Hervé Bongrain (42), pionnier de la recherche de Défense

Hervé Bongrain (42), pionnier de la recherche de Défense

Dossier : TrajectoiresMagazine N°760 Décembre 2020Par Jean CARPENTIER (44)

Décé­dé le 25 juillet, l’ingénieur géné­ral de l’Armement (2e sec­tion) Her­vé Bon­grain a consa­cré sa car­rière à faire pro­gres­ser la recherche pour la défense sous tous ses aspects.

Né en 1922, fils et petit-fils d’officiers de marine, Her­vé Bon­grain eut très tôt un vif inté­rêt pour les sciences appli­quées à la défense. Reçu à l’X en 1942, il fut envoyé dans un chan­tier de jeu­nesse pour cou­per du bois dans les Landes, puis pour diri­ger un ate­lier en Cor­rèze. La classe 1942 étant ensuite envoyée au STO en Alle­magne, Her­vé Bon­grain se retrou­va des­si­na­teur indus­triel chez Jun­kers. Des actes de résis­tance, dont l’aide aux dépor­tés, lui valurent la croix de guerre. Sor­ti dans l’arme des Trans­mis­sions, il pas­sa deux années à l’ENST. Cette arme l’affecta au Grou­pe­ment des contrôles radio­élec­triques, orga­nisme situé au Mont-Valé­rien, char­gé de détec­ter et loca­li­ser les émis­sions du monde entier.

Programme nucléaire

L’exemple du com­man­dant Paul Chan­son l’amena à réorien­ter sa car­rière et à effec­tuer, au labo­ra­toire du duc Mau­rice de Bro­glie, un stage consa­cré à la détec­tion et à la mesure de la radio­ac­ti­vi­té. Ce stage lui fut fort utile quand il fut affec­té ensuite à la sec­tion tech­nique de l’Armée. Il devait par­ti­ci­per à la réa­li­sa­tion des appa­reils de détec­tion et de mesures pour les essais atomiques.

Au pou­voir en 1958, le géné­ral de Gaulle déci­da de doter la France d’un arme­ment nucléaire. Affec­té à un cabi­net Arme­ment, créé auprès du ministre de la Défense, Her­vé Bon­grain contri­bua à la mise sur pied de ce pro­gramme, en liai­son avec la direc­tion des appli­ca­tions mili­taires du CEA et l’État-Major des Armes spé­ciales, com­man­dé par le géné­ral Aille­ret. Il assis­ta à une série d’essais nucléaires dont celui de la pre­mière bombe à Reg­gane, puis à des essais ther­mo­nu­cléaires, et sui­vit le pro­gramme d’équipement du bom­bar­dier Mirage IV.

Des transmissions aux télécommunications d’armement

Her­vé Bon­grain rejoi­gnit le corps des télé­com­mu­ni­ca­tions d’armement consti­tué en 1961 par l’IGA Com­baux, puis, en 1968, le corps des ingé­nieurs de l’Armement. Appe­lé par le secré­taire géné­ral de la Défense natio­nale, le géné­ral Cazelles (31), il fut nom­mé, en 1972, pré­sident du Comi­té d’action scien­ti­fique de la défense (CASD) et fut aus­si l’adjoint du pro­fes­seur Néel, prix Nobel, au Comi­té scien­ti­fique de l’Otan.

Her­vé Bon­grain rejoi­gnit ensuite la DGA, pour être adjoint au direc­teur de la DRET (direc­tion des recherches, études et tech­niques). Un pro­ces­sus essen­tiel de l’action de la DRET consis­tait, après consul­ta­tion des états-majors sur les besoins des Armées, à éla­bo­rer des plans plu­ri­an­nuels pour les recherches et pour les déve­lop­pe­ments explo­ra­toires. Her­vé Bon­grain eut aus­si un rôle essen­tiel pour le recru­te­ment des scien­ti­fiques du contin­gent, qui pou­vaient faire une large par­tie de leur ser­vice mili­taire dans des orga­nismes de recherche éta­tiques, uni­ver­si­taires ou indus­triels. Cette dis­po­si­tion fut très béné­fique au rap­pro­che­ment de l’Université avec l’industrie et l’Armement.

Admis en deuxième sec­tion en 1984, Her­vé Bon­grain res­ta au ser­vice de la DGA en qua­li­té de res­pon­sable des publi­ca­tions de l’Armement et par­ti­ci­pa à diverses ins­tances scien­ti­fiques et tech­niques de la Défense, comme membre voire président.

Ain­si, toute la car­rière d’Hervé Bon­grain a eu comme moti­va­tion essen­tielle la recherche pour les besoins de la Défense. Dans ses dif­fé­rentes affec­ta­tions, il tra­vailla en liai­son étroite avec les orga­nismes char­gés d’orienter ou d’effectuer la recherche civile. Tous ses inter­lo­cu­teurs l’appréciaient pour son ouver­ture d’esprit et sa volon­té d’aboutir à des résul­tats concrets, en coopé­ra­tion effi­cace à tous les niveaux, avec un plein sou­ci des fac­teurs humains.

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