Louis Vicat (1786–1861) Le père d’un nouvel art de construire

Dossier : ExpressionsMagazine N°675 Mai 2012
Par Anne BERNARD-GÉLY (74)
Par Laurent IZORET

Portrait de Louis VICATLouis Vicat se présente à l’École poly­tech­nique en 1804, à l’âge de dix-huit ans, sur les con­seils du math­é­mati­cien Joseph Fouri­er, alors préfet de l’Isère, et réus­sit le con­cours d’entrée.

En 1806, son rang de classe­ment lui per­met d’intégrer l’École des ponts et chaussées.

À la recherche de nouvelles techniques

Nom­mé en 1809 ingénieur ordi­naire de deux­ième classe à Périgueux, il par­ticipe aux travaux d’aménagement du départe­ment et se voit con­fi­er la con­struc­tion du pont de Souillac.

Une tech­nique perdue
Les Chi­nois, les Grecs, les Égyp­tiens, les Mayas éle­vaient des con­struc­tions avec des mortiers à base d’une chaux obtenue par cuis­son de roches cal­caires, suiv­ie d’une extinc­tion à l’eau. Les Romains fab­ri­quaient des liants hydrauliques, comme en témoigne Vit­ruve dans ses dix livres d’architecture. Ils mélangeaient de la chaux à des cen­dres vol­caniques de la région de Pouz­zoles qui, en présence d’eau, fix­aient la chaux pour con­stituer un liant sus­cep­ti­ble avec le sable de for­mer un morti­er, et inven­tèrent ain­si le « béton romain » qu’ils coulaient dans des cof­frages en bois.

Celle-ci avait été sus­pendue, l’Empire napoléonien étant finan­cière­ment exsangue. Ce con­cours de cir­con­stances va inciter Louis Vicat à rechercher de nou­velles tech­niques pour assur­er le plus économique­ment, et le plus solide­ment pos­si­ble, les fon­da­tions du pont.

L’École poly­tech­nique compte Louis Vicat par­mi ses élèves qui ont fait hon­neur à la France entre 1794 et 1994 en le représen­tant aux côtés de Cauchy sur le trip­tyque du Bicen­te­naire de l’École situé dans le grand hall à Palaiseau.

Ce n’est qu’en 1817 qu’il redé­cou­vre, grâce à sa curiosité sci­en­tifique et sa cul­ture tech­nologique, les pro­priétés hydrauliques des liants : en cher­chant un morti­er de pouz­zolane capa­ble d’améliorer la con­struc­tion du pont de Souil­lac dont il a la charge, il isole un liant arti­fi­ciel, le « ciment », et éla­bore la théorie de l’hydraulicité des chaux.

En 1817, il isole un liant arti­fi­ciel, le « ciment », et éla­bore la théorie de l’hydraulicité des chaux

On pense bien sûr au Pan­théon de Rome, au Col­isée ou au Pont du Gard qui témoignent, aujourd’hui encore, de la dura­bil­ité de ce pre­mier matéri­au com­pos­ite. Mais ce principe res­ta inex­pliqué et la tech­nolo­gie du béton se perdit complètement.

Une révolution dans l’art de construire

Cette décou­verte est à la base de la pro­duc­tion indus­trielle du ciment qui a mar­qué une ère nou­velle révo­lu­tion­nant com­plète­ment l’art de construire.

Près de deux cents ans plus tard, ces décou­vertes demeurent le socle à par­tir duquel se dévelop­pent les plus récents pro­grès en matière de liant hydraulique et de béton.Jusque-là, les fon­da­tions des piles de ponts étaient réal­isées empirique­ment selon un procédé coû­teux à par­tir de poudre de tuileaux ou de pouz­zolane et de chaux pour for­mer un morti­er pro­pre à dur­cir sous l’eau. Face à ces ques­tions à la fois économiques et tech­niques, Louis Vicat entre­prend une série d’études sur les mortiers, au cours desquelles il fait de manière sys­té­ma­tique l’analyse chim­ique des roches sus­cep­ti­bles de don­ner par cuis­son un bon liant.

Un principe encore appliqué

Port­land et la suite
En 1824, à la suite de la décou­verte de Louis Vicat, l’Écossais Joseph Aspdin dépose un brevet de ciment arti­fi­ciel, appelé Port­land (comme la roche grise extraite de la presqu’île de Portland).
Puis, en 1833, un poly­tech­ni­cien, Léon Pavin de Lafarge, installe des fours à chaux au Teil en Ardèche, et en 1848, la pre­mière usine de ciment, créée par Dupont et Demar­le, s’installe à Boulogne-sur- Mer.

De cette approche, il tire un indice hydraulique (dit de Vicat), rap­port des élé­ments acides aux élé­ments basiques : il per­met de com­pos­er des mélanges de roches qui don­neront par cuis­son un pro­duit qui, fine­ment broyé, dur­ci­ra sous l’eau. Ce principe de com­po­si­tion quan­ti­ta­tive des matières pre­mières de cimenterie est encore appliqué aujourd’hui.

Louis Vicat applique ensuite ces principes en vraie grandeur ; il mon­tre alors sa qual­ité d’entrepreneur en con­trôlant en per­ma­nence les coûts de fab­ri­ca­tion et pour­suit la mise au point de la fab­ri­ca­tion avec le souci con­stant d’en min­imiser le coût.

Les ciments artificiels

Le résul­tat de ces études lui per­met de décou­vrir en 1817 de nou­velles chaux, les chaux hydrauliques arti­fi­cielles, qui peu­vent à volon­té sur­pass­er en qual­ité les meilleures chaux naturelles, et d’établir la loi de la fab­ri­ca­tion du ciment arti­fi­ciel : l’hydraulicité des chaux, c’est-à-dire le dur­cisse­ment des liants sous l’eau, est due aux pro­por­tions d’argiles con­tenues dans les cal­caires et à la tem­péra­ture de cuis­son, ce que vingt siè­cles d’usage n’étaient pas par­venus à élucider.

Le pont de Souillac
Le pont de Souil­lac, pre­mière con­struc­tion au monde réal­isée avec du ciment artificiel.

Le bon dosage
En suiv­ant de près la con­struc­tion du pont de Souil­lac et en con­trôlant avec minu­tie les gâchées des ouvri­ers maçons, Vicat a pu mon­tr­er que le bon dosage en eau con­di­tion­nait la qual­ité du morti­er. Il a même inven­té un instru­ment de mesure pour tester la résis­tance du pro­duit qui devint « l’aiguille Vicat ». En 1822, le pont de Souil­lac est achevé et entre dans l’histoire : pre­mière con­struc­tion au monde réal­isée avec du ciment arti­fi­ciel, il mesure 180 mètres de long sur 9 mètres de large et compte 7 arch­es sur­bais­sées reposant sur 6 piles.

Pas de brevets

Il préféra la gloire d’être utile à celle d’être riche

Durant plus de quar­ante ans de car­rière, Louis Vicat, précurseur de la recherche expéri­men­tale, pour­suiv­it son œuvre sci­en­tifique. Chez lui, le savant rejoint réelle­ment l’ingénieur, l’observation et l’interprétation se ren­for­cent d’indications pra­tiques rigoureuses.

Louis Vicat ne déposa pas de brevet, con­sid­érant qu’il était redev­able à la col­lec­tiv­ité de sa for­ma­tion d’ingénieur, donc de son invention.

Une reconnaissance scientifique et historique

La recon­nais­sance du monde littéraire
Tous les rap­ports ont mis en exer­gue le car­ac­tère durable et économique des inven­tions de Vicat et les pos­si­bil­ités offertes aux con­cep­teurs, archi­tectes et ingénieurs par le matéri­au nais­sant, le béton.
Même le monde lit­téraire s’intéressa à ces décou­vertes, puisqu’en 1839 Hon­oré de Balzac écriv­it dans Le Curé de vil­lage : « Quelle sera la récom­pense de Vicat, celui d’entre nous qui a fait faire le seul pro­grès réel à la sci­ence pra­tique des constructions ?»

La pub­li­ca­tion du tra­vail de Vicat eut un très grand reten­tisse­ment. Aus­si, le Con­seil général des ponts et chaussées et l’Académie royale des sci­ences, après avoir chargé de son exa­m­en cer­tains de leurs mem­bres qui, par leurs travaux antérieurs, sem­blaient les plus aptes à appréci­er le mérite des décou­vertes annon­cées par Louis Vicat, per­mirent une recon­nais­sance sci­en­tifique et hon­ori­fique de son œuvre.

Le béton armé

En 1853, son fils, Joseph Vicat, égale­ment poly­tech­ni­cien (1841), crée la société Vicat et se lance dans la pro­duc­tion indus­trielle du ciment arti­fi­ciel inven­té par son père. Par­al­lèle­ment, la pro­duc­tion indus­trielle d’acier débute avec l’invention du four Besse­mer, per­me­t­tant ain­si le mariage des qual­ités de trac­tion de l’acier et de com­pres­sion du béton. Le béton armé naît d’abord avec la bar­que expéri­men­tale de Joseph Lam­bot en 1848 et les caiss­es hor­ti­coles du jar­dinier paysag­iste Joseph Monier en 1849, puis avec François Coignet en 1852 qui réalise les pre­mières appli­ca­tions en bâti­ment à Saint-Denis.

Le symbole de la modernité

Hen­nebique et le bureau d’études
En matière de ponts, le démar­rage fut plus tardif et les pre­miers ouvrages d’art en béton armé datent de l’extrême fin du XIXe siè­cle ; c’est à François Hen­nebique que l’on doit la con­struc­tion d’un pre­mier grand pont, celui de Châteller­ault sur la Vienne avec ses 144 mètres de long. Après des années de con­cep­tion empirique, Hen­nebique met au point des règles de dimen­sion­nement du béton armé et ouvre la voie du cal­cul et de la con­cep­tion mod­ernes. En se con­cen­trant sur les études et la ratio­nal­i­sa­tion du béton armé, il pro­fes­sion­nalise la con­cep­tion des struc­tures et crée le bureau d’études, fig­ure dom­i­nante de la maîtrise d’œuvre française.

Alors que l’Exposition uni­verselle de 1889 était celle du métal, celle de 1900 con­sacre le béton armé et son appli­ca­tion général­isée dans le monde de la con­struc­tion. Le béton devient alors le sym­bole de la modernité.

L’Exposition uni­verselle de 1900 con­sacre le « béton armé »

L’administration française accom­pa­gne cette ten­dance et pub­lie en 1906 le pre­mier règle­ment de cal­cul, offi­cial­isant ain­si la tech­nique du béton armé dans la con­struc­tion qui trou­ve ain­si son plein épanouisse­ment dans la pre­mière moitié du XXe siè­cle, avant d’être forte­ment con­cur­rencée par la tech­nique du béton précontraint.

La précontrainte

Le principe même de la pré­con­trainte est très ancien puisque les Égyp­tiens con­stru­i­saient déjà des coques de bateaux con­sti­tuées de planch­es de bois dont les joints étaient ser­rés sous l’effet du refroidisse­ment de lames de fer posées à chaud. Dans les années 1900, l’idée vint aux ingénieurs d’appliquer ce principe au béton qui ne résiste guère à la trac­tion pour lim­iter les fis­sur­a­tions : aux endroits où les charges dévelop­per­ont des trac­tions, il s’agit de com­primer le béton de façon arti­fi­cielle, préal­able et permanente.

Com­primer le béton de façon arti­fi­cielle et permanente

Les pre­mières recherch­es échouèrent et ce n’est que vers 1930 qu’un autre poly­tech­ni­cien, Eugène Freyssinet (1879- 1962), égale­ment ingénieur des Ponts – et, comme Vicat, à la fois théoricien, sci­en­tifique et prati­cien – sut appli­quer ce principe de la pré­con­trainte au béton et met­tre au point des procédés visant à don­ner une redis­tri­b­u­tion intel­li­gente des sol­lic­i­ta­tions dans la matière. Les pre­mières appli­ca­tions de son brevet furent la fab­ri­ca­tion de poteaux élec­triques puis la con­sol­i­da­tion de la gare mar­itime du Havre, dont le suc­cès entraî­na la dif­fu­sion rapi­de de la pré­con­trainte dans les ouvrages d’art.

Viaduc des Usses (A41)
Le via­duc des Uss­es (A 41) avec ses piles majestueuses.

Les débuts du béton précontraint
Le phénomène de la pré­con­trainte est apparu à Eugène Freyssinet en 1912 au pont du Veur­dre, ouvrage auda­cieux en béton armé sur l’Allier. Peu de temps après sa con­struc­tion, la voûte s’abaissait pro­gres­sive­ment et ce déplace­ment deve­nait si dan­gereux que Freyssinet déci­da en pleine nuit de relever, avec quelques ouvri­ers, les arcs sans faire inter­rompre la circulation.
Cet inci­dent lui per­mit de com­pren­dre les défor­ma­tions dif­férées du béton et de dépos­er en 1928 son pre­mier brevet de pré­con­trainte en util­isant des câbles en aci­er pou­vant sup­port­er des ten­sions ini­tiales élevées.

Les bétons à hautes performances

Tou­jours plus d’audace dans la con­cep­tion des ouvrages et des bâtiments

C’est dans les années 1980 qu’un nou­veau saut tech­nologique per­met de don­ner de nou­velles pro­priétés con­struc­tives au béton, matéri­au désor­mais devenu uni­versel. Ain­si appa­raît une nou­velle généra­tion de bétons, appelés pour la pre­mière fois bétons à hautes per­for­mances (BHP) par Roger Lacroix, lui aus­si poly­tech­ni­cien (46) et ingénieur des Ponts et Chaussées, et le pro­fesseur Yves Malier, précurseurs recon­nus en Europe et aux États-Unis de ces nou­veaux bétons, util­isés ensuite large­ment et en par­ti­c­uli­er dans la con­struc­tion d’ouvrages emblé­ma­tiques comme le pont de l’île de Ré ou la Grande Arche de La Défense.

La course à la résistance mécanique

Aujourd’hui, les pro­grès dans les bétons ne se situent plus seule­ment dans la course à la résis­tance mécanique mais se décli­nent à l’échelle glob­ale de la con­struc­tion, en prenant en compte son util­i­sa­tion et son analyse de cycle de vie, depuis la con­cep­tion, la réal­i­sa­tion jusqu’à la démolition.

À par­tir d’une large gamme de ciments que l’on com­pose à l’aide d’ajouts maîtrisés en cimenterie, la for­mu­la­tion de ces bétons mod­ernes per­met, en plus des aspects de résis­tance mécanique, de créer des matéri­aux et des sys­tèmes con­struc­tifs aux qual­ités adap­tées aux besoins : duc­til­ité, esthé­tique jusqu’à la trans­parence, dura­bil­ité, iso­la­tion et iner­tie ther­mique, per­for­mances envi­ron­nemen­tales et san­i­taires, effi­cac­ité énergé­tique, réduc­tion des con­som­ma­tions de matières et des coûts de la construction.

La tour Oxygène en construction à Lyon
La tour Oxygène à Lyon, réal­isée suiv­ant la démarche Haute Qual­ité Environnementale.

Bétons mod­ernes
Les bétons mod­ernes sont for­mulés par exten­sion de la notion de com­pos­ite : par asso­ci­a­tion avec les molécules organiques qui appor­tent des qual­ités de plus en plus spé­ci­fiques comme la rhéolo­gie ou l’incorporation de fibres de natures var­iées, on maîtrise aujourd’hui des bétons qui se met­tent en place sous le sim­ple effet de la grav­ité sans avoir recours à la vibra­tion bruyante et pénible (bétons auto­plaçants), ceux devenus duc­tiles par l’utilisation d’une large gamme de gran­u­lométrie de leurs com­posants, les « autonet­toy­ants » par action pho­to­cat­aly­tique de micropar­tic­ules, les bétons dépol­lu­ants qui puri­fient l’air, les bétons phoniques des­tinés aux écrans acous­tiques, les bétons isolants, les bétons drainants, les bétons isolants qui lais­sent pass­er la lumière, ceux à faible niveau d’émissions, les bétons de gran­u­lats légers, ceux qui résis­tent à de très hautes tem­péra­tures et même des bétons flex­i­bles, voire rebondissants.

Un jeu de construction

Pour l’architecte et le con­cep­teur d’ouvrages, c’est un véri­ta­ble jeu de con­struc­tion qui s’offre à eux, jeu com­plexe mais pour des solu­tions mul­ti­ples et adap­tées avec l’aide des maîtres de l’art (ingénieurs, four­nisseurs de matéri­aux, entre­pris­es, etc.).

La com­mu­nauté poly­tech­ni­ci­enne est très large­ment impliquée dans cet art de la con­cep­tion, que ce soit pour des con­struc­tions « courantes » qui con­som­ment plus de 85% du béton pro­duit, ou d’autres con­struc­tions plus excep­tion­nelles – comme le via­duc de Mil­lau, l’opéra de Pékin ou d’autres ouvrages remar­quables pour lesquels nos cama­rades Michel Vir­logeux, Paul Andreu et tous les con­cep­teurs inno­vants orchestrent l’utilisation de ces nou­veaux matériaux.

De la résistance à la performance

Toute cette nou­velle généra­tion de bétons a pro­fondé­ment mod­i­fié la con­struc­tion non seule­ment dans son aspect tech­nologique, réduc­tion des coûts et des délais de mise en œuvre, qual­ités envi­ron­nemen­tales et san­i­taires, mais aus­si dans son aspect humain et social comme l’amélioration du con­fort et l’augmentation du niveau de qual­i­fi­ca­tion des opérateurs.

Le béton n’est plus seule­ment « résis­tance », il est main­tenant « per­for­mances », inté­grant les défis de la con­struc­tion durable, sou­tenant tou­jours plus d’audace dans la con­cep­tion des ouvrages et des bâtiments.

Et son his­toire n’est pas finie, un autre saut tech­nologique est prob­a­ble­ment en train de s’amorcer avec les nou­velles approches du béton à l’échelle nanométrique qui per­me­t­tront d’encore mieux maîtris­er la rhéolo­gie du matéri­au et d’en opti­miser la for­mu­la­tion pour con­tin­uer sur les traces de Louis Vicat à s’adapter aux nou­veaux défis de notre société.

Le groupe cimen­tier inter­na­tion­al Vicat, entre­prise française, a su garder à la fois une tra­di­tion famil­iale, une voca­tion indus­trielle et un man­age­ment humain tout en réus­sis­sant à s’implanter dans onze pays à tra­vers le monde et à s’imposer comme un des fleu­rons français à l’international.

L’École poly­tech­nique compte Louis Vicat par­mi ses élèves qui ont fait hon­neur à la France entre 1794 et 1994 en le représen­tant aux côtés de Cauchy sur le trip­tyque du Bicen­te­naire de l’École situé dans le grand hall à Palaiseau.

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