OncoDiag développe des tests simples de dépistage du cancer

Des tests simples, mais efficaces pour dépister et faire le suivi des cancers

Dossier : Vie des entreprises - HealthtechMagazine N°793 Mars 2024
Par Claude HENNION

Onco­Diag innove pour déve­lop­per des tests simples de dépis­tage du can­cer, non-inva­sifs, sen­sibles et spé­ci­fiques à chaque patho­lo­gie. Avec déjà plu­sieurs tests dans son por­te­feuille, la start-up contri­bue acti­ve­ment au dépis­tage et au sui­vi des réci­dives. Claude Hen­nion, pré­sident de cette entre­prise inno­vante, nous en dit plus.

Votre ambition est de simplifier le diagnostic, le dépistage et le suivi des récidives. Dites-nous en plus sur votre positionnement dans ce cadre ? 

Dans le domaine du can­cer, les tests et les exa­mens des­ti­nés à dépis­ter et à diag­nos­ti­quer sont par­fois rebu­tants, com­plexes, longs, pénibles, voire dou­lou­reux. Cette réa­li­té engendre des réti­cences bien com­pré­hen­sibles chez les patients, mais elle pro­voque aus­si des retards qui réduisent leurs chances de guérison. 

Dans cette démarche, votre objectif est de simplifier au maximum ces tests pour les patients. Pourquoi est-ce essentiel ? Comment cela se traduit-il concrètement ? 

Onco­Diag déve­loppe des tests basés sur les der­nières avan­cées de la bio­lo­gie molé­cu­laire telles que la PCR, le NGS (séquen­çage de nou­velle géné­ra­tion), la spec­tro­mé­trie de masse afin de recher­cher à par­tir de simples recueils d’urine ou de prises de sang des mar­queurs spé­ci­fiques de cancer.

Aujourd’hui, vous proposez un premier test, Urodiag qui permet de détecter très tôt les récidives du cancer de la vessie. Dites-nous en plus.

Le can­cer de la ves­sie est un can­cer dont le taux de réci­dive est très éle­vé : 80% de réci­dive dans les cinq ans. Un sui­vi régu­lier post-opé­ra­toire des patients est néces­saire. À l’heure actuelle, ce sui­vi est pra­ti­qué en exa­mi­nant les parois de la ves­sie à l’aide d’une camé­ra insé­rée par les voies natu­relles. Cet exa­men très pénible doit être réa­li­sé tous les trois mois. Cer­tains patients retardent au maxi­mum cet exa­men, alors que cer­tains ne le font plus du tout. En cas de réci­dive, cette situa­tion peut très vite deve­nir dramatique. 

Fort de ces constats, Onco­Diag pro­pose donc de rem­pla­cer cet exa­men par un simple test uri­naire. À par­tir d’une ana­lyse par PCR des cel­lules tumo­rales qui ont des­qua­mées dans l’urine, le test Uro­diag va per­mettre de diag­nos­ti­quer très rapi­de­ment une réci­dive avec une extrême sen­si­bi­li­té et de façon tota­le­ment indo­lore pour le patient. Grâce à Uro­diag, la réa­li­sa­tion de ce test à réa­li­ser tous les trois mois n’est une plus contrainte dou­lou­reuse pour le patient ce qui contri­bue à réduire les risques en cas de récidive. 

En parallèle, vous travaillez d’ores et déjà sur d’autres tests. Pouvez-vous nous les présenter ?

Tou­jours dans l’objectif de faci­li­ter le sui­vi des can­cers et de mieux pré­ve­nir les réci­dives, nous tra­vaillons sur plu­sieurs tests qui sont en cours de validation.

Actuel­le­ment, pour les patients âgés de 50 à 74 ans, le dépis­tage sys­té­ma­tique du can­cer colo­rec­tal est réa­li­sé à par­tir d’un pré­lè­ve­ment de selles réa­li­sé tous les 2 ans et envoyé au labo­ra­toire. Une très grande par­tie des per­sonnes concer­nées est rebu­tée par cette mani­pu­la­tion. Résul­tat : seuls 30% d’entre elles le réa­lisent et près de 70% de la popu­la­tion n’est pas dépis­tée pour ce can­cer très silen­cieux. Et quand les symp­tômes se mani­festent, le can­cer est mal­heu­reu­se­ment déjà très avan­cé. Pour lever ce frein, nous avons déve­lop­pé Colo­diag, qui est un test san­guin plus facile à réa­li­ser et qui va contri­buer à géné­ra­li­ser le dépis­tage pré­coce de ce can­cer sur l’ensemble de la popu­la­tion. En paral­lèle, le test réa­li­sé actuel­le­ment engendre de nom­breux « faux posi­tifs » qui entraînent du stress chez les patients et qui, à par­tir de là, néces­site, pour vali­der le diag­nos­tic, une colo­sco­pie qui est exa­men pénible de l’ensemble du colon par endo­scope sous anes­thé­sie géné­rale, coû­teux et qui fait perdre une jour­née aux patients. Colo­diag se dif­fé­ren­cie de ce test par deux avan­tages : pre­miè­re­ment, un dépis­tage géné­ra­li­sé et pré­coce du can­cer colo­rec­tal, ce qui in fine implique une réduc­tion des trai­te­ments lourds et des décès et, deuxiè­me­ment, de très fortes éco­no­mies de san­té (réduc­tion des soins coû­teux et des coloscopies).

Nous nous inté­res­sons aus­si au can­cer de la pros­tate qui est le can­cer le plus fré­quent chez les hommes avec deux tests. Dia­gno­prost, qui est en cours d’évaluation, devrait per­mettre, à par­tir d’une simple prise de sang, de réa­li­ser un dépis­tage sys­té­ma­tique et plus pré­cis de ce can­cer que le test PSA actuel­le­ment uti­li­sé. En paral­lèle, le niveau de gra­vi­té et d’agressivité de ce can­cer étant très variable d’un patient à l’autre : il peut être indo­lent et ne néces­si­ter qu’une sur­veillance régu­lière, ou très agres­sif et néces­si­ter, au contraire, une inter­ven­tion lourde. Pros­ta­diag, qui est en phase de vali­da­tion cli­nique, est un test d’agressivité du can­cer de la pros­tate qui doit per­mettre, entre autres, de savoir si un can­cer est véri­ta­ble­ment indo­lent et d’éviter ain­si un trai­te­ment lourd et/ou une abla­tion de la prostate.

L’ensemble de vos tests sont basés sur les derniers développements en matière de biologie moléculaire. Quelques mots sur cette dimension.

La France est un des lea­ders dans ce domaine. Il y a 22 ans, la France a été à l’origine de la pre­mière carte du génome humain. Depuis, il y a eu de très nom­breuses avan­cées dans l’univers de la san­té : thé­ra­pie génique, nou­veaux vac­cins… Le domaine du diag­nos­tic a lar­ge­ment par­ti­ci­pé à faire pro­gres­ser le dépis­tage et le diag­nos­tic de nom­breuses mala­dies à par­tir de pré­lè­ve­ments très simples, comme le sang et les urines. Onco­Diag s’inscrit dans cette conti­nui­té en cher­chant à déve­lop­per des solu­tions faciles à mettre en œuvre et d’une grande pré­ci­sion diag­nos­tique dans le domaine du can­cer en capi­ta­li­sant sur la bio­lo­gie moléculaire.

Aujourd’hui, comment vous projetez-vous ? Quelles sont vos perspectives et qu’en est-il des freins auxquels vous êtes confrontés ?

À court terme, il s’agit avant tout d’aller jusqu’au bout de toutes les vali­da­tions cli­niques en cours afin de pou­voir obte­nir les cer­ti­fi­ca­tions néces­saires pour pou­voir com­mer­cia­li­ser nos tests dans l’ensemble des pays du monde.

Notre pre­mier test, Uro­diag, est l’objet d’un registre (essai cli­nique en vraie gran­deur sur le ter­rain) orga­ni­sé par l’AFU (Asso­cia­tion Fran­çaise d’Urologie), socié­té savante qui regroupe une très grande par­tie des uro­logues. En outre, en France, nous avons noué un par­te­na­riat avec les labo­ra­toires Cer­ba pour la mise en œuvre et le ren­du des résul­tats de ce test. Dès que les vali­da­tions cli­niques des autres tests seront ter­mi­nées (cou­rant 2024 pour Pros­ta­diag et Colo­diag), nous allons dépo­ser les dos­siers de cer­ti­fi­ca­tion, un pro­ces­sus long qui peut prendre jusqu’à une année. Néan­moins, dans une logique de favo­ri­sa­tion de l’innovation, la France a mis en place des pro­cé­dures sim­pli­fiées d’accès au mar­ché dans le domaine de la san­té dont Onco­Diag pour­ra en bénéficier.

Et pour les mar­chés à l’international, nous avons recru­té un busi­ness deve­lo­per pour trou­ver les meilleurs par­te­naires dans chaque pays, en com­men­çant par les pays euro­péens qui béné­fi­cient d’une régle­men­ta­tion com­mune avec la France.

À plus long terme, d’autres déve­lop­pe­ments seront envi­sa­gés dans le même esprit : tests simples, non-inva­sifs, sen­sibles et spé­ci­fiques pour les prin­ci­paux types de can­cer qui ne béné­fi­cient pas encore de telles solu­tions (can­cer du sein, du pou­mon, du rein, du pan­créas, etc.). 

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