Joaquin RODRIGO : Concierto de Aranjuez et Sergueï RACHMANINOV : Symphonie n°2

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°676 Juin/Juillet 2012Par : Juan Manuel Cañizares, guitare, Orchestre philharmonique de Berlin, dir. Sir Simon RattleRédacteur : Marc DARMON (83)

Coffret du Blue-ray de l'orchestre philharmonique de Berlin,avec Sir Simon Rattle

Tous les 1er Mai, l’Orchestre phil­har­mo­nique de Ber­lin célèbre l’anniversaire de sa fon­da­tion dans une grande ville d’Europe. Ces Euro­pa Kon­zert sont régu­liè­re­ment fil­més et publiés en DVD par Euroarts, et nous conseillons gran­de­ment, ces der­nières années, ceux d’Athènes (Brahms par Rat­tle et Baren­boïm) et Istan­bul (Ber­lioz et Mozart diri­gés par Mariss Jan­sons). À Madrid, l’année der­nière, l’orchestre a joué, sous la direc­tion de son chef per­ma­nent Sir Simon Rat­tle, un grand concert fai­sant le lien entre l’Espagne (España de Cha­brier, le Concier­to de Aran­juez) et la musique du reste de l’Europe avec la Sym­pho­nie n° 2 de Rach­ma­ni­nov. Dans la grande salle du Tea­tro Real, réno­vée il y a quinze ans et recon­nais­sable à sa gran­diose loge royale, le concert débute par un apé­ri­tif brillam­ment enle­vé (superbes cuivres !), l’España d’Emmanuel Cha­brier de 1883, pièce légère mais deve­nue une des plus célèbres du com­po­si­teur français.

Le Concier­to de Aran­juez date de 1939. Il est évi­dem­ment l’œuvre la plus célèbre de Rodri­go (il a écrit quatre autres concer­tos pour gui­tare), un com­po­si­teur de très grand talent, qui comme son contem­po­rain Turi­na est trop mécon­nu en France. Ce concer­to pour gui­tare est ici inter­pré­té par la star du fla­men­co qu’est Juan Manuel Cañi­zares. Posi­tion­né sur le devant de l’orchestre, il est très bien fil­mé et enre­gis­tré : nous voyons tout de la qua­li­té de son jeu, mais aus­si de la classe de ce per­son­nage expres­sif et impres­sion­nant. Les Ber­li­ner donnent la réplique comme s’il s’agissait d’une œuvre de Brahms ou de Bee­tho­ven, mais avec une grande finesse de timbre adap­tée à cette orches­tra­tion typée. Le célèbre second mou­ve­ment, dont la mélo­die est deve­nue un stan­dard, intro­duit au cor anglais, et fait se suc­cé­der une suite de dia­logues entre les bois et la guitare.

La seconde sym­pho­nie de Rach­ma­ni­nov est la plus connue du com­po­si­teur russe, et son pre­mier véri­table suc­cès qui ne soit pas dû au pia­no, en 1908. Après une intro­duc­tion lente de plus de cinq minutes, le pre­mier mou­ve­ment s’anime, sur les mêmes thèmes. Rat­tle se per­met d’exacerber et de faire res­sor­tir le côté hyper-roman­tique de cette musique, avec des ral­len­tan­di à se dam­ner, des cordes lan­guis­santes et un tis­su orches­tral d’une grande épais­seur. Mais il fait aus­si res­sor­tir les facettes pro­gres­sistes de cette musique, qui ne sautent pas aux oreilles lors d’interprétations plus fades. Rat­tle, qui dirige sans par­ti­tion, est tou­jours aus­si impres­sion­nant à voir diri­ger, alliant dyna­misme et une grande expressivité.

Pour la Sym­pho­nie n° 2, il faut voir éga­le­ment le témoi­gnage d’Eugène Orman­dy, qui a répé­té cette sym­pho­nie avec Serge Rach­ma­ni­nov lui-même : à la tête de « son » orchestre de Phi­la­del­phie, qu’il diri­gea qua­rante-quatre ans, il a lais­sé un film (Euroarts éga­le­ment) remar­quable, mais dans des condi­tions tech­niques natu­rel­le­ment bien infé­rieures. Le concert de 2011 est super­be­ment fil­mé, et l’image en Blu-Ray est même exceptionnelle

Poster un commentaire