moissonneuse-batteuse avec capteurs

L’agriculture connectée

Dossier : L'internet des objetsMagazine N°723 Mars 2017
Par Véronique BELLON-MAUREL
Par Bruno TISSEYRE
Par Jean-Pierre CHANET

L’a­gri­cul­ture a été par­mi les pre­miers secteurs à se con­necter, à l’époque du Mini­tel. En suiv­ant toutes les étapes tech­niques, elle est aujour­d’hui à l’heure du smart­phone, qui per­met de recevoir les infor­ma­tions mais aus­si de trans­met­tre les don­nées locales. Il faut veiller à ce que ces don­nées ne soient pas con­cen­trées dans la main de quelques acteurs et que l’on puisse les valoriser. 

En oppo­si­tion avec l’image erronée, mais mal­heureuse­ment répan­due d’une fil­ière « rétro­grade », l’agriculture a été l’un des pre­miers secteurs à se con­necter avec, dans les années 1980, l’adoption du Mini­tel pour accéder à des ser­vices inter­ac­t­ifs (météo, cours des marchés, télédéclarations). 

Depuis, cet investisse­ment n’a pas fléchi : 

« L’offre technologique “géolocalisation, observation” est à la base de l’agriculture de précision »
  • dans les années 1990, l’électronique et l’informatique « s’embarquent » dans les agroéquipements avec les pre­mières machines de traite robo­t­isées, le con­trôle des out­ils trac­tés et le GPS, indis­pens­able à l’agriculture de précision ; 
  • l’an 2000 signe l’apparition des appli­ca­tions Inter­net, puis des télé­phones portables ; 
  • les smart­phones se déploient à par­tir des années 2010. 

Aujourd’hui, en France, 250 000 agricul­teurs sont con­nec­tés et l’ère des objets con­nec­tés (Inter­net des objets ou IoT) s’annonce.

Sin­gulière­ment, cette révo­lu­tion a lieu dans les pays de tech­nolo­gie avancée, mais aus­si dans les pays émergents. 

REPÈRES

Les capteurs sont les éléments incontournables de l’agriculture 3.0, ils permettent d’acquérir des données à haute résolution spatiale et temporelle sur le sol, la plante, le climat, les ravageurs, etc.
Ils sont embarqués sur les satellites, les avions ou les drones pour caractériser l’état du couvert végétal et aider à mieux gérer la fertilisation, mais également sur les machines d’intervention où leurs observations géoréférencées par GNSS génèrent des données in situ sur la variabilité du sol ou des cultures.

SE CONNECTER POUR MIEUX PRODUIRE

Ce con­texte sans précé­dent a per­mis l’émergence et l’adoption de ser­vices inno­vants en agri­cul­ture, en par­ti­c­uli­er pour assis­ter l’agriculteur dans ses opéra­tions culturales. 


Un sys­tème de cap­teurs de ren­de­ment, d’humidité et de taux de pro­téine équipe les moisson­neuses-bat­teuses et per­met de con­naître et car­togra­phi­er pra­tique­ment en temps réel les car­ac­téris­tiques de la récolte en cours. © WOLFGANG JARGSTORFF / FOTOLIA.COM

L’aide au guidage – ou le guidage automa­tique des machines grâce au GNSS (Glob­al Nav­i­ga­tion Satel­lite Sys­tem dont fait par­tie le GPS) – con­stitue l’un des ser­vices les plus large­ment adop­tés par les agricul­teurs. Util­isé avant tout pour le con­fort de tra­vail qu’il pro­cure, l’aide au guidage per­met d’optimiser la tra­jec­toire des machines agri­coles et la réal­i­sa­tion des travaux. 

On est capa­ble d’adapter les opéra­tions aux besoins de la plante mesurés par divers moyens d’observation et car­tographiés : mod­u­la­tion des dos­es d’intrants (pes­ti­cides, engrais, semences, irri­ga­tion). Cette com­bi­nai­son obser­va­tion-géolo­cal­i­sa­tion des machines-action mod­ulée est le socle de l’agriculture de pré­ci­sion, qui con­tribue à l’amélioration de la dura­bil­ité économique et envi­ron­nemen­tale des exploita­tions agri­coles : la bonne dose, au bon moment, au bon endroit. 

L’une des appli­ca­tions emblé­ma­tiques est le sys­tème de cap­teurs de ren­de­ment, d’humidité et de taux de pro­téine qui équipe les moisson­neuses- bat­teuses et per­met de con­naître et car­togra­phi­er pra­tique­ment en temps réel les car­ac­téris­tiques de la récolte en cours. 

Les cap­teurs peu­vent aus­si être posi­tion­nés à poste fixe, sur la plante ou dans le sol ; con­nec­tés, ils con­stituent des réseaux d’observation sur l’état hydrique des cul­tures, du sol, mais aus­si des ravageurs. 

LE SMARTPHONE INTRODUIT UNE VRAIE RUPTURE

L’évolution des télé­phones porta­bles présente de nou­velles oppor­tu­nités : mesure-géolo­cal­i­sa­tion-con­nex­ion, le smart­phone réu­nit ces fonc­tion­nal­ités qui per­me­t­tent la mise en œuvre d’applications pro­fes­sion­nelles dédiées. 

« En agriculture, l’hétérogénéité des données est un point fondamental »

Le smart­phone présente une extrême mod­u­lar­ité per­me­t­tant à chaque agricul­teur d’adapter sa boîte à out­ils en fonc­tion de son niveau de com­pé­tences et d’exigences. Véri­ta­ble « couteau suisse » qui intè­gre des logi­ciels dédiés pour saisir des opéra­tions, mais aus­si des appli­ca­tions d’aide au réglage des out­ils, de recon­nais­sance des mau­vais­es herbes, de mesures spé­ci­fiques (couleur, forme, den­sité, etc.) sur les cul­tures ou les ani­maux, d’accès à des bases de référence, etc. 

Les obser­va­tions effec­tuées par les smart­phones ouvrent la voie vers de véri­ta­bles réseaux d’observation et de partage à l’échelle des ter­ri­toires agri­coles, que ce soit sur les ravageurs, l’état des cul­tures, l’état du sol, etc., ren­dant pos­si­ble l’alimentation de réseaux d’observations partagés déjà mis en œuvre par les insti­tuts tech­niques ou cer­taines sociétés de ser­vices ou de l’agrofourniture.

Enfin, les « objets con­nec­tés » font leur appari­tion en agri­cul­ture, qu’il s’agisse de sta­tions météo, de machines agri­coles, de cap­teurs en réseaux (humid­ité du sol, ravageurs, etc.). Les don­nées générées par ces divers­es sources ont voca­tion à être trans­for­mées en indi­ca­teurs et con­seils utiles aux agriculteurs. 

UNE OPPORTUNITÉ POUR LES PAYS EN DÉVELOPPEMENT

VERS UN « BIG DATA » AGRICOLE

Des opérateurs historiques comme les éditeurs de logiciels agricoles ou les équipementiers (via la télématique des machines) proposent d’agréger les données à différentes échelles (exploitations, région, pays) pour éditer des références et améliorer le conseil agricole (ou la maintenance des machines).
Mais demain, avec l’explosion de l’offre d’objets connectés (on en attend 80 milliards dans le monde en 2020), ces données massives ouvrent la voie à des possibilités démultipliées de valorisation.

Dans les pays en développe­ment, l’agriculture reste un secteur économique pré­dom­i­nant, avec une majorité de petits exploitants et d’éleveurs, de faibles ren­de­ments (sauf en zone irriguée) et des bar­rières à l’accès aux infor­ma­tions cri­tiques, aux marchés et aux inter­mé­di­aires financiers. 

L’offre tech­nologique pour abor­der les défis agri­coles est dif­férente du fait des exi­gences par­ti­c­ulières de résis­tance et de maîtrise des coûts : pas ou peu de cap­teurs spé­ci­fiques, mais une abon­dance de télé­phones mobiles, pal­liant l’absence d’infrastructures ter­restres de télé­phonie, dans une démarche de leapfrog­ging.

Si les SMS sont les vecteurs d’information préférés pour les alertes météo, par­a­sitaires et les don­nées sur les marchés, des appli­ca­tions plus com­plex­es appa­rais­sent avec la dif­fu­sion des smart­phones. Tous les opéra­teurs sont intéressés par ce marché et pro­posent des solu­tions. En 2011, GSMA, leur asso­ci­a­tion mon­di­ale, a lancé le pro­gramme mAgri, qui réu­nit les opéra­teurs et four­nisseurs de tech­nolo­gies mobiles et les organ­i­sa­tions agri­coles, pour accélér­er le développe­ment de ser­vices mobiles pour les petits agricul­teurs et les com­pag­nies agricoles. 

La Banque Mon­di­ale a analysé les fac­teurs de réus­site du développe­ment des TIC dans les Pays du Sud : gain économique réel, choix du vecteur de com­mu­ni­ca­tion appro­prié (en ten­ant compte de l’illettrisme), con­struc­tion de rela­tions de con­fi­ance de long terme, en inclu­ant les gou­verne­ments, des cen­tres sup­ports et des facil­i­ta­teurs locaux, recours à des tech­nolo­gies alter­na­tives aux TIC en cas de faible con­nec­tiv­ité, impli­ca­tion des agricul­teurs dans la for­ma­tion des mem­bres de la com­mu­nauté et dans la con­struc­tion des solutions. 

Comme dans les pays occi­den­taux, la dimen­sion sociale de ces inno­va­tions à base de TIC (appro­pri­a­tion de l’outil, for­ma­tion, etc.) est donc essentielle. 

UN « BIG DATA » MONDIALISÉ

Dans le monde entier se pro­file donc une mas­si­fi­ca­tion de la don­née agri­cole. Asso­ciée à la néces­sité de com­bin­er des don­nées très hétérogènes, elle donne nais­sance à un véri­ta­ble big data agricole. 

Si le big data est car­ac­térisé par les 3 V (vol­ume, var­iété, véloc­ité), c’est la « var­iété » qui est l’élément le plus déter­mi­nant en agriculture. 

« Rendre les données plus accessibles, plus riches et plus interopérables »

Le vol­ume n’est pas le point le plus remar­quable, les vol­umes les plus impor­tants étant issus de l’imagerie satel­li­taire et des plate­formes de phéno­ty­page. La véloc­ité n’est pas non plus un verrou. 

C’est surtout la var­iété ou plutôt l’hétérogénéité des don­nées qui est un point fon­da­men­tal en agri­cul­ture : les don­nées très divers­es, issues de sources dis­tribuées chez dif­férents acteurs et non standardisées. 

Ain­si, même si les tech­nolo­gies de stock­age, de manip­u­la­tion et de traite­ment du big data sont main­tenant disponibles, encour­agées par les besoins d’autres secteurs (le com­merce, la banque, la ville, la san­té, etc.), les don­nées agri­coles présen­tent des ver­rous par­ti­c­uliers : la vari­abil­ité et la dis­per­sion chez des parte­naires divers. 

LES ACTEURS MULTIPLIENT LES INITIATIVES

C’est pourquoi des ini­tia­tives se mul­ti­plient, avec l’objectif de ren­dre les don­nées plus acces­si­bles, plus rich­es et plus interopérables. 

Agriculture en Afrique
Dans les pays en développe­ment, l’of­fre tech­nologique pour abor­der les défis agri­coles est dif­férente du fait des exi­gences par­ti­c­ulières de résis­tance et de maîtrise des coûts. © CODEV EPFL

À titre d’exemples, citons la plate­forme API-Agro, plate­forme de références agronomiques (http://www.api-agro.fr/) ini­tiée par l’ACTA (asso­ci­a­tion des cen­tres tech­niques agri­coles), qui vise à favoris­er l’interopérabilité des références agronomiques, le sys­tème d’information Agrosyst, dévelop­pé par l’Inra, pour cap­i­talis­er des don­nées agronomiques et les ren­dre interopérables (ini­tiale­ment pour les sys­tèmes de cul­ture économes en pes­ti­cides du réseau nation­al DEPHY du pro­gramme Eco­phy­to), ou le por­tail AgGate (http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/174000039.pdf).

Ce dernier vise à faciliter l’accès aux don­nées d’intérêt agri­cole afin de favoris­er l’innovation ouverte : la com­bi­nai­son et le traite­ment cou­plés de don­nées de pro­duc­tion, de don­nées pédo­cli­ma­tiques, géné­tiques, tech­niques, etc., accéléreront la con­struc­tion de nou­velles con­nais­sances agronomiques, dans un con­texte qui change vite, élab­o­ra­tion de nou­velles var­iétés, mis­es en place de nou­velles pra­tiques agronomiques (par exem­ple en agroé­colo­gie avec asso­ci­a­tion de cul­tures dans les champs, bio­con­trôle des mal­adies et des agresseurs, etc.). 

Cette « accéléra­tion » est cru­ciale car le temps de l’agronomie est un « temps long », qui se heurte aujourd’hui à des change­ments très rapi­des, aux­quels il faut faire face (change­ment cli­ma­tique, évo­lu­tion des marchés, etc.). 

Au-delà de la trans­for­ma­tion tech­nique, l’agriculture con­nec­tée entraîn­era une évo­lu­tion du rôle des acteurs de l’agriculture (agricul­teurs, con­seillers agri­coles, recherche agronomique, agro­four­nisseurs) dans les ter­ri­toires et les filières. 

LES PAYS EN DEVELOPPEMENT JOUENT LA CONNECTIVITE

En 2014, le taux d‘adoption de mobiles par la population des pays les moins développés était de 64 %. Avec les images satellites, ils jouent un rôle crucial pour aborder les défis agricoles. Les technologies robustes (téléphones cellulaires basiques) sont préférées, mais les smartphones poursuivent leur déploiement (+ 66 % des ventes au 1er trimestre 2015 pour la zone Moyen-Orient Afrique), notamment grâce à des offres tarifaires alléchantes (47 % des smartphones vendus en Afrique sont à moins de 100 $). 

SE CONNECTER POUR MIEUX S’INTÉGRER AU MONDE

Du fait de l’urbanisation et de la mon­di­al­i­sa­tion, qui éloignent les lieux de con­som­ma­tion des lieux de pro­duc­tion, l’agriculture est moins présente dans notre quo­ti­di­en, et peut devenir presque invis­i­ble et donc « inex­is­tante ». Inter­net devient alors un out­il indis­pens­able pour recon­stru­ire un lien entre les agricul­teurs et ces con­som­ma­teurs « éloignés ». 

« La limitation la plus importante reste la connectivité en milieu rural »

Plus en phase avec nos exi­gences de con­som­ma­tion, le regroupe­ment de plusieurs agricul­teurs dans une même plate­forme élec­tron­ique de vente per­met d’élargir la gamme de pro­duits et donc d’être beau­coup plus attrac­t­if. Il néces­site cepen­dant une logis­tique par­ti­c­ulière, qu’il faut soit inté­gr­er dans les coûts, soit con­fi­er à un tiers. 

Ain­si Inter­net per­met, comme dans les autres secteurs, une dés­in­ter­mé­di­a­tion, mais ver­ra ses lim­ites dans la com­plex­ité de la logis­tique des pro­duits périss­ables. Cette con­trainte liée aux flux de matières dis­paraît dès lors qu’on con­sid­ère unique­ment les flux d’information.

LES AGRICULTEURS INVESTISSENT LE WEB 2.0

Aujourd’hui plus de 50 % des agricul­teurs utilisent Inter­net pour s’informer. L’usage des out­ils de com­mu­ni­ca­tion par­tic­i­pat­ifs (forums, réseaux soci­aux, blogs) reste faible, mais est en crois­sance : la fréquen­ta­tion des forums a crû de 50 % dans les trois dernières années, et devrait pour­suiv­re son essor, les jeunes util­isant plus fréquem­ment ces outils. 

DU PRODUCTEUR AU CONSOMMATEUR VIA INTERNET

Les consommateurs, échaudés par les crises alimentaires, sont en demande de transparence dans les circuits, de reconstruction de circuits courts, en particulier pour les produits frais. La commande par Internet apporte souplesse, modularité et réactivité, ce qui explique que les sites d’exploitations agricoles ayant investi ce créneau abondent

Les réseaux soci­aux numériques sont plus mobil­isés dans le cadre per­son­nel que pro­fes­sion­nel ; par exem­ple, le plus pop­u­laire, Face­book, est util­isé per­son­nelle­ment par 30 % des agricul­teurs et pro­fes­sion­nelle­ment par 15 % seulement. 

Selon Roger Le Guen, soci­o­logue à l’ESA d’Angers, ils « attirent les agricul­teurs parce que ceux-ci sont plus isolés, plus spé­cial­isés dans leur méti­er, moins disponibles pour les réu­nions ». Ces liens « faibles » qui se créent entre agricul­teurs ou entre agricul­teurs et société sont, selon M. Le Guen, une mar­que de la « résur­gence des formes col­lec­tives en agriculture ». 

Ils jouent donc un rôle fon­da­men­tal pour rompre l’isolement, mais peu­vent génér­er une « dés­in­ter­mé­di­a­tion » vis-à-vis d’institutions d’accompagnement et de con­seil agri­cole, avec le risque d’une forme « d’ubérisation » de cette activité. 

DES VERROUS À LEVER

Ecran de la plateforme de données API-AGRO
API-Agro, plate­forme de références agronomiques ini­tiée par l’ACTA (asso­ci­a­tion des cen­tres tech­niques agri­coles), vise à favoris­er l’interopérabilité des références agronomiques.

Même si les agricul­teurs utilisent quo­ti­di­en­nement les TIC, notam­ment via leur smart­phone, il reste encore des lim­i­ta­tions aux développe­ments de ces tech­nolo­gies. La plus impor­tante est la ques­tion de la con­nec­tiv­ité en milieu rur­al : la 3G, et d’autant plus la 4G, sont encore absentes dans de nom­breuses zones, ce qui entrave le déploiement de ser­vices mobiles performants. 

Même con­stat pour les liaisons filaires qui pro­posent encore des débits bien plus faibles qu’en milieu urbain. 

Ces nou­velles tech­nolo­gies oblig­ent les acteurs du secteur de l’agriculture à revoir leurs mod­èles économiques : comme dans d’autres secteurs, on passe peu à peu d’une société de « pos­ses­sion » à une société de « fonc­tions » (ser­vices). Tout l’écosystème de la chaîne de valeur (agricul­teurs, équipemen­tiers, con­seillers, etc.) doit évoluer. 

VALORISATION OU ALIÉNATION DES DONNÉES ?

Côté « effets béné­fiques » de la val­ori­sa­tion des don­nées sous forme de ser­vice, on peut prévoir une baisse de l’endettement des agricul­teurs ayant recours au ser­vice plutôt qu’à l’achat d’équipements ; d’autre part, les don­nées des agricul­teurs sur lesquelles s’appuient les ser­vices pren­nent de la valeur, qui reste mal­gré tout à quantifier. 

En revanche, il faut être vig­i­lant sur la pos­ses­sion et l’usage des don­nées : elles peu­vent être une arme red­outable pour la spécu­la­tion sur des marchés très fluc­tu­ants où les marges des agricul­teurs sont très faibles. 

COMMUNALISATION DES DONNÉES

Pour éviter une appropriation des données, des initiatives ont été prises très récemment : aux USA, la AgDataCoalition, lancée par le Farm Bureau, premier syndicat agricole, projette de construire un entrepôt de données indépendant dans lequel les agriculteurs pourront stocker leurs données ; en France, le portail AgGate, cité plus haut, pourrait offrir les mêmes services.

Ain­si, la perte de con­trôle des don­nées et surtout la main­mise sur les don­nées par quelques acteurs (GAFA, agro­four­nisseurs) est un dernier risque, peut-être le plus grave, car il touche au pilotage de la pro­duc­tion ali­men­taire mondiale. 

Enfin, cette évo­lu­tion tech­nologique très rapi­de pose des prob­lèmes de com­pé­tence des acteurs. Il est indis­pens­able d’élaborer des dis­posi­tifs de for­ma­tion et de démon­stra­tion, via des exploita­tions de test et de démon­stra­tion (DigiFerme d’Arvalis, Mas numérique de Mont­pel­li­er Supa­gro, etc.), et via de nou­velles fil­ières de for­ma­tion con­tin­ue et ini­tiale : de nou­veaux métiers émer­gent, sou­vent pluridis­ci­plinaires (par exem­ple, agronomie et infor­ma­tique) et les cur­sus de for­ma­tion doivent l’intégrer.

UN EFFORT DE RECHERCHE POUR ACCOMPAGNER CETTE RÉVOLUTION

LE BAS DÉBIT RESTE UTILE

Des technologies de communication émergentes propres à l’IoT (Internet des objets), proposées par Sigfox ou Orange (technologie LoRa), qui connectent des objets sur de longues distances pour des échanges bas débit, trouvent un marché important dans l’agriculture, qui bénéficiera à plein de l’essor de l’IoT.

L’agriculture con­nec­tée est en marche, aus­si bien dans nos con­trées que dans les pays du Sud. Au-delà des béné­fices soci­aux (recon­struc­tion de sol­i­dar­ités et de réseaux, meilleur con­fort de tra­vail, etc.), elle génér­era une dés­in­ter­mé­di­a­tion du con­seil et de la vente, de la trans­parence dans les échanges, la con­cil­i­a­tion des exi­gences économiques et envi­ron­nemen­tales, et poten­tielle­ment, un accroisse­ment de la productivité. 

Cette révo­lu­tion doit être accom­pa­g­née, d’une part en veil­lant à ce que les don­nées et les capac­ités de traite­ment ne soient pas con­cen­trées dans la main de quelques acteurs, d’autre part en créant les con­di­tions de la val­ori­sa­tion de ces données. 

« Il faut être vigilant sur la possession et l’usage des données »

Un enjeu impor­tant est de fédér­er une force de recherche française inter­dis­ci­plinaire sur le sujet. C’est l’objectif de #Dig­itAg, l’Institut Con­ver­gences agri­cul­ture numérique, à Mont­pel­li­er, pre­mier insti­tut français offrant recherche et enseigne­ment supérieur sur le sujet de l’agriculture numérique (www.HDigitag.fr).

POUR EN SAVOIR PLUS SUR L’AGRICULTURE CONNECTÉE :

  • Pil­laud, H. 2015, Agron­u­mer­i­cus, Inter­net est dans le pré, Édi­tion France Agri­cole, 251 p. 
  • Isaac, H., Pouy­at, M. 2015, Les défis de l’agriculture con­nec­tée dans une société numérique, Édi­tion Renais­sance Numérique, 106 p. 

Commentaire

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Fredrépondre
14 juillet 2017 à 7 h 09 min

Il y a de bonnes idées, les

Il y a de bonnes idées, les recherch­es dans le domaine met­tent en avant des alter­na­tives pos­i­tives dans ce domaine et le seul prob­lème réside dans la malveil­lance, de la pru­dence il en faut vous avez bien rai­son de la souligner. 

Au plaisir de vous lire 

Fred de gar­denice Charleville

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