Le conseil en stratégie : un tremplin et un accélérateur de carrière

Dossier : Gestion de carrièreMagazine N°659 Novembre 2010
Par Matthias BOYER-CHAMMARD (00)

REPÈRES
Par­mi les X, nom­breux sont ceux qui font un pas­sage par le con­seil au cours de leur vie pro­fes­sion­nelle. On estime, par exem­ple, qu’en moyenne une quin­zaine d’X de chaque pro­mo­tion passera par le Boston Con­sult­ing Group à un moment ou à un autre de sa car­rière. Pro­por­tion impor­tante et com­pa­ra­ble à celle des plus grands groupes français. Au bureau de Paris, les X représen­tent 20 % de l’ef­fec­tif total des consultants.

Tous les tal­ents sont inté­grés et for­més, quel que soit leur par­cours pro­fes­sion­nel antérieur

Les cab­i­nets de con­seil en stratégie et en man­age­ment sont sor­tis des sphères ini­tiale­ment con­fi­den­tielles et com­mu­niquent plus large­ment sur leur pro­fes­sion. La mul­ti­tude des chemins de car­rières pos­si­bles est moins con­nue, alors que les oppor­tu­nités sont bien réelles. Jeune diplômé ou expéri­men­té, man­ag­er ou expert tech­nique, il est tou­jours pos­si­ble de rejoin­dre les cab­i­nets de con­seil où tous les tal­ents sont inté­grés et for­més, quel que soit leur par­cours pro­fes­sion­nel antérieur. Pour la moitié des X qui rejoignent notre cab­i­net, il s’ag­it d’un pre­mier emploi, éventuelle­ment après un stage d’op­tion. Pour l’autre moitié, ils arrivent après une expéri­ence pro­fes­sion­nelle de trois à huit ans, dans tout secteur d’ac­tiv­ité. On trou­ve ain­si des X anciens directeurs d’u­sine, chefs de pro­jet infor­ma­tique, hauts fonc­tion­naires ou banquiers.

Témoignage
Camille Brégé (2002), entrée après l’X et Stan­ford, évoque avec ent­hou­si­asme ses dix-huit pre­miers mois : “Entre le bureau de Paris et le bureau de New York, j’ai tra­vail­lé suc­ces­sive­ment pour une restruc­tura­tion d’ac­tiv­ités postales, une stratégie de diver­si­fi­ca­tion dans les médias, du mar­ket­ing dans la banque et l’as­sur­ance, de la R&D dans les télé­coms, et enfin une mise sous con­trôle de grands pro­jets d’ingénierie dans l’in­dus­trie pétrolière.”

La durée des expéri­ences des X dans les cab­i­nets de con­seil est vari­able — de deux ans à plus de vingt ans pour les asso­ciés les plus anciens — mais l’analyse de quelques pro­mo­tions per­met de dégager des ten­dances représen­ta­tives. Sur les pro­mos 93 à 96, env­i­ron 60 % des X entrés comme con­sul­tants au BCG sont devenus chefs de pro­jet et 40% y sont encore aujourd’hui.

Une grande variété de problématiques

Le pas­sage par le con­seil en stratégie est un excel­lent accéléra­teur de car­rière qui repose sur la pos­si­bil­ité de s’ex­pos­er à une grande var­iété de prob­lé­ma­tiques de direc­tion générale dans une péri­ode de temps courte mais intense. Secteurs, fonc­tions, clients, équipes… la var­iété est au cœur du méti­er du conseil. 

Un haut niveau d’exigence

Témoignage
Elsy Bogli­oli (2001) : “Mes deux pre­mières années général­istes ont été indis­pens­ables, car c’est en voy­ant de nom­breux prob­lèmes dans de nom­breux secteurs qu’on apprend le méti­er. La spé­cial­i­sa­tion vient d’elle-même par les goûts et les oppor­tu­nités : je me con­cen­tre main­tenant sur l’in­dus­trie phar­ma­ceu­tique et je développe une réelle exper­tise san­té. Cette spé­cial­i­sa­tion a du sens et de la valeur parce qu’elle me per­met de nouer des rela­tions per­son­nelles de con­fi­ance avec des mem­bres de comités de direc­tion chez mes clients. ”

Le niveau d’ex­i­gence des cab­i­nets de con­seil est par­ti­c­ulière­ment élevé, mais con­stitue en soi un des fac­teurs clés de l’ap­pren­tis­sage. Avec de nom­breuses années de recul, nous con­sta­tons que cet enchaîne­ment soutenu d’ex­péri­ences cor­re­spond par­ti­c­ulière­ment bien aux per­son­nes qui appré­cient d’être mis­es au défi et de se retrou­ver fréquem­ment en dehors de leur ” zone de con­fort “. En revanche il peut être vécu dif­fi­cile­ment par des per­son­nes qui préfèrent évoluer dans un envi­ron­nement con­nu et sta­ble à la fois en ter­mes de prob­lé­ma­tiques abor­dées et d’équipes.

Lau­rent Blivet (93), chef de pro­jet senior et respon­s­able du recrute­ment, indique : ” C’est ce que j’aime dire aux can­di­dats à la fin des entre­tiens de recrute­ment : vous vous plairez si vous aimez vous remet­tre en cause con­stam­ment ; au con­traire, si c’est la sécu­rité d’un envi­ron­nement sta­ble et con­nu qui vous per­met de vous dévelop­per, vous vivrez peut-être dif­fi­cile­ment ce métier.”

Se spécialiser progressivement

Les deux pre­mières années, les con­sul­tants sont encour­agés à rester général­istes afin d’ap­pren­dre et maîtris­er les out­ils du con­seil et d’élargir leurs com­pé­tences en analyse stratégique. Ensuite, ils peu­vent pilot­er leur par­cours et se spé­cialis­er progressivement.

Un environnement international

Témoignage
Jacques Garaïalde (76), aujour­d’hui asso­cié-gérant d’un fonds d’in­vestisse­ment et ancien directeur asso­cié du BCG, explique : “Tous les trois ans, on se remet en cause : on com­pare le nou­veau chal­lenge que le cab­i­net pro­pose aux clins d’oeil envoyés par les clients. J’ai choisi de relever les défis pen­dant de nom­breuses années : dévelop­per des rela­tions clients, ouvrir le bureau de Brux­elles, puis admin­istr­er le bureau de Paris.”

Tra­vailler dans le con­seil, c’est égale­ment évoluer dans un envi­ron­nement inter­na­tion­al. Le posi­tion­nement des clients, sou­vent de grands groupes inter­na­tionaux, favorise cette ouver­ture inter­na­tionale. Le bureau de Paris du BCG est par­ti­c­ulière­ment act­if au sein du réseau. Après avoir par­ticipé à la créa­tion des bureaux de Milan, Brux­elles et d’Eu­rope de l’Est, il est actuelle­ment la tête de pont du développe­ment en Afrique du Nord.

Ken Tim­sit (95), chef de pro­jet senior, insiste : ” J’avais envie de tra­vailler à New York et j’ai pu y pass­er deux ans ; les économies asi­a­tiques m’at­ti­raient et je suis main­tenant instal­lé à Sin­gapour avec ma famille. Au final j’ai pu tra­vailler dans dix pays en dix ans.”

Une grande diversité

Un appel à des pro­fils atyp­iques : chercheurs, médecins, philosophes ou sociologues

Un atout sup­plé­men­taire ? La diver­sité au sein des cab­i­nets de con­seil. Nous n’hési­tons pas à faire appel à des pro­fils atyp­iques : chercheurs, médecins, hauts fonc­tion­naires, philosophes ou soci­o­logues. La cul­ture de l’in­no­va­tion intel­lectuelle est nour­rie par cette mix­ité. Hen­ri Sal­ha (89) en est un excel­lent exem­ple. Pas­sion­né de philoso­phie, il entre à l’ENS à la sor­tie de l’X et passe l’a­gré­ga­tion. Il décide finale­ment d’en­tr­er dans le con­seil : ” Je souhaitais être dans l’ac­tion et en même temps rester dans un envi­ron­nement qui val­orise la réflex­ion, la rigueur et la créa­tiv­ité. Je n’ai pas été déçu.” 

Piloter son parcours

Témoignage
Stéphanie Mon­net (94), chef de pro­jet : ” C’est la meilleure façon de con­cili­er vie famil­iale équili­brée et car­rière pro­fes­sion­nelle attrayante. C’est un méti­er qui demande beau­coup de flex­i­bil­ité mais qui en donne aus­si beau­coup. Par exem­ple, je n’ai pas raté un seul spec­ta­cle ou événe­ment sco­laire de mes deux filles depuis mon entrée. De plus, à par­tir d’un cer­tain niveau d’ex­péri­ence, on peut tra­vailler à temps par­tiel sans chang­er le con­tenu du poste et les per­spec­tives de car­rière. Au lieu de suiv­re deux pro­jets on n’en suit qu’un seul.”

Il n’y a pas de chemin de car­rière unique dans le con­seil : les cab­i­nets offrent la pos­si­bil­ité de par­cours per­son­nal­isés avec une pro­gres­sion rapi­de. ” Moi-même, entré au cab­i­net à la sor­tie de l’É­cole, j’ai passé trois ans à appren­dre les bases. Ensuite, j’ai souhaité dévelop­per une com­pé­tence dans le secteur pub­lic, et le BCG a soutenu mon pro­jet de mas­ter d’ad­min­is­tra­tion publique à la Kennedy School d’Har­vard. Après ces deux ans de MPA aux États-Unis, cela fait main­tenant deux ans que je par­ticipe active­ment au développe­ment de l’ac­tiv­ité du bureau auprès des min­istères et des secteurs régulés.

” L’évo­lu­tion rapi­de tous les deux à trois ans est car­ac­téris­tique du début de la car­rière dans le con­seil — c’est la durée moyenne des postes d’as­so­ci­ate (entrée en sor­tie d’é­cole), puis de con­sul­tant (entrée après une expéri­ence pro­fes­sion­nelle de trois à huit ans), ou encore de chef de pro­jet. Ce rythme d’évo­lu­tion reste en grande par­tie vrai par la suite pour ceux qui choi­sis­sent de faire une car­rière longue dans le conseil.

Faire une pause

Pilot­er sa car­rière peut aus­si sig­ni­fi­er faire une pause. En cela, le con­seil est assez unique puisqu’il per­met rel­a­tive­ment sim­ple­ment de tra­vailler à temps par­tiel ou bien de pren­dre un con­gé sab­ba­tique de plusieurs mois sans que cela ne remette en cause la pro­gres­sion de car­rière. Cela a une sig­ni­fi­ca­tion par­ti­c­ulière pour les femmes qui désirent amé­nag­er leur vie pro­fes­sion­nelle pour laiss­er la place à l’ar­rivée de leurs enfants. Le méti­er de con­sul­tant était his­torique­ment mas­culin ; il tend aujour­d’hui à se féminis­er, non par hasard, mais pour ces raisons et parce qu’un effort par­ti­c­uli­er est porté vers l’in­té­gra­tion des femmes.

Une pression importante

Un effort par­ti­c­uli­er est porté vers l’in­té­gra­tion des femmes

Pro­gres­sion de car­rière rapi­de sig­ni­fie intérêt du tra­vail sans cesse renou­velé, mais aus­si pres­sion impor­tante. C’est par­ti­c­ulière­ment vrai lors du pas­sage au stade de chef de pro­jet. C’est une posi­tion pas­sion­nante aux inter­faces entre l’équipe client, l’équipe interne et les directeurs asso­ciés. Elle apporte beau­coup en ter­mes de qual­ités de ges­tion de pro­jet, mais elle néces­site un investisse­ment per­son­nel impor­tant. Tous les con­sul­tants ne devi­en­nent pas chef de pro­jet. Dans tous les cas, la promesse des cab­i­nets de con­seil est égale­ment d’ac­com­pa­g­n­er les con­sul­tants au moment où ils les quit­tent : par exem­ple, 70 % des per­son­nes qui quit­tent le cab­i­net trou­vent leur nou­veau poste grâce au réseau de clients et d’anciens.

Un pari gagnant

Au-delà des jeunes diplômés, les cab­i­nets de con­seil recru­tent beau­coup de pro­fils expéri­men­tés. En général, il s’ag­it de per­son­nes d’une trentaine d’an­nées réus­sis­sant très bien dans leur branche, mais qui ont le sen­ti­ment d’avoir atteint les lim­ites de la ges­tion des tal­ents de leur entre­prise. “Après trois ans chez Renault, con­firme Raphaël Desi (96), chef de pro­jet senior, le con­seil m’a per­mis d’ac­célér­er ma tra­jec­toire pro­fes­sion­nelle en me con­frontant à des inter­locu­teurs plus âgés et à des prob­lé­ma­tiques plus stratégiques.

” C’est par­ti­c­ulière­ment vrai pour les femmes après trois à cinq ans d’ex­péri­ence pro­fes­sion­nelle qui se posent la ques­tion des oppor­tu­nités au sein de leur entre­prise quand elles envis­agent d’avoir des enfants.

Une transition en forme de défi

Devenir entre­pre­neur Con­cer­nant les X en par­ti­c­uli­er, 60% des alum­ni ont inté­gré un grand groupe indus­triel ou de ser­vice, 25 % prof­i­tent de leur expéri­ence pour rejoin­dre des fonds d’in­vestisse­ment, des ban­ques d’af­faires ou d’autres métiers de la finance, et 15 % se lan­cent dans l’en­tre­pre­neuri­at ou dans la direc­tion de PME en forte croissance.

La tran­si­tion est tou­jours dif­fi­cile les pre­miers mois. Après un temps d’ap­pren­tis­sage au méti­er de con­sul­tant, il faut met­tre à prof­it ses con­nais­sances pour partager avec le reste de l’équipe ses expériences.

Frédéric Gastal­do (83) est un ancien sidérur­giste qui a fait le choix de venir au BCG. Il est resté trois ans avant de lancer, avec un cama­rade de l’X, LDCOM (futur NeufCege­tel) dans les années 2000. “Les pre­miers mois ont été un véri­ta­ble chal­lenge. J’ai dû endoss­er un rôle d’exé­cu­tant alors que j’avais eu jusque-là l’habi­tude de man­ag­er des équipes en tant qu’ingénieur de pro­duc­tion puis en direc­tion indus­trielle. Mais ce fut aus­si une expéri­ence fon­da­trice où j’ai décou­vert Inter­net et les télécoms.”

Philippe Roch (84), ancien chef de pro­jet senior et aujour­d’hui mem­bre du comité exé­cu­tif de Val­lourec en charge de la per­for­mance, évoque la com­plé­men­tar­ité de ses huit années passées au BCG après celles passées chez PSA : ” Mon expéri­ence indus­trielle a été démul­ti­pliée. Le con­seil en stratégie est un com­plé­ment indispensable.”

Témoignage Vanes­sa Lyon (95), chef de pro­jet senior et heureuse maman. ” J’ai adoré les qua­tre années que j’ai passées chez L’Oréal, mais je ne voy­ais pas com­ment con­cili­er la per­spec­tive d’une car­rière d’ex­cel­lence tout en ayant des enfants. Le BCG offre des solu­tions con­crètes et éprou­vées, notam­ment le fonc­tion­nement en mode pro­jet per­met de s’ar­rêter quelques mois sans risque de per­dre sa place.” Témoignage Pierre Derieux (85), directeur- asso­cié : ” J’ai choisi de rejoin­dre le con­seil après sept années passées chez Arcelor. C’é­tait un choix dif­fi­cile, j’é­tais directeur d’u­sine avec des respon­s­abil­ités et des équipes impor­tantes. Mais je voulais m’ou­vrir à d’autres hori­zons et me pré­par­er à des respon­s­abil­ités de chef à trois plumes. Au final, l’ex­péri­ence fut for­mi­da­ble et je ne le regrette pas. Alors que je pen­sais pass­er deux ans dans le con­seil, cela fait main­tenant treize ans que je suis motivé par ce métier.”

Pour conclure

Finale­ment, l’am­bi­tion des cab­i­nets de con­seil est de for­mer des pro­fes­sion­nels d’hori­zons var­iés aux principes essen­tiels de la stratégie d’en­tre­prise et de les expos­er à la plus grande var­iété pos­si­ble de prob­lé­ma­tiques de direc­tion générale.

Le con­seil en stratégie com­plète har­monieuse­ment l’ex­péri­ence industrielle

C’est en ce sens qu’ils con­stituent un véri­ta­ble trem­plin. Jacques Garaïalde (76), ancien respon­s­able du BCG Paris et actuel asso­cié-gérant du fonds d’in­vestisse­ment KKR, porte un regard sur son expéri­ence : “Je garde de mes dix-huit années dans le con­seil tous les fon­da­men­taux de l’analyse stratégique et un sens aigu de l’éthique. J’ai vécu une quan­tité extra­or­di­naire de sit­u­a­tions dif­férentes, si bien qu’au­jour­d’hui lorsque l’une des sociétés du porte­feuille de KKR est con­fron­tée à une dif­fi­culté, j’en suis sou­vent fam­i­li­er et je peux aider le man­age­ment à y faire face. ”

Le Boston Con­sult­ing Group est un cab­i­net inter­na­tion­al de con­seil en stratégie créé en 1963. Fort de 7000 per­son­nes, dont 4000 con­sul­tants, répar­ties sur 69 bureaux dans 40 pays, il compte 64 poly­tech­ni­ciens dont 9 directeurs associés.

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