Le peuple inattendu

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°586 Juin/Juillet 2003Par : André BELLON (63) et Anne-Cécile ROBERT Préface de Claude Nicolet, membre de l’institutRédacteur : François TARD (58)

21 avril 2003 : ce lun­di de Pâques mar­que le pre­mier anniver­saire d’une journée inat­ten­due ! La réflex­ion sur l’événement a‑t-elle été faite, les con­séquences en ont-elles été tirées ? Non. L’aveuglement règne.

“Le soir du pre­mier tour de l’élection prési­den­tielle, la France émergea de sa tor­peur avec une bonne gueule de bois. Pour­tant, le scé­nario avait été bien mon­té. Le cast­ing prévu pour le sec­ond tour était par­fait. Jacques Chirac dans le rôle de l’homme poli­tique de droite tac­tique, habile, mais […] Lionel Jospin dans celui de l’homme poli­tique de gauche sérieux, tra­vailleur et vertueux, mais quelque peu coincé.

L’Histoire a par­fois des bizarreries et, tel l’iceberg venant heurter le Titan­ic qu’il aurait pour­tant dû savoir insub­mersible, sur­git soudain du brouil­lard élec­toral un acteur vrai­ment inat­ten­du : le peu­ple. Il élim­i­na dès le pre­mier tour le can­di­dat chou­chou des experts et de la plu­part des médias.

Depuis lors, les respon­s­ables passent out­re à toute analyse de leur pro­pre rejet par un peu­ple auquel ils inter­dis­ent d’exprimer une souf­france sociale accu­mulée en vingt ans de dom­i­na­tion du libéral­isme économique. Ils cherchent com­ment mieux con­trôler, voire ori­en­ter les votes à l’avenir. Pire, la classe dirigeante sem­ble chercher des sub­sti­tuts au peu­ple et à ses représentants.

Cette époque, qui retourne vers le Moyen Âge en TGV, a un car­ac­tère réac­tion­naire qu’il est urgent de dénon­cer. ” Cette mor­dante dernière de cou­ver­ture donne un aperçu du pro­pos véhé­ment et déca­pant des auteurs : ils ont mal à la République. Privé de toute infor­ma­tion digne de ce nom, de toute par­tic­i­pa­tion à quelque véri­ta­ble débat que ce soit, de tout con­trôle sur les déci­sions qui le con­cer­nent, déshérité des valeurs d’émancipation indi­vidu­elle et de respon­s­abil­ité col­lec­tive qu’il devrait pour­tant trans­met­tre aux nou­velles généra­tions, que devient le “ citoyen ” ?

Mais au fait, le Peu­ple, qui est-ce ? C’est aus­si toi, c’est aus­si moi, cher (chère) Cama­rade. Nous sommes mem­bres d’une com­mu­nauté qui s’appelle le peu­ple, ce qui nous crée des droits et aus­si des devoirs, y com­pris celui de se sen­tir con­cerné par la ges­tion de la Cité.

Député des Alpes-de-Haute-Provence pen­dant trois lég­is­la­tures, Prési­dent de la Com­mis­sion des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale pen­dant deux ans, André Bel­lon a su met­tre ses con­vic­tions en pra­tique. Prési­dent fon­da­teur de l’association Tech­nique et Société dont le but est de faire la syn­thèse entre sci­en­tifique, ingénieur, tech­ni­cien et citoyen, il milite pour un statut des élus qui per­me­tte à un pub­lic plus divers en général, et en par­ti­c­uli­er à un plus grand nom­bre de sci­en­tifiques, d’ingénieurs, de tech­ni­ciens, de chefs d’entreprise de s’impliquer dans la ges­tion de la Cité, en appor­tant à la com­mu­nauté les com­pé­tences pro­pres à leur cursus.

En col­lab­o­ra­tion avec Anne-Cécile Robert, jour­nal­iste au Monde diplo­ma­tique notre cama­rade André Bel­lon apporte un éclairage remar­quable sur la vie poli­tique de notre époque, et sur la coupure entre le peu­ple, seul déten­teur légitime du pou­voir, et le monde politi­cien. Mon sen­ti­ment : à lire absol­u­ment par celles et ceux qui sont attachés aux valeurs répub­li­caines et qui veu­lent que les choses bougent.

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