Jacques Raynal

Jacques Raynal (53) Un théoricien de la physique nucléaire internationalement reconnu

Dossier : TrajectoiresMagazine N°765 Mai 2021
Par Charle-Michel MARLE (53)

Décédé le 11 avril 2020, Jacques Ray­nal était un physi­cien extrême­ment réputé au niveau inter­na­tion­al, tant chez les théoriciens que chez les expéri­men­ta­teurs, pour ses travaux sur l’analyse des réac­tions nucléaires de bass­es et moyennes énergies.

Jacques Ray­nal est né le 10 août 1934 à Vit­ry-le-François (Marne), dans une famille rel­a­tive­ment mod­este. Jacques fit ses études sec­ondaires à Bédarieux puis sa pré­pa à Mont­pel­li­er. Sa voca­tion était déjà très affir­mée : il désir­ait faire de la recherche sci­en­tifique. Dès sa pre­mière année de taupe, il fut admis à l’École poly­tech­nique où, dès les pre­mières com­po­si­tions, il se clas­sa dans le pelo­ton de tête de la pro­mo­tion. À sa sor­tie, il choisit le corps des Mines et, avec Mar­cel Frois­sart, il béné­fi­cia d’un détache­ment au CEA, où il rejoignit le ser­vice de physique théorique, dans lequel il avait déjà fait un stage durant sa sec­onde année à l’X. Il y fit toute sa car­rière, jusqu’à sa retraite qu’il prit en 1994.

Les travaux sci­en­tifiques de Jacques Ray­nal por­taient sur l’analyse des réac­tions nucléaires de bass­es et moyennes éner­gies, et les out­ils math­é­ma­tiques util­isés dans ce domaine (prin­ci­pale­ment la théorie des groupes de Lie et de leurs représen­ta­tions). Physi­cien théoricien, il était aus­si très proche des expéri­men­ta­teurs. Les méth­odes math­é­ma­tiques et les pro­grammes infor­ma­tiques qu’il créa, con­sid­érés par les spé­cial­istes comme par­mi les plus per­for­mants, sont encore de nos jours employés pour l’interprétation des résul­tats d’expérience de réac­tions nucléaires un peu partout dans le monde. Il fut invité à venir présen­ter ses travaux dans de nom­breux cen­tres de recherche et enseigna, notam­ment au Cen­tre inter­na­tion­al de physique théorique de Mira­mare, près de Trieste.

Séjour en Algérie

J’ai beau­coup fréquen­té Jacques Ray­nal pen­dant l’année 1959. Nous avions tous été envoyés en Algérie pour par­ticiper au plan de Con­stan­tine, lancé en 1958 par les pou­voirs publics. Jacques Ray­nal et Mar­cel Frois­sart, futurs chercheurs, furent affec­tés à l’université d’Alger pour y enseign­er en qual­ité d’assistants, et moi à l’OCRS (Organ­i­sa­tion com­mune des régions sahari­ennes), ce qui me don­na l’occasion de nom­breux déplace­ments dans le Sud algérien. Con­nais­sant déjà assez bien Alger, j’ai accom­pa­g­né et guidé Jacques dans cer­taines de ses vis­ites. Jacques était très intéressé par les cou­tumes et le mode de vie des habi­tants, par­ti­c­ulière­ment par la musique arabe dont il col­lec­tion­nait les enreg­istrements. Très dis­cret et réservé, il par­lait peu mais était ouvert aux autres et tou­jours prêt à ren­dre ser­vice. Son père, qui dans sa jeunesse avait appris l’espéranto, l’initia à cette langue dans laque­lle, depuis son enfance, il cor­re­spondait avec des amis du monde entier.

Un adepte du cyclotourisme

Jacques était un grand voyageur et un fer­vent adepte du cyclo­tourisme. Lors de son ser­vice mil­i­taire il prof­i­ta d’une longue per­mis­sion pour aller à vélo de Kehl (Alle­magne) à Bédarieux, afin de voir ses par­ents, en pas­sant par l’Autriche et la plaine du Pô, puis retour à Kehl. Quelques années plus tard il fit seul un long périple jusqu’à Istan­bul en pas­sant par les Balka­ns, et retour par la Grèce et l’Italie, tou­jours à vélo (sauf la courte tra­ver­sée de Grèce en Ital­ie). Son car­ac­tère aven­tureux l’amena aus­si, à l’occasion d’une école d’été aux Houch­es, à faire l’ascension du mont Blanc avec pour seul com­pagnon un ami nor­malien unijambiste.

Jacques Ray­nal fut un exem­ple et un guide pour sa sœur et son frère qui, comme lui, firent de très bonnes études. Sa sœur Michelle, née en 1936, devint pro­fesseur de math­é­ma­tiques. Son frère Jean-Claude, né en 1945, pré­maturé­ment décédé en 2015, fut admis à l’École nor­male supérieure (Ulm, pro­mo­tion 1963) et devint, au CNRS, un physi­cien théoricien spé­cial­iste recon­nu des quarks.

Emporté par une grave insuff­i­sance res­pi­ra­toire, il laisse der­rière lui son épouse, deux filles et qua­tre petits-enfants dont un fait des études d’ingénieur et est attiré par la recherche.

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