Le savoir et l’ordinateur

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°593 Mars 2004Par : Denis BERTHIER (68)Rédacteur : TRAN Quoc-Anh (62)

Denis Berthi­er, actuelle­ment directeur des Études à l’INT (Groupe des Écoles des télé­com­mu­ni­ca­tions) com­bine une expéri­ence d’enseignant de haut niveau (X et ENPC), à celles de chercheur et de créa­teur dans un domaine pointu, l’Intelligence Arti­fi­cielle (IA), dans l’industrie.

Il a pub­lié fin 2002, aux édi­tions de l’Harmattan, un livre de réflex­ion tou­jours d’actualité, recom­mand­able non seule­ment à cer­tains de nos cama­rades “ spé­cial­istes ”, mais aus­si à tous ceux qui pressen­tent mais ne voient pas encore net­te­ment que l’ordinateur va tous nous affecter pro­fondé­ment jusque dans nos habi­tudes de tra­vailler intellectuellement.

Le sujet paraît vaste et très général, mais la thèse qui émerge nous sem­ble très claire et per­ti­nente : l’IA, actuelle­ment passée de mode et rejetée dans l’ombre, va revenir mas­sive­ment en force, sous forme “ d’agents rationnels ” par­tic­i­pant à de véri­ta­bles sociétés mixtes (humaines et infor­ma­tiques) répar­ties aux qua­tre coins du globe et com­mu­ni­quant à tra­vers le réseau Internet.

Suiv­ant l’intérêt du lecteur six “ fils con­duc­teurs ” dif­férents peu­vent être suivis :

1) Fil “infor­ma­tique sym­bol­ique” : des machines de Tur­ing aux agents intel­li­gents, en pas­sant par l’IA.

2) Fil “ sémi­o­tique ” : séman­tique, struc­tural­isme, lan­gage naturel en se référant aux ouvrages du séman­ti­cien Jay Jackendoff.

3) Fil “ archéologique ” : référence aux ouvrages de Michel Fou­cault sur le savoir du signe et de la langue.

4) Fil “ épisté­mologique ” : par­a­digme de la mod­éli­sa­tion “ recon­nue tar­di­ve­ment par l’IA ”.

5) Fil “ socié­tal ”, exem­ples de grandes réal­i­sa­tions investies par l’informatique sym­bol­ique : bases de con­nais­sances tech­niques, bases de con­nais­sances de sens com­mun, lex­iques, com­posants métiers.

6) Fil “ appli­catif ” : sans entr­er dans le détail d’applications par­ti­c­ulières. Aucun domaine de con­nais­sance, aucun secteur d’activité n’échappe aux assauts de l’IA.

L’absence de glos­saire ne devrait pas arrêter ceux qui sont gênés par les mots un peu tech­niques ou savants ren­con­trés dès les pre­mières pages comme : épistémè, par­a­digme, mod­éli­sa­tion, socié­tal, imag­i­nal, ordre symbolique.

Car, au fil des pages, l’auteur régale les lecteurs patients dans l’explication des con­cepts les plus impor­tants de l’informatique mod­erne en remon­tant aux sources les plus pures et les plus autorisées de la con­nais­sance humaine : philoso­phie, sci­ences “ dures ” (math­é­ma­tiques, logique, rel­a­tiv­ité) et dis­ci­plines sci­en­tifiques mod­ernes (struc­tural­isme, lin­guis­tique, sémantique).

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