Le consultant en stratégie : un fournisseur de services comme un autre ?

Dossier : Entreprise et managementMagazine N°598 Octobre 2004
Par Laurent JULIA (88)

Pour répon­dre à cette ques­tion, cher­chons d’abord à savoir ce qu’on entend par stratégie. Le bon sens du patron d’en­tre­prise con­fron­té à une con­cur­rence de plus en plus vive rejoint ici la déf­i­ni­tion qu’au­rait don­née un César ou un Napoléon : c’est ce qui per­met de bat­tre l’en­ne­mi (on dit ” con­cur­rent ”) et ce de façon prévis­i­ble (c’est-à-dire autrement que sur un coup de chance). Il en résulte tout naturelle­ment que le con­sul­tant ne peut pas amen­er le (petit) ” plus ” qui ferait gag­n­er l’un et l’autre des adversaires.

La notion d’ex­clu­siv­ité est cru­ciale au regard du ser­vice ren­du. Elle per­met notam­ment d’as­sur­er que les intérêts des deux par­ties (entre­prise et con­sul­tant) sont alignés. Si cela se passe mal, la perte est con­sid­érable pour le con­sul­tant : c’est là un gage de total dévouement.

Tout naturelle­ment, chez Mars & Co, nous avons fait de l’ex­clu­siv­ité l’un des fonde­ments de notre approche du méti­er. L’autre est la spé­cial­i­sa­tion en stratégie !

La spécificité du métier

Voyons donc main­tenant en quoi le stratège pra­tique un méti­er rad­i­cale­ment dif­férent de tous les autres métiers de ser­vices aux entre­pris­es, y com­pris les autres con­sul­tants spécialisés.

De façon à con­stru­ire des avan­tages durables et tan­gi­bles (gages de la ” vic­toire ” men­tion­née plus haut), une vision d’ensem­ble de l’ac­tiv­ité est indis­pens­able : on ne peut se con­tenter d’en opti­miser une par­tie (par exem­ple les coûts de pro­duc­tion) sans se pos­er la ques­tion de quoi faire de l’a­van­tage ain­si acquis (par exem­ple l’in­ve­stir pour gag­n­er des parts de marché). De même, les con­di­tions de l’op­ti­mi­sa­tion de telle ou telle par­tie (par exem­ple la réduc­tion dras­tique du nom­bre de références pour réduire les coûts de pro­duc­tion) peu­vent nuire à l’ensem­ble. Les Anglo-Sax­ons appel­lent ce type de prob­lème ” the silo syn­drom “.

Donc, pre­mière car­ac­téris­tique tech­nique du con­sul­tant en stratégie : sa capac­ité à repér­er et sug­gér­er les bons arbi­trages avec une vision d’ensem­ble de la problématique.

La sec­onde car­ac­téris­tique est aux antipodes de celle-ci : il s’ag­it de démon­ter patiem­ment, avec un soin d’hor­loger, tous les mécan­ismes d’ac­cu­mu­la­tion d’ef­fi­cac­ité économique, et ce à cha­cun des stades de valeur ajoutée de l’ac­tiv­ité analysée.

Par exem­ple, sur tel seg­ment du marché faut-il jouer sur les prix, les pro­mo­tions ou la com­mu­ni­ca­tion ? Avec quel dosage ? Quels résul­tats chiffrés faut-il attendre ?

Pour cela, point n’est besoin de dessin­er soi-même l’emballage du pro­duit ou de con­cevoir le spot de pub ni même de fournir le sys­tème infor­ma­tique qui va ren­dre compte des résul­tats obtenus. Il faut en revanche établir, cal­i­br­er, démon­ter toutes les rela­tions de cause à effet impliquées, et avoir établi une com­préhen­sion aus­si fine et quan­tifiée du con­cur­rent pour savoir où et quand atta­quer (ou bien éventuelle­ment s’al­li­er et col­la­bor­er avec lui).

Les spécialistes fonctionnels

Esprit de syn­thèse, capac­ité à démon­ter les mécan­ismes de la com­péti­tiv­ité, voilà les spé­ci­ficités du méti­er de con­sul­tant en stratégie. Ajoutons‑y l’ex­i­gence d’ex­clu­siv­ité du client et l’on voit mal com­ment des spé­cial­istes fonc­tion­nels, aus­si com­pé­tents soient-ils, qui en ter­mes d’or­gan­i­sa­tion, qui en matière de sys­tèmes infor­ma­tiques, qui en logis­tique peu­vent apporter des répons­es val­ables aux ques­tions de stratégie.

En effet, le con­sul­tant fonc­tion­nel con­stru­it son savoir-faire sur une logique hor­i­zon­tale (faire la même chose chez des gens dif­férents au sein du même secteur économique). Par con­struc­tion, il con­tre­vient au principe d’ex­clu­siv­ité. De plus, sa démarche intel­lectuelle est rad­i­cale­ment dif­férente de celle du stratège : à la fois moins général­iste car plus focal­isée sur le détail opéra­tionnel et moins tournée vers l’ex­térieur et vers la final­ité de l’a­van­tage con­cur­ren­tiel à bâtir.

Pour revenir à la déf­i­ni­tion don­née en intro­duc­tion, il y a sou­vent con­fu­sion sur le terme ” stratégie “. S’il s’ag­it d’une sim­ple mise au goût du jour avec aligne­ment sur les dernières ten­dances (“ buzz­words ” du type ” reengi­neer­ing “, ” con­duite du change­ment “…) il n’y a aucun prob­lème à utilis­er les ser­vices très pro­fes­sion­nels au demeu­rant de ” stratèges “, qui, non exclusifs et ven­dant leur expéri­ence fonc­tion­nelle (les ” prac­tices ”), sont alors idéale­ment placés. Si au con­traire, il s’ag­it pour l’en­tre­prise d’abor­der des ques­tions de fond pour son avenir même ou de com­pren­dre com­ment men­er au mieux la bataille con­cur­ren­tielle, un con­sul­tant pra­ti­quant l’ex­clu­siv­ité sera le meilleur choix.

Les critères décisifs

En sub­stance donc, je dirais que, pour exis­ter, voire sur­vivre, le con­sul­tant spé­cial­isé en stratégie doit aller jusqu’au bout de la logique de son méti­er : l’ex­clu­siv­ité et l’aligne­ment avec les car­ac­téris­tiques tech­niques uniques du méti­er. Ce sont, répé­tons-le, l’ap­ti­tude à for­mer une vision d’ensem­ble tout en étant capa­ble de démon­ter les mécan­ismes de com­péti­tiv­ité dans leurs moin­dres détails. Ces car­ac­téris­tiques doivent être les élé­ments clefs pour guider le choix des entre­pris­es lorsqu’elles veu­lent se faire aider à répon­dre à des ques­tions de stratégie.

Le suc­cès de notre entre­prise et la fidél­ité que lui témoignent ses clients sur le long terme reposent sur un respect absolu de ces principes. 

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