Les cent ans des Amis de la forêt de Fontainebleau

Dossier : ExpressionsMagazine N°632 Février 2008
Par Michel HENRY (59)

Les forêts doma­niales de Fontainebleau, des Trois Pignons et de la Com­man­derie, situées à 60 kilo­mètres au sud de Paris, avec leurs 25 000 hectares de cal­caire, grès ou sable, ont eu, pen­dant longtemps, des rela­tions priv­ilégiées avec l’É­cole poly­tech­nique, grâce à la présence de l’É­cole d’ap­pli­ca­tion de l’ar­tillerie qui, local­isée à Metz, sous le Sec­ond Empire, avait dû se repli­er après 1870. 

Un champ de tir en pleine forêt

Le duc de Bris­sac (X 18), futur prési­dent de Schnei­der et de l’Arbed, racon­te, dans le pre­mier vol­ume de ses mémoires, En d’autres temps, qu’il y entra comme offici­er-élève, le 1er octo­bre 1920. Il logeait au château, quarti­er Hen­ri IV : ” Je partageais avec deux cama­rades, Mar­cel Hen­ry et Jean Ricard, une vaste et haute cham­bre au cen­tre de l’aile offrant vue au sud sur le Parterre créé par François Ier et remanié par Le Vau. (…) À la vérité, une école d’ar­tillerie et un champ de tir en pleine forêt étaient un para­doxe (…). En 1920, la sit­u­a­tion était lim­ite, mais en plaçant les bat­ter­ies à une extrémité du champ de tir et les objec­tifs (un décor de vil­lage en bois) à l’autre, on pou­vait encore régler des tirs de 75 et 155 jusqu’à cinq mille mètres. ” Depuis, l’É­cole a sage­ment choisi de démé­nag­er, à nou­veau, pour être plus au large. 

Escapades romantiques

Quelle est la sit­u­a­tion actuelle de la forêt, que l’on sup­pose, à juste rai­son, men­acée de tous côtés, par les amé­nage­ments routiers qui mor­dent sur la sur­face boisée (1 100 km de chaussées car­ross­ables), la crois­sance du traf­ic des camions et des voitures qui tra­versent la forêt jour et nuit, le piétine­ment des dix-sept mil­lions de vis­ites par an, effec­tuées par les habi­tants de toutes les aggloméra­tions d’Île-de-France et d’ailleurs, qui marchent sur les nom­breux sen­tiers de prom­e­nade ? Que sont dev­enues, dans ces con­di­tions, les escapades roman­tiques de George Sand et Alfred de Mus­set qui venaient de Paris par le coche d’eau et débar­quaient à Avon pour s’é­gar­er dans les bois ? Eh bien, l’As­so­ci­a­tion, en étroite coopéra­tion avec les ser­vices de l’Of­fice nation­al des forêts, con­tribue, de façon déter­mi­nante, à la bonne cohab­i­ta­tion entre les pro­fes­sion­nels qui gèrent la forêt, et les touristes à pied, pique-niqueurs, campeurs, cyclistes à VTT, ran­don­neurs de toutes sortes, varappeurs, ramasseurs de champignons ou de châ­taignes, sans compter les cours­es de chevaux, l’équipage de chas­se à courre, le Ral­lye Fontainebleau, qui oeu­vre encore deux fois par semaine, et les braconniers. 

Coupes claires ou coupes sombres

L’Association con­tribue de façon déter­mi­nante à la cohab­i­ta­tion générale, du varappeur au braconnier 

Actuelle­ment présidée par Jean Saint Lou­bert-Bié, frère d’un de nos cama­rades, elle a eu, entre autres pres­tigieux respon­s­ables, l’an­cien gou­verneur du Crédit Fonci­er, Hen­ri Deroy. Tous se sont dévoués à ces deux tâch­es qui peu­vent paraître con­tra­dic­toires : faire con­naître et appréci­er sans déna­tur­er les lieux ” en assur­ant la con­ser­va­tion et la pro­tec­tion des sites, des mon­u­ments pit­toresques et des peu­ple­ments végé­taux et ani­maux ” d’où des querelles récur­rentes : par exem­ple, pour la saine exploita­tion, faut-il procéder à des coupes claires ou som­bres, com­ment répar­er les dégâts des tem­pêtes (1967, 1999) et prévenir les incendies ? Ils y parvi­en­nent par de nom­breuses actions dont l’en­tre­tien et le bal­is­age de plus de 300 km de sen­tiers dont cer­tains tracés au XIXe siè­cle, par le ” syl­vain ” Claude-François Denecourt, puis Charles Col­inet. Pour mar­quer le Cen­te­naire, ont eu lieu, les 22 et 23 sep­tem­bre dernier, une fête de la Forêt, dans la plaine du Grand Par­quet et un col­loque sci­en­tifique dans les locaux de l’IN­SEAD. Toutes ces infor­ma­tions devraient nous inciter à revis­iter le site qui ” n’a rien per­du de son charme “.

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