François Parcy

François Parcy (88) : Se hisser aux sommets

Dossier : TrajectoiresMagazine N°741 Janvier 2019
Par Pierre LASZLO

François Par­cy a la ténac­ité du grimpeur. Je lui applique sa car­ac­téri­sa­tion de Wal­ter Bon­at­ti, qu’il juge le plus grand alpin­iste du vingtième siè­cle : « Pour la pureté de ses lignes en rocher, sa résis­tance surhu­maine et son audace. »

Une enfance campagnarde

Il naquit à Val­réas. Sa mère était fleuriste, plus tard régis­seuse de restau­rant sco­laire. Son père était ouvri­er spé­cial­isé dans le cartonnage.

« J’habitais en cam­pagne et pas­sais de longs moments au con­tact de la nature, dans les arbres, sur les bor­ds de la riv­ière ou à faire pouss­er quelques légumes. » Autres influ­ences sur l’enfant : en CE1, un enseignant très sévère, mais grat­i­fi­ant ; en cinquième, la lec­ture de Bac ou pas bac, que faire après de l’Onisep, et l’objectif d’entrer à l’X car « c’était la meilleure école » ; et la mon­tagne, par un grand-père cha­mo­ni­ard : « J’ai rêvé de mon­tagne en lisant tous les livres de ma bib­lio­thèque de col­lège sur le sujet : Mau­rice Her­zog, mais surtout Lionel Ter­ray, le Grenoblois. »

Ce sera la biologie… via l’X !

En sec­onde, la lec­ture d’un hors-série de Sci­ence et Vie, sur la nou­velle botanique, le décide à être chercheur en biolo­gie végé­tale. Par l’X ! Interne à 15 ans au lycée d’Orange, il entre en ter­mi­nale C, il aime la physique, mais adore la biolo­gie. Puis, hypotaupe au lycée du Parc, à Lyon, avec Hormière, « un prof d’une exi­gence incroy­able mais admiré de ses élèves ». Puis la taupe P’ : « J’ai raté Supaéro en 3/2, refusé Cen­trale Lyon car mes notes avaient mon­té tout au long de la spé et je pen­sais pou­voir avoir mieux. J’ai fait 5/2, en tra­vail­lant à l’internat avec des copains et en séchant une majorité de cours car le Parc don­nait les bons profs aux M’. »

Vint alors le ser­vice mil­i­taire, d’abord Coëtquidan, avec « un ­cap­i­taine mesquin et abom­inable qui savait faire la cohé­sion con­tre lui ». Puis, un classe­ment suff­isant pour cette unité d’élite, les ­chas­seurs alpins, à Barcelonnette.

Vers les cimes

Durant l’École, sur le plateau, il se lie d’amitié avec Alix Mar­tin, autre pas­sion­né d’escalade, qui devien­dra son beau-frère. Sa sco­lar­ité, mar­quée par une cam­pagne de kès hyper­folk­lo, l’est aus­si par son tiraille­ment entre l’astrophysique et la biolo­gie : notre tra­vers nation­al, hiérar­chis­er, nous englue dans la clas­si­fi­ca­tion des sci­ences d’Auguste Comte, qui reste déter­mi­nante. François part donc pour un stage en astro­physique à l’Institut Max Planck de Garch­ing. Mais il choisit néan­moins la majeure de biolo­gie. Aux vacances de Pâques, il entre dans le labo de Jérôme Girau­dat, un X aus­si, très rigoureux, à Gif-sur-Yvette : « J’ai adoré faire des manips sur les ADN, sur les plantes. Une révéla­tion, mon rêve de sec­onde qui deve­nait réal­ité. » Après son doc­tor­at, il part en post­doc (deux ans et qua­tre mois) au Salk Insti­tute, à San Diego, ce qui se sol­de par un gros papi­er : « Full arti­cle dans Nature dont j’étais le pre­mier auteur, une con­sécra­tion, une nais­sance dans la com­mu­nauté scientifique. »

“Mon rêve de seconde
devenait réalité”

La génomique

François Par­cy est par­mi les tout pre­miers à tra­vailler sur le génome d’Ara­bidop­sis thaliana, l’un des plus petits par­mi les plantes : cinq paires de chro­mo­somes, la séquence com­plète d’ADN de cette espèce est con­nue depuis 2001 : 157 mil­lions de paires de base. C’est devenu l’organisme mod­èle, de par sa petite taille, son cycle de vie rapi­de de six semaines (de graines à graines), sa résis­tance et sa capac­ité à s’autoféconder. Ara­bidop­sis thaliana est altérable par Agrobac­teri­um tume­fa­ciens, assur­ant l’insertion d’ADN‑T dans le génome de la plante qui, s’intégrant aléa­toire­ment, per­met l’inactivation de gènes et la créa­tion de muta­tions dirigées.

Consécration médiatique

Retour en France. Autre année de post­doc en Espagne. Puis, créa­tion de son pro­pre labo, à Greno­ble. En 2013, encore une année à l’étranger à Van­cou­ver, pour s’initier à la bio-infor­ma­tique. En 2014, une belle his­toire pub­liée dans Sci­ence com­bi­nant évo­lu­tion et biolo­gie struc­turale d’un régu­la­teur. Et une autre per­cée récente (2017) : « Nous essayons de com­bin­er toutes les tech­niques pour répon­dre à des ques­tions biologiques liées au développe­ment de la fleur et à son orig­ine. Une pub­li sur une plante sans fleur (la gym­nosperme Wel­witschia mirabilis) m’a don­né l’accès aux médias après un com­mu­niqué de presse et une dépêche AFP. Je suis passé sur plusieurs radios, j’adore expli­quer et partager avec tous les publics. »


Pour en savoir plus :

« A link between LEAFY and B‑gene homo­logues in Wel­witschia mirabilis sheds light on ances­tral mech­a­nisms pre­fig­ur­ing flo­ral devel­op­ment », Moy­roud (Edwige), Mon­ni­aux (Marie), Thévenon (Emmanuel), Dumas (Renaud), Scutt (Charles P.), Frohlich (Michael W.), Par­cy (François), in New Phy­tol­o­gist, 24 Feb­ru­ary 2017, https://doi.org/10.1111/nph.14483

Commentaire

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Dany et Aimé JUILLANrépondre
4 février 2019 à 19 h 08 min

Mer­ci pour ce très bel arti­cle sur ” notre François”…

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