodes et des pro­ces­sus des bio­tech­no­lo­gies, mais éga­le­ment de nouer des par­te­na­riats et de tra­vailler avec l’ensemble des par­ties pre­nantes de notre écosystème. 

En paral­lèle, il y a aus­si la volon­té d’œuvrer pour un monde en meilleure san­té. Cet enga­ge­ment est au cœur de notre rai­son d’être et des valeurs que nous pro­mou­vons auprès de nos équipes et col­la­bo­ra­teurs. Nous culti­vons une intel­li­gence col­lec­tive qui pour­ra être mise au ser­vice de l’innovation et de la recherche et du déve­lop­pe­ment afin d’améliorer dura­ble­ment la vie des patients. 

Cet enga­ge­ment se tra­duit aus­si par le fait que nous nous posi­tion­nons comme un acteur de san­té publique et un par­te­naire des auto­ri­tés de san­té et des gou­ver­ne­ments afin de mettre rapi­de­ment à dis­po­si­tions des malades des solu­tions thé­ra­peu­tiques pour répondre à un besoin médi­cal fort. Pour mettre à dis­po­si­tion de la col­lec­ti­vi­té des inno­va­tions dans des délais courts, il faut pou­voir s’appuyer sur une culture du dia­logue et de l’échange bien ancrée entre les dif­fé­rentes par­ties pre­nantes du public, du pri­vé et en inté­grant éga­le­ment les asso­cia­tions de patients. La plus récente illus­tra­tion est bien évi­dem­ment le vac­cin contre la Covid-19. Depuis plu­sieurs années nous avions iden­ti­fié la tech­no­lo­gie basée sur l’ARNm comme une poten­tielle approche inno­vante pour déve­lop­per des vac­cins plus effi­caces contre la grippe et les infec­tions virales entre autres. La col­la­bo­ra­tion avec une bio­tech inno­vante, la prise de risque, la volon­té de miser sur la science des nou­velles tech­no­lo­gies et nos impor­tants inves­tis­se­ments ont fait le reste !

Nos actions et ini­tia­tives ont plu­sieurs objec­tifs sou­vent com­plé­men­taires : accé­lé­rer le déve­lop­pe­ment de solu­tions pour pro­té­ger la popu­la­tion mon­diale ; mieux pré­pa­rer le sec­teur face aux futures crises ; faci­li­ter les échanges et l’accès des tra­vaux de recherche à toute la communauté.

Quels sont néanmoins les enjeux qui persistent ? 

Dans notre sec­teur, un des enjeux est la pré­ser­va­tion de l’innovation sans laquelle, nous n’aurions pu faire face à cette crise mon­diale. Nous devons garan­tir cette inno­va­tion et entre­te­nir les moyens qui nous per­mettent d’innover. L’innovation doit être sou­te­nue au juste prix et doit être un bien à sauvegarder. 

La période que nous tra­ver­sons aura per­mis de retrou­ver un niveau de confiance impor­tant vis-à-vis des entre­prises du médi­ca­ment et cela grâce à notre capa­ci­té d’innovation et la fia­bi­li­té démon­trée dans le res­pect de nos enga­ge­ments sur la capa­ci­té d’approvisionner dans un contexte ten­du où la demande a été très forte notam­ment pour les trai­te­ments uti­li­sés en soins cri­tiques et les vaccins.

Nous avons remar­qué un gain cer­tain en cré­di­bi­li­té et répu­ta­tion vis-à-vis des dif­fé­rents acteurs de la san­té mais aus­si de la popu­la­tion générale.

Aujourd’hui, un autre enjeu est de faire per­du­rer ce modèle qui va per­mettre au monde de la san­té d’être plus agile et rapide dans la mise à dis­po­si­tion de solu­tions inno­vantes au béné­fice des patients. L’urgence impo­sée par la crise sani­taire a contri­bué au déploie­ment d’énergie, de moyens et d’efforts com­muns pour faire face à une situa­tion excep­tion­nelle. Il est évident qu’il y aura un avant et un après Covid-19. Et nous devons par­ti­ci­per à la construc­tion de cette « nou­velle nor­ma­li­té » dès main­te­nant. Cette dyna­mique doit être pré­ser­vée et accé­lé­rée, car nous ne sommes pas à l’abri de nou­velles crises sanitaires. 

En France, dans le cadre de la recon­quête de la sou­ve­rai­ne­té indus­trielle et sani­taire enga­gée par le gou­ver­ne­ment, une des prio­ri­tés est la néces­si­té de repen­ser le sys­tème de san­té à la lumière des der­niers événements. 

À notre niveau, nous saluons cette ini­tia­tive mais il est indis­pen­sable de consi­dé­rer ces enjeux au regard des ques­tions d’attractivité et de com­pé­ti­ti­vi­té rela­tifs à la recherche, au déve­lop­pe­ment et à l’accès au mar­ché notam­ment pour s’assurer que les patients puissent béné­fi­cier de ce pro­grès thérapeutique. 

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