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Mesurer la vitesse de la lumière : c à Paris

Dossier : ExpressionsMagazine N°624 Avril 2007
Par Jean-Louis BOBIN (54)
Par James LEQUEUX
Par Nicolas TREPS (94)

La vitesse de la lumière dans le vide est une constante uni­ver­selle dont la valeur est fixée depuis 1983 à 299 792 458 m/s, au plus près des der­nières mesures qui ont conclu une longue aven­ture scien­ti­fique : trois siècles d’ob­ser­va­tions et d’ex­pé­riences qui valaient bien une célé­bra­tion dans le cadre de l’an­née mon­diale de la Phy­sique. Telle était l’o­ri­gine du pro­jet « c à Paris » com­bi­nant une expo­si­tion à l’Ob­ser­va­toire et une recons­ti­tu­tion, avec les tech­niques d’au­jourd’­hui, de la méthode de Fizeau.

Sup­port de cette expé­rience réa­li­sée à l’au­tomne 2005, un fais­ceau laser de cou­leur verte était ten­du, pour le spec­tacle, entre deux sites remar­quables de Paris : l’Ob­ser­va­toire et la butte Montmartre.

Un peu d’histoire

De Galilée à Arago

De l’An­ti­qui­té au XVIIe siècle, la majo­ri­té des pen­seurs admet­tait que la lumière se pro­page ins­tan­ta­né­ment. Met­tant en doute cette opi­nion, Gali­lée a essayé de mesu­rer la vitesse de la lumière. Deux opé­ra­teurs munis cha­cun d’une lan­terne étaient pla­cés à une assez grande dis­tance l’un de l’autre et fai­saient de nuit l’ex­pé­rience sui­vante : le pre­mier découvre sa lan­terne en déclen­chant une hor­loge, le second découvre la sienne dès qu’il aper­çoit le signal lumi­neux et le pre­mier arrête son hor­loge dès qu’il voit le signal. Il est ain­si théo­ri­que­ment pos­sible d’ap­pré­cier le temps d’al­ler et retour de la lumière. En pra­tique ce fut un fias­co. Les temps mesu­rés, indé­pen­dants de la dis­tance entre les hommes, étaient leurs temps de réaction.

Le mérite d’a­voir prou­vé que la vitesse de la lumière n’est pas infi­nie revient à Jean-Domi­nique Cas­si­ni (1625−1712), le res­pon­sable de l’Ob­ser­va­toire de Paris, et à Olaüs Roe­mer (1644−1710), un Danois qui tra­vaillait à l’Ob­ser­va­toire. Ayant éta­bli des éphé­mé­rides moyennes des satel­lites de Jupi­ter, ils consta­tèrent que les occul­ta­tions par la pla­nète du pre­mier satel­lite, Io, parais­saient en retard par rap­port à leurs tables lorsque la Terre était très éloi­gnée de Jupi­ter, et en avance lors­qu’elle en était proche. Ils com­prirent que la lumière met­tait plus long­temps à nous par­ve­nir dans le pre­mier cas. Cette expli­ca­tion capi­tale, qui date de 1676, fut accep­tée par Huy­gens, New­ton et d’autres.

Cas­si­ni et Roe­mer ne don­nèrent pas de valeur numé­rique. Mais Chris­tiaan Huy­gens (1629−1695), qui à l’é­poque, se trou­vait aus­si à l’Ob­ser­va­toire de Paris, fit un cal­cul repro­duit dans son Trai­té de la lumière de 1690. Il affir­ma ain­si que « la vitesse de la lumière est plus de 600 000 fois plus grande que celle du son » (en fait 660 000 fois avec ses don­nées). Évi­dem­ment la pré­ci­sion était médiocre, le résul­tat étant trop faible de plus de 20 %.

Une autre éva­lua­tion vint de la décou­verte de l’a­ber­ra­tion : toutes les étoiles effec­tuent un mou­ve­ment appa­rent annuel, obser­vé dès le XVIIe siècle par plu­sieurs astro­nomes, notam­ment sur l’é­toile Polaire.

Ne com­pre­nant pas la cause de cet effet, Cas­si­ni le qua­li­fia d’a­ber­rant. Le nom est resté.

En 1727, l’An­glais James Brad­ley (1693−1762) a expli­qué pour la pre­mière fois ce phé­no­mène qu’il avait sui­vi avec beau­coup de soin sur plu­sieurs étoiles : la vitesse de la lumière se com­pose avec celle de la Terre sur son orbite, comme la vitesse de chute de la pluie se com­pose avec celle d’un véhicule.

Si l’on connaît la vitesse de la Terre (envi­ron 30 km/s), la vitesse de la lumière se déduit de la mesure de la dévia­tion maxi­male d’une étoile par rap­port à sa posi­tion moyenne. La valeur cal­cu­lée ain­si par Brad­ley était meilleure que celle de Roe­mer et Huygens.

Réca­pi­tu­lant les résul­tats obte­nus jus­qu’au début du XIXe siècle, Fran­çois Ara­go (1803) (1786−1853) annon­ça dans son Astro­no­mie popu­laire une vitesse de 308 300 kilo­mètres par seconde. Cet ouvrage post­hume étant basé sur des cours don­nés de 1813 à 1846, il est dif­fi­cile de savoir à quelle date il a esti­mé cette vitesse.

Le temps des physiciens

C’est en France, sous l’im­pul­sion d’A­ra­go, que les pre­mières expé­riences furent conçues et réa­li­sées par Hip­po­lyte-Louis Fizeau (1819−1896) et Léon Fou­cault (1819−1868), deux phy­si­ciens plus ou moins auto­di­dactes. Ayant en tête une valeur appro­chée de la vitesse de la lumière dans l’es­pace inter­pla­né­taire et la méthode pré­co­ni­sée par Gali­lée, ils ne par­taient pas de zéro.

Figure 1

a) de l’ex­pé­rience de Fizeau (1849)
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b) de sa recons­ti­tu­tion en 2005


Pour son expé­rience de juillet 1849, Fizeau adap­ta l’i­dée de Gali­lée. L’al­ler et retour le long d’une base de lon­gueur connue se fai­sait entre une sta­tion d’é­mis­sion-récep­tion implan­tée à Sur­esnes et un miroir de ren­voi dis­po­sé à Mont­martre au foyer d’une lunette col­li­ma­trice (figure 1). La dis­tance était de 8 633 m, déter­mi­née par tri­an­gu­la­tion. La source était un mor­ceau de craie chauf­fé à blanc par la flamme d’un cha­lu­meau oxhy­drique (lumière de Drum­mond ou « lime­light »). Avec l’aide du célèbre construc­teur d’ins­tru­ments de pré­ci­sion Gus­tave Fro­ment (1835), Fizeau avait mis au point un sys­tème de roue den­tée en rota­tion rapide (figure 2) qui pro­vo­quait, à l’é­mis­sion, des occul­ta­tions pério­diques du fais­ceau lumi­neux. Une porte s’ouvre et se ferme ain­si pério­di­que­ment. Pour une période quel­conque, la lumière trouve au retour une porte entrou­verte et un obser­va­teur, en rai­son de la per­sis­tance des images sur la rétine, voit une lueur conti­nue. Si le temps d’ou­ver­ture, et d’oc­cul­ta­tion, cor­res­pond exac­te­ment à la durée du tra­jet aller et retour, l’ob­ser­va­teur ne voit rien.

Le résul­tat, 315 000 km/s, était assez éloi­gné de la valeur déduite des obser­va­tions de Brad­ley sur l’a­ber­ra­tion des étoiles fixes. La plus grande source d’er­reur venait de la dif­fi­cul­té de connaître la vitesse de rota­tion de la roue.

Figure 2

Détail de la roue den­tée de Fizeau : copie d’époque, conser­vée à l’École poly­tech­nique. La roue den­tée ori­gi­nelle de Fizeau et son méca­nisme ont été per­dus. La roue den­tée, de 12 cm de dia­mètre, porte une cou­ronne de 720 dents, cha­cune occu­pant 0,26 mm de la cir­con­fé­rence : de l’usinage au cen­tième de mm !

Alors que Fizeau n’a­vait pas pour­sui­vi sa ten­ta­tive au-delà de quelques essais, Alfred Cor­nu (1860) (1841−1902) répé­ta un quart de siècle plus tard la même expé­rience en se pro­po­sant de faire des mesures pré­cises. Entre-temps Fou­cault avait uti­li­sé la méthode du miroir tour­nant qui per­met de réduire la base à quelques mètres. D’a­bord, chez lui en 1850, il avait mon­tré que la lumière va plus vite dans l’air que dans l’eau ce qui tran­chait en faveur d’une nature ondu­la­toire et non cor­pus­cu­laire. Ensuite, en 1862 à l’Ob­ser­va­toire de Paris, il avait trou­vé 298 000 km/s à 1 000 km/s près.

Cor­nu cri­ti­quait ce résul­tat, trop éloi­gné à son gré des valeurs annon­cées par Ara­go et par Fizeau. Au sur­plus, Fou­cault n’a­vait pas tenu compte d’é­ven­tuels effets d’en­traî­ne­ment de la lumière par le mou­ve­ment du miroir.

Cor­nu appor­ta diverses amé­lio­ra­tions au mon­tage de Fizeau. Un méca­nisme d’hor­lo­ge­rie ser­vait à contrô­ler une vitesse angu­laire bien connue grâce à un compte-tours élec­trique. Ses mesures effec­tuées en 1872 sur une dis­tance de 10 310 m entre l’É­cole poly­tech­nique et le mont Valé­rien (tou­jours Sur­esnes !), puis en 1874 sur 23 km entre l’Ob­ser­va­toire de Paris et la tour de Montl­hé­ry (figure 3) ont don­né pour valeurs de c : 298 500 et 300 030 km/s (± 1 000 km/s.) res­pec­ti­ve­ment, après cor­rec­tion de l’ef­fet ralen­tis­seur de l’in­dice de réfrac­tion de l’air. Ce résul­tat confir­mait celui de Foucault.

Une der­nière mise en œuvre de la roue den­tée eut lieu en 1902 sous la direc­tion d’Hen­ri Per­ro­tin (1845−1904) le long de diverses bases dont une de 46 kilo­mètres entre l’ob­ser­va­toire de Nice et le mont Vinaigre dans l’Es­té­rel. La valeur trou­vée est de 299 880 ± 84 km/s.

< Figure 3

Sta­tion d’émission-réception ins­tal­lée par Cor­nu sur la ter­rasse de l’Observatoire d’où il visait la tour de Montlhéry.

La méthode des occul­ta­tions eut une seconde vie grâce à l’in­ven­tion des obtu­ra­teurs ultra­ra­pides à effet Kerr. De nou­velles réa­li­sa­tions de l’ex­pé­rience de Fizeau ont été ain­si menées à bien de 1925 à 1950. La détec­tion des signaux ne se fai­sait plus à l’œil dont la réponse est trop lente mais avec des cel­lules pho­to­élec­triques. La pré­ci­sion était très supé­rieure à celle de la roue den­tée. En 1950, le Sué­dois E. Berg­strand annon­çait 299 796,1 ± 0,3 km/s. 

L’exposition

Les col­lec­tions de l’Ob­ser­va­toire de Paris sont riches de pièces his­to­riques. La recons­ti­tu­tion de l’ex­pé­rience de Fizeau était l’oc­ca­sion de mettre en valeur des docu­ments et des ins­tru­ments qui se rap­portent aux obser­va­tions et aux expé­riences conduites autre­fois en ce haut lieu de la mesure de la vitesse de la lumière. L’ex­po­si­tion fai­sait ain­si la part belle aux astro­nomes Cas­si­ni et Roe­mer, ain­si qu’aux phy­si­ciens Fou­cault et Cornu.

Des vitrines incor­po­rées à de grands pan­neaux expli­ca­tifs étaient consa­crées à leurs appa­reils : len­tilles taillées à Rome au XVIIe siècle, miroir tour­nant de Fou­cault avec sa tur­bine (figure 4), roues den­tées de Cor­nu, régu­la­teur de vitesse fabri­qué par les éta­blis­se­ments Breguet.

Contrai­re­ment à la roue den­tée ori­gi­nelle, les notes et les manus­crits de Fizeau ont été conser­vés. La ville de Sur­esnes avait prê­té les feuilles sur les­quelles Fizeau avait consi­gné ses résul­tats et effec­tué quelques cal­culs (entiè­re­ment à la main, sans même une table de logarithmes !).

Figure 4

En vitrine, les ins­tru­ments uti­li­sés par Fou­cault pour sa mesure de la vitesse de la lumière : hélio­stat, hor­loge, mon­ture du miroir tour­nant avec sa tur­bine, miroirs.

L’ex­po­si­tion com­por­tait des démons­tra­tions qua­li­ta­tives des expé­riences de Fizeau et de Fou­cault. Celle de Fizeau avait été minia­tu­ri­sée en 2004 par des lycéens de la ban­lieue de Caen pour concou­rir aux Olym­piades de Phy­sique. C’é­tait en réduc­tion, l’ex­pé­rience déployée au-des­sus de Paris. Le fais­ceau laser reve­nait près de sa source après un tra­jet dans les hau­teurs de la salle Cassini.

L’ex­pé­rience de Fou­cault, moder­ni­sée par des phy­si­ciens de l’u­ni­ver­si­té Denis Dide­rot (Paris 7), avait aupa­ra­vant fonc­tion­né à l’Es­pace des Sciences de l’É­cole de Phy­sique et Chi­mie (ESPCI).

La par­tie nord de la salle Cas­si­ni, de forme octo­go­nale, était réser­vée à l’his­toire des mesures des dis­tances ter­restres : de la tri­an­gu­la­tion au GPS et au télé­mètre laser. La tri­an­gu­la­tion, aujourd’­hui com­plè­te­ment dépas­sée, a joué un rôle capi­tal dans la déter­mi­na­tion de la figure de la Terre et dans le cal­cul pré­cis des dis­tances dont, de Fizeau à Michel­son, on eut besoin pour déter­mi­ner la vitesse de la lumière.

Des pan­neaux pré­sen­taient les cartes des deux tri­an­gu­la­tions de la France : la pre­mière ayant ser­vi, dans les années 1790, à la défi­ni­tion du mètre, la seconde, effec­tuée jus­qu’au milieu du XIXe siècle, pour dres­ser la carte d’é­tat-major au 180 000. Dans les deux cas, la base avait été mesu­rée en uti­li­sant les « règles de Bor­da ». Celles-ci au nombre de quatre, conser­vées à l’Ob­ser­va­toire, étaient mon­trées pour la pre­mière fois au public. 

La reconstitution

Elle a été réa­li­sée dans le cadre d’une col­la­bo­ra­tion entre l’Ob­ser­va­toire de Paris et l’u­ni­ver­si­té Pierre et Marie Curie (labo­ra­toire Kast­ler-Bros­sel, com­mun avec l’É­cole nor­male supé­rieure). Des étu­diants de la licence de phy­sique et des élèves ingé­nieurs (Poly­tech­nique et Ins­ti­tut poly­tech­nique de Paris VI), tous volon­taires, y ont par­ti­ci­pé activement.

L’Ob­ser­va­toire avait mis à dis­po­si­tion un local situé sur les toits et ouvrant vers le Nord. À Mont­martre, le réflec­teur, un simple coin de cube, avait été ins­tal­lé sur une ter­rasse. Le fais­ceau laser sui­vait un tra­jet assez voi­sin du méri­dien de Paris, maté­ria­li­sé au sol de la capi­tale par les médaillons Ara­go. La dis­tance entre les deux sta­tions est de 5 560 m (à moins d’un mètre près), résul­tat d’une tri­an­gu­la­tion effec­tuée par des élèves de l’É­cole natio­nale des sciences géo­gra­phiques et contrô­lée par des points GPS.

Dispositif expérimental

Tableau 1
Année Porte périodique Mesure (km/s) Erreur annoncée
H. FIZEAU 1849 Roue dentée 315 300
A. CORNU 1872 Roue dentée 298 500 ± 1 000
A. CORNU 1874 Roue dentée 300 030 ± 1 000
H. PERROTIN 1902 Roue dentée 299 880 ± 84
E. BERGSTRAND 1950 Cel­lule de Kerr 299 796 ± 0,3
Reconstitution 2005 Modu­la­teur acousto-optique 299 840 ± 30


Le sché­ma géné­ral de l’ex­pé­rience est pré­sen­té sur la figure 1b. Le laser YAG pom­pé par diode et dou­blé en fré­quence, émet un fais­ceau conti­nu d’une puis­sance de 5 watts. Le long de son tra­jet optique, le fais­ceau est foca­li­sé pour pas­ser par l’o­ri­fice d’un modu­la­teur acous­to-optique, dis­po­si­tif lar­ge­ment répan­du de nos jours dans les labo­ra­toires de phy­sique. Basé sur la dif­frac­tion de la lumière par des ondes sta­tion­naires ultra­so­nores dans un quartz pié­zo­élec­trique, il per­met de com­man­der dans de bonnes condi­tions l’oc­cul­ta­tion du fais­ceau qui retrouve ensuite sa diver­gence natu­relle (infé­rieure au mil­li­ra­dian) et tra­verse tel quel, par des trous per­cés sui­vant leur axe, deux len­tilles qui pré­cèdent le miroir de sor­tie orientable.

Le dia­mètre du fais­ceau, de l’ordre du mil­li­mètre au départ, dépasse 3 mètres à Mont­martre où le coin de cube pré­sente la sec­tion effi­cace d’un tri­angle équi­la­té­ral de 7,5 cm de côté. Il ren­voie vers la source moins du dix mil­lième de la puis­sance inci­dente. Au retour à l’Ob­ser­va­toire, le dia­mètre est d’en­vi­ron 30 cm. La len­tille col­lec­trice a un dia­mètre de 50 mil­li­mètres. On perd ain­si beau­coup de lumière. Mais la diver­gence du fais­ceau a été impo­sée par des impé­ra­tifs de sécu­ri­té. Lan­cer un fais­ceau laser au-des­sus de Paris est sou­mis à l’au­to­ri­sa­tion de la Pré­fec­ture de Police, accor­dée à condi­tion de res­pec­ter un cer­tain nombre de contraintes. La diver­gence garan­tis­sait l’in­no­cui­té du rayon­ne­ment sur la plus grande par­tie du tra­jet. Heu­reuse com­pen­sa­tion, la diver­gence ren­dait la visée plus facile. Mieux vaut un fais­ceau large pour atteindre une cible de taille réduite, le coin de cube, située à plus de 5 mètres au-des­sus d’un petit pan de mur blanc repé­ré au moyen d’une lunette, authen­ti­que­ment his­to­rique, emprun­tée aux col­lec­tions de l’Ob­ser­va­toire. Lors des essais, le coin de cube fut atteint presque du pre­mier coup.

Figure 5

Le rayon vert sur Paris

La détec­tion du signal de retour était effec­tuée par une pho­to­diode suf­fi­sam­ment sen­sible au niveau escomp­té de 10 micro­watts. En fai­sant varier la fré­quence d’oc­cul­ta­tion appli­quée au modu­la­teur acous­to-optique, l’o­pé­ra­teur détec­tait l’ap­pa­ri­tion et la dis­pa­ri­tion du signal de retour super­po­sé à un signal témoin du cré­neau de ten­sion déli­vré par le géné­ra­teur. Le temps de mon­tée du modu­la­teur étant de l’ordre de 100 ns., il s’est avé­ré dif­fi­cile de déter­mi­ner à mieux que 10 hertz près la fré­quence cor­res­pon­dant à l’ex­tinc­tion pour un aller et retour et dont la valeur théo­rique était de 13 476 hertz.

Résultats

Pen­dant les mois d’oc­tobre et novembre 2005, à part quelques jours de brume ou de pluie, le temps était rai­son­na­ble­ment clair en début de soi­rée. Un cer­tain nombre de mesures ont pu être effec­tuées dont les résul­tats sont grou­pés autour de 299 750 km/s. La prin­ci­pale cause d’in­cer­ti­tude vient de l’a­jus­te­ment de la fré­quence d’oc­cul­ta­tion, l’ex­tinc­tion totale étant déli­cate à appré­cier avec des signaux de retour « herbeux ».

La moyenne des dif­fé­rentes mesures, pon­dé­rée par les marges d’er­reur, four­nit 299 760 ± 30 km/s pour la vitesse de la lumière dans l’air de Paris. Faute d’une sen­si­bi­li­té et d’une repro­duc­ti­bi­li­té suf­fi­sante, il n’a pas été pos­sible de mettre en évi­dence des varia­tions dues à la modi­fi­ca­tion de la com­po­si­tion ou de la tem­pé­ra­ture de l’atmosphère.

En cor­ri­geant de l’in­dice de l’air (1,000275), on arri­ve­rait, pour la vitesse de la lumière dans le vide, à 299 840 km/s ± 30 km/s (1,6 écart pro­bable par rap­port à la valeur cano­nique). Le résul­tat de ce petit cal­cul n’a d’autre inté­rêt que de situer, vis-à-vis des expé­riences anciennes, la per­for­mance réa­li­sée dans le cadre de cette recons­ti­tu­tion (tableau I). 

Conclusion

Pour autant que ses pro­mo­teurs puissent en juger, « c à Paris » a été une réus­site auprès d’un public sen­si­bi­li­sé à la culture scien­ti­fique, venu en nombre visi­ter l’ex­po­si­tion et, pour les plus chan­ceux, assis­ter au spec­tacle du fais­ceau laser lan­cé au-des­sus de Paris depuis la ter­rasse de l’Ob­ser­va­toire, sur fond de lumières de la ville (figure 5). L’im­pact sur un public plus vaste est dif­fi­cile à éva­luer. Les médias ont bien relayé l’o­pé­ra­tion. Le « rayon vert » a intri­gué les noc­tam­bules par­cou­rant Mont­martre ou d’autres lieux stratégiques.

Mais dans l’o­pi­nion, la phy­sique a mau­vaise presse. Elle est jugée inac­ces­sible au pro­fane, peu attrayante pour la plu­part de ceux qui subissent son ensei­gne­ment, et dan­ge­reuse dans ses appli­ca­tions. La mise en valeur d’une expé­rience his­to­rique, dans un autre contexte que tris­te­ment sco­laire, était une des nom­breuses mani­fes­ta­tions de l’An­née mon­diale de la Physique.

Aura-t-elle contri­bué à redres­ser une fâcheuse image de marque et à don­ner de nou­veau de l’at­trait aux sciences répu­tées dures ? 

Bibliographie

• J. L. BOBIN, Quelle est la vraie vitesse de la lumière ? Le pom­mier, (2004).
• J. L. BOBIN, La mesure de la vitesse de la lumière, les phy­si­ciens à l’ouvrage, L’astronomie, vol. 119, sep­tembre 2005.
• Col­lec­tif, Roe­mer et la vitesse de la lumière, Table ronde du CNRS, 16 et 17 juin 1976, Vrin, « His­toire des sciences » (1978).
• Col­lec­tif, Com­ment a‑t-on réus­si à mesu­rer la vitesse de la lumière ? Cahiers de Science et Vie, n° 25 (1995).
• F. X. DULAC, La vitesse de la lumière, une recherche millénaire,
http://www.polytechnique.fr/eleves/binet/ xpassion/article.php?id=2
• J.LEQUEUX, Nature et vitesse de la lumière, de Roe­mer à Fres­nel, L’astronomie, vol. 119, sep­tembre 2005.
• Pour plus de détails sur l’expérience et l’exposition consul­ter les sites :
http://vo.obspm.fr/exposition/lumiere2005/ tir.html
http://www2.upmc.fr/AMP2005/index.htm
http://seraphin.levain.free.fr/
http://sabthiery.free.fr/lumière

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