Les 50 ans du corps de l’armement

Dossier : ÉditorialMagazine N°734 Avril 2018
Par Bruno ANGLES (84)

La réus­site de la fusion des corps, mal­gré la réduc­tion des effec­tifs, a mon­tré tout l’in­té­rêt pour la haute fonc­tion publique d’a­voir dans ses rangs des ingé­nieurs. C’est dans la voca­tion de l’École poly­tech­nique, et dans l’intérêt géné­ral d’a­voir un État qui intègre plei­ne­ment les dimen­sions scien­ti­fiques et l’innovation technologique. 

À la fin des années 50, la très grande majo­ri­té des élèves poly­tech­ni­ciens sor­taient dans un corps mili­taire à l’issue de leurs études, comme cela avait été le cas depuis la créa­tion de l’École en 1794. 

Dans la décen­nie qui a sui­vi, le nombre d’élèves qui rejoi­gnaient un corps d’officier des armées a très for­te­ment chu­té et le prin­ci­pal recru­te­ment, à la sor­tie de l’École poly­tech­nique dans des corps à sta­tut mili­taire, est deve­nu celui des corps d’ingénieurs. Depuis 1968, on peut même réduire au corps des ingé­nieurs de l’armement, corps dont nous mar­quons le cin­quan­te­naire dans ce numé­ro de La Jaune et la Rouge.

Ce corps est issu de la fusion des anciens corps d’ingénieurs mili­taires de sor­tie de l’X. En effet, l’Armement a été pré­cur­seur dans cette démarche de fusion, qui ensuite, dans d’autres minis­tères, a conduit à des regrou­pe­ments au corps des Mines et au corps des Ponts, des Eaux et des Forêts. 

Les besoins et les choix de l’État ont fait que le nombre de places offertes dans les corps a beau­coup dimi­nué, mais je me réjouis de ce que l’Armement soit res­té stable ces der­nières années avec 18 admis­sions chaque année. 

Même si, au total, les corps de l’État n’ont plus le volume anté­rieur, il demeure très impor­tant que, chaque année, des ingé­nieurs rejoignent la haute fonc­tion publique. C’est dans la voca­tion de l’École poly­tech­nique, que sou­tient l’AX, et dans l’intérêt géné­ral pour avoir un État effi­cace, stra­tège et régu­la­teur, en inté­grant plei­ne­ment les dimen­sions scien­ti­fiques et d’innovation technologique. 

L’armement fran­çais est, aujourd’hui, en bonne posi­tion, avec des maté­riels per­for­mants et com­pé­ti­tifs, mal­gré des bud­gets beau­coup plus contraints que ceux des forces amé­ri­caines. L’excellente réus­site des expor­ta­tions en témoigne. 

Pour les sys­tèmes de défense, les ingé­nieurs de l’armement ont mon­tré tout leur savoir-faire, qu’ils soient dans l’industrie ou à la DGA dont les suc­cès montrent tout l’intérêt d’avoir un corps d’ingénieurs de haut niveau. 

Réunir une base de lan­ce­ment de fusées, une cen­trale ato­mique, un vil­lage avec son hôpi­tal, le tout sous l’eau, et en toute dis­cré­tion acous­tique, voi­là un exemple de réa­li­sa­tion extra­or­di­naire à laquelle très peu de pays peuvent pré­tendre et où les ingé­nieurs de l’armement ont joué un rôle prépondérant. 

Dans les autres domaines, pour la dis­sua­sion nucléaire, les sys­tèmes ter­restres, aéro­nau­tiques, spa­tiaux, de ren­sei­gne­ment, et aujourd’hui de cyber­dé­fense, les ingé­nieurs de l’armement peuvent aus­si se féli­ci­ter de très beaux accomplissements. 

Lors du petit-déjeu­ner poly­tech­ni­cien du 5 février, la ministre des Armées, Flo­rence Par­ly, nous a dit toute l’importance d’un ren­for­ce­ment de la Défense, et les déci­sions d’augmentations du bud­get qui résultent de cette conviction. 

Nul doute que les poly­tech­ni­ciens, ingé­nieurs de l’armement, sau­ront prendre toute leur part dans cet effort de la Nation. 

3 Commentaires

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Lutunrépondre
17 avril 2018 à 22 h 41 min

des ori­gines du corps de l’ar­me­ment (édi­to­rial de B. Angles)

Les 6 089 élèves sor­tis de 1946 à 1967 et admis­sibles dans les ser­vices publics se répar­tissent ainsi : 

  • ingé­nieurs mili­taires (6 corps), 1 480 (24,3%),
  • offi­ciers des armées, 318 (5,2%),
  • corps civils, 1941 (31,9%),
  • botte recherche (303, 5,0%)
  • et démis­sion­naires, 2 047 (33,6%).

Les 9 503 élèves sor­tis de même de 1900 à 1945 se répar­tissent ain­si , le tout selon les fron­tières des corps de l’époque : 

  • ingé­nieurs mili­taires , 899 (9,4%),
  • offi­ciers des armées, 4 567 (48,1%),
  • corps civils, 1 691 (17,8%),
  • démis­sion­naires 2 346 (24,7%) 

La grande majo­ri­té n’est donc pas sor­tie dans les corps mili­taires après 1900, et l’as­ser­tion contraire n’a été vraie que pen­dant une par­tie du XIXe siècle. Du reste le minis­tère de la Guerre ne fixait aucune limite au recru­te­ment de l’Ar­tille­rie et du Génie, et les suc­ces­seurs de ces mili­taires ont ensuite gros­si le nombre des démissionnaires. 

Après la guerre de 1914, le recru­te­ment a été arrê­té pen­dant plu­sieurs années, signe d’une crise morale dans un milieu qui a eu beau­coup moins de pertes que les Saint-Cyriens. 

Il a repris ensuite, mais les offi­ciers X ne fai­saient plus qu’un pas­sage dans l’ar­mée. Après 1945, il s’est tari définitivement. 

Je signale encore que le corps de l’Ar­tille­rie était char­gé de l’arme et du ser­vice jus­qu’en 1935, et que les offi­ciers pou­vaient faire toute leur car­rière dans l’arme ou dans le ser­vice. La coexis­tence durait depuis la créa­tion en 1755 du corps des offi­ciers de l’ar­tille­rie par fusion de corps exis­tants, dont l’un était char­gé des arse­naux, des places et de la direc­tion du tir au com­bat. Le ser­vice est deve­nu DEFA puis DGA. Et il y a eu aus­si des fusions de corps civils. 

Ber­nard LUTUN, X74.

Lutunrépondre
18 avril 2018 à 18 h 00 min

Sor­tie des élèves,1794–1853, d’a­près le réper­toire de Marielle
Marielle, alors archi­viste de l’E­cole, four­nit les ren­sei­gne­ments sui­vants, qui com­plètent ceux que j’ai tirés des listes des jurys de sor­tie pour l’é­poque 1900–1967..

De 1794 à 1853, 7 688 élèves sont sor­tis de l’é­cole, dont 6 131 dans seize ser­vices publics, 1 221 démis­sion­naires et 336 autres sor­ties (dont 145 décé­dés pen­dant leurs études). 438 élèves ont été admis dans les ser­vices publics après leur sor­tie ; ils ont été pris par­mi les reti­rés ou les « autres sor­ties ». La répar­ti­tion des 6 131 + 438 = 6 569 fonc­tion­naires entre les ser­vices est la suivante :

9 Ser­vices ou corps mili­taires : artille­rie de la Marine, 149 ; artille­rie de terre, 2 504 ; corps d’é­tat-major, 204 ; génie mili­taire, 1 338 ; infan­te­rie, cava­le­rie, mai­son du Roi, 205 ; ingé­nieurs géo­graphes, 107 ; Marine, 213 ; génie mari­time, 196 ; ingé­nieurs hydro­graphes, 27. Total : 4 943 (75%).

7 ser­vices ou corps civils : ponts et chaus­sées, 1 206 ; mines, 226 ; poudres et sal­pêtres, 36 ; tabacs, 38 ; lignes télé­gra­phiques, 95 ; ins­truc­tion publique, 21 ; agri­cul­ture et com­merce, 4. Total : 1 626 (25%).

Ber­nard LUTUN, X74.

tenue31répondre
19 juillet 2018 à 10 h 20 min

Direc­tion des Fabri­ca­tions de l’Armement

Bonjour, 

Le Corps de l’Ar­me­ment est lui-même le résul­tat de nom­breuses évo­lu­tions au cours de la période 1918 à 1940. Période qui a vu : 

  • la sor­tie des fabri­ca­tions d’ar­me­ment de la tutelle de la Direc­tion de l’Artillerie. 
  • “esquisse puis la genèse en 1933 de la Direc­tion de Fabri­ca­tions d’Armement. 
  • la créa­tion du Corps des Ingé­nieurs Mili­taires en 1935. 

Ces ingé­nieurs mili­taires des fabri­ca­tions d’ar­me­ment https://tenue31.fr/service-fabrications-darmement/
ain­si que les ingé­nieurs des poudres https://tenue31.fr/service-poudres/
for­mèrent ensuite deux des six corps d’in­gé­nieurs mili­taires fusion­nés en 1961 lors de la créa­tion de la Délé­ga­tion Minis­té­rielle pour l’Ar­me­ment, puis Corps des Ingé­nieurs de l’Ar­me­ment en 1968. 

Il serait dom­mage que la défaite de 1940 obli­tère l’é­norme tra­vail de trans­for­ma­tion mili­ta­ro-indus­trielle ini­tiée dès 19331935 (sans doute trop tard). 

N’au­rait-il pas fal­lu célé­brer aus­si les 65 ans de la Direc­tion des Fabri­ca­tions de l’Armement ? 

Bien cordialement
Laurent Hélaine

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