La solution innovante

Dossier : Arts, lettres et sciencesMagazine N°743 Mars 2019

Le titre de ce deuxième roman d’Anatole Toko­faï est ambi­gu. Il s’en explique dans une vidéo. On pour­rait après coup en sug­gé­rer bien d’autres : Ema­nen­ki, du nom de son héros, ou De San­dou­gou à San­dou­gou, pour sou­li­gner un périple – com­men­cé et fini à San­dou­gou – qui se referme sur lui-même, ou… Nous sommes en Afrique de l’Ouest, dans la seconde moi­tié du XIXe siècle. Les Sim­ba, implan­tés dans le bas­sin du Yoro, sont déci­dés à y régner seuls en maîtres, et la meilleure façon d’y par­ve­nir est d’éliminer jusqu’au der­nier ceux qui s’obstinent à y demeu­rer, leurs enne­mis les Lem­bés. Sous la conduite de leur cabo­cir, le chef Omo­koé, ils règlent rapi­de­ment l’affaire, et Ana­tole Toko­faï éga­le­ment, en quelques pages. Le roman peut com­men­cer, pla­cé sous le patro­nage d’un apho­risme (n° 531) de Frie­drich Nietzsche dans Humain, trop humain : « Qui vit de com­battre un enne­mi a inté­rêt à ce qu’il reste en vie. » Dans la vidéo ci-des­sus réfé­ren­cée, l’auteur redit son ambi­tion d’éclairer, à tra­vers La solu­tion inno­vante, cette péti­tion de principe. 

Ce n’est pour­tant pas seule­ment ce qu’on découvre en le lisant, car au-delà de cette ambi­tion affir­mée, c’est dans une sorte de docu­ment anthro­po­lo­gique et socio­lo­gique que l’on se retrouve immer­gé. Ce qui se met en place sous nos yeux, et qui frappe avant tout, c’est la vie quo­ti­dienne, ce sont les cou­tumes, les mœurs d’un petit groupe eth­nique, d’une tri­bu essen­tiel­le­ment guer­rière qui pro­longe cette acti­vi­té comme par­tie pre­nante aux der­niers ava­tars du com­merce tri­an­gu­laire, ven­dant aux tra­fi­quants euro­péens les esclaves que ses cam­pagnes mili­taires lui ont acquis. La bar­ba­rie san­glante et arbi­traire qui règne chez les Sim­ba sidère. Ema­nen­ki, res­ca­pé incer­tain du der­nier mas­sacre et fil conduc­teur du roman, cahote, au fil de mul­tiples épi­sodes qui le condui­ront en Amé­rique et en Europe, vers une ten­ta­tive plus opti­miste de morale humaniste.

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