Le Nil : l’espoir et la colère

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°552 Février 2000Par : Jean KERISEL (28)Rédacteur : Jean KERISEL

Dans la plaine du Nil, pen­dant des mil­lé­naires avant notre ère, s’est dévelop­pée une grande civil­i­sa­tion. Il y eut alors com­mu­ni­ca­tion intel­li­gente entre l’homme, la terre et l’eau. De Narmer à Nass­er, l’auteur évoque cette trilo­gie riche en réal­i­sa­tions et sym­bol­es puis il souligne les ambi­tions par­fois démesurées des loin­tains suc­cesseurs des pharaons ou de leurs con­seillers au XIXe siècle.

Les pharaons pen­saient détenir le mono­pole des eaux du fleuve ; ain­si en était-il encore récem­ment dans la plaine : Sadate menaça de guerre le suc­cesseur du Négus s’il touchait aux eaux du Nil bleu.

Pour emma­gasin­er à jamais ces eaux, le haut bar­rage, au lende­main de la nation­al­i­sa­tion du canal, fut défi au monde occi­den­tal et rup­ture avec la grande intel­li­gence hydraulique des pharaons : l’auteur mon­tre qu’un bar­rage plus mod­este, à l’amont, eût suf­fi, épargnant la basse Nubie et ses tem­ples, les crues étant rejetées latérale­ment dans la dépres­sion de Tochk­la déjà bien con­nue des pharaons.

Erreur de con­cep­tion tar­di­ve­ment recon­nue, puisque c’est dans ce site que sont depuis peu rejetées les crues du fleuve. Du même coup, Tochk­la veut devenir point de départ d’une nou­velle val­lée, celle des oasis. Val­lée de l’espoir pour les Égyp­tiens, mais pour les pays d’amont, val­lée de la colère parce que gouf­fre d’eau.

Tous ces pays men­a­cent de dévelop­per des irri­ga­tions tout au long du fleuve retenant l’eau qui arrose la plaine d’Égypte : le lac Nass­er devien­dra une sorte de mer d’Aral aux eaux de plus en plus bass­es décou­vrant un envase­ment déjà abon­dant et l’Égypte, renonçant à sa nou­velle val­lée, ver­ra dépérir son agri­cul­ture. Sera-ce alors la guerre de l’eau dans la val­lée de nos ancêtres ? Le sapi­ens sapi­ens chem­i­nant vers des ter­res incon­nues était empli d’espérance : ses descen­dants de plus en plus nom­breux se deman­dent avec angoisse si le fleuve pour­ra étanch­er leur soif.

Le salut de l’Égypte, pense l’auteur, pour­ra être dans l’aménagement hydraulique des chutes du Nil bleu, source d’énergie et d’eau abon­dante au long de l’année, au sein d’une action fédérée groupant Éthiopie, Nord-Soudan et Égypte.

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