Mablink invente la nouvelle génération de thérapie ciblée

Dossier : Health techMagazine N°773 Mars 2022
Par Jean-Guillaume LAFAY
Par David SOURDIVE (86)

Jean-Guil­laume Lafay, cofon­da­teur et CEO de Mablink, nous en dit plus sur cette pépite française de la Health Tech qui révo­lu­tionne les thérapies ciblées et ouvre des per­spec­tives promet­teuses en ter­mes de traite­ment du can­cer.  

Comment Mablink a vu le jour ? 

Mablink a été créé il y a déjà trois ans. Sa créa­tion s’appuie sur un brevet extrême­ment inno­vant issu des travaux de recherche du doc­teur War­ren Viri­cel qu’il a dévelop­pé avec les pro­fesseurs Benoît Joseph et Charles Dumon­tet. Con­va­in­cu par cette idée et son poten­tiel, je leur ai pro­posé de créer Mablink. 

Quel est le positionnement de Mablink au sein de l’écosystème HealthTech ?

Mablink est une biotech qui développe des thérapies ciblées, appelées ADC pour Anti­body-Drug Con­ju­gate, ou immuno­con­jugués en français. Ce type de thérapie ciblée est une révo­lu­tion pour le traite­ment des can­cers. L’idée est d’essayer de détru­ire unique­ment les cel­lules can­céreuses sans touch­er les tis­sus sains. 

Sur le marché aujourd’hui, on recense unique­ment une dizaine d’ADC car il existe des bar­rières et des ver­rous tech­nologiques très com­plex­es à lever pour dévelop­per, mais aus­si pour pro­duire de manière sim­ple et effi­cace, ces bio­médica­ments. La tech­nolo­gie brevetée de Mablink per­met, elle, de dévelop­per de manière plus robuste et plus facile ce type de thérapie sophis­tiquée pour le traite­ment du cancer. 

Concrètement, vous proposez une cape d’invisibilité pour rendre une nouvelle génération d’Antibody-Drug Conjugate dix fois plus efficaces. De quoi s’agit-il ?

Pour être plus pré­cis, nous cher­chons à amélior­er l’index thérapeu­tique de l’ADC, c’est le rap­port entre la tox­i­c­ité et l’efficacité. Pour se faire nous fixons sur nos ADC une cape d’invisibilité qui va per­me­t­tre de cacher, et donc de dimin­uer, la tox­i­c­ité du médicament. 

Et comment cela fonctionne-t-il ? 

Nous util­isons les anti­corps comme des vecteurs capa­bles de recon­naître et cibler spé­ci­fique­ment les cel­lules can­céreuses, et sur lesquels nous venons gref­fer des agents de chimio­thérapie. La cape d’invisibilité va per­me­t­tre de cacher la présence de ces agents chimio­thérapiques afin que l’organisme tolère mieux le traitement. 

Aujourd’hui, il n’existe aucune autre tech­nolo­gie capa­ble de mas­quer la présence de drogues dans l’organisme. Ce côté dis­rup­tif, inédit et forte­ment inno­vant de notre tech­nolo­gie intéresse forte­ment les grands lab­o­ra­toires phar­ma­ceu­tiques et les sociétés de biotechnologie. 

Quelles sont les implications pour le monde de la santé et les patients ?

Elles sont immenses ! Si nous ambi­tion­nons d’établir des parte­nar­i­ats stratégiques, nous avons tout de même fait le choix de dévelop­per égale­ment en interne nos pro­pres can­di­dats-médica­ments, car nous avons la con­vic­tion forte que nous pour­rons aller très rapi­de­ment chez le patient. 

Pour le monde de la san­té, dis­pos­er de traite­ments anti­cancéreux qui sont net­te­ment mieux tolérés, entraîne for­cé­ment un par­cours patient beau­coup plus con­fort­able avec moins d’effets indésirables. 

En effet, nous nous atten­dons à ce que le traite­ment soit moins tox­ique et mieux toléré grâce à notre tech­nolo­gie, qui, finale­ment, per­met d’adresser la chimio­thérapie en ciblant le bon endroit dans le corps du patient. On retrou­ve véri­ta­ble­ment, dans notre démarche, l’essence même du principe de la thérapieciblée ! 

Aujourd’hui, où en êtes-vous et quelles sont les prochaines étapes pour Mablink ?

Actuelle­ment, cinq preuves de con­cept pré­clin­iques ont été réal­isés une et ont per­mis de démon­tr­er la force de la tech­nolo­gie. Nous ren­trons aujourd’hui en phase de test chez le primate. 

Nous nous rap­pro­chons donc de l’Homme à grands pas ! Nous avons lancé les étapes de pro­duc­tion à grande échelle dans le but de pou­voir faire notre étude régle­men­taire pour, in fine, aller chez l’Homme.

Dans ce cadre, quels ont vos principaux enjeux ?

Mablink étant pro­prié­taire de la tech­nolo­gie, nous ambi­tion­nons de dévelop­per plusieurs médica­ments qui devraient mon­tr­er un meilleur index thérapeu­tique que les ADC actuelle­ment util­isés. L’idée est ain­si d’avoir des pro­grammes sur des cibles thérapeu­tiques déjà validées et des indi­ca­tions déjà con­nues pour pro­pos­er des traite­ments mieux tolérés, mais aus­si de tra­vailler sur des médica­ments des­tinés à des can­cers qu’on ne peut pas encore traiter aujourd’hui.

Par ailleurs, nous avons signé un pre­mier con­trat de licence avec Emer­gence Ther­a­peu­tics, qui a basé l’intégralité de son développe­ment sur notre tech­nolo­gie ADC. Con­séc­u­tive­ment à la prise de licence de notre tech­nolo­gie ADC, ils ont réus­si à lever 87 mil­lions d’euros en novem­bre dernier.

En par­al­lèle, nous avons des enjeux forts en ter­mes de struc­tura­tion de l’entreprise et de la ges­tion de sa crois­sance. La lev­ée de fonds de 4 mil­lions d’euros réal­isée en 2021 nous a per­mis d’initier ce tra­vail et a con­fir­mé l’intérêt des investis­seurs pour Mablink. 

Et pour conclure ? 

Le suc­cès de Mablink et nos prochaines réus­sites sont le fruit d’un tra­vail d’équipe. Mablink n’est pas seule­ment une suc­cess-sto­ry tech­nologique, c’est avant tout une aven­ture humaine portée par des tal­ents et des com­pé­tences qui se sont investi et ont cru, dès le début, à la per­ti­nence du projet.


David Sourdive (86), président du conseil d’administration de Mablink Bioscience nous explique pourquoi il a rejoint l’entreprise.

« J’ai rejoint le con­seil d’administration de Mablink pour deux raisons prin­ci­pales. Tout d’abord pour l’équipe, avec laque­lle il y a eu une vraie alchimie. Solide, bien que jeune, elle rassem­ble les com­pé­tences et l’énergie d’entrepreneurs capa­bles de men­er ce pro­jet ambitieux. J’avais le sen­ti­ment de pou­voir lui apporter une réelle exper­tise du fait de mon par­cours et de mon expéri­ence. Par ailleurs, la tech­nolo­gie dévelop­pée par Mablink apporte une vraie rup­ture per­me­t­tant de lever de grands ver­rous clas­sique­ment ren­con­trés dans le développe­ment de toute une classe de médica­ments promet­teurs : les anti­corps immuno­con­jugués (ADC). La chimie dévelop­pée par Mablink est nou­velle est per­met de bien meilleurs index thérapeu­tiques, autrement dit, des médica­ments beau­coup moins tox­iques et avec un plus fort béné­fice, appor­tant une vraie dif­férence pour des patients pris en charge pour un cancer. »

“Le vivant est un objet d’ingénieur. Aujourd’hui on est capable de le façonner et c’est ce qu’a fait Mablink avec ses molécules de nouvelle génération. Les ADC développés pas Mablink sont comme des nano-drones biologiques, capables de relarguer un médicament de manière programmée, au bon moment, au bon endroit.”

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